Cour de cassation, Chambre civile 1, 9 juin 2011, 10-13.570, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il incombe à celui qui invoque l’abus notoire dans l’usage ou le non-usage du droit de divulgation d’une oeuvre posthume de la part du représentant de l’auteur décédé d’en rapporter la preuve Il résulte de l’article L. 331-4 du code de la propriété intellectuelle que la reproduction, dans des conclusions, de certaines lettres en vue d’établir, lors d’une procédure judiciaire, l’intérêt de la publication de l’ensemble de la correspondance de leur auteur et, partant, le caractère abusif du refus de cette publication par le représentant de l’auteur décédé, n’a pas à être soumise à l’autorisation de celui-ci non plus qu’à celle du juge de la mise en état Ne peuvent justifier une condamnation à indemnisation en raison de leur caractère prétendument diffamatoire, les passages de conclusions déposées lors d’une instance judiciaire, tendant à fonder les prétentions de la partie concernée

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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 9 juin 2011, n° 10-13.570, Bull. 2011, I, n° 109
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 10-13570
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin 2011, I, n° 109
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 3 décembre 2009
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000024174451
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2011:C100599
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu que M. Gilles X… et Mme Paule X…(les consorts X…), ayant formé le projet de faire publier la correspondance échangée, durant plus de vingt années, entre René

Y…

et leur mère, Tina Z…, ainsi qu’entre l’écrivain et leur grand-mère, Maria Z…, et eux-mêmes et s’étant heurtés au refus de Mme Marie-Claude A… épouse

Y…

, instituée par son mari, selon un testament olographe du 14 mars 1987, légataire universelle et chargée, avec Tina Z…, légataire particulier de certains biens, de veiller à l’ensemble de son oeuvre, ont fait assigner Mme

Y…

pour être autorisés à faire publier cette correspondance, en prétendant que le refus opposé par l’exécuteur testamentaire constituait un abus notoire dans l’exercice du droit moral dont elle était investie ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de Mme

Y…

, pris en sa première branche :

Vu l’article 1315 du code civil, ensemble les articles L. 121-2 et L. 121-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que pour dire abusif l’usage fait par Mme

Y…

de son droit de divulgation en refusant la publication des lettres échangées entre René

Y…

et Tina Z…, l’arrêt retient que lorsque la personne investie du droit de divulgation post mortem, qui ne dispose pas d’un droit absolu mais doit exercer celui-ci au service des oeuvres et de leur promotion, conformément à la volonté de l’auteur, s’oppose à cette divulgation, il lui incombe de justifier de son refus en démontrant que l’auteur n’entendait pas divulguer l’oeuvre en cause et que sa divulgation n’apporterait aucun éclairage utile à la compréhension et à la valorisation des oeuvres déjà publiées ;

Qu’en inversant ainsi la charge de la preuve, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident des consorts X…, pris en sa première branche :

Vu l’article L. 331-4 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que, pour condamner les consorts X… à indemniser Mme

Y…

en raison de la reproduction, dans leurs conclusions, de plusieurs lettres et donc de leur divulgation, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que ces lettres avaient été reproduites sans l’autorisation de Mme

Y…

et sans en avoir demandé l’autorisation au juge de la mise en état et que, si la demande de production de tels documents se heurtant au secret des correspondances avait été faite, le juge de la mise en état l’aurait vraisemblablement accueillie mais en la limitant dans son volume et en fixant le mode de production, à savoir en pièces communiquées et non dans le corps des conclusions ;

Qu’en statuant ainsi, après avoir retenu que la production de ces lettres était utile à la démonstration qu’entendaient faire les consorts X… de l’intérêt de la publication de ces documents pour mieux comprendre René

Y…

, quand la production et la reproduction desdites lettres n’étaient pas soumises à l’autorisation du juge de la mise en état, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du même pourvoi incident :

Vu l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Attendu que, pour condamner les consorts X… à indemniser Mme

Y…

, l’arrêt retient le caractère diffamatoire des passages de leurs conclusions insinuant qu’elle a oeuvré pour laisser perdre certains documents et pour faire disparaître toutes traces des autres compagnes ou amantes de René

Y…

;

Qu’en statuant ainsi, quand les passages incriminés, produits devant la juridiction saisie, tendaient à fonder le caractère abusif du refus de publication imputé à Mme

Y…

par les consorts X…, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 4 décembre 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon ;

Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son propre pourvoi ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme A… veuve

Y…

.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué infirmatif d’avoir rejeté la demande de Mme Marie-Claude

