Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 janvier 2015, 13-26.785, Publié au bulletin

  • Allocataire s'étant vu reconnaître le statut de réfugié·
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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte de l’application de l’article L. 553-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l’article 2257, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à son abrogation par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, que le délai de prescription biennale de l’action en versement des prestations par l’allocataire s’étant vu reconnaître le statut de réfugié ne commence à courir qu’à compter de la date de son admission effective au statut de réfugié.

Viole ces textes, la cour d’appel qui, pour rejeter la demande en paiement des prestations familiales à compter de l’entrée sur le territoire, retient que si l’étranger qui se voit reconnaître la qualité de réfugié peut prétendre au bénéfice des prestations rétroactivement à compter de sa demande de la qualité de réfugié, son action est néanmoins prescrite pour le paiement des prestations antérieures de plus de deux ans au dépôt de sa demande de versement

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur la déchéance partielle du pourvoi :

Vu l’article 978 du code de procédure civile ;

Attendu que, sur le pourvoi formé par Mme X… épouse Y… contre un arrêt rendu au profit de la caisse d’allocations familiales des Alpes-Maritimes, en présence du ministre chargé de la sécurité sociale, le mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée n’a pas été signifié à la partie intervenante ;

Qu’il s’ensuit que la déchéance partielle du pourvoi est encourue à l’égard du ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le moyen unique :

Vu l’article L. 553-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l’article 2257, alinéa 1, du code civil, dans sa rédaction antérieure à son abrogation par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, applicable ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que la prescription de l’action de l’allocataire pour le paiement des prestations se prescrit par deux ans ; que, selon le second, la prescription ne court point à l’égard d’une créance qui dépend d’une condition tant que la condition ne s’est pas réalisée ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’entrée en France en novembre 2001, Mme X… épouse Y…, ressortissante russe, a demandé le bénéfice du statut de réfugié qui lui a été reconnu en juillet 2006 ; que les droits aux prestations familiales lui ayant été ouverts à compter du mois d’août 2006 par la caisse d’allocations familiales des Alpes-Maritimes (la caisse), elle a demandé le paiement des prestations pour la période antérieure ; que la caisse n’ayant fait droit à sa demande que dans la limite de la prescription biennale de sa demande de versement, l’intéressée a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour déclarer prescrite l’action en paiement des prestations pour la période de novembre 2001 à mars 2004, l’arrêt énonce que le délai de deux ans fixé à l’article L. 553-1 du code de la sécurité sociale est un délai administratif de forclusion et non de prescription, de sorte qu’il n’est pas régi par les articles 2219 et suivants du code civil et par là même insusceptible de suspension pour les causes qui motivent la suspension de droit commun ; qu’en conséquence, si l’étranger qui se voit reconnaître la qualité de réfugié peut en principe, eu égard au caractère recognitif de l’admission au statut de réfugié, prétendre au bénéfice des prestations familiales pour ses enfants à charge, rétroactivement à compter de sa demande de la qualité de réfugié, son action est néanmoins prescrite pour le paiement des prestations antérieures de plus de deux ans au dépôt de sa demande de versement, son délai pour agir n’étant pas suspendu jusqu’à la date d’obtention du statut de réfugié ;

Qu’en statuant ainsi, alors que, si l’obtention du statut de réfugié lui ouvrait droit, en raison de son caractère recognitif, aux prestations familiales à compter de son entrée sur le territoire, l’intéressée ne pouvait faire valoir utilement ses droits aux prestations qu’après son admission effective au bénéfice du statut de réfugié, de sorte que le délai de la prescription biennale n’avait pas commencé à courir à la date de sa demande d’admission, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CONSTATE la déchéance partielle du pourvoi en ce qu’il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 31 octobre 2012, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la caisse d’allocations familiales des Alpes-Maritimes aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse d’allocations familiales des Alpes-Maritimes et la condamne à payer à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille quinze et signé par Mme Flise, président, et par Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour Mme X… épouse Y…

Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré prescrite l’action en paiement de prestations familiales de Madame Zarema X… pour la période du mois de novembre 2001 au mois de mars 2004 ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE l’historique de la présente procédure administrative, non contesté par les parties, est présenté comme suit ; que dans un premier temps, la CAF était saisie d’une demande de prestations le 20 juillet 2006 établie par la famille de Madame GAITOVA, son mari et leurs trois enfants ; qu’en application des dispositions de l’article L. 552-1 du code de la sécurité sociale, les droits aux prestations familiales ont été ouverts à compter du 1er août suivant ; que dans un deuxième temps, les requérants sollicitaient le 25 avril 2008 le paiement d’un arrérage de prestations familiales, précédant la reconnaissance par l’OFPRA de leur statut de réfugié ; que prenant en considération l’effet recognitif du statut de réfugié, il était décidé par la Caisse nationale des Allocations Familiales que l’étude des droits aux prestations familiales devait s’appliquer à compter de la date d’entrée en France, dans la limite de la prescription biennale ; que dès lors, il était accordé une régularisation aux requérants, dans la limite des deux ans à compter de leur première demande en date du 20 juillet 2006, soit un rappel de prestations d’août 2004 à juillet 2006 inclus ; que dans un troisième temps, les requérants sollicitaient à nouveau le paiement rétroactif des prestations familiales à compter de leur entrée en France soit le 12 novembre 2001 ; que le réexamen alors effectué permettait de retrouver une demande de la part de la famille de Madame X…, en date d’avril 2006, aux fins de percevoir une allocation adulte handicapé concernant le père des enfants ; qu’un dernier rappel était alors effectué dans la limite de la prescription biennale, soit d’avril 2004 à avril 2006 ; que les requérants soutiennent que l’acceptation du statut de réfugié emporte un effet rétroactif au jour de la demande d’asile, le réfugié devant être regardé comme ayant séjourné régulièrement sur le territoire national depuis la date de demande d’asile, soit en l’espèce le 12 novembre 2001 ; qu’en outre, ils contestent l’application de la prescription biennale dans le paiement de prestations familiales ; qu’il est à rappeler que, si les personnes de nationalité étrangère bénéficient de plein droit des prestations familiales françaises dès lors qu’elles attestent de la régularité de leur entrée et de leur séjour en France, il est établi que l’attribution de ce droit repose sur le système déclaratif ; qu’en effet l’article D. 512-1 nouveau du code de la sécurité sociale redéfinit les titres de séjour ou documents en cours de validité que doit présenter l’étranger, « qui demande à bénéficier de prestations familiales » ; qu’ainsi, tel que précisé ci-dessus, l’effet recognitif attaché au statut de réfugié a bien été pris en considération, mais à compter de la première demande répertoriée de l’allocataire, soit avril 2006 ; qu’ensuite, doit être nécessairement posé le problème de la prescription ; qu’il est à rappeler qu’en application de l’article L. 553-1 du code de la sécurité sociale, l’action de l’allocataire pour le paiement des prestations se prescrit par deux ans ; qu’une jurisprudence établie précise alors que le délai de deux ans fixé à cet article est un délai administratif de forclusion et non de prescription, de sorte qu’il n’est pas régi par les articles 2219 et suivants du code civil et par là même insusceptible de suspension pour les causes qui motivent la suspension de droit commun ; qu’en conséquence, si l’étranger qui se voit reconnaître la qualité de réfugié peut en principe, eu égard au caractère recognitif de l’admission au statut de réfugié, prétendre au bénéfice des prestations familiales pour ses enfants à charge, à compter rétroactivement de sa demande de qualité de réfugié, son action est néanmoins prescrite pour le paiement des prestations antérieures de plus de deux ans au dépôt de sa demandé, son délai pour agir n’étant pas suspendu jusqu’à la date d’obtention du statut de réfugié ; qu’en l’espèce et comme déjà précisé ci-dessus, la première demande répertoriée de l’allocataire étant en date d’avril 2006, un dernier rappel avait alors été effectué par la caisse dans la limite de la prescription biennale, soit d’avril 2004 à avril 2006 ; qu’il apparaît que l’action en paiement des prestations familiales de Madame X… pour la période de novembre 2001 à mars 2004, est ainsi prescrite, et que les requérants ont été remplis de la totalité de leurs droits ; qu’il convient en conséquence de considérer qu’en rejetant le recours, le premier juge a fait une juste appréciation des faits de la cause et que sa décision doit être confirmée ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l’article D. 512-1 dispose que l’étranger qui demande à bénéficier des prestations familiales doit justifier de la régularité de son séjour par la production d’un des titres suivants en cours de validité, en l’espèce, le récépissé de demande de titre de séjour valant