Cour d'appel de Poitiers, 1re chambre, 23 mai 2023, n° 21/02101

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, 1re ch., 23 mai 2023, n° 21/02101
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 21/02101
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de La Rochelle, 11 mars 2021
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 29 mai 2023
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Texte intégral

ARRÊT N°227

N° RG 21/02101

N° Portalis DBV5-V-B7F-GKBU

S.A.S. EVIDENCE EDITIONS

C/

[R]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 23 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 12 mars 2021 rendu par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE

APPELANTE :

S.A.S. EVIDENCE EDITIONS

N° SIRET : 822 77 7 3 48

[Adresse 3]

[Localité 1]

ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

ayant pour avocat plaidant Me Kathleen BANNET, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

Monsieur [T] [R]

né le 02 Février 1971 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

ayant pour avocat postulant Me Paul-Henri BOUDY, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 13 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La société Evidence Editions est une maison d’édition qui a commencé son activité le 5 septembre 2016. Elle a été immatriculée le 28 septembre suivant au registre du commerce et des sociétés. Elle est présidée par [O] [R].

La société Libertine Editions est une société d’éditions et de vente d’ouvrages à caractère érotique. Elle a été immatriculée en 2018 et est également présidée par [O] [R].

[T] [R] est informaticien et cousin de [O] [R]. Ils sont entrés en relation en vue de la réalisation du site internet 'Libertine Editions'.

Par courriel en date du 27 juillet adressé à [O] [R], [T] [R] a chiffré à 8.000 € hors taxes le coût de sa prestation. Le site internet 'libertine-editions.fr’ a été livré le 11 novembre 2018. La facture afférente est en date du 22 mars 2019. Elle a été adressée à la société Evidence Editions et est demeurée impayée.

Par courrier en date du 25 avril 2019, [T] [R] a mis en demeure la société Evidence Editions de lui payer la somme hors taxes de 8.000 €.

Par acte du 12 novembre 2019, [T] [R] a assigné la société Evidence Editions devant le tribunal de commerce de La Rochelle. Il a à titre principal demandé paiement de la somme de 8.000 € hors taxes correspondant au montant de la facture demeurée impayée et celle de 2.000 € à titre de dommages et intérêts.

La défenderesse a conclu au rejet de ces demandes en l’absence selon elle de contrat avec elle et le site internet devant être celui de la société Libertine Editions. Subsidiairement, elle a soutenu que les imperfections du site l’autorisaient à opposer l’exception d’inexécution et à solliciter la réduction du prix de la prestation litigieuse.

Par jugement du 12 mars 2021, le tribunal de commerce de La Rochelle a statué en ces termes :

'Vu les articles 1101, 1103, 1104, 1113, 1240, 1349, 1353, et 1382 du code civil,

Vu les articles 514, 696 et 700 du code de procédure civile,

Déboute la société EVIDENCE EDITIONS de sa demande de juger l’assignation comme mal dirigée ;

Reçoit Monsieur [T] [R] en sa demande, la dit fondée, il lui fera droit;

Condamne la société EVIDENCE EDITIONS à payer à Monsieur [T] [R] la somme de 8.000 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2019 ;

Déboute la société EVIDENCE EDITIONS en ses demandes reconventionnelles;

Déboute Monsieur [T] [R] du surplus de ses demandes ;

Condamne la société EVIDENCE EDITIONS à payer à Monsieur [T] [R], la somme justement appréciée de 1200 € au titre des dispositions de l’article 700 du CPC ;

Ordonne l’exécution provisoire du jugement ;

Condamne, conformément à ce qu’indique l’article 696 du CPC, EVIDENCE EDTTIONS, au paiement des entiers dépens de l’instance comprenant les frais du greffe s’élevant à la somme de soixante-trois euros et trente-six centimes TTC'.