Y…

tendant à faire interdiction à M. B… et Mme Paule X… de divulguer, sous quelque forme que ce soit, le contenu des lettres écrites par René

Y…

à Tina Z…, ses enfants et sa mère, ainsi que les lettres adressées à René

Y…

par Tina Z…, et à voir condamner in solidum M. B… et Mme Paule X… à lui verser la somme de 10. 000 euros en réparation du préjudice subi à raison de la divulgation des lettres de René

Y…

à Tina Z…, d’avoir donné acte à M. B… et Mme Paule X… qu’ils entendent faire publier un choix de lettres échangées entre René

Y…

et Tina Z…, qui rendent compte de leur relation et, de façon privilégiée, de leur collaboration intellectuelle, d’avoir dit qu’en opposant un refus à la publication par M. B… et Mme Paule X… d’un tel choix de lettres, Mme Marie-Claude

Y…

a fait un usage abusif du droit de divulgation dont elle est investie, de l’avoir en conséquence condamnée à verser à M. B… et à Mme Paule X… la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts, et d’avoir procédé à la fixation des droits d’auteur en disant que les droits d’auteur à provenir de la publication de ces lettres seront partagés par moitié entre les parties ;

Aux motifs que « aux termes de l’article L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle sur le fondement duquel l’action est engagée, " En cas d’abus notoire dans l’usage ou le non-usage du droit de divulgation de la part des représentants de l’auteur décédé visée à l’article L 121-2, le Tribunal de grande instance peut ordonner toute mesure appropriée ; qu’il suit que la personne investie du droit de divulgation post mortem ne dispose pas d’un droit absolu mais doit exercer celui-ci au service des oeuvres et de leur promotion, conformément à la volonté de leur auteur telle qu’elle a pu s’exprimer de son vivant et telle qu’elle a pu en avoir connaissance ; que lorsqu’elle s’oppose à la divulgation, il lui incombe alors de justifier de son refus en démontrant que l’auteur n’entendait pas divulguer l’oeuvre en cause et que sa divulgation n’apporterait aucun éclairage utile à la compréhension et à la valorisation des oeuvres déjà publiées ; qu’en l’espèce Madame C… expose que René

Y…

s’est toujours montré extrêmement réservé sur sa vie privée, et refusa tout entretien ou interview qui puisse en faire état, que s’il a fait don à la Bibliothèque Littéraire Jacques

D…

de ses archives et de celles de Yvonne E… avec qui il eut une relation très amoureuse et avec laquelle il entretint une correspondance de 1947 à 1970, il a donné des instructions « communication réservée jusqu’en 2025 » et « communication réservée jusqu’en 1995 des manuscrits, lettres à des tiers ayant un caractère polémique »… " Enfin, en ce qui concerne toutes les lettres, en particulier celles de Victor F…, de Nicolas G…, dont je suis le destinataire, leur autorisation ou celle de mes exécuteurs testamentaires Telles sont les conditions de la donation du fonds René

Y…

et du fonds Yvonne E… à l’Université de Pans pour la Bibliothèque

D…

5 mars 1970 ", qu’il agit de même avec des instructions plus précises s’agissant de sa correspondance avec André H…; qu’elle ajoute que lorsque Y… donnait l’autorisation de publier quelques unes de ses lettres, il le faisait toujours après s’être assuré du contexte de la publication et de l’objectif poursuivi ; qu’il avait en outre pour habitude de regrouper certaines des lettres qu’il recevait en les plaçant dans des enveloppes de réexpédition sur lesquelles il portait diverses mentions manuscrites telles « secret » ou « Lettres » T mai 1960 « A brûler sans ouvrir au cas ou je mourrais » ; que parmi celles-ci se trouvaient des lettres de Tina Z…; qu’elle ajoute que si René

Y…

l’a désignée en qualité d’exécuteur testamentaire, c’est en raison de la confiance qu’il lui accordait pour respecter sa volonté et décider à sa place de divulguer ou non ses oeuvres posthumes, ce qu’elle s’applique à faire en évitant surtout de mettre la vie privée de l’auteur en avant de son oeuvre ; que cependant René

Y…

dont l’oeuvre a été publiée de son vivant dans la collection « La Pléiade » n’ignorait pas l’intérêt que pouvait présenter la publication de l’abondante correspondance qu’il avait entretenue avec des personnalités les plus diverses et avec ses compagnes, et que certaines des lettres révélaient sa vie privée ; qu’ainsi, dans l’ouvrage intitule Rencontres avec René

