Cour d'appel de Toulouse, 4 juin 2007, n° 06/02991

  • Piscine·
  • Eau de javel·
  • Maçonnerie·
  • Support·
  • Chlore·
  • Traitement·
  • Préjudice de jouissance·
  • Sociétés·
  • Expert·
  • Préjudice

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 4 juin 2007, n° 06/02991
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 06/02991
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Montauban, 17 avril 2006, N° 05/1648

Texte intégral

04/06/2007

ARRÊT N°

N°RG: 06/02991

CF/CD

Décision déférée du 18 Avril 2006 – Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN – 05/1648

R. DUMAINE

SA IRRIJARDIN

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

C/

A X

représenté par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1re Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATRE JUIN DEUX MILLE SEPT

***

APPELANTE

SA IRRIJARDIN

XXX

XXX

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour

assistée de Me Daniel SAGARD, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur A X

XXX

XXX

représenté par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE, avoués à la Cour

assisté de la SCP CAMBRIEL, GOURINCHAS, DE MALAFOSSE, STREMOOUHOFF, avocats au barreau de TARN ET GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 27 Mars 2007 en audience publique, devant la Cour composée de :

O. COLENO, conseiller faisant fonction de président

C. FOURNIEL, conseiller

A. FAVREAU, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par O. COLENO, conseiller, et par E. KAIM-MARTIN, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

Au cours du premier semestre 1999 monsieur A X a acheté à la société IRRIJARDIN divers matériels nécessaires à la construction d’une piscine sur sa propriété sise à XXX

L’ouvrage qu’il a construit par ses propres moyens a été mis en service au début de l’été 1999.

A la fin de la saison quelques taches brunes sont apparues sur le liner, puis ont disparu jusqu’à la saison suivante, où elles ont réapparu de façon persistante.

Monsieur X a demandé conseil à la société IRRIJARDIN puis a fait appel à un expert le cabinet Y qui a constaté la présence de taches multiples, brunes, sur la totalité du bassin, et leur réapparition malgré la mise en oeuvre d’un traitement par eau de javel.

La société IRRIJARDIN qui ne s’était pas présentée aux opérations d’expertise, a répondu à la mise en demeure de l’expert que la disparition momentanée des taches lors de l’injection d’acide entre le liner et le support établissait la présence d’une bactérie derrière le liner.

Elle a préconisé la baisse du PH, la réalisation d’une chloration choc, ainsi que la mise du bassin dans le noir complet durant 10 jours, avec si possible maintien de la température de l’eau à moins de 15 °C, et ce à la date du 10 août 2004.

Monsieur X a sollicité en référé une mesure d’expertise judiciaire, qui a été ordonnée le 21 décembre 2004.

L’expert monsieur Z a déposé son rapport le 7 avril 2005.

Par acte d’huissier du 26 mai 2005, monsieur X a fait assigner la SA IRRIJARDIN en déclaration de responsabilité pour manquement à son devoir d’information et de conseil, et en réparation du préjudice subi du fait des désordres.

Suivant jugement en date du 18 avril 2006, le tribunal de grande instance de MONTAUBAN a considéré que la société IRRIJARDIN avait manqué à son devoir de renseignements et de conseil vis à vis de monsieur X, et a en conséquence :

— déclaré la SA IRRIJARDIN responsable des préjudices subis par monsieur X ;

— condamné la SA IRRIJARDIN à payer à monsieur X la somme de 3.100 euros en réparation des désordres, ainsi que celle de 1.000 euros pour le préjudice de jouissance ;

— débouté monsieur X de sa demande de remplacement ou de paiement de la bâche ;

— condamné la SA IRRIJARDIN à lui verser la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, ordonné l’exécution provisoire du jugement, et condamné la SA IRRIJARDIN aux dépens.

Par déclaration en date du 21 juin 2006 dont la régularité et la recevabilité ne sont pas discutées, la SA IRRIJARDIN a relevé appel de ce jugement.

Elle demande à la cour de débouter monsieur X de l’ensemble de ses demandes, et de le condamner au paiement des sommes de 3.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la procédure dilatoire engagée en lecture de rapport, 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction pour ceux d’appel au profit de la SCP SOREL-DESSART-SOREL.

La société appelante fait valoir que l’expert ne retient aucune faute à son encontre, mais au contraire la pleine responsabilité du demandeur, et que seule la faute de monsieur X dans la construction de la maçonnerie de la piscine a entraîné les désordres.