Il a considéré que :

— l’assignation n’était pas mal dirigée, les échanges s’étant produits entre la société Evidence Editions et [T] [R] ;

— ces derniers avaient conclu un contrat de prestation de services ;

— les manquements imputés au demandeur n’étaient pas établis ;

— ce dernier ne justifiait pas d’un préjudice subi.

Par déclaration reçue au greffe le 5 juillet 2021, la société Evidence Editions a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 août 2022, elle a demandé de :

'Vu les articles 1101, 1103, 1113 et 1217 du Code civil

Vu l’article 122 du Code de procédure civile

[…]

' DECLARER la société EVIDENCE EDITIONS bien fondée en son appel ;

' INFIRMER intégralement la décision rendue par le Tribunal de commerce de la Rochelle le 12 mars 2021 sauf en ce qu’elle a débouté Monsieur [T] [R] de ses demandes ;

' CONFIRMER la décision rendue par le Tribunal de commerce de la Rochelle le 12 mars 2021 en ce qu’elle a rejeté la demande de condamnation à hauteur de 2.000 € formée par Monsieur [T] [R].

Et statuant à nouveau

A titre principal :

' JUGER que l’action de Monsieur [T] [R], en ce qu’elle concerne le paiement d’une facture d’une prestation de service réalisée sur l’ordre et pour une société tierce est mal dirigée à l’encontre de la société EVIDENCE EDITIONS

Et en conséquence :

' JUGER Monsieur [T] [R] IRRECEVABLE en ses demandes à l’encontre de EVIDENCE EDITIONS ;

' DEBOUTER Monsieur [T] [R]

A titre subsidiaire :

' JUGER l’absence de rencontre des volontés entre Monsieur [T] [R] et EVIDENCE EDITIONS

' JUGER l’absence de contrat conclu

Et en conséquence :

' DEBOUTER Monsieur [T] [R] de sa demande d’exécution forcée

A titre infiniment subsidiaire :

' JUGER que Monsieur [T] [R] a commis des manquements contractuels

Et en conséquence :

' JUGER que l’exception d’inexécution opposée par EVIDENCE EDITION au paiement de la facture de Monsieur [T] [R] est légitime ;

OU

' JUGER que le prix des prestations fournies par Monsieur [T] [R] doit être réduit à plus juste proportion ;

En tout état de cause :

' JUGER que les manquements contractuels de Monsieur [T] [R] ont causé un préjudice à EVIDENCE EDITIONS ;

Et en conséquence :

' CONDAMNER Monsieur [T] [R] à payer la somme de 5.000 € à EVIDENCE EDITIONS en réparation de son préjudice résultant des manquements contractuel de Monsieur [T] [R].

' DEBOUTER Monsieur [T] [R] de toutes demandes, fins et conclusions ;

' CONDAMNER Monsieur [T] [R] à verser à la société EVIDENCE EDITIONS la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens'.

Elle a maintenu :

— que l’assignation avait été mal dirigée, les échanges étant selon elle intervenus entre l’intimé et la société Libertine Editions ;

— [T] [R] n’avait pas qualité à agir, l’activité d’auto-entrepreneur éditeur de logiciels ayant été radiée le 21 février 2002 ;

— ne pas avoir contracté avec [T] [R] qui l’avait sollicitée ;

— être subsidiairement fondée à opposer l’exception d’inexécution et à solliciter une réduction du prix, le logiciel élaboré par l’intimé ayant dysfonctionné ;

— que ces manquements avaient été pour elle source d’un préjudice, un nouveau site ayant dû être développé par la société Studio Vitamine.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 janvier 2023, [T] [R] a demandé de :

'Vu les dispositions de l’article 1103 du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article 1787 du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article 1104 du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article 1101 du Code Civil,

Vu les dispositions de l’article 1113 du Code Civil,

Vu l’article 1240 du code civil

Vu l’article 9 du cpc ,

Vu la jurisprudence,

Vu la mise en demeure en date en date du 25 avril 2019,

Vu le jugement du Tribunal de commerce en date du 12 mars 2021

RECEVOIR Monsieur [T] [R] en ses demandes et l’en déclarer bien fondé.

