Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 19 octobre 2021, n° 19/04032

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 8, 19 oct. 2021, n° 19/04032
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/04032
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 21 janvier 2018, N° 15/18850
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 8

ARRÊT DU 19 OCTOBRE 2021

(n° 2021/ , 21 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/04032 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7LZX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Janvier 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 15/18850

APPELANTE

Société SMABTP

[…]

[…]

[…]

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro : 775 684 764 02155

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

assistée de Me Natacha DEMARTHE-CHAZARAIN, avocat au barreau des Hauts de Seine, toque 1702

INTIMÉES

SA AVIVA ASSURANCES

[…]

[…]

Immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro : 306 522 665

Représentée et assistée de Me Juliette MEL de l’ASSOCIATION ROME ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0002

SA GENERALI IARD

2, rue Pillet-Will

[…]

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro : 552 062 663 02212

Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU – CICUREL – MEYNARD – GAUTHIER – MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Assistée de Me Marine CHEVALLIER – MERIC, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, toque R 61, substituant Me Emmanuelle DEVIN, Membre de Beldev association d’avocats, toque R 61

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 15 Juin 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre

M. Christian BYK, Conseiller

M. Z A, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Z A dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET

ARRÊT : Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Laure POUPET, Greffière présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE :

La SCI VICTOR HUGO 3 (la SCI) a, en qualité de maître d’ouvrage, procédé courant 2010-2012 à la réalisation d’un bâtiment de type R + 8 sur trois niveaux de sous-sol dénommé 'OVALIE’ à usage de bureaux à SAINT OUEN (93). Pour ce faire, elle a notamment souscrit le 03 décembre 2010 auprès de la société AVIVA ASSURANCES une police TOUS RISQUES CHANTIERS (TRC) garantissant, aux termes de l’article II.1, 'toute détérioration ou destruction de tout ou partie de l’Ouvrage assuré résultant d’un évènement fortuit et soudain' survenant pendant la durée des travaux, ou après réception de l’ouvrage, dans le cadre cette fois de la garantie 'maintenance visite'.

Un avenant de prolongation de garantie non signé a été dressé le 15 février 2012 afin de reporter la date de fin des travaux au 30 avril 2012.

Sont notamment intervenues à cette opération :

— la société SPIE, chargée du lot 'plomberie-CVC' assurée auprès de la société GENERALI au titre de la garantie facultative 'responsabilité civile pendant travaux',

— la société BRISSET, sous traitante de SPIE, chargée du lot 'réseaux hydrauliques eau glacée, eau chaude et réseaux de récupération d’énergie des LT en terrasse R + 8', assurée auprès de la

SMABTP au titre de la garantie facultative 'responsabilité civile en cours de travaux'.

Le chantier avait démarré le 19 juillet 2010. Un important dégât des eaux est cependant survenu à la suite de la rupture d’une canalisation d’eau glacée au R+8, le dimanche 3 juin 2012.

La SCI a déclaré le 04 juin 2012 le sinistre entre les mains de la société AVIVA ASSURANCES.

Une première réunion d’expertise amiable a eu lieu le 04 juin 2012 au contradictoire du cabinet X, expert mandaté par la société AVIVA ASSURANCES, du cabinet Y, mandaté par la société GENERALI, ès-qualités d’assureur de la société SPIE, et du cabinet HDE, expert mandaté par la SMABTP, ès-qualités d’assureur de la société BRISSET.

Le cabinet NEVEU a été choisi comme économiste de la construction.

Une copie du procès-verbal de constatations relatif aux causes et circonstances a été diffusée par le cabinet X le 22 juin 2012, dans la perspective de sa signature, prévue lors d’une réunion fixée au 26 juin 2012.

Un deuxième avenant au contrat, non signé par le souscripteur, a été dressé le 13 juin 2012, avec effet rétroactif au 1er juin 2012, pour reporter la date de fin des travaux au 15 juin 2012.

Le 06 juillet 2012, la société PETIT, intervenue en urgence pour réaliser des travaux conservatoires, a délivré une quittance subrogative à AVIVA au titre de la perception d’une somme 200 000 euros qualifiée d’indemnité provisionnelle.

Le 27 juillet 2012, la SCI a délivré à AVIVA une nouvelle quittance subrogative pour la somme de 1 280 396,53 euros.

Après que l’expert Y a refusé par courrier du 16 août 2012 le chiffrage proposé par X, qui reprenait celui retenu par le cabinet NEVEU, et refusé de donner une suite favorable à la proposition de tenue d’une réunion destinée à signer le second procès-verbal, consacré cette fois-ci au chiffrage des dommages, AVIVA a exercé un recours dans le cadre de la procédure dite 'échelon direction’ qui s’est révélé infructueux.

Puis AVIVA a saisi la commission d’arbitrage de la FFSA le 09 janvier 2014.

Estimant que l’instance arbitrale n’avait pas rendu de décision dans les délais impartis par la convention d’arbitrage, AVIVA a mis fin à la procédure de conciliation et a, par actes d’huissier du 04 décembre 2015, fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris les sociétés GENERALI et SMATPB en leurs qualités d’assureurs de responsabilité civile respectifs des sociétés SPIE et BRISSET, afin de condamnation in solidum à lui payer la somme totale de 1 180 396,53 euros.

C’est dans ce contexte que, par assignation en date du 04 décembre 2015, la société AVIVA ASSURANCES ès-qualités d’assureur suivant police TRC a saisi le tribunal de grande instance de Paris aux fins de :

— constater la responsabilité des sociétés SPIE et BRISSET à raison du sinistre subi par la SCI VICTOR HUGO 3 le 03 juin 2012,

— constater sa subrogation dans les droits et actions du maître d’ouvrage et de la société PETIT,

— en conséquence, condamner in solidum les sociétés GENERALI et SMABTP à lui rembourser la somme de 1 480 396,53 euros versée à titre d’indemnité, sous le bénéfice de l’exécution provisoire,

outre 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Par jugement en date du 22 janvier 2018, ledit tribunal a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :

— condamné in solidum les sociétés GENERALI IARD et SMABTP à payer à la société AVIVA Assurances la somme de 1 281.564,09 euros ;

— condamnée la SMABTP à garantir la compagnie GENERALI IARD de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre ;

— condamné in solidum les sociétés GENERALI IARD et SMABTP à payer à la société AVIVA la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens.

La société AVIVA a signifié cette décision à la SMABTP le 12 février 2018.

A la suite de cette signification, la SMABTP a interjeté appel par déclaration électronique le 14 mars 2018 en précisant que cet appel portait 'en ce que le tribunal a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :

- condamné in solidum les sociétés GENERALI IARD et SMABTP à payer à la société AVIVA la somme de 1.281.564,09 euros ;

- condamnée la SMABTP à garantir intégralement la compagnie GENERALI IARD de la condamnation prononcée ;

- condamné in solidum les sociétés GENERALI IARD et SMABTP à payer à la société AVIVA la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens ;

- débouté la société SMABTP de ses demandes tendant à voir :

.déclarer irrecevable et à tout le moins mal fondée la Société AVIVA ASSURANCES de l’ensemble de ses prétentions financières, aucune garantie n’étant due à raison de la police TRC.

. A titre subsidiaire, juger que la société SPIE, entreprise principale, a engagé sa responsabilité à raison du sinistre survenu ; que sa quote-part ne saurait être inférieure à 40% ; que la société AVIVA ASSURANCES n’a pas respecté le principe du contradictoire quant à l’estimation des dommages ;

. limiter l’indemnité due au bénéfice de la société AVIVA ASSURANCES à la somme de 1.280.396,53 euros ;

. en conséquence, juger que la quote-part de la SMABTP ne saurait être supérieure à la somme de 768.237,92euros

. désigner tel expert qu’il plaira a l’effet de déterminer le montant des dommages ;

. rejeter toutes demandes plus amples ou contraires émanant de la société AVIVA ASSURANCES et de la société GENERALI ès qualité d’assureur de la société SPIE ;

. condamner in solidum tout succombant à régler à la SMABTP la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

- débouté la SMABTP de toutes demandes plus amples ou contraire lui faisant grief'.

