Tribunal de commerce de Créteil, Chambre 01, 9 novembre 2010, n° 2009F00145

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. com. Créteil, ch. 01, 9 nov. 2010, n° 2009F00145
Juridiction : Tribunal de commerce de Créteil
Numéro(s) : 2009F00145

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE COMMERCE DE CRETEIL

JUGEMENT DU 9 NOVEMBRE 2010 1re Chambre

N° RG: 2009F00145

DEMANDEUR M. H I J 9 bis rue H Jacques X la Pépinière […] comparant par Me Emmanuel Charles BLANC 6 […]

. DEFENDEUR SAS COVIDIEN FRANCE 2 […] comparant par SCP ALTERMAN – […]

COMPOSITION DU TRIBUNAL

La présente affaire a été débattue devant M. K L en qualité de juge rapporteur qui a clos les débats et mis en délibéré.

Décision contradictoire en premier ressort.

Délibérée par M. K L, Président, M. Didier RENOULT, M. H-François GRANET, Juges.

Prononcée ce jour par la mise à disposition au Greffe de ce Tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Minute signée, pour le Président empêché, par M. Didier RENOULT, l’un des juges en ayant délibéré, et Mme Y

DENIEL, Greffier

RD

LES FAITS

La société COVIDIEN FRANCE, anciennement dénommée société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE a acquis, en mars 2006, l’activité de la société SOFRADIM qui avait confié la commercialisation de différents produits médicaux à M. H I J dans le cadre d’un contrat d’agence commerciale.

Le 23 mai 2006, la société COVIDIEN FRANCE, alors dénommée société TYCO HÉEALTHCARE FRANCE, a notifié à M. H I J sa volonté de cesser le contrat d’agence commerciale lui proposant un contrat de salarié.

Par courrier du 26 juillet 2006, la société COVIDIEN FRANCE revenait sur sa décision et maintenait le contrat d’agence commerciale.

Par courrier du 27 septembre 2007, la société COVIDIEN FRANCE notifiait à M. H I J la rupture, pour fautes graves, du contrat d’agence commerciale.

M. H I J a alors demandé une indemnisation à hauteur de 3 années de commissions, les fautes graves étant, selon lui, non avérées.

La société COVIDIEN FRANCE gardant le silence, M. H I J l’a assignée.

Ainsi est née la présente instance.

LA PROCEDURE

Par acte extrajudiciaire, signifié à personne habilitée le 2 février 2009, M. H I J a assigné la société COVIDIEN FRANCE (anciennement dénommée TYCO HÉEALTHCARE FRANCE) demandant au Tribunal de

Vu les dispositions des articles L. 134-1 et suivants du Code de commerce, Vu le contrat d’Agent commercial, Vu la notification de la rupture du contrat à l’initiative du mandant,

— Constater que la rupture du contrat d’agent commercial a été notifiée par la société TYCO HÉEALTHCARE FRANCE (désormais dénommée COVIDIEN FRANCE) pour des motifs purement internes, non justifiée par une quelconque faute grave ,

— Condamner la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE (désormais dénommée COVIDIEN FRANCE) au paiement des sommes de

» 600.000,00€ au titre de l’indemnité compensatrice de rupture,

» 15.500,00€ au titre de l’indemnité contractuelle de l’avenant du 3 septembre 2003, restée impayée,

» 4.500,00€ au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens d’instance lesquels seront recouvrés par la société FIDAL, par application des dispositions de l’article 699 du même code ,

— Fixer au 27 décembre 2007 la date d’application des intérêts de retard à calculer sur la totalité des sommes ci-dessus ,

— Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir dans sa totalité.

Aux audiences collégiales des 17 février, 24 mars, 12 mai, 9 juin, 15 septembre et 13 octobre 2009, M. H I J n’a pas comparu.