DEBOUTER la Société EVIDENCE EDITIONS de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Confirmer la décision du Tribunal de commerce en date du 12 Mars 2021 en ce qu’elle a :

Débouté la société EVIDENCE EDITION de sa demande de juger l’assignation de Monsieur [T] [R] comme mal dirigée.

A considéré recevable et fondé l’action de Monsieur [R] en ses demandes de condamnation de la société Evidence EDITION au paiement de la somme de 8000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 avril 2019.

A considéré fondé la demande de condamnation de la Société EVIDENCE EDITION au paiement de des frais de procédure et l’a condamné au paiement de la somme de 1200 euros par application des dispositions de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Par voie de conséquence :

CONDAMNER la Société EVIDENCE EDITIONS au paiement de la somme de 8 000 € au titre des prestations effectuées pour la réalisation du site internet, somme qui sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 25 avril 2018.

CONDAMNER la Société EVIDENCE EDITIONS au paiement de la somme de 1200 € par application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER la Société EVIDENCE EDITIONS aux entiers dépens.

Pour le surplus

Sur la demande de dommage et intérêts de Monsieur [T] [R] au visa de l’article 1240 du code civil

Réformer la décision intervenue en ce qu’elle a débouté Monsieur [T] [R] de sa demande de dommages intérêts.

En conséquence condamné LA Société EVIDENCE EDITION au paiement de la somme de 2000 euros à titre de dommages et intérêts par application des dispositions de l’article 1240 du code civil

Sur les frais de procédure d’appel

Condamner la Société Evidence Edition au paiement de la somme de 6000 euros par application des dispositions de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens'.

Il a soutenu :

— la recevabilité de son action à l’encontre de la société Evidence Editions avec laquelle il avait échangé ;

— que le contrat conclu entre cette société et lui-même avait eu pour objet le développement d’un site internet, au prix hors taxes de 8.000 € ;

— que le site avait été livré le 11 novembre 2018 ;

— que les manquements allégués n’étaient pas établis ;

— que la demande de réduction du prix de sa prestation n’était pour ces motifs pas fondée ;

— que le comportement de l’appelante avait été pour lui source d’un préjudice devant être indemnisé.

L’ordonnance de clôture est du 13 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A – SUR LA RECEVABILITE

L’article 30 du code de procédure civile dispose que :

'L’action est le droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.

Pour l’adversaire, l’action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention'.

L’article 32 du même code précise que : 'Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir'.

Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile : 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

1 – sur la qualité à agir

[T] [R] soutient avoir contracté avec la société Evidence Editions.

Il a été immatriculé au registre du commerce et des sociétés tenu au greffe du tribunal de commerce de Saint-Brieuc à compter du 8 juin 2001 et radié le 21 février 2002 au motif suivant : 'Cessation d’activité dans le ressort'. L’activité déclarée, en nom personnel, avait pour objet la création, la conception et le développement de produits multimédia. Il a produit un justificatif d’une inscription ou d’une réinscription au répertoire des entreprises et des établissements (Sirène) à compter du 1er novembre 2018. L’activité exercée est la programmation informatique.

Ces formalités sont sans incidence sur la personnalité juridique de [T] [R], personne physique ayant exercé en son nom et non sous une forme sociale, et sur sa capacité à contracter.

[T] [R] a dès lors, indépendamment du bien fondé de ses prétentions, qualité pour agir.

2 – sur la qualité à défendre

La société Evidence Editions soutient que les échanges ont concerné la société Libertine Editions.

Hormis un courrier de mise en demeure à en-tête de Libertine Editions non daté mais postérieur toutefois à la mise en demeure de payer de [T] [R] qu’il mentionne, dont les preuves d’envoi et de réception ne sont pas produites, l’ensemble des échanges a été effectué par courriers électroniques entre les adresses [Courriel 7] et [Courriel 6], adresse de courrier électronique de [T] [R].