La société AVIVA a notifié par RPVA le 29 juin 2018 des conclusions d’incident afin de déclarer l’appel formé par la SMABTP irrecevable comme tardif. La SMABTP a reconnu dans ses conclusions signifiées le 31 août 2018 que son appel était tardif mais a soutenu qu’elle était recevable à agir à l’encontre de la compagnie AVIVA au motif d’une indivisibilité du litige telle que prévue aux termes de l’article 553 du code de procédure civile en exposant que GENERALI avait signifié le jugement du 22 janvier 2018 à la SMABTP le 21 février 2018 et que l’appel de la SMABTP avait été interjeté le 14 mars 2018 soit dans le délai d’un mois.

Par ordonnance en date du 24 septembre 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la déclaration d’appel de la SMABTP et l’a condamnée à payer à AVIVA la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700, outre les dépens.

A la suite de cette ordonnance, la compagnie SMABTP a déposé une requête en déféré le 8 octobre 2018 au visa des articles 916, 552 et 553 du code de procédure civile.

Par arrêt en date du 19 février 2019, la cour statuant sur le déféré, a estimé que l’indivisibilité évoquée résultait du fait que la société GENERALI IARD et la SMABTP ont été condamnées in solidum mais aussi du fait que la SMABTP a été condamnée à garantir intégralement la compagnie GENERALI IARD, et que la société AVIVA avait ainsi intérêt à ce que chacune des parties soient maintenues dans la cause afin d’apprécier les responsabilités et garanties respectives, indépendamment du recours entre les co-obligés à la dette que sont la SMABTP et la société GENERALI IARD, et du fait que son appel est recevable à l’égard de l’une des parties au moins à savoir la société GENERALI IARD, de sorte que l’appelant pouvait interjeter appel même tardivement à l’encontre de l’autre partie, à savoir la société AVIVA, ce qu’elle a effectivement fait.

La cour a en conséquence infirmé l’ordonnance du 24 septembre 2018 en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, a :

— déclaré la SMABTP recevable en son appel ;

— dit que chacune des parties supportera la charge des dépens par elle engagés dans le cadre de l’incident ayant donné lieu à l’ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état le 24 septembre 2018 et du présent déféré ;

— dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— renvoyé l’affaire à la mise en état du 4 mars 2019 pour fixation.

A la suite de cet arrêt, la société AVIVA a, par requête séparée, distincte et motivée, demandé que la cour transmette à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité suivante:

— 'les articles 552 et 553 du code de procédure civile en ce qu’ils dispensent l’appelant à respecter le délai impératif d’un mois prévu à l’article 538 du code de procédure civile au seul prétexte d’une indivisibilité du litige qui relève de la seule appréciation des juges du fond, sont ils conformes aux droits et libertés que la constitution garantit et, plus précisément, au principe d’égalité devant la Loi ''.

Par ordonnance du 2 septembre 2019, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société AVIVA, rejeté toutes autres demandes en ce compris celles présentées en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et renvoyé l’affaire à la mise en état du 30 septembre 2019 pour fixation.

Par ordonnance du 14 mai 2020, le magistrat en charge de la mise en état a révoqué l’ordonnance de clôture du 9 mars 2020 rendue par erreur.

La SMABTP a fait sommation à la société AVIVA et à la société GENERALI de communiquer les comptes-rendus de chantier et le planning de travaux du chantier, et a notifié de nouvelles écritures le 19 octobre 2020, jour fixé pour la clôture.

La clôture a été prononcée et l’affaire fixée à l’audience de plaidoirie du 17 novembre 2020, en rapporteur.

Par conclusions notifiées par RPVA le 19 octobre 2020, la société GENERALI a sollicité le rejet des conclusions de la SMABTP signifiées ce jour-là.

Par conclusions notifiées par RPVA le 05 novembre 2020, la société GENERALI a de nouveau sollicité le rejet des conclusions de la SMABTP signifiées le 19 octobre 2020, outre la sommation de communiquer.

La clôture a été de nouveau révoquée, par ordonnance du 17 novembre 2020 et l’affaire fixée, avec un calendrier d’échange des conclusions en défense en réponse à celles notifiées le 19 octobre 2020, à l’audience collégiale du 13 avril 2021, la demande de plaidoiries devant la formation collégiale ayant été formulée par l’appelante par courrier du 09 novembre 2020.

Aux termes de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 19 octobre 2020, la SMABTP ès qualités d’assureur de la société BRISSET demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en son appel, d’infirmer le jugement déféré et ce faisant, de :

1) FAIRE SOMMATION à GENERALI de communiquer au débat les comptes rendus de chantier et le planning d’intervention du chantier litigieux ;

Vu les articles 1134, 1147 et 1382 anciens du code civil, 1102, 1103 et 1231-1 (nouveau) du code civil, les pièces versées au débat, et l’appel provoqué interjeté par l’assureur GENERALI IARD,

JUGER inopposables à la SMABTP, les conclusions du cabinet X s’agissant tant de l’origine des dommages que du chiffrage des conséquences induites,

en conséquence,

JUGER que la cour ne dispose pas d’éléments avérés et certains permettant de déterminer la sphère d’intervention de chacun et donc les responsabilités encourues,

ORDONNER la désignation de tel expert qu’il plaira afin de déterminer notamment les responsabilités et le coût des travaux de reprise ainsi que des préjudices,

SURSEOIR A STATUER dans l’attente du rapport d’expertise correspondant ;

2) en conséquence,

JUGER que la société SPIE est débitrice en sa qualité d’entreprise principale d’une obligation de résultat,

PRENDRE ACTE des observations développées par la SMABTP ès-qualités,

JUGER que la société SPIE entreprise principale, a engagé sa responsabilité à raison du sinistre survenu,

JUGER que sa quote-part de responsabilité ne saurait être inférieure à 40 %,

JUGER que la quote-part de responsabilité de la société BRISSET devra être limitée à

60 %,

dès lors, INFIRMER le jugement déféré en ce qu’il a condamné la SMABTP à relever indemne et garantir intégralement la société GENERALI des condamnations portées au bénéfice de la société AVIVA ASSURANCES, assurance TRC ;

en tout état de cause,

PRENDRE ACTE des plafonds et franchises susceptibles d’être opposés par la SMABTP ès-qualités d’assureur de la société BRISSET,

CONDAMNER la société GENERALI IARD à relever indemne et garantir la SMABTP de toute condamnation susceptible d’intervenir à son endroit en principal, frais et accessoires,

ECARTER toute demande de la compagnie GENERALI IARD ès qualités d’assureur de la société SPIE,

LA CONDAMNER également à régler à la SMABTP la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens, dont distraction,

Aux termes de ses dernières écritures (n°6) transmises par voie électronique le 05 février 2021, la société AVIVA ASSURANCES demande à la cour au visa des articles 538, 908 et 910-4 du code de procédure civile :

1/ SUR L’APPEL DE LA COMPAGNIE SMABTP

PRENDRE ACTE de ce que l’appel formé par la compagnie SMABTP est limité et qu’elle sollicite uniquement la réformation du jugement en ce que les premiers juges l’ont condamnée à garantir intégralement la compagnie AVIVA ASSURANCES,

JUGER IRRECEVABLES toutes les demandes et prétentions formées par la compagnie SMABTP à l’encontre de la société AVIVA ASSURANCES,

2/ SUR L’APPEL DE LA COMPAGNIE GENERALI

REJETER l’appel incident formé par la société GENERALI ,

CONFIRMER le jugement,

Par conséquent,

JUGER que l’étendue et le coût des travaux réparatoires ont été définis contradictoirement lors des opérations d’expertise amiable,

JUGER que les contestations soulevées par les sociétés GENERALI et SMABTP ont été inventées pour les besoins de la cause,

CONDAMNER in solidum les sociétés GENERALI et SMABTP à payer à la société AVIVA ASSURANCES la somme totale de 1 281 564,09 euros,

en tout état de cause, DEBOUTER les compagnies SMABTP et GENERALI de leur demande d’expertise, et CONDAMNER la compagnie in solidum SMABTP et la société GENERALI à lui

payer la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières écritures (n°5) transmises par voie électronique le 10 mars 2021, la société GENERALI IARD demande à la cour statuant sur l’appel interjeté par la SMABTP, au visa des articles 1134, 1147 (1102, 1103 et 1231-1 nouveaux) du code civil, et '16 de la CDH’ de :