A l’audience collégiale du 1er décembre 2009, la société COVIDIEN FRANCE a déposé des conclusions datées du 30 novembre 2009 où la page 14/15 n’est pas jointe et où le « PAR CES MOTIFS » n’est pas indiqué. W

A cette même audience collégiale, M. H I J a déposé des conclusions récapitulatives en demande n° 2 réitérant ses demandes introductives d’instance, sauf à y ajouter

— Condamner la société TYCO HEALTHCARE FRANCE (désormais dénommée COVIDIEN FRANCE) au paiement d’une somme égale à 26% de l’indemnité compensatrice de rupture; soit 156.000,00€ au titre de ''l’indemnité de réemploi"

A l’audience collégiale du 26 janvier 2010, M. H I J ne comparait pas et l’affaire est radiée. Après rétablissement de l’affaire, à l’audience collégiale du 16 mars, la société COVIDIEN FRANCE a déposé des conclusions responsives et récapitulatives (ainsi qu’il en est régularisé à l’audience du Juge rapporteur du 4 mai 2010) demandant au Tribunal de

Vu l’article 1134 du Code civil, Vu l’article 134-12 du Code de commerce,

— Dire irrecevables et à défaut mal fondées les demandes formulées par M. H I J ,

— Débouter M. H I J en toutes ses demandes, fins et conclusions formulées à l’encontre de la société COVIDIEN FRANCE ,

— Condamner M. H I J à payer à la société COVIDIEN FRANCE la somme de 7.500,00€ par application de l’article 700 du CPC ,

— Condamner M. H I J en tous les dépens. A cette même audience collégiale, l’affaire a été envoyée devant un Juge rapporteur

A son audience du 4 mai 2010 où les deux parties sont présentes, le Juge rapporteur régularise les conclusions déposées le 16 mars 2010 à l’audience collégiale par la société COVIDIEN FRANCE, et entend les- parties en leurs plaidoiries. Puis il autorise que lui soit adressée avant le 1er juin 2010 une note en délibéré fournissant la preuve (et la date) de distribution de produits que la société SOFRADIM ne fabriquait pas et que la société COVIDIEN FRANCE (TYCO HEALTHCARE FRANCE) fabrique.

Le Juge rapporteur a alors clos les-débats, mis le jugement en délibéré et dit qu’il serait prononcé le 19 octobre 2010 par mise à disposition au Greffe, date qui a été reportée au 9 novembre 2010, les parties en ayant été avisées.

M. H I J a adressé le 25 mai 2010 une note en délibéré y joignant les pièces 39, 40 et 41 concernant la société VECTEC.

La société COVIDIEN FRANCE a répliqué par note en délibéré du 2 juin 2010.

MOYENS DES PARTIES M. H I J expose

— que la société COVIDIEN FRANCE, précédemment dénommée société TYCO HEALTHCARE FRANCE, a acquis l’activité de la société SOFRADIM en mars 2006, laquelle fabrique des produits chirurgicaux, notamment des prothèses ,

— que la société SOFRADIM avait conclu le 21 décembre 1994 un contrat d’agence commerciale avec M. H I J qui s’est vu attribuer la commercialisation de la gamme Parietex notamment, ainsi que des produits dans les domaines urologiques et

gynécologiques (pièces 16, 17 et 18) , %

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— que la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) a repris par courrier du 6 mars 2006 le contrat d’agent commercial (pièce n° 11) ,

— que le 23 mai 2006, la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) a notifié à M. H I J la volonté de cesser le contrat d’agence commerciale et lui a proposé un contrat de salarié précisant qu’en cas de refus de devenir salarié, le courrier valait notification de rupture de contrat d’agence (pièce n° 10) ,

— que par courrier du 26 juillet 2006, la société TYCO HÉEALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) décidait de revenir sur sa décision du 23 mai 2006 et notifiait qu’elle souhaitait poursuivre la relation d’Agence commerciale (pièce n° 9) ,

— que le seul autre agent commercial et un VRP se sont vu notifiés les mêmes courriers (pièces n° 24, 25 et 26) ,

— que par la suite, la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) a refusé à M. H I J d’engager des actions marketing auprès des chirurgiens et prospects comme il était pourtant usuel de le faire (pièce n° 8 et 31) ,

— que par lettre du 19 mars 2007, de nombreux reproches, tous infondés, ont été adressés à M. H I J (pièce n° 7) lequel répondait par courrier du 10 avril 2007 (pièce n°6) en démontrant leur absence totale de fondement ,

— que dans le même temps, M. H I J se voyait féliciter pour l’excellence de ses performances (pièces n° 5 bis et 20) ,