Il s’ensuit que ce dernier est recevable à agir à l’encontre de la société Evidence Editions avec laquelle il a correspondu, au motif qu’elle serait sa cocontractante.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu’il a rejeté de la demande de l’appelante de déclarer l’assignation mal dirigée et déclaré l’action de [T] [R] recevable.

B – SUR LA RELATION CONTRACTUELLE

1 – sur un contrat

L’article 1101 du code civil dispose que : 'Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations’ et l’article 1102 que : 'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits'.

L’article 113 du même code dispose que :

'Le contrat est formé par la rencontre d’une offre et d’une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s’engager.

Cette volonté peut résulter d’une déclaration ou d’un comportement non équivoque de son auteur'.

L’article 1172 alinéa 1er rappelle que : 'Les contrats sont par principe consensuels'. L’accord des volontés suffit à créer la convention, le principe du consensualisme n’imposant pas, sauf exception légale ou réglementaire, que cet accord soit constaté par un écrit.

Par courriel en date du 16 juillet 2018, [T] [R] a proposé à [O] [R] la conception d’un site internet. Par courriel en date du 25 juillet 2018, [I] [M], directrice générale d’Evidence Editions, a exprimé 'nos envies pour 'Libertine Editions'. Par courriel en date du 27 juillet suivant, [T] [R] a chiffré à 8.000 € hors taxes sa prestation. Par courriel en date du 4 août 2018, il a décrit l’architecture du futur site.

[O] [R], ès qualités de président d’Evidence Editions, [I] [M], directrice générale d’Evidence Editions et [T] [R] ont postérieurement échangé par courriels sur l’aspect du site en construction, son contenu, les besoins, la teneur des messages à adresser aux clients. Par courriel en date du 14 octobre 2018, [T] [R] a transmis 'la liste effectée des modifications demandées lors de la présentation de dimanche 7.10.18". Par courriel en date du 10 novembre 2018, il a indiqué que le site serait sous peu achevé. Par courriel du même jour comportant le logo d’Evidence Editions, [O] [R] et [I] [M] en leur qualité de dirigeants de cette société, ont répondu en ces termes : 'Super, nous avons notre calendrier 2019 qui arrive semaine prochaine et que nous allons mettre en ligne. On espère qu’on arrivera à gérer cela et les promos sur la boutique'.

Le site a été livré par courriel en date du 11 novembre 2018, comportant en pièces jointes les documents nécessaires à son fonctionnement.

Les échanges se sont poursuivis postérieurement. Un courriel de la société Evidence Editions a ainsi été adressé le 22 novembre 2018 à [T] [R], suggérant diverses modifications et adaptations du site livré.

Il résulte de ces développements que [T] [R] a en contrepartie du paiement du prix de sa prestation d’un montant hors taxes de 8.000 € auquel s’engageait la société Evidence Editions, convenu avec cette dernière de la réalisation d’un site internet 'Libertine éditions'.

Les courriels en date du 3 août 2018 échangés entre les parties (18 h 48 et 18 h 53) évoquant la possibilité d’une rémunération calculée sur le chiffre d’affaires, puis celui postérieur (19 h 18) en date du même jour de [T] [R] relatif à un paiement éventuellement fractionné (4 x 2.000 €) ne sont pas de nature à remettre en cause l’accord sur la chose et sur le prix intervenu.

2 – sur l’exécution du contrat

L’article 1104 du code civil dispose que : 'Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi'.

Aux termes de l’article 1217 du même code :

'La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

— refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;

— poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;

— obtenir une réduction du prix ;

— provoquer la résolution du contrat ;

— demander réparation des conséquences de l’inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter'.

a – sur l’exception d’inexécution

L’article 1219 du code civil dispose que : 'Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave'.

[T] [R] a exécuté son obligation principale en livrant le site internet.