autorisation de séjour d’une durée de validité de trois mois renouvelable délivré dans le cadre de l’octroi de la protection subsidiaire, accompagné de la décision de l’OFPRA ou de la commission de recours des réfugiés accordant cette protection ; que de même, l’article D. 512-2 dispose que la régularité de l’entrée et du séjour des enfants étrangers que le bénéficiaire a à charge et au titre desquels demande des prestations familiales est justifié par la production d’un des documents suivants, en l’espèce, le livret de famille, délivré par l’OFPRA ou, à défaut un acte de naissance établi le cas échéant par cet office, lorsque l’enfant est membre d’une famille de réfugié, apatride ou bénéficiaire de la protection subsidiaire ; qu’en conséquence, les droits ont été ouverts à compter du mois d’août 2006 (allocation de rentrée scolaire, allocations familiales et leur forfait, complément familial) ; que le 25 avril 2008, les époux Y… sollicitaient le paiement d’un arrérage de prestations familiales précédant la reconnaissance par l’OFPRA de leur statut de réfugié ; que les demandeurs, ayant produit l’ensemble des documents pour la régularisation de leur dossier (déclaration de, ressources) leurs droits aux prestations familiales ont ainsi été régularisés en janvier 2009 ; qu’un rappel de prestations familiales de 8.509,79 euros leur a été attribué pour la période d’août 2004 à juillet 2006 inclus, soit dans la limite de la prescription biennale à compter de leur demande de prestations familiales en date du 20 juillet 2006 ; que le 24 avril 2009, les demandeurs sollicitaient de nouveau le paiement rétroactif des prestations familiales à compter de leur entrée en France, soit novembre 2001 ; qu’il a donc été procédé en décembre 2009, à une nouvelle régularisation de leurs droits aux prestations ; qu’ainsi, deux rappels de prestations familiales ont été adressés à la famille, l’un d’un montant de 6.614,29 euros pour la période de juillet 2004 à juin 2006 inclus et le second d’un montant de 439,62 euros pour la période d’avril 2004 à juin 2004 inclus ; qu’il résulte des articles précités que l’attribution du droit aux prestations familiales en général repose sur un système « dit déclaratif » ; que les personnes demandant à bénéficier des prestations doivent en faire la demande sous quelque forme que ce soit mais vérifiable, ce qui contraint la Caisse à étudier les droits à compter de la première manifestation de l’allocataire ; qu’en l’espèce, la Caisse a bien pris acte de l’effet recognitif attaché au statut de réfugié depuis la date d’entrée en France de la famille, soit en 2001 mais n’a pu rétroagir que dans la limite des deux ans à compter de la première manifestation de l’allocataire soit avril 2006 ; que de plus, l’article D. 512-1 ayant permis de reconnaître la qualité d’allocataire au couple Y… dispose clairement que l’étranger qui demande à bénéficier des prestations familiales doit justifier de la régularité de son séjour par la production de certains documents ; qu’on ne saurait donc opposer à la Caisse d’avoir retenu comme point de départ de la prescription biennale, la demande des intéressés du 26 avril 2006 comme étant leur première manifestation ; qu’ainsi, compte-tenu de ce qui précède, la famille a bien été remplie de ses droits en matière de prestations familiales ; qu’il y a lieu dès lors, de confirmer la date d’avril 2004 comme date d’ouverture de droit aux prestations familiales en application du Code de la Sécurité Sociale, d’acter du rappel des prestations pour la période à compter d’avril 2004 à juillet 2006 inclus, de déclarer prescrite l’action en paiement des prestations de la demanderesse pour la période de-novembre 2001 à mars 2004 et de débouter Madame Zarema Y… de l’ensemble de ses demandes ;

ALORS QUE la prescription ne court à l’égard d’une créance qui dépend d’une condition qu’à compter du jour où la condition se réalise ; que, pour dire que, nonobstant le caractère recognitif de l’admission au statut de réfugié, l’action de Madame Zarema X… en paiement de prestations familiales pour la période du mois de novembre 2001 au mois de mars 2004 était prescrite, la cour d’appel a affirmé que le délai de deux ans de l’article L. 553-1 du code de la sécurité sociale était un « délai administratif de forclusion insusceptible de suspension », et en a déduit que, le délai pour agir de Madame Zarema X… n’ayant pas été suspendu jusqu’à son obtention, le 13 juillet 2006, du statut de réfugié, cette dernière ne pouvait prétendre rétroactivement aux prestations familiales qu’à compter du jour de sa première demande répertoriée, soit le 26 avril 2006, et ce dans la limite de deux ans ; qu’en se déterminant ainsi, cependant que, dans l’attente de l’attribution du statut de réfugié, laquelle constituait la condition d’accès aux prestations familiales, le délai de prescription de l’action en paiement de prestations familiales de Madame Zarema X… n’avait pas commencé à courir, la cour d’appel a violé l’article L. 553-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l’article 2233 du code civil.

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