— que par lettre du 27 septembre 2007, la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) notifiait à M. H I J la résiliation du contrat commercial à ses torts exclusifs pour fautes graves, en particulier l’existence d’engagements pris vis-à-vis de clients sans accord préalable de la direction, le défaut d’assistance aux réunions, la représentation de produits concurrents, et précisait que le contrat prenait fin à l’issue d’un délai de trois mois (pièce n° 3) ,

— que sans jamais répondre au courrier de M. H I J, la société TYCO HEÉEALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) se gardait de mettre fin au contrat avec effet immédiat ,

— que cette décision de rupture de nature collective visait à cesser de recourir à des agents commerciaux (pièces n° 25 et 29) ,

— que la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) n’hésitait pas à donner de fausses assurances à ses agents, via les membres du comité d’entreprise, afin d’éviter qu’ils ne relâchent leurs efforts sur leurs secteurs (pièce n° 19) ,

— que par lettre du 23 octobre 2007 (pièce n° 5), M. H I J démontre qu’aucun des motifs allégués par la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) pour justifier la rupture sans indemnisation pour une prétendue fauté grave n’est fondé ,

— en particulier, qu’aucun engagement n’a été pris à l’égard de chirurgiens sans l’accord de la Direction ,

— que ce sont les chirurgiens qui, conformément à l’usage depuis 1994, faisaient part de leurs souhaits transmis à l’assistante de la Direction commerciale, que seuls les clients de M. H I J ont été frappés par la fin de la prise en charge de leur participation à dès

congrès scientifiques , /Â

— que concernant la participation aux réunions commerciales, lorsque le délai de 8 semaines prévu au contrat (article 8) n’est pas respecté, il a pu arriver à M. H I J de ne pas être présent, son emploi du temps étant déjà rempli ,

— qu’il paraît plus opportun de visiter plusieurs établissements disposant d’un fort potentiel plutôt qu’un chirurgien lointain établi à l’Ile de la Réunion ,

— qu’enfin les ciseaux à usage unique distribués par M..H I J ne sont pas dans le champ contractuel, lequel est constant depuis treize ans, que la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) ne lui a jamais interdit et n’avait aucun droit à le faire de continuer à diffuser des produits préexistants à la conquête de la société SOFRADIM par la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE ,

— que par lettre du 10 septembre 2008 (pièce n° 21), M. H I J réitérait sa demande d’indemnisation pour des montants de 599.166,00€ et 15.500,00€, puis que son Conseil adressait le 14 octobre 2008 une nouvelle lettre demandant une indemnisation.

La société COVIDIEN FRANCE rétorque

— que M. H I J a demandé de manière systématique la prise en charge des frais de sa participation ou de celles de ses clients à des congrès organisés à l’étranger, que ces remboursements n’ayant pas de fondement contractuel et n’étant accompagnés d’aucun élément justificatif, la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) a refusé de les prendre en charge (pièces n° 5, 7, 8 et 38) ,

— que M. H I J n’a pas cru bon de se déplacer pour assister à des réunions de travail organisées par la société TYCO HEÉEALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) de manière répétée (pièces n° 5 et 6) ,

— qu’il a fait la promotion de produits concurrents (aiguille à pneumopéritoine et ciseaux à usage unique) ,

— qu’il a reconnu mener une campagne de dénigrement auprès des clients de son mandant (pièce n° 15).

M. H I J réplique

— que la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE reconnaît elle-même par sa lettre du 19 mars 2007 que l’usage était de faire prendre en charge par la société les frais de participations des chirurgiens à certains congrès organisés à l’étranger et qu’en raison du chiffre d’affaires qu’il réalisait, M. H I J était fondé à transmettre plus de 5 demandes par année et que pour la première fois en 13 ans, quatre demandes sur cinq de prises en charge ont été refusées à M. H I J, que d’ailleurs si des demandes sont refusées, ceci prouve qu’elles ont été émises préalablement à tout engagement ,