— JUGER inopposables à son égard les conclusions du cabinet X, le procès verbal d’expertise établi par ses soins, non signé par les parties ainsi que le rapport du cabinet NEVEU ayant chiffré le montant des dommages ;

— DEBOUTER la compagnie AVIVA ASSURANCES de sa demande, la cour prenant acte de l’aveu judiciaire de la compagnie GENERALI IARD ;

En conséquence,

REFORMER la décision entreprise,

REJETER l’ensemble des demandes de la compagnie AVIVA,

en toute hypothèse, JUGER que les dommages immatériels ne sont pas couverts par la police TRC et rejeter toute demande de ce chef,

A titre subsidiaire, ORDONNER une expertise judiciaire afin de voir constater la réalité des dommages et en chiffrer le montant le cas échéant,

A TITRE SUBSIDIAIRE,

JUGER que seule la responsabilité de la société BRISSET tenue d’une obligation de résultatest engagée,

CONDAMNER la SMABTP à la relever et garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre en principal, intérêts et frais,

CONDAMNER tout succombant à lui payer la somme de 10 0000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

La clôture est intervenue le 29 mars 2021 et l’affaire, fixée au 13 avril 2021 en formation collégiale, a été reportée au 15 juin 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’étendue de la saisine de la cour

Il convient à titre liminaire de relever qu’aucune des parties ne conteste en cause d’appel le fondement du recours exercé par AVIVA reconnu par le tribunal, à savoir les règles de la subrogation légale prévues par l’article L 121-12 du code des assurances, de sorte qu’AVIVA est fondée à exercer son recours en sa qualité de subrogée dans les droits de la SCI et de la société PETIT.

Sur l’irrecevabilité des demandes et prétentions formées par la SMABTP à l’encontre de la société AVIVA ASSURANCES

L’article 910-4 du code de procédure civile précise qu’à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les

parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 783, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Ces principes constituent une concentration temporelle des prétentions en début de l’instance d’appel. En effet, l’obligation pour les parties de présenter l’ensemble de leurs prétentions sur le fond dans leurs premières conclusions est destinée à réduire les échanges de conclusions et, par suite, à diminuer le temps d’instruction des affaires, ce qui répond à un objectif de bonne administration de la justice.

L’alinéa 2 de l’article 910-4 du même code apporte un correctif en faveur de l’intimé, mais circonscrit à des cas précis. Ce texte ne prévoit pas, comme sanction du non respect de la concentration temporelle des prétentions en début de l’instance d’appel, l’irrecevabilité des conclusions, mais institue l’irrecevabilité des prétentions elles-mêmes.

En l’espèce, au terme de leurs derniers échanges d’écritures, la SMABTP et AVIVA conviennent de ce que la cour n’est saisie d’aucune demande de la SMABTP à l’égard d’AVIVA, la SMABTP limitant son appel au recours formé par GENERALI à son encontre, et sollicitant la réformation du jugement en ce qu’il l’a condamnée à garantir intégralement GENERALI, ce qui nécessite le réexamen des responsabilités des sociétés en cause dans la survenance du sinistre, garanties par leur assureur respectif, outre celui du montant des réparations, qui ont d’ores et déjà été effectuées.

Ainsi au regard du dispositif des dernières conclusions de la SMABTP, notifiées le 19 octobre 2020, qui, seul, saisit la cour en application de l’article 954 du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de 'juger irrecevables toutes les demandes et prétentions formées par la compagnie SMABTP à l’encontre de la société AVIVA ASSURANCES', dès lors qu’aucune demande n’est formulée par la SMABTP à l’encontre de la société AVIVA dans le dispositif de ses dernières conclusions.

Il n’y a par ailleurs pas lieu de 'PRENDRE ACTE de ce que l’appel formé par la compagnie SMABTP est limité et qu’elle sollicite uniquement la réformation du jugement en ce que les premiers juges l’ont condamnée à garantir intégralement la compagnie AVIVA ASSURANCES' (en fait 'à garantir la compagnie GENERALI des condamnations portées au bénéfice de la société AVIVA, assurance TRC', comme mentionné dans le dispositif des dernières conclusions de la SMABTP, en page 21/22), une telle demande ne constituant pas une prétention au sens des articles 9 et 954 du code de procédure civile, tout comme les demandes de 'dire et juger’ et de 'constater’ d’ailleurs.

Sur les demandes principales

Vu les articles 1134, 1147 et 1382 anciens du code civil ;

Vu les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

La SMABTP affirme tout d’abord que dans le cadre des opérations d’expertise amiable, menées par le cabinet X avec le cabinet NEVEU, ni la société SPIE, entreprise générale titulaire du lot 'CVC', assurée par GENERALI, ni son sous-traitant, la société BRISSET, assurée auprès d’elle, n’ont acquiescé à leur responsabilité.

Elle conteste la responsabilité de son assurée, la société BRISSET, compte tenu du caractère non probant parce qu’insuffisant des opérations d’expertise amiable qu’invoque AVIVA, qui n’ont selon

elle pas permis de mener à bien la discussion contradictoire nécessaire, s’agissant tant du constat des dommages que de l’évaluation des conséquences induites, en terme de chiffrage des travaux de réparation et préjudices, de sorte qu’il convient non seulement de déclarer les conclusions du cabinet X sur ces points inopposables à son égard, mais aussi d’ordonner une expertise judiciaire, afin de déterminer notamment les responsabilités et le coût des travaux de reprise ainsi que des préjudices, dès lors que la cour ne dispose pas d’éléments avérés et certains permettant de déterminer la sphère d’intervention de chacun et donc les responsabilités encourues.

Dans l’attente de ce rapport d’expertise, qui devra tenir compte des pièces qu’elle somme GENERALI de communiquer au débat, à savoir les comptes rendus de chantier et le planning d’intervention du chantier litigieux, elle sollicite le sursis à statuer.

Elle rappelle que la société SPIE, débitrice d’une obligation de résultat, est tenue à l’égard du maître d’ouvrage des fautes commises par son sous-traitant, à savoir BRISSET, lequel est tenu également d’une obligation de résultat envers l’entreprise principale et donc de livrer un ouvrage conforme aux spécifications contractuelles réglementaires, exempt de vice, et que pour autant, la seule qualité de sous-traitant n’emporte pas une responsabilité de plein droit du chef de désordres, qui doivent être constatés et dont l’origine doit être déterminée au regard des obligations contractuelles de chacun.

Elle demande à tout le moins d’effectuer un partage de responsabilité à hauteur de 40 % pour la société SPIE, et de 60 % pour la société BRISSET.

La société GENERALI affirme quant à elle que malgré les demandes répétées du cabinet Y qu’elle avait mandaté, le chiffrage a été établi unilatéralement sur la base de devis d’entreprises et de plans qui n’ont jamais été soumis à la discussion contradictoire, alors même que le cabinet X se devait de procéder aux constats contradictoires des dommages, et de communiquer les devis ainsi que l’ensemble des pièces justificatives des réclamations.

Elle demande à la cour de juger inopposables à son encontre les conclusions du cabinet X, le procès verbal d’expertise établi par ses soins, non signé par les parties ainsi que le rapport du cabinet NEVEU ayant chiffré le montant des dommage, de débouter AVIVA de sa demande tendant à ce que la cour prenne acte de son propre aveu judiciaire, qu’elle conteste, et subsidiairement d’ordonner une expertise judiciaire afin de constater la réalité des dommages et d’en chiffrer le montant le cas échéant, en précisant que les dommages immatériels ne sont pas couverts par la police TRC et qu’il convient donc de rejeter toute demande de ce chef.

La société AVIVA réplique que l’étendue et le coût des travaux réparatoires ont été définis contradictoirement lors des opérations d’expertise amiable et que les contestations soulevées par les sociétés GENERALI et SMABTP ont été inventées pour les besoins de la cause. Elle s’oppose à leur demande d’expertise, qu’elle estime au demeurant inutile, et à la demande de communication de pièces, qu’elle estime impossible dès lors qu’elle n’est pas en possession de ces documents et ne pourra l’être.