Y…

(Corti 1991) que lui consacra Jean I…, il devait préciser ses intentions en se démarquant d’une publication consacrée à Saint John Perse qui faisait la part belle à un ensemble de discours, d’hommages et de correspondances ; qu'" ce qui me concerne, je réduirai au maximum ce qui n ‘ est pas ma poésie proprement dite. Quant à ma correspondance, je n’en consens pas de copies, sauf exception/ On retrouvera mes lettres, ici ou là, après ma mort. Comme j’ai gardé beaucoup de celles que j’ai reçues, ça pourrait faire un second volume de la Pléiade, à titre posthume " page 227 ; qu’en outre, le caractère privé et intime de sa correspondance avec Yvonne E… n’a pas été un obstacle à son versement a la Bibliothèque littéraire

D…

; qu’il a simplement mentionné « communication réservée jusqu’en 2025 » ; que pour d’autres correspondances, Y… a manifesté clairement ses intentions à Edmond J… par exemple (« Je vous demande de bien vouloir me communiquer ce que vous aurez préféré ») ; qu’il suit que Y… était pleinement conscient du fait que sa correspondance allait inévitablement faire l’objet de demandes de publication après son décès, que quand bien même pouvait-il estimer qu’elle présentait un intérêt littéraire secondaire-ce qui n’aurait pas été un moyen suffisant pour en interdire la publication-, ou qu’elle pouvait témoigner de sa vie privée, il n’a pris aucune disposition générale la concernant et n’a manifesté sa volonté d’en retarder la communication au public que pour celle qu’il a entretenue avec Yvonne E…; qu’il n’a d’évidence pas voulu soustraire à un projet de publication la correspondance qu’il a échangée avec Tina Z… alors que tant pai son volume que par la personnalité de Tina Z… qu’il désigne dans son testament comme « sa collaboratrice littéraire », il était vraisemblable qu’elle allait appeler un projet de publication ; qu’enfin s’il a pu classer certaines des lettres qu’il recevait dans des enveloppes sur lesquelles il portait la mention « à brûler » ou « à ne pas ouvrir », il n’est pas établi que ces enveloppes aient contenu des lettres de Tina Z…; qu’au surplus, l’intimée qui précise avoir scrupuleusement respecté la volonté de Y… ne prétend pas qu’elle ne s’est pas conformée aux instructions figurant sur les enveloppes ; que s’agissant de l’intérêt de la publication envisagée qui comme le souhaitent les appelants, rendra compte de façon privilégiée de la collaboration intellectuelle et littéraire des correspondants, Madame

Y…

peut d’autant moins le contester qu’elle même déclara « il reste la correspondance qui est comme une antichambre de son oeuvre, qui devra peu à peu voir le jour » (revue TDC, n° 931- pièce 27) ; qu’en conséquence, le refus qu’elle oppose au projet de publication ne peut qu’être qualifie d’abusif au sens de l’article L 121-3 précité ; qu’il convient de la condamner à verser aux appelants la somme de 1 euro a titre de dommages et intérêts ; que par ailleurs le contenu de l’oeuvre n’étant pas encore arrêté, il ne sera pas fait droit à la demande d’autorisation de sa publication, qu’en revanche, il sera donné acte aux appelants qu’ils feront un choix qui rendra compte de la relation des correspondants et qui privilégiera leur collaboration intellectuelle » ;

Alors que, de première part, l’exercice du droit de divulgation d’une oeuvre posthume par le représentant de l’auteur décédé ne peut être contesté en justice qu’en cas d’abus notoire dans l’usage ou le non-usage de ce droit ; qu’il appartient à celui qui conteste l’exercice du droit de divulgation par le représentant de l’auteur décédé de démonter que ce dernier n’a pas respecté la volonté exprimée par l’auteur de son vivant quant à la communication de son oeuvre au public ; qu’en retenant, pour justifier sa décision de dire que Madame Marie-Claude

Y…

avait abusé notoirement de son droit de divulgation en n’autorisant pas la publication de la correspondance intime échangée entre René

Y…

et Tina Z…, que « lorsqu’elle s’oppose à la divulgation, la personne investie du droit de divulgation post mortem doit justifier de son refus en démontrant que l’auteur n’entendait pas divulguer l’oeuvre en cause et que sa divulgation n’apporterait aucun éclairage utile à la compréhension et à la valorisation des oeuvres déjà publiées », alors qu’il appartenait en l’espèce aux Consorts X… de démontrer, pour justifier que Madame Marie-Claude