— qu’il est visible que la société TYCO HEALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) retire à M. H I J toute possibilité d’action marketing envers ses clients de longue date, que M. H I J s’est vu contraint d’informer ses clients des refus formulés, que ce n’est pas M. H I J qui a entamé une campagne de dénigrement mais la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) qui a adopté une attitude contraire à l’exigence d’exécuter le contrat de bonne foi conformément à l’article 1134 du Code civil en violation de ses obligations de veiller à fournir à son agent les moyens d’assurer sa prestation selon l’article L 134-4 du Code de commerce ,

— que la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) cherche à faire croire que M. H I J aurait cherché à faire prendre en charge de faux congrès. Or ce sont les clients eux-mêmes qui se sont trompés en croyant que le congrès avait lieu à nouveau en 2007 et que la réalité des faits reprochés par la lettre du 27 septembre 2007 est totalement différente , /%L

MS

— que cette même lettre de rupture se fonde sur le défaut d’assistance à deux réunions en date du 6 février et du 27 février, que ces réunions n’étaient pas espacées de 8 semaines environ comme le prévoit le contrat et que le délai de prévenance de 3 semaines prévu n’a pas été respecté ,

— que la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE omet de préciser que M. H I J n’avait pas été convié à la réunion Europe de la société TYCO HEALTHCARE FRANCE à Milan en janvier 2007 ,

— que sur la prétendue action de concurrence déloyale, M. H I J n’est pas un agent commercial exclusif de la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE, que ni le contrat d’agent commercial et son annexe A, ni l’avenant de septembre 2003 ne citent des produits de types aiguilles et ciseaux à usage unique ,

— que le Tribunal ne pourra accepter l’argument cherchant à faire croire que M. H I J aurait dû connaître tous les produits de la division de la société TYCO HÉEALTHCARE FRANCE et s’interdire de commercialiser des produits concurrents ,

— que M. H I J, ayant exécuté son engagement de non concurrence de 12 mois, a subi une très importante perte de revenus ,

La société COVIDIEN FRANCE oppose

— que l’action fondée sur l’avenant à effet du 1er juillet 2002 en date du 3 septembre 2003 est prescrite, toute demande d’indemnisation ayant dû être effectuée avant le 30 juin 2004 et à défaut avant le 2 septembre 2004 ,

— que M. H I J n’a jamais contesté le montant de l’indemnité de rupture contractuelle, qu’il n’a cependant pas réclamé dans le délai légal d’un an et qu’il doit être débouté de sa demande en paiement de la somme de 15.500,00€ ,

— que le mandant a un droit intangible de résilier un contrat d’agent commercial sans avoir à motiver sa décision en se tenant au simple respect du préavis contractuellement ou légalement fixé (Cour de cassation 6 mai 2002, pourvoi n° 99-14093) ,

— qu’aucune disposition législative ni principe jurisprudentiel n’interdisait à la société TYCO HÉEALTHCARE FRANCE d’accorder un préavis à M. H I J, qu’en l’espèce ce préavis révèle la bonne foi de la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE.

M. H I J expose à nouveau

— que la rupture de son contrat avait un caractère prémédité et collectif puisque la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) s’est séparée de tous ses partenaires commerciaux payés à la commission au même moment ,

— que, en Comité d’entreprise, la société TYCO HEÉEALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) déclarait le 12 septembre 2007 que « les agents qui travaillent actuellement pour la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE (nouvellement dénommée COVIDIEN FRANCE) ne subissent aucun changement » et que MM. H I J, A et Mme Z se sont vus notifiés la rupture de leur contrat moins de 15 jours après cette déclaration ,

— que seul M. H I J s’est vu notifier une rupture pour prétendue faute grave, ce qui ne peut s’expliquer que par le niveau très important des commissions qu’il générait ,

— que M. H I J a perçu un montant annuel de commission de 199.722,00€ (pièces n° 20 factures 97 à 124 couvrant les années 2004 à 2007) ,

— que conformément à la jurisprudence récente en vigueur au moment de la rupture du contrat, de nombreux Tribunaux accordent à l’agent une indemnité de réemploi

correspondant à l’impôt que l’agent devra supporter au titre de l’indemnité de fin de contrat , M. H I J demande à ce titre 26% de l’indemnité compensatrice, soit 156.000,00€ ,

La société COVIDIEN FRANCE rétorque à nouveau

— qu’un comité d’entreprise n’a aucune autorité ni qualité pour décider de la résiliation ou du maintien d’un contrat d’agent commercial, l’agent commercial étant un tiers à la société ,