Sur ce,

Il convient au préalable de rappeler que la convention concernant l’expertise amiable contradictoire applicable entre assureurs, invoquée par les parties dans le présent litige, a pour objet d’organiser les modalités des opérations d’expertise contradictoires afin que les constatations techniques et factuelles faites à cette occasion soient opposables aux assureurs concernés. Il s’agit d’expertiser les dommage garantis au titre d’une assurance de choses et pouvant donner lieu à l’exercice d’un recours au titre d’une assurance de responsabilité. Toute appréciation concernant les garanties ou les responsabilités éventuelles n’est pas du domaine de l’expertise en question. Au terme du modèle de procès-verbal de constatations relatives aux causes et circonstances et à l’évaluation des dommages, annexé à cette convention, il est précisé que 'ce document n’a pour but que d’établir contradictoirement les constatations et observations des experts présents pour donner aux assureurs intéressés les éléments objectifs nécessaires à la gestion du sinistre. Il ne peut être considéré par aucune des parties intéressées comme une reconnaissance des garanties stipulées dans les contrats d’assurance ou comme une acceptation des responsabilités éventuelles. Il n’implique donc pas la prise en charge par tel ou tel des assureurs concernés des indemnités qui lui sont réclamés'.

* l’opposabilité du procès-verbal dressé dans le cadre des opérations amiables d’expertise

Comme il l’a été rappelé ci-dessus, la SCI a déclaré le sinistre dégât des eaux à la société AVIVA, au titre de la garantie TRC, le 04 juin 2012.

Dans le cadre de l’instruction de ce sinistre, et conformément aux dispositions de la convention professionnelle concernant l’expertise amiable contradictoire, les compagnies d’assurances ont mandaté leurs experts dommages respectifs, à savoir :

— le cabinet X pour AVIVA, assureur TRC,

— le cabinet Y pour GENERALI assureur de la société SPIE,

— le cabinet HDE pour la SMABTP, assureur de la société BRISSET.

En cours d’expertise, le cabinet NEVEU a été saisi aux cotés du cabinet X, en sa qualité d’économiste de la construction avec mission d’évaluer la quantité de matériaux nécessaire et de calculer le prix de la construction, au contradictoire des experts mandatés par les autres assureurs en la cause.

Le chiffrage des dommages a été délégué en totalité au cabinet NEVEU par le cabinet X, qui en a informé notamment les experts mandatés par GENERALI et la SMABTP.

Une copie du 'procès-verbal de constatations relatif aux causes et circonstances', datée des 21/ 22 juin 2012, a été diffusée par le cabinet X par courrier daté du 21 juin 2012 dans la perspective d’une réunion devant se tenir sur place le 26 juin 2012 aux fins de signature de ce procès-verbal reprenant selon l’expert, le libellé de ce qui avait été convenu lors de la réunion contradictoire du 20 juin dernier.

Ce procès-verbal relate les circonstances ainsi que les causes du sinistre en ces termes :

'Le sinistre est survenu au cours du chantier de réalisation de l’immeuble de bureaux OVALIE, à Saint Ouen, opération de construction devant être réceptionnée le 15 juin 2012.

Tous les experts constatent que :

Le sinistre s’est produit sur une canalisation DN 200 du réseau d’eau glacée reliant les groupes frigorifiques, à l’extérieur du local CTA, au ballon tampon, situé à l’intérieur de celui-ci.

Ce réseau est réalisé en matériaux KRYCOCLIM (fabricant GIRP).

L’origine de la fuite se trouve située au droit d’un assemblage, par emboîtement et collage, entre une portion de canalisation linéaire, à l’extérieur, et un coude à 90° situé à l’intérieur du local juste après traversée du voile.

La cause réside en un déboîtement de l’assemblage entre coude et canalisation.

La valeur d’emboîtement relevée sur place est de l’ordre de 40 mm en lieu et place de celle de 107 mm, où se situent les butées, selon documentation technique du fabricant.

Le déboîtement s’est fait sans qu’il y ait eu arrachement de matière et/ou rupture de matière au niveau des tubes.

Il est précisé par ailleurs que :

- Au moment des faits, le réseau d’eau glacée était en charge, l’installation en fonction depuis mi-mai 2012, en cours de réglages et d’autocontrôles par les entreprises, et que le report d’alarme à partir de la GTB n’était pas en fonctionnement.

- La réalisation du lot CVC relevait de l’entreprise SPIE, locateur d’ouvrage.

- La poste (sans fourniture) de la canalisation et du coude a été réalisée par l’entreprise BRISSET, sous-traitante de SPIE, sans agrément du maître d’ouvrage pour ces travaux spécifiques.

L’entreprise BRISSET fait remarquer, qu’à l’extérieur du local CTA, un élément métallique vertical relié au portique de supportage des canalisations, avait été déposé avant sinistre'.

Ce procès-verbal mentionne les noms des experts mandatés par Y pour GENERALI assureur de SPIE, par HDE pour la SMABTP, assureur de BRISSET, par le cabinet BESSON pour la MAF, assureur de PG Architecture, et par CPA pour AXA, assureur de OCI.

Le cabinet X, sous couvert de la participation des experts aux réunions d’expertises contradictoires des 14, 18, 20 juin 2012, et 10, 19 juillet 2012, et de la vérification opérée par le cabinet NEVEU selon rapport du 02 août 2012 et ses pièces annexes, a ensuite établi un 'procès-verbal relatif à l’évaluation des dommages – frais et préjudices imputables au sinistre' daté des 7/9 août 2012 pour la somme totale de 1.322.717,96 euros HT, devant être soumis à la signature du cabinet BESSON (pour la MAF), et de CPA (pour AXA).

Suivant quittances d’indemnité TRC et quittance provisionnelle d’indemnité TRC datées du 27 juillet 2012 émanant respectivement de la SCI et de la société PETIT, il apparaît qu’AVIVA a versé respectivement à la société SCI et à la société PETIT au titre des travaux réparatoires :

* une indemnité de 1.280.396,53 euros dont il n’est pas contesté qu’elle se décompose ainsi :

— coût des travaux : 1.322.276,53 euros

— moins prime TRC : 11.880 euros

— moins franchise : 30.000 euros avec délégation de paiement à hauteur de la somme de 1.038.996,53 euros HT directement à des entreprises qui interviennent en réparation en déduction de la provision de 200.000 euros HT déjà versée à la société PETIT,

* une provision de 200.000 euros.

Le cabinet Y, qui s’était ému dès les 02 juillet 2012 et 31 juillet 2012 du chiffrage des dommages, a par courrier du 22 août 2012, répondu point par point au rapport de vérification du cabinet NEVEU en exposant les raisons de son désaccord sur la plupart des postes retenus et refusé, en conséquence, comme l’expert de la SMABTP, de signer le procès-verbal 'relatif à l’évaluation des dommages – frais et préjudices imputables au sinistre', tout comme le premier procès-verbal.

L’article 2.4 de la Convention concernant l’expertise amiable contradictoire applicable entre assureur dispose à ce sujet que : 'L’expert désigné par l’assureur de l’éventuel responsable doit être associé et participer à la recherche des causes et circonstances du sinistre ainsi qu’à l’évaluation des dommages'.

L’article 2.3 RAP précise les éléments caractérisant cette participation en ces termes :

'Les éléments qui doivent être communiqués sont notamment :

- la réclamation chiffrée du lésé ou l’état des pertes qu’il a produit ;

- ainsi que les rapport de police ou de gendarmerie, constat d’huissier, convention, devis, marchés, déclarations ou observations des assurés etc'.

Par ailleurs, le contenu du procès-verbal, qui doit être conforme au modèle figurant en annexe de la convention et comporter deux volets, l’un de constatations relatives aux causes et circonstances du sinistre, l’autre de constatations relatives à l’évaluation des dommages, est soumis au respect de règles précises, édictées à l’article 2.61 RAP :

'Le procès verbal doit être rédigé sur place. Il doit obligatoirement comporter le texte de la mention 'important’ inscrite en tête de ce modèle ainsi que (') :

- l’accord, le désaccord et les observations des parties sur les constations matérielles et l’évaluation des dommages (les observations d’une certaine longueur peuvent être annexées au procès-verbal sur un document libre qui sera signé par les parties),

- le refus de signature de l’une des parties'.

L’article 2.63 relatif à la signature du procès-verbal précise que : 'les personnes présentes doivent signer le procès-verbal sur place.