Les dysfonctionnements allégués ne sont pas d’une gravité telle qu’ils justifient que l’appelante retienne le prix du contrat.

b – sur la réduction du prix

L’article 1223 alinéa 1er du code civil dispose que :

'En cas d’exécution imparfaite de la prestation, le créancier peut, après mise en demeure et s’il n’a pas encore payé tout ou partie de la prestation, notifier dans les meilleurs délais au débiteur sa décision d’en réduire de manière proportionnelle le prix. L’acceptation par le débiteur de la décision de réduction de prix du créancier doit être rédigée par écrit'.

Les dysfonctionnements allégués du site n’ont pas été constatés par huissier de justice.

Ils ont postérieurement à la livraison du site été décrits dans deux courriels. Celui en date du 22 novembre 2018 adressé à l’intimé décrit des difficultés mineures, la plus importante étant le dysfonctionnement du bouton 'accueil’ du site. Celui en date du 21 février 2019 indique que :

'… nous avons quelques soucis avec le site.

Personne ne reçoit mes mails de réception de manuscrit, de mise en lecture et de validation ou de refus,

De plus, nous avons une commande mais impossible d’imprimer une facture… et sur ce document, il n’y a pas de frais de port.

On devait pouvoir faire les frais de port offerts à tout moment pour un ou plusieurs clients mais aussi faire comme les promos, mettre les frais de ports offerts. Nous devions le faire pour le salon du livre et du coup, personne n’a commandé car le but était d’avoir les FDP offerts.

Pour les précommandes, il n’y a pas de date buttoir et donc on doit revenir sur le site pour le passer en vente, hors ce n’est possible sinon on doit se faire des rappels sur toutes nos ventes.

[…]

On a eu pas mal de remontées sur le site et des soucis, on t’en parle plus tard'.

Il n’a pas été justifié de ces remontées sur le site des soucis mentionnés à ce courriel.

Aucun élément des débats n’établit que ces dysfonctionnements ont fondé de confier à la société Studio Vitamine la 'duplication de la boutique en ligne https://www.evidence-boutique.com/ afin de créer le site http://www.libertine-editions.fr'. Au surplus, seul un devis non accepté en date du 25 mars 2019 (n° D-20190325-01482) a été produit et non une facture.

Les dysfonctionnements allégués, mineurs, ne sont pas de nature à justifier une baisse du prix de la prestation réalisée par [T] [R].

c – sur le comportement de [T] [R]

L’appelante soutient que celui-ci aurait proféré des menaces verbales ou écrites et aurait modifié les mots de passe de divers comptes (Facebook, 'back office’ marchand) et l’adresse de son compte Twitter. Il ne résulte toutefois nullement des documents produits que ces modifications, qui au surplus n’ont pas généré de préjudice, sont imputables à l’intimé.

Les propos emportés, voire grossiers imputés à [T] [R] sont sans incidence sur l’exécution du contrat et ne sont pas à l’origine d’un préjudice avéré.

Il résulte des développements précédents que ce dernier est fondé à demander paiement à la société Evidence Editions de la somme de 8.000 €. Le jugement sera pour ces motifs confirmé de ce chef.

C – SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS DE [T] [R]

L’article 1231-6 du code civil dispose que :

'Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d’aucune perte.

Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l’intérêt moratoire'.

L’intimé ne justifie pas d’un préjudice subi indépendant du retard de paiement que viennent réparer les intérêts moratoires. Sa demande présentée sur le fondement de l’article 1231-6 précité n’est en conséquence pas fondée.

Le jugement sera pour ces motifs confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.

D – SUR LES DEMANDES PRÉSENTÉES SUR LE FONDEMENT DE L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE

Le premier juge a équitablement apprécié l’indemnité due sur ce fondement par l’intimée.

Les circonstances de l’espèce ne justifient pas de faire droit aux demandes présentées sur ce fondement devant la cour

E – SUR LES DÉPENS

La charge des dépens d’appel incombe à l’appelante.

PAR CES MOTIFS,

statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement du 12 mars 2021 du tribunal de commerce de La Rochelle ;

REJETTE les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Evidence Editions aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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