— qu’en tout état de cause, M. H I J avait pris connaissance des fautes qui lui étaient reprochées par un courrier du 19 mars 2007, fautes qu’il avait contesté par courrier du 10 avril 2007 ,

— qu’au surplus, M. H I J a bénéficié du préavis légal et contractuel de trois mois ,

— qu’il convient de noter que la société TYCO HEALTHCARE FRANCE a résilié le contrat d’agent commercial conclu avec M. A sans relever la moindre faute grave à son encontre et en lui accordant une indemnité de rupture de 200.000,00€ correspondant à 18 mois de commissions nettes calculées sur la moyenne mensuelle des commissions versées au titre des trois dernières années ,

— que le législateur français a transposé la directive européenne du 18 décembre 1986 en optant pour la réparation du préjudice, qu’aucune disposition légale ne prévoit le paiement d’une indemnité équivalente à deux années de commissions, encore moins à trois années a fortiori parce que M. H I J représentait des produits concurrents de ceux commercialisés par la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE ,

— que la demande d’une indemnité de réemploi au titre de l’incidence fiscale est mal fondée, d’abord à défaut d’un fondement juridique, et parce que la Cour de cassation a posé comme principe que « les dispositions fiscales frappant les revenus sont sans incidence sur les obligations des personnes responsables du dommage et le calcul de l’indemnisation des victimes » ,

— que M. H I J demande réparation du préjudice, selon lui, résultant de la rupture du contrat et que ce contrat, s’il avait été poursuivi, aurait généré un chiffre d’affaires lui-même imposable.

Les parties ont versé aux débats les pièces qu’elles jugeaient nécessaires au succès de leurs prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR CE, LE TRIBUNAL

Sur la demande en principal

Attendu que M. H I J demande une indemnité compensatrice de rupture du contrat d’agent commercial qui lui a été notifié par la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE (désormais dénommée société COVIDIEN FRANCE) pour fautes graves.

Attendu que M. H I J conteste les fautes graves qui lui sont reprochées par la société COVIDIEN FRANCE.

Attendu que par sa lettre du 27 septembre 2007, la société COVIDIEN France, pour justifier la résiliation du contrat d’agent commercial, énumère les fautes qu’elle reproche à M. H I J, à savoir

— l’existence d’engagements pris vis-à-vis de nos clients, sans accord préalable de notre Direction, concernant notamment des déplacements,

; /

M3

— le défaut d’assistance aux réunions organisées régulièrement, qu’il s’agisse d’une présence physique ou d’une participation aux conférences téléphoniques (et en particulier les 6 et 27 février 2007),

— la représentation de produits concurrents de ceux commercialisés par la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE,

— le dénigrement de la société COVIDIEN FRANCE auprès de la clientèle.

Attendu que dans ces conditions, le Tribunal examinera successivement les fautes reprochées à M. H I J par la société COVIDIEN FRANCE (anciennement dénommée société TYCO HEALTHCARE FRANCE).

Sur l’existence d’engagements pris sans accord préalable de la Direction

Attendu que la note interne de la société SOFRADIM du 20 janvier 2004 (pièce n° 35) précise en page 2 que les membres de la force de vente ne doivent en aucun cas s’engager de façon anticipée auprès des clients pour les prises en charge de manifestations.

Attendu que dans un -mail du 19 février 2007 (pièce n° 5), la société COVIDIEN FRANCE fait état d’une réaction de M. H I J au refus d’une prise en charge du Dr B pour un congrès à BAHIA, qu’il y est précisé qu’aucun accord ne doit être confirmé au client sans validation de la Direction, mais que la société COVIDIEN FRANCE ne fournit aucune pièce autre que son propre mail sur cette affaire.

Attendu que par lettre du 27 février 2007, la société COVIDIEN FRANCE a informé M. H I J (pièces n° 8 et 31) qu’elle acceptait une demande marketing pour M. D E et Mme F G (référence Hernia Congress Boston 7/06).

Attendu qu’il s’est avéré ultérieurement que la demande de prise en charge ne correspondait ni au lieu, ni à la date du congrès.