Le refus de signature de l’une des parties doit être acté au procès-verbal. Il est sanctionné par l’application des règles de l’opposabilité prévues par l’article 3', consacré à l’opposabilité de l’expertise à l’assureur de l’éventuel responsable.

Enfin, au terme de l’article 3.1, 'Les constatations du procès-verbal relatives aux causes et circonstances et à l’évaluation du dommage sont opposables aux assureurs :

- présents ou représentés aux opérations d’expertise,

(…) En revanche les points sur lesquels un désaccord a été consigné lors de la réunion ne sont

pas opposables'.

Il est constant que le procès-verbal sus-visé n’a pas été établi sur place, chacun de ses volets, ici formalisés dans deux procès-verbaux distincts, ayant été adressés, séparément, par courriers des 21/22 juin 2012 et 7/9 août par le cabinet X aux fins de signature lors d’une réunion prévue le 26 juin 2012 pour le premier et à une date qui restait à fixer mais qui ne l’a jamais été compte tenu du refus opposé par certains experts, pour le second.

Néanmoins, aucune des dispositions de la convention invoquée ne prévoit de sanction en cas d’inobservation des dispositions édictées à l’article 2.61 RAP imposant la rédaction 'sur place' du procès-verbal.

En outre, si aucune explication n’est donnée quant à la tenue ou non de la réunion fixée au 26 juin 2012 pour signer le premier procès-verbal, il apparaît que la SMABTP a demandé au cabinet

X d’annuler cette réunion, en précisant qu’elle n’y participerait pas, au motif que signer en l’état ce procès-verbal 'serait accepter l’imputabilité complète du sinistre alors même que les dommages n’ont pas été arrêtés', et que la société BRISSET 'n’est pas seule responsable du sinistre et qu’une solution de partage doit être trouvée'.

Or, comme mentionné à titre liminaire en première page de ce premier volet, et conformément au préambule de la convention et au modèle annexé d’ailleurs, ce document n’avait nullement pour but de déterminer les responsabilités éventuelles des uns ou des autres, mais uniquement de constater contradictoirement 'les causes et circonstances' du sinistre.

En outre, il ressort des pièces versées au dossier que le cabinet X a organisé, les 13, 14, 18 et 20 juin 2014, quatre réunions dédiées aux constats des désordres. La société GENERALI et la SMABTP y étaient représentées par leur conseil technique respectif, à savoir le cabinet Y et le cabinet HDE.

Comme le fait valoir AVIVA, l’origine des désordres a, à cette occasion, été discutée et débattue par l’ensemble des parties et il ne peut être sérieusement contesté qu’à cette occasion, chacune des parties a pu faire valoir ses observations, la société BRISSET ayant notamment 'fait remarque qu’à l’extérieur du local CTA, un élément métallique vertical relié au portique de supportage des canalisations avait été déposé avant sinistre'.

L’expert De Castelbajac, du cabinet X, a signé le courrier du 21 juin 2012 auquel il a joint la copie du premier procès-verbal en prenant le soin de préciser qu’il reprenait 'le libellé de ce que nous avons convenu lors de la réunion contradictoire du 20 juin dernier', à laquelle les experts des autres compagnies d’assurance étaient présents.

La cour relève en outre que, dans sa note sur le déroulement de l’expertise amiable en date du 17 février 2014, l’expert mandaté par GENERALI, Y, précise à ce sujet qu’il a 'refusé de se déplacer pour signer le PV, mais n’a nullement refusé de signer le PV'.

Il s’en déduit que, nonobstant l’absence de signature de ce premier procès-verbal par les experts mandatés par GENERALI et la SMABTP, les constatations relatives aux causes et circonstances du sinistre qui résultent d’un débat contradictoire mené avec les représentants des parties, leur sont pleinement opposables, en l’absence de consignation des points de désaccord invoqués par la suite, ces constatations faisant suite au rapport lui-même contradictoire d’expertise d’ouverture tous risques chantier du 12 juin 2012.

Il s’en déduit que la cause du sinistre survenu le 03 juin 2012 est le 'déboitement de l’assemblage entre le coude et la canalisation'.

Concernant le second document, qui correspond en fait au second volet du procès-verbal type prévu par la convention, relatif à 'l’évaluation des dommages', consacré au cas d’espèce au 'à l’évaluation des dommages, frais et préjudices imputables au sinistre', et donc au montant des réparations, dont le montant a d’ores et déjà été réglé comme en attestent les quittances versées au débat, il ressort des divers échanges de courriers que la date de réunion à laquelle il aurait dû être signé, après plusieurs réunions préparatoires, n’a jamais été fixée, sans qu’il soit possible d’en imputer la responsabilité au seul cabinet X.

Ce second 'procès-verbal’ a été suivi d’un courrier émanant du cabinet Y, en date du 22 août 2012, faisant état de nombreux points de désaccord, qui ne figurent pas sur le projet de procès-verbal.

Cependant, comme AVIVA le fait valoir, elle a proposé par courriel du 12 septembre 2012 à la GENERALI d’organiser une réunion, après l’envoi du rapport du cabinet NEVEU, et GENERALI a

décliné cette proposition dans un courrier en date du 26 septembre 2012 en invoquant l’absence de débat sur la RC et le quantum.

En outre, il ressort des pièces versées au débat que le cabinet NEVEU, désigné en qualité de métreur-vérificateur aux côtés du cabinet X par AVIVA a, parallèlement à la détermination des causes du sinistre par X, évalué les réclamations concernant le coût des travaux réparatoires, avant 'tout travail de vérification notamment en matière de justification', à partir des devis d’entreprises collectés, à la somme totale de 2.305.500 euros HT, évaluation transmise par courrier du 28 juin 2012 par X à l’ensemble de ses confrères, à savoir les cabinets Y et HDE, outre le cabinet CPA.

Si Y s’est, aux termes de ses courriers des 02 et 18 juillet 2012, étonné de ce qu’aucun devis d’entreprise ne lui avait été communiqué, c’est à juste titre qu’AVIVA lui oppose le fait qu’il ne s’agissait que d’un premier chiffrage des interventions des entreprises n’ayant fait l’objet d’aucun contrôle par le cabinet NEVEU, comme annoncé dans son courrier, communication dont l’intérêt est difficile à percevoir, dès lors que le cabinet Y avait accepté de s’en remettre aux vérifications et conclusions du cabinet NEVEU et qu’une réunion était organisée les 10 et 19 juillet, justement, pour débattre de l’étendue et du coût des travaux réparatoires.

Ces deux réunions, tenues les 10 et 19 juillet 2012, étaient en effet consacrées 'au chiffrage définitif du coût des dommages permettant de recueillir l’accord de l’ensemble des parties intéressées au règlement des conséquences du sinistre'.

Les différents postes de travaux ont été analysés un à un, sur la base de devis préalablement étudiés par le cabinet NEVEU et les échanges de courriers entre les parties attestent de ce que certains postes ont nécessité des explications de sorte que le coût des travaux réparatoires a été arrêté in fine à la somme totale de 1.322.717,96 euros HT.

GENERALI et la SMABTP ont quant à elle décliné la proposition qui leur avait été faite par le cabinet X dans sa lettre circulaire du 15 juin 2012, de désigner leur propre économiste de la construction. En cours d’expertise, elles ont indiqué lors de la réunion du 07 juin 2012 qu’elles s’en remettaient aux conclusions du cabinet NEVEU.

Les cabinets Y et HDE avaient en outre la possibilité d’assister aux nombreuses réunions notamment celle du 26 juin 2012, organisées entre le cabinet NEVEU et les entreprises afin de vérifier les métrés et prix proposés par les entreprises, ce qu’ils n’ont pas fait.

C’est dans ce contexte que le cabinet X a, dans son courrier du 09 août 2012, signé de son expert et joint à la communication du rapport de vérification du cabinet NEVEU (daté du 02 août 2012) et des 18 pièces annexées, communiqué aux parties le projet de procès-verbal d’expertise portant sur l’évaluation faite des dommages, frais et préjudices, établi sur la base de ce rapport.

La SMABTP n’a émis, à réception du rapport de vérification du cabinet NEVEU et du projet de procès-verbal relatif à l’évaluation des dommages, aucune contestation.