Elle affirme qu’elle a entièrement rempli son obligation d’information et de conseil lors de la vente grâce à plusieurs supports proposés dans son catalogue, que monsieur X s’est estimé suffisamment informé et compétent pour mettre seul en oeuvre et suivant ses propres initiatives les éléments qu’il lui avait achetés, que le liner a été livré avec un bon de garantie du fournisseur dans lequel il est indiqué que le support ou structure sur laquelle le liner est posé doit être perméable, que contrairement à ce qu’a indiqué le tribunal la piscine du demandeur n’est pas une piscine 'Flamingo’ comprenant des blocs coffreurs, mais une piscine de maçonnerie traditionnelle, et que ce dernier ne prouve pas qu’elle a été son seul fournisseur.

La société IRRIJARDIN ajoute qu’elle a fourni un conseil afin de connaître l’origine des taches et trouver une solution durable, mais que monsieur X l’a refusé, que la preuve qu’elle ait conseillé l’injection d’eau de javel n’est pas rapportée, que l’analyse de l’eau a démontré une teneur en chlore très élevée, que seul le mauvais entretien de la piscine par monsieur X est en cause dans la dégradation du liner et des pièces à sceller, et qu’il n’existe aucun préjudice de jouissance.

Monsieur X conclut à la confirmation du jugement, et à la condamnation de la société IRRIJARDIN au paiement d’une somme supplémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’appel dont distraction au profit de la SCP BOYER-LESCAT-MERLE.

L’intimé soutient que le bon de garantie ne lui a jamais été fourni, ni lors de la livraison du liner, ni avant l’implantation de celui-ci, que la société IRRIJARDIN ne démontre pas lui avoir donné l’information qui lui incombait relative à la nature du support du liner qui doit être non étanche, qu’elle a engagé sa responsabilité contractuelle de ce chef, mais aussi en lui fournissant ensuite des conseils de traitement inappropriés.

Il précise qu’il a subi un préjudice esthétique tenant à la multiplication des taches marrons sur le liner, à la décoloration des pièces scellées et de la bâche de protection, et un préjudice de jouissance du fait de l’agressivité particulière pour la peau du surdosage en eau de javel et en chlore de l’eau du bassin.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 27 mars 2007.

* * *

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la responsabilité de la société IRRIJARDIN

L’expert judiciaire indique dans son rapport que les taches marrons sont causées par la prolifération d’algues qui se développent entre le liner et la structure maçonnée de la piscine et qui traversent la membrane microporeuse ;

que monsieur X a réalisé la maçonnerie en agglos de ciment, radier en béton, avec à l’intérieur un enduit hydraulique hydrofugé.

Il précise que la structure du bassin est trop étanche, que l’interface liner/maçonnerie recueille des eaux d’infiltration et de condensation due aux différences de température entre le sol et l’eau, et que ce milieu pratiquement humide en permanence est un terrain propice au développement des algues ;

que le traitement des zones contaminées à l’acide chlorhydrique ou à l’eau de javel est une solution dont l’efficacité est limitée dans le temps, et que la surchloration de l’eau ainsi que le maintien d’un PH bas ne peuvent être appliqués durablement.

Selon monsieur Z la solution consiste à perforer les parois du bassin.

Il souligne que la maçonnerie du bassin ne doit pas être étanche, et que le Groupement des Industries du plastique souple pour piscines (GIPSOP) affilié à la Fédération Nationale des constructeurs d’équipements de sports et de loisirs (FNCESEL) préconise dans un guide de recommandations pour la réalisation, la pose et l’entretien d’un liner de piscine : 'le support doit être perméable pour permettre l’évacuation des eaux de condensation. Il est souhaitable de faire subir au support un traitement antifongique en utilisant un produit approprié.'

La norme française FD T 54-802 relative aux liners pour piscines comporte également des recommandations relatives à la non étanchéité du bassin.

Monsieur Z conclut que l’origine du désordre provient d’un excès de qualité dans la construction du bassin, monsieur X ayant pensé qu’une étanchéité quasi parfaite des parois pouvait améliorer la destination de l’ouvrage ;

que le défaut de porosité des murs et du radier a conduit à la formation de zones confinées, à humidité permanente, favorisant le développement de micro organismes, phénomène irréversible, et que les différents traitements appliqués ont dégradé la membrane d’étanchéité en PVC.

Il ressort des conclusions expertales que monsieur X a fait une erreur en réalisant une maçonnerie étanche.

La SA IRRIJARDIN a vendu pour un prix d’environ 30.000 francs à monsieur X un ensemble d’éléments destinés à la mise en oeuvre d’une piscine, et notamment un liner ainsi qu’une thibaude géotextile.

Le vendeur professionnel a une double obligation de renseignement et de conseil quant aux caractéristiques et aux conditions d’utilisation correcte du matériel qu’il commercialise.