Attendu que par lettre du 19 mars 2007 adressée à M. H I J, la société COVIDIEN FRANCE dénonçait l’usage qui consistait à prendre en charge les frais engendrés par la participation de M. H I J et de ses clients à des congrès organisés à l’étranger et précisait que cette nouvelle disposition prenait effet sous un délai de trois mois, aucun accord écrit n’ayant régi jusqu’alors ce principe (pièce n° 7).

Attendu que dans ces conditions, au vu des pièces versées aux débats, le Tribunal dira que la société COVIDIEN FRANCE ne démontre pas que M. H I J a pris des engagements au nom de la société envers les clients sans accord préalable de la Direction.

En conséquence, le Tribunal dira que la faute grave alléguée par la société COVIDIEN FRANCE n’est pas caractérisée, mais relèvera une certaine légèreté de M. H I J qui transmet des demandes de prises en charge sans vérification aucune, d’autant que les sommes en causes peuvent ne pas être négligeables en cas de prise en charge à 100%.

Sur le défaut d’assistance aux réunions

Attendu que la société COVIDIEN FRANCE déclare dans ses écritures que M. H I J, contrairement aux stipulations de l’article 8 du contrat, n’a pas assisté aux réunions organisées les 6 et 27 février 2007 notamment (pièce n° 5).

Attendu que la société COVIDIEN France, par sa lettre du 1er mars 2007, reproche à M. H I J de ne pas s’être présenté à une réunion prévue le 1er mars 2007

Attendu que M. H I J déclare dans ses écritures que le contrat précise que la société COVIDIEN FRANCE doit le prévenir 3 semaines à l’avance pour les réunions

commerciales car son planning est très chargé. W

Attendu que M. H I J, concernant les réunions des 6 et 27 février 2007, demande au Tribunal de remarquer que ces réunions n’étaient pas espacées de 8 semaines environ et que le délai de prévenance de 3 semaines prévu n’a pas été respecté.

Attendu que M. H I J déclare dans ses écritures que la société COVIDIEN FRANCE n’applique pas les mêmes méthodes que la société SOFRADIM en le convoquant le 19 février 2007 par e-mail pour une réunion prévue le 27 février 2007

Attendu que M. H I J ne fournit au Tribunal aucune pièce montrant qu’il avait informé la société COVIDIEN FRANCE de l’impossibilité où il se trouvait d’être présent aux réunions programmées.

Attendu que dans ces conditions, au vu des pièces versées, le Tribunal dira que la société COVIDIEN FRANCE ne démontre pas que M. H I J n’a pas respecté les engagements pris au titre de l’article 8 du contrat.

En conséquence, le Tribunal dira que la faute grave alléguée par la société COVIDIEN FRANCE n’est pas caractérisée mais relèvera une certaine désinvolture quant à la manière dont M. H I J gérait ses relations avec son mandant.

Sur la représentation de produits concurrents

Attendu que l’article 7 du contrat interdit à M. H I J toute activité au bénéfice de sociétés distribuant des produits commercialisés par la société SOFRADIM ou ses fournisseurs.

Attendu que la société COVIDIEN FRANCE reproche à M. H I J de distribuer des produits concurrents de ceux commercialisés par la société COVIDIEN FRANCE, à savoir des aiguilles à pneumopéritoine (en concurrence avec les produits Surgi needie) et des ciseaux à usage unique (en concurrence avec les produits Endo Shears).

Attendu que dans son courrier du 10 avril 2007 (pièce n° 6), M. H I J précise que son contrat a été signé avec la société SOFRADIM le 21 décembre 1994, que les produits ont été définis avec la société SOFRADIM, que les produits mentionnés par la société COVIDIEN FRANCE n’étaient pas fabriqués, ni distribués par la société SOFRADIM et qu’il n’a donc en aucun cas enfreint les règles stipulées dans le contrat SOFRADIM.

Attendu qu’il précise à nouveau dans son courrier du 23 octobre 2007 (pièce n° 5) que les ciseaux à usage unique ne sont pas dans les champs contractuels.

Attendu donc que le Tribunal dira que M. H I J n’a pas enfreint la lettre du contrat le liant avec la société SOFRADIM.