En revanche, par courrier du 16 août 2012, le cabinet Y, et par devers lui, la société GENERALI, ont remis en cause l’ensemble de l’expertise amiable, en faisant état de l’absence de devis, état de perte ou réclamation, en dépit de demandes formulées par courriers des 18 et 31 juillet 2012, et d’un chiffrage non contradictoire, et a réclamé la communication des réclamations adressées à X et des plans permettant de définir l’importance de certains dommages.

Par courrier du 22 août 2012, le cabinet Y a accusé réception du rapport NEVEU et du projet de procès-verbal, auprès du cabinet X, et lui a fait des remarques d’ordre général sur le rapport, liées à des imprécisions, et a contesté certains postes de réclamation, tout en déplorant

l’absence de chiffrage contradictoire.

Dans sa note sur le déroulement de l’expertise amiable en date du 17 février 2014, l’expert de Y précise à ce sujet qu’il a 'contesté le chiffrage du cabinet NEVEU du fait d’un désaccord sur certains postes assez nombreux' dès le 22 août, alors même que 'les devis des entreprises ne lui ont été communiquées que par courrier du 9 août par le cabinet X', ce qui atteste de la communication des devis en question, et donc de la possibilité de les discuter par la suite.

L’expert précise par ailleurs dans cette note qu’il 'ne pouvait pas accepter de signer un PV d’expertise', considérant qu’aucun chiffrage contradictoire n’était arrêté.

Or, comme il l’a été rappelé ci-dessus, si cet expert était en droit de ne pas signer le procès-verbal, il ne pouvait faire obstacle à ce que le cabinet X consigne son refus et les points de désaccords sur ce procès-verbal, lors d’une réunion à laquelle chacune des parties aurait dû accepter de se rendre, dans le cadre du processus de l’expertise amiable qu’ils se devaient tous de respecter, loyalement, jusqu’à son terme.

En outre, dès lors que le cabinet X rapporte la preuve qu’il a proposé au cabinet Y de se rapprocher du cabinet NEVEU, de désigner son propre économiste, ainsi que de se rendre sur site pour procéder à toutes les vérifications utiles et proposer des solutions réparatoires alternatives, la cour ne peut suivre GENERALI lorsqu’elle remet en cause avec une certaine mauvaise foi le caractère contradictoire des opérations d’expertise sur le chiffrage du préjudice, le montant des travaux réparatoires ayant été évalué, selon une méthodologie définie et acceptée par l’ensemble des intervenants, présents, représentés ou juste convoqués, et ce, dès le démarrage des opérations d’expertise.

Si ce projet de procès-verbal n’a pas davantage que le premier été établi sur place, il n’encourt aucune inopposabilité de ce seul fait, dès lors que la convention concernant l’expertise amiable ne prévoit pas une telle sanction.

Ayant eu par la suite la possibilité de discuter les conclusions du cabinet NEVEU, ce qu’elle a d’ailleurs fait avec détails dans son courrier du 16 août 2012 par l’intermédiaire de son expert, GENERALI ne peut, sauf s’il y a eu fraude à son encontre, ce qu’elle ne démontre ni ne prétend, soutenir qu’elles lui sont inopposables.

Cette opposabilité est par ailleurs valable à l’égard de la SMABTP, qui a également eu par la suite la possibilité de discuter les conclusions du cabinet NEVEU, et par-là le montant des travaux réparatoires retenu dans le procès-verbal, ce que le cabinet HPE n’a pas fait dans le courrier adressé par la suite au cabinet X, le 8 avril 2013.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments, nonobstant l’absence de strict respect du formalisme imposé par la convention applicable entre assureur, qu’il n’y a pas lieu de déclarer inopposable à la SMABTP les conclusions du cabinet X, s’agissant tant de l’origine des dommages que du chiffrage des conséquences induites, et qu’il n’y a pas davantage lieu de déclarer inopposable à GENERALI les conclusions du cabinet X, le procès-verbal d’expertise établi par ce cabinet, ainsi que le rapport du cabinet NEVEU ayant chiffré le montant des dommages.

* l’aveu judiciaire allégué par AVIVA à l’encontre de GENERALI

AVIVA explique que GENERALI a, en réponse aux contestations soulevées par la SMABTP, reconnu dans ses conclusions que 'les dommages ont bien été constatés'et qu’elle ne peut en conséquence, d’un côté, prétendre qu’elle n’a pas constaté les désordres pour s’opposer à sa demande puis, d’un autre, reconnaître que les dommages ont été constatés pour justifier son appel en garantie contre la SMABTP.

AVIVA demande à la cour de prendre de ce fait acte d’un aveu judiciaire de GENERALI, selon lequel 'les constats qui constituent le socle de la réclamation' ont été contradictoires.

Cependant, comme le réplique GENERALI, il convient de distinguer les constats du phénomène à l’origine du sinistre et la recherche des imputabilités d’une part, et les opérations de constats des désordres et de chiffrage des travaux réparatoires de ces désordres d’autre part, opérations totalement distinctes.

La recherche des imputabilités s’effectue à partir des constats du phénomène technique à l’origine des désordres, en l’occurrence, une fuite sur une canalisation d’eau glacée ; cette fuite a été constatée de façon contradictoire, comme il l’a été exposé ci-dessus.

En revanche, les opérations de chiffrage supposent de constater et de relever l’étendue des dommages, puis des discussions sur la nature des travaux destinés à remédier aux désordres, et enfin l’obtention et l’analyse de devis de travaux réparatoires.

Ces opérations minutieuses et contradictoires donnent éventuellement lieu à la signature d’un procès-verbal de chiffrage entre les experts des parties.

Comme cela ressort des dernières écritures de GENERALI, et des échanges antérieurs entre les experts, les premiers constats sur site ont permis de constater et de déterminer l’origine du sinistre et donc d’en tirer les conséquences qui s’imposent en terme d’imputabilité, ce qui n’est pas contesté par GENERALI .

Ce sont d’ailleurs ces constats contradictoires que rappelle GENERALI dans son argumentation en réplique à la SMABTP qui tente de contester le principe de la responsabilité de la société BRISSET.

En revanche, GENERALI soutient que les travaux menés par l’expert du cabinet X missionné par AVIVA n’ont pas permis de constater contradictoirement l’intégralité des dommages et de procéder à un chiffrage contradictoire des dommages.

Par conséquent, c’est vainement que AVIVA se fonde sur l’argumentation développée par GENERALI à l’encontre de la SMABTP sur la question de l’origine des désordres afin de lui opposer un aveu judiciaire quant au constat contradictoire des dommages et de leur chiffrage.

L’ aveu judiciaire de GENERALI quant au chiffrage contradictoire des dommages n’est ainsi pas caractérisé et AVIVA sera déboutée de sa demande tendant à ce que la cour prenne acte de cet aveu judiciaire.

* les demandes de communication de pièces, d’expertise, et de sursis à statuer

Vu les articles 134, 146, 378 et suivants du code de procédure civile ;

Le 19 octobre 2020, la SMABTP a fait vainement sommation à GENERALI et AVIVA de communiquer au débat les comptes rendus de chantier et le planning d’intervention du chantier litigieux. Elle a renouvelé cette sommation dans ses dernières écritures.

Par ailleurs, la SMABTP sollicite, pour la première fois en cause d’appel, la désignation d’un expert afin qu’il examine, certes sur pièces, les éléments factuels et contractuels, comptes rendus de chantier et échanges ultérieurs inclus, la sphère d’intervention des uns et des autres, afin de déterminer notamment les responsabilités et le coût des travaux de reprise ainsi que des préjudices, et dans l’attente de ce rapport d’expertise, le sursis à statuer.

GENERALI s’y oppose mais sollicite également à titre subsidiaire une expertise judiciaire afin de

voir constater la réalité des dommages et d’en chiffrer le montant le cas échéant.

AVIVA s’y oppose en faisant valoir qu’une telle mesure est parfaitement injustifiée et inutile dans la mesure où le contrat de sous-traitance est en possession de la SMABTP, et où il appartenait, à l’époque, à la SMABTP de se renseigner auprès de son assurée sur l’étendue de ses travaux et le déroulement du chantier ; elle ajoute qu’une telle mesure n’a pas vocation à palier la carence de la SMABTP, et que les parties n’ont, à l’époque, pas contesté l’origine des désordres ni la responsabilité de la société BRISSET de sorte qu’elles n’avaient aucune raison de réclamer les comptes rendus de chantier ni d’échanger sur la 'sphère d’intervention’ de la société BRISSET.