Il lui appartient, afin que la vente soit conclue en connaissance de cause, de s’informer sur les besoins de son acheteur et de le renseigner ensuite sur les contraintes techniques de la chose vendue.

Il incombe au vendeur professionnel de prouver qu’il a exécuté cette obligation.

En l’espèce le catalogue IRRIJARDIN détaille les étapes de réalisation de la piscine, fournit des détails techniques sur l’usage et la composition du liner PVC, mais n’attire pas l’attention des acheteurs-utilisateurs sur la nécessité d’assurer la non étanchéité du support, alors que cette qualité à donner à la structure n’est pas évidente pour un non professionnel de ce type d’ouvrage, ce qui est le cas de monsieur X.

La société IRRIJARDIN ne démontre pas qu’elle a délivré cette information à son client.

Elle prétend pour la première fois en cause d’appel que cette indication figure sur le bon de garantie du fournisseur qui aurait été joint au liner lors de la livraison.

Monsieur X conteste avoir été destinataire de ce bon de garantie.

La lettre du 12 mars 2007 du fournisseur attestant que tous les liners sont conditionnés dans un carton à l’intérieur duquel est joint un bon de garantie, ne suffit pas à rapporter la preuve qu’en 1999 monsieur X a bien été en possession d’un tel document avant de réaliser la maçonnerie de sa piscine.

La société IRRIJARDIN, qui connaissait nécessairement le type de piscine choisi par monsieur X dans son catalogue, devait l’informer de la nécessité de réaliser une maçonnerie non étanche, ou si elle était déjà construite, rechercher une solution pour pallier les inconvénients liés à l’étanchéité avant la pose du liner.

Elle n’a manifestement pas satisfait à cette obligation.

Le premier juge a estimé à juste titre que la société IRRIJARDIN avait manqué à son devoir de renseignement et de conseil lors de la vente.

En ce qui concerne l’attitude ultérieure de la société appelante, celle-ci conteste avoir conseillé à monsieur X d’injecter de l’eau de javel entre le liner et la maçonnerie.

Cependant force est de constater que lors de la réunion contradictoire du 22 février 2005, à laquelle assistait un représentant du service technique d’IRRIJARDIN, il a été mentionné que monsieur X avait injecté de l’eau de javel entre la membrane et la structure maçonnée de la piscine sur les conseils de la société IRRIJARDIN, et que l’expert n’a reçu aucune observation de la part de celle-ci sur ce point.

Il n’est pas discuté qu’un tel traitement est inefficace à moyen et long terme, et qu’il a pour inconvénient de dégrader la membrane d’étanchéité.

La société IRRIJARDIN reconnaît le conseil donné par lettre du 10 août 2004 : abaissement du PH, chloration choc, bassin dans le noir pendant 10 jours et eau à moins de 15°.

Il ne peut être reproché à l’intimé de ne pas avoir suivi ce conseil, jugé irréalisable en été par l’expert judiciaire.

La société IRRIJARDIN a donc fourni des conseils de traitement qui n’étaient pas appropriés.

Il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré la SA IRRIJARDIN responsable des préjudices subis par monsieur X.

Sur les préjudices

L’expert a évalué à 3.100 euros le coût des travaux de réparation.

Cette évaluation n’est pas contestée, et a été justement retenue.

Les taches apparues sur le liner, surtout en partie basse du bassin, ont un aspect peu esthétique mais n’ont pas empêché une utilisation normale de la piscine.

Monsieur X n’établit pas que le surdosage en eau de javel et en chlore de l’eau du bassin ait eu des conséquences néfastes pour les utilisateurs de la piscine.

Il n’est donc pas justifié d’un préjudice de jouissance indemnisable.

Ce chef de demande sera rejeté.

Le rejet de la demande relative à la dégradation de la bâche n’est pas remis en cause.

Sur les demandes annexes

L’indemnité allouée au demandeur sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile sera maintenue.

Il n’y a pas lieu de faire application de ces dispositions en cause d’appel.

Sur les dépens

La SA IRRIJARDIN a été condamnée à bon droit aux dépens de première instance.

Succombant au principal en ses prétentions devant la cour, elle supportera les dépens d’appel.

* * *

PAR CES MOTIFS

La cour

En la forme, déclare l’appel régulier,

Au fond, réformant le jugement,

Déboute monsieur X de sa demande d’indemnisation d’un préjudice de jouissance,

Confirme le jugement en ses autres dispositions,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile en cause d’appel,

Condamne la SA IRRIJARDIN aux dépens de l’instance d’appel , dont distraction au profit de la SCP BOYER-LESCAT-MERLE , avoué à la cour.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Toulouse, 4 juin 2007, n° 06/02991