En conséquence, le Tribunal dira que la faute grave, en l’occurrence le non respect de la clause de non concurrence, alléguée par la société COVIDIEN FRANCE n’est pas caractérisée, mais relèvera un certain manque de loyauté de M. H I J dans ses rapports avec son mandant car il ne pouvait ignorer, étant professionnel du secteur, qu’une partie de son portefeuille multicarte recouvrait une partie de l’activité de la société COVIDIEN FRANCE.

Sur le dénigrement de la société COVIDIEN FRANCE auprès de la clientèle

Attendu que dans son courrier du 10 avril 2007 (pièce n° 6), M. H I J écrit « Je tiendrai la société TYCO HEÉALTHCARE FRANCE personnellement responsable d’une baisse de mon chiffre d’affaires. Il est de mon devoir d’aviser la clientèle. Je me réserve aussi le droit de leur montrer ce courrier pour les informer de la manière dont vous vous comportez avec moi. Ci-joints courriers de deux chirurgiens déjà prévenus de votre nouvelle politique »

Attendu que la société COVIDIEN FRANCE verse aux débats la lettre reçue du Dr C

HINGOT (pièce n° 15) dont le libellé suit "J’ai eu la surprise d’être informé par M. H I J du refus de votre société d’assumer la prise en charge du congrès de Las

. je

Rs

Vegas du 19 août 2007 J’estime que notre collaboration est à compter de ce jour remise en question et vois à travers ce geste une méthode anti-commerciale et mesquine qui s’ajoute au ressentiment accumulé vis-à-vis de la société TYCO HÉALTHCARE FRANCE depuis plusieurs années"

Attendu que dans ces conditions, le Tribunal dira qu’une lecture attentive de ces deux courriers ne permet pas de conclure à une campagne de dénigrement effectuée par M. H I J au préjudice de la société COVIDIEN FRANCE, le Dr C. HINGOT s’élevant contre la modification d’une pratique décidée par la société COVIDIEN FRANCE.

En conséquence, le Tribunal dira que la faute grave alléguée par la société COVIDIEN FRANCE, à savoir le dénigrement auprès de la clientèle, n’est pas démontrée mais relèvera que M. H I J n’envisage pas d’exécuter de bonne foi la politique décidée par la société COVIDIEN FRANCE en ce qui concerne la prise en charge des frais de clients liés à des congrès organisés à l’étranger.

Attendu de ce qui précède que le Tribunal n’a pas retenu une ou plusieurs fautes graves à l’encontre de M. H I J.

Mais attendu que le Tribunal a relevé un certain nombre de fautes commises par M. H I J.

Attendu que M. H I J produit des factures de commissions pour les années

—  2006 à hauteur de 222.672,78€ TTC, – 2007 à hauteur de 215.698,32€ TTC,

que ces factures n’ont pas été contestées par la société COVIDIEN FRANCE.

Attendu qu’au visa de l’article L. 134-12 du Code de commerce, l’agent a droit à la réparation du préjudice subi en cas de cessation du contrat, que tel est le cas en l’espèce.

Attendu que le préjudice subi par M. H I J doit s’analyser comme étant, aux termes du contrat, la clause de non concurrence qui l’a empêché d’exercer pendant une année dans les domaines où il intervenait auparavant, M. H I J ne démontrant pas le quantum de tout autre préjudice.

Attendu que dans ces conditions et en dépit des fautes retenues à l’encontre de M. H I J, le Tribunal dira que l’indemnité compensatrice devra s’élever à la moyenne des commissions TTC des années 2006 et 2007 qui s’élève à 219.185,55€ arrondi à 220.000,00€.

En conséquence, le Tribunal condamnera la société COVIDIEN FRANCE à payer à M. H I J la somme de 220.000,00€ au titre de l’indemnité compensatrice.

Sur la demande d’une indemnité de réemploi

Attendu que M. H I J demande que lui soit payé par la société COVIDIEN FRANCE du montant de l’indemnité compensatrice au titre de l’indemnité de réemploi pour tenir compte de la fiscalité devant s’imputer sur l’indemnité compensatrice.

Attendu que le Code de commerce ne prévoit aucune « indemnité de réemploi »

Attendu que la jurisprudence exclut le paiement de prélèvements fiscaux qui ne peuvent être considérés comme un préjudice réparable par le mandant ou cocontractant.