AVIVA soutient qu’au surplus, elle n’est pas concernée par les débats techniques entre la société SPIE et son sous-traitant, la société BRISSET, qu’elle ne pourra fournir aucun renseignement à l’expert sur le déroulement du chantier ou sur les relations (ordres donnés, contrôles) entre ces deux parties, et qu’il n’y a aucun intérêt à ce qu’elle participe aux opérations d’expertise.

Elle ajoute qu’une expertise sur le 'chiffrage'' telle que sollicitée par GENERALI est, non seulement, injustifiée et inutile mais, surtout, impossible dès lors qu’il est impossible de constater 'la réalité des dommages' puisque les travaux réparatoires ont été réalisés, qu’un expert ne sera pas en mesure de donner son avis sur l’étendue des désordres sur la seule base des quelques photos qui auraient été prises en 2011 et que faute de pouvoir constater les désordres, un expert ne pourra pas, non plus, se prononcer sur leur réparation.

Pour les motifs exposés ci-dessus, il ne sera pas fait droit aux demandes de communication de pièces, d’expertise judiciaire et de sursis à statuer, la cour, qui doit veiller à la résolution du litige dans un délai raisonnable, au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, étant en mesure de statuer au regard des pièces versées au débat, soumises depuis plusieurs années à la libre discussion entre les parties, étant rappelé qu’en aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence des parties dans l’administration de la preuve, et qu’aucune mesure d’instruction n’a été sollicitée soit en référé, soit devant le juge de la mise en état, alors même que les données du litige étaient parfaitement connues de chacune des parties depuis la délivrance de l’assignation.

En outre, s’il peut être reproché à AVIVA d’avoir mis fin au processus amiable qu’elle avait pourtant initié (procédure d’escalade), sans justifier d’ailleurs de ce que la commission arbitrale n’aurait pas rendu sa décision dans le délai imparti comme chacune des parties au litige s’accorde pourtant pour l’affirmer, tant la SMABTP que GENERALI ont contribué à complexifier in fine le déroulement de l’expertise amiable engagée préalablement, dans le parfait respect du contradictoire à leur égard, en refusant de se rendre à la réunion fixée par l’expert X (le 26 juin 2012) pour examiner contradictoirement le premier volet du procès-verbal et/ou en refusant de donner suite à la demande de fixation de la réunion destinée à examiner le second volet du procès-verbal, après communication du rapport du cabinet NEVEU dont elles avaient approuvé la désignation et le mandat, privant ainsi l’expert X de la possibilité de consigner leur refus et les motifs de ce refus, et mettant ainsi un terme par ce comportement à l’application loyale de la convention précitée régissant les rapports entre assureurs, en particulier quant à ses dispositions sur l’opposabilité, destinées à parer les difficultés qui se sont présentées par la suite pour la résolution du litige.

Or, c’est précisément dans le cadre de ce processus que les pièces réclamées in fine auraient pu être demandées.

Enfin, tant AVIVA que GENERALI affirment qu’ils ne disposent pas des comptes-rendus de chantier et du planning d’intervention sollicités par la SMABTP, documents que son expert, le cabinet HPE, n’a pourtant à l’époque jamais sollicité, de sorte que faire droit à la sommation sollicitée serait manifestement voué à l’échec.

* les responsabilités des sociétés SPIE et BRISSET et les demandes subséquentes de condamnation solidaire, d’opposabilité des limites de garantie et de franchise, d’appel en garantie et de partage de responsabilité

En application de l’article 1147 ancien du code civil, le sous-traitant est tenu envers l’entrepreneur principal de livrer un ouvrage exempt de vices et ne peut s’exonérer que par la preuve d’une cause étrangère.

La société BRISSET, sous-traitant de la société SPIE selon contrat de sous-traitance du 09 novembre 2011, était chargée d’une 'prestation globale et forfaitaire de travaux pour la réalisation des réseaux hydrauliques eau glacée, eau chaude et réseaux récupération d’énergie des LT terrasse r+8'.

Ce contrat prévoit notamment que :

— la société BRISSET met à disposition de la société SPIE la main d''uvre pour réaliser les réseaux hydrauliques primaires eau glacée dans l’enceinte de la terrasse (tube colle décapant, raccords, brides…), ce qui signifie que le personnel du sous-traitant est pour cette prestation placé sous la responsabilité de l’encadrement de la société SPIE,

— la société BRISSET réalise la mise en épreuve des réseaux hydropiques 'krioclim'.

Comme il l’a été vu ci-dessus, l’origine du sinistre réside dans le déboîtement d’un tronçon de canalisations installées par la société BRISSET, sous-traitant de la société SPIE, en raison de la mauvaise exécution du collage et de la profondeur d’emboîtement insuffisante des éléments en PVC.

La responsabilité de la société BRISSET dans la survenance du sinistre est reconnue par la SMABTP à hauteur de 60 % (en pages 19 et 21 /22 de ses écritures), conformément aux recommandations du cabinet HDE, faites dans un courrier du 08 avril 2013, adressé à Y, dans une proportion néanmoins encore plus élevée (65 %).

En tant qu’entreprise chargée du lot 'plomberie', la société SPIE était quant à elle tenue d’une obligation de résultat vis-à-vis du maître de l’ouvrage. A ce titre, elle devait prévoir l’ensemble des travaux nécessaires à la bonne réalisation de son ouvrage et elle est tenue à l’égard du maître d’ouvrage, des fautes commises par son sous-traitant.

Dès lors, GENERALI et la SMABTP, dont les responsabilités sont engagées, seront condamnées solidairement.

La SMABTP demande à la cour de lui donner acte de l’opposabilité de ses limites de garantie tenant à l’opposabilité de la franchise RC ainsi que ses plafonds contractuels. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a fait droit à cette demande au vu de la police responsabilité civile signée versée aux débats.

La SMABTP conclut par ailleurs à un partage de responsabilité entre son assurée et la société SPIE au motif que la société SPIE a commis plusieurs fautes consistant à :

— avoir mis en place l’ensemble des calorifugeages des réseaux, avant qu’une mise en épreuve des réseaux puisse être réalisée, intervention qui ne serait 'pas conforme à la norme’ parce que pouvant empêcher la détection d’un commencement de fuite, toutes les parties du réseau devant en effet être visibles et accessibles au cours des essais,

— avoir fait procéder à la mise en eau des équipements de CVC autour du 15 mai 2012, ce qui a déclenché le fonctionnement des pompes de maintien de pression et le déboîtement de la canalisation en partie haute du réseau (R+8) jusqu’à leur mise à l’arrêt manuel le 16 mai 2012, ce qui a aggravé le sinistre,

— à ne pas avoir établi de plan de supportage des réseaux, ce qui l’a contrainte à concevoir elle-même et à mettre en 'uvre ces supportages,

— et enfin, à avoir déposé un élément de supportage au droit du siège du sinistre sans l’avoir avertie de cet élément, générant une situation technique ne respectant pas la documentation du fournisseur.

La SMABTP estime que l’ensemble de ses observations techniques doivent conduire la cour à s’interroger plus particulièrement sur les éléments suivants :

— l’état exact des travaux réalisés d’une part, par la société SPIE et d’autre part, par la société BRISSET concomitamment au sinistre,

— la société SPIE ayant procédé à un contrôle des réseaux mis en place avant même que la société BRISSET n’achève ses prestations,

— d’où la nécessaire communication au débat et l’analyse des comptes rendus de chantier et le planning d’intervention, pour lesquels elle a fait sommation de communiquer,

— la détermination de l’auteur de la dépose de l’élément mécanique vertical relevé au portique de support de la canalisation fuyarde.

Cependant, comme le lui objecte GENERALI, qui demande à être intégralement garantie par la SMABTP, au titre de l’obligation de résultat dont était redevable la société BRISSET en qualité de sous-traitante, dès lors qu’elle est intervenue en cette qualité, la société BRISSET voit sa responsabilité engagée à l’égard de la société SPIE au vu des constatations relevées dans le cadre de l’expertise amiable, société envers laquelle elle était en effet tenue à une obligation de résultat, et devait lui délivrer à ce titre un ouvrage conforme aux spécifications contractuelles et réglementaires exempt de vices, ce qui n’a pas été le cas au vu des obligation stipulées dans le contrat précité et de l’origine du sinistre, sans quoi le sinistre ne serait pas advenu.

Elle ne peut dès lors s’exonérer de sa responsabilité, et aucune de ses observations techniques n’est de nature à justifier le partage de responsabilité dont elle se prévaut, en l’absence de preuve d’une faute ayant joué un rôle causal dans le survenance du sinistre, étant observé que son propre expert avait relevé dans son courrier du 25 juin 2012 que le lien de causalité entre les griefs reprochés à SPIE concernant le supportage de la conduite et l’absence de contrôle général avant mise en oeuvre du calorifuge et le sinistre n’était pas démontré, outre le fait qu’un des griefs évoqué, à savoir l’augmentation des volumes d’eau perdus, ne pourrait en toute hypothèse que concerner l’aggravation des conséquences dommageables.

La SMABTP devra ainsi garantir GENERALI intégralement de la condamnation prononcée à son encontre à titre principal, sur le fondement de l’article 1147 du code civil, outre les condamnations prononcées à l’encontre de GENERALI au titre des intérêts, frais et accessoires.

* Sur le montant des réparations

La limite d’assiette du recours subrogatoire d’AVIVA, tel que le tribunal l’a retenu, à hauteur de 1.280.396,53 euros n’est pas en soi contestée, au regard des quittances subrogatives des 06 et 27 juillet 2012 et du relevé des opérations débitées sur son compte-bancaire, accompagné des photocopies des chèques escomptés, en ce compris le chèque de 200.000 euros versé à la société PETIT le 13 juillet 2012.

AVIVA expose qu’elle est fondée à obtenir le paiement des travaux réparatoires ainsi que des dommages immatériels qu’elle a réglés au maître d’ouvrage.

GENERALI et la SMABTP contestent le quantum du préjudice, au motif que les évaluations faites par le cabinet NEVEU n’auraient pas fait l’objet d’une discussion contradictoire, ce que la cour juge inexact.

AVIVA verse copie du rapport de vérification dressé par le cabinet NEVEU, et de ses annexes, rapport qui distingue les différents postes de préjudices et mentionne le prix des devis reçus ainsi que les montants finalement retenus.

Comme il l’a été exposé ci-dessus, GENERALI et la SMABTP, qui ont été associées aux opérations d’expertise dès leur origine, lesquelles ont donné lieu à sept réunions, n’ont pas souhaité désigner leurs propres économistes ainsi que le proposait X dans sa lettre circulaire du 15 juin 2012.

Par ailleurs, elles ne produisent pas davantage devant la cour qu’elles ne l’ont fait devant le tribunal, de contre-proposition de chiffrage, ni aucune pièce qui tendrait à remettre en cause les conclusions du cabinet NEVEU, soumises au contradictoire jusque devant la cour.

Si GENERALI soutenait devant le tribunal que les frais, notamment, de prolongement des cautions bancaires, de gardiennage complémentaire, de mise à disposition d’un agent de sécurité, et de maintenance du monte-charge constituaient des 'pertes indirectes’ au sens de la police, formellement exclues des garanties du contrat, ce moyen n’est plus soutenu en cause d’appel.

GENERALI demande uniquement à la cour de 'dire que les dommages immatériels' ne sont pas couverts par la police TRC et de rejeter toute demande de ce chef, sans développer ce chef de demande, distinct de celui concernant les pertes indirectes.

Comme le fait valoir AVIVA, la police TRC ne vise parmi les 'pertes indirectes' exclues que 'la privation de jouissance, la dépréciation, les amendes ou pénalités de retard de quelque nature que ce soit du à un retard de livraison, une inobservation des délais, à un dommage à l’ouvrage garanti ou non par le présent contrat ou tout autre cause', ce qui ne concerne pas les postes évoqués par GENERALI devant le tribunal de grande instance.

Le jugement est ainsi confirmé en ce qu’il a rejeté la demande subsidiaire d’expertise formulée dans ce cadre.

En revanche, il ne peut qu’être infirmé en ce qu’il a fixé le montant de la condamnation à la somme de 1.281.564, 09 euros, la limite d’assiette du recours subrogatoire d’AVIVA au vu des quittances produites étant de 1.280.396,53 euros et non de 1.281.564,09 euros, la cour observant à ce titre que AVIVA sollicite en page 23 de ses écritures la 'confirmation’ du montant de 1.280.396,53 euros, alors que c’est en se basant sur le tableau récapitulatif des 18 chèques débités sur le compte bancaire d’AVIVA ouvert auprès du Crédit Agricole, que le tribunal a in fine retenu la somme de 1.281. 564,09 euros, tandis que les extraits de comptes justifiaient d’un débit total de 1.283.856,53 euros pour 23 chèques.

* Sur les appels en garantie et la contribution à la dette

Dans leurs relations entre eux, les responsables ne peuvent exercer de recours qu’à proportion de leurs fautes respectives, sur le fondement des dispositions de l’article 1382 ancien du code civil s’agissant des locateurs d’ouvrage non liés contractuellement entre eux, ou de l’article 1147 ancien du code civil s’ils sont contractuellement liés.

GENERALI demande à être garantie intégralement par la SMABTP au titre de l’obligation de résultat dont était redevable la société BRISSET en qualité de sous-traitante.

La SMABTP demande à la cour d’ordonner un partage de responsabilité au motif que SPIE a commis

plusieurs fautes, consistant à réaliser le contrôle des réseaux mis en place avant que les travaux ne soient achevés, à ne pas avoir pas établi de supportage du réseau, et à avoir déposé un élément de supportage au droit du siège du sinistre.

Comme l’a relevé le tribunal, en l’absence de production en cause d’appel d’autres éléments à ce sujet, ces allégations ne sont étayées par aucune pièce.

En outre, s’il résulte du procès-verbal de constatation dressée par X le 22 juin 2012 que la société BRISSET avait signalé la dépose d’un élément métallique vertical relié au portique de supportage de la canalisation fuyarde, cette seule mention, sans constatation objective d’un fait imputable à la société SPIE et sans avis technique extérieur permettant d’en déduire une faute ayant joué un rôle causal dans la survenance du sinistre, ne suffit pas à établir le bien fondé d’une demande de partage de responsabilité.

Le jugement sera ainsi confirmé en ce qu’il a exactement déduit des faits de la cause que la SMABTP devait garantir GENERALI intégralement de la condamnation prononcée à son encontre sur le fondement de l’article 1147 ancien du code civil.

Sur les demandes accessoires

La SMABTP et GENERALI qui succombent seront condamnées in solidum aux entiers dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par AVIVA ASSURANCES en cause d’appel.

La SMABTP et GENERALI seront déboutées de leur demande formée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant en dernier ressort, contradictoirement et par mise à disposition de la décision au greffe,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné in solidum les sociétés GENERALI et SMABTP à payer à la société AVIVA ASSURANCES la somme totale de 1.281.564,09 euros et limité la condamnation de la SMABTP à garantir la SA GENERALI IARD à celle prononcée à titre principal ;

Statuant de nouveau de ces chefs et y ajoutant :

Condamne in solidum les sociétés GENERALI et SMABTP à payer à la société AVIVA ASSURANCES la somme totale de 1.280.396,53 euros;

Déboute AVIVA ASSURANCES de sa demande concernant l’aveu judiciaire ;

Déboute la SMABTP

Déboute la SMABTP et la société GENERALI de leur demande d’expertise judiciaire ;

Condamne in solidum la SMABTP et la société GENERALI aux dépens ;

Condamne in solidum la SMABTP et la société GENERALI à payer à la société AVIVA ASSURANCES en cause d’appel la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la SMABTP et la société GENERALI de leur demande formée de ce chef ;

Condamne la SMABTP ès-qualités d’assureur de la société BRISSET à garantir intégralement la SA GENERALI IARD des condamnations prononcées en principal, intérêts, frais et accessoires ;

Dit que la SMABTP ès-qualités d’assureur de la société BRISSET pourra opposer ses plafonds et franchises contractuelles à la SA AVIVA ASSURANCES ;

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 19 octobre 2021, n° 19/04032