Attendu au surplus qu’en tout état de cause, la somme de 220.000,00€ payée au titre de l’indemnité compensatrice, si elle avait été payée au titre des commissions, le contrat se

poursuivant, aurait généré une imposition. 4/{ 10 %

En conséquence, le Tribunal déboutera M. H I J de sa demande de condamnation de la société COVIDIEN FRANCE à lui payer en sus une somme égale à 26% de l’indemnité compensatrice au titre d’une indemnité de réemploi.

Sur l’indemnité contractuelle au titre de l’avenant signé le 3 septembre 2003

Attendu que l’avenant versé aux débats par M. H I J est signé en date du 3 septembre 2003 par une partie seulement.

Attendu que dans ses écritures, la société COVIDIEN FRANCE déclare que cet avenant a été négocié et conclu d’un commun accord entre la société SOFRADIM et M. H I J.

Attendu que M. H I J ne démontre pas avoir demandé le paiement de cette indemnité contractuelle à hauteur de 15.500,00€ avant la lettre recommandée avec accusé de réception du 10 septembre 2008 (pièce n° 21) dont l’accusé de réception n’est pas versé aux débats et l’assignation du 2 février 2009.

Mais attendu que la prescription contractuelle doit être considérée comme étant de 10 ans telle qu’en vigueur à l’époque.

En conséquence, le Tribunal ne dira pas prescrite l’action de M. H I J à l’encontre de la société COVIDIEN FRANCE au titre de cette indemnité contractuelle et condamnera la société COVIDIEN FRANCE à payer à M. H I J la somme de 15.500,00€ au titre de cette indemnité.

Sur la date d’application des intérêts de retard

Attendu que M. H I J demande que la date d’application des intérêts de retard soit fixée au 27 décembre 2007, date de la fin de son préavis.

Attendu que c’est par la lettre du 10 septembre 2008 (pièce n° 21) que M. H I J a chiffré le montant de l’indemnisation demandée.

Mais attendu que l’accusé de réception de cette lettre n’est pas versé aux débats.

Attendu qu’une demande d’indemnisation chiffrée a été à nouveau formulée lors de l’assignation remise à la société COVIDIEN FRANCE le 2 février 2009.

En conséquence, le Tribunal dira que les intérêts au taux légal s’appliqueront à compter du 2 février 2009.

Sur l’exécution provisoire

Attendu que vu la nature de l’affaire, le Tribunal l’estime nécessaire, il ordonnera l’exécution provisoire de ce jugement sous réserve qu’en cas d’appel, il soit fourni par le bénéficiaire une caution bancaire égale au montant de la condamnation prononcée à son profit.

Sur l’article 700 du CPC

Attendu que le Tribunal estime qu’il est équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais non compris dans les dépens qu’elles ont engagés dans cette instance, il dira

qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du CPC et déboutera les parties de leurs demandes formées de ce chef.

Sur les dépens

Attendu que la société COVIDIEN FRANCE succombe, les dépens seront mis à sa charge.

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11

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PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, par un jugement contradictoire en premier ressort, Condamne la société COVIDIEN FRANCE à payer à M. H I J la somme

de 220.000,00 euros au titre de l’indemnité compensatrice avec intérêts au taux légal à compter du 2 février 2009.

Déboute M. H I J de sa demande de condamnation de la société COVIDIEN FRANCE à lui payer 26% de l’indemnité compensatrice au titre d’une indemnité de réemploi. -

Condamne la société COVIDIEN FRANCE à payer la somme de 15.500,00 euros au titre d’une indemnité contractuelle à M. H I J.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du CPC et déboute les parties de leurs demandes formées de ce chef.

Ordonne l’exécution provisoire de ce jugement sous réserve qu’en cas d’appel il soit fourni par le bénéficiaire une caution bancaire égale au montant de la condamnation prononcée à son profit.

Condamne la société COVIDIEN FRANCE aux dépens.

Liquide ces derniers à recouvrer par le Greffe à la somme de _//Z, 0 ) 4 'Z euros TTC (dont 19,6% de TVA).

12°"* et dernière page

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Tribunal de commerce de Créteil, Chambre 01, 9 novembre 2010, n° 2009F00145