Y…

avait abusé notoirement de son droit de divulgation, que cette dernière ne s’était pas conformée à la volonté exprimée par René

Y…

de son vivant quant au sort de son oeuvre posthume, la Cour d’appel, qui a indûment inversé la charge de la preuve, a violé l’article 1315 du Code civil ;

Alors que, de seconde part, les décisions de divulgation des oeuvres posthumes prises par l’exécuteur testamentaire sont présumées respecter la volonté de l’auteur défunt ; que le représentant de l’auteur décédé n’abuse notoirement de son droit de divulgation que si la décision qu’il prend quant à la communication ou la noncommunication de l’oeuvre au public est manifestement contraire à la volonté de l’auteur ; qu’en retenant que le refus de Madame Marie-Claude

Y…

d’autoriser la publication de la correspondance intime échangée entre René

Y…

et Tina Z… doit être qualifié d’abus notoire dans l’exercice du droit de divulgation au motif que René

Y…

n’avait pris aucune disposition générale concernant sa correspondance privée et n’avait manifesté sa volonté d’en retarder la communication au public que s’agissant de la correspondance qu’il avait entretenue avec Yvonne E…, la Cour d’appel, qui n’a pas établi l’abus notoire dans le non-usage du droit de divulgation de la part de son exécuteur testamentaire, Madame Marie-Claude

Y…

, a violé par fausse application l’article L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle ;

Alors que, de troisième part, les décisions de divulgation des oeuvres posthumes prises par l’exécuteur testamentaire sont présumées respecter la volonté de l’auteur défunt ; que le représentant de l’auteur décédé n’abuse notoirement de son droit de divulgation que si la décision qu’il prend quant à la communication ou la noncommunication de l’oeuvre au public est manifestement contraire à la volonté de l’auteur ; que l’arrêt relève que René

Y…

a classé « certaines des lettres qu’il recevait dans des enveloppes sur lesquelles il portait la mention « à brûler » ou « à ne pas ouvrir » », et que, s’agissant de la correspondance privée et intime échangée entre René

Y…

et Yvonne E…, René

Y…

avait donné comme instruction de ne pas procéder à la communication de cette dernière avant l’année 2025 ; qu’en retenant que Madame Marie-Claude

Y…

a commis un abus notoire dans l’exercice de son droit de divulgation de l’oeuvre de René

Y…

en s’opposant à un projet de publication des lettres intimes échangées entre René

Y…

et Tina Z…, alors même qu’elle constatait que l’auteur s’était expressément opposé à la communication au public de sa correspondance personnelle, ou à tout le moins, qu’il n’admettait une telle communication qu’après une très longue période de secret, la Cour d’appel, qui n’a pas valablement tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 121-2 et L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle ;

Alors que, de quatrième part, Madame Marie-Claude

Y…

faisait valoir dans ses écritures d’appel, offres de preuve à l’appui, que la correspondance échangée entre René

Y…

et Tina Z… était une correspondance de nature amoureuse, et comme telle relevant de l’intime et de la vie privée des correspondants ; qu’en se bornant, pour dire que Madame Marie-Claude

Y…

avait notoirement abusé du droit de divulgation dont elle est investie en sa qualité d’exécuteur testamentaire de René

Y…

en s’opposant à la publication de cette correspondance, à faire état de « l’intérêt de la publication envisagée qui, comme le souhaitent les Consorts X…, rendra compte de façon privilégiée de la collaboration intellectuelle et littéraire » de René

Y…

et de Tina Z…, ce sans s’interroger sur la nature spécifiquement intime de cette correspondance et sans préciser, notamment, si le caractère intime de cette dernière ne justifiait pas la décision de refus de publication prise par Madame Marie-Claude

Y…

dans le cadre de l’exercice du droit de divulgation de l’oeuvre posthume de René

Y…

au regard de la volonté constante de l’auteur de ne pas voir sa vie privée dévoilée au public, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-2 et L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle ;

Alors que, de cinquième part, l’atteinte à la vie privée et au secret des correspondances constituée par la communication au public d’une correspondance posthume à caractère intime interdit de qualifier d’abus notoire dans l’exercice du droit de divulgation la décision du représentant de l’auteur défunt de s’opposer à cette communication ; que dans ses écritures d’appel, Madame Marie-Claude

Y…

fondait sa demande tendant à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a fait interdiction aux Consorts X… de divulguer les lettres composant la correspondance échangée entre René

Y…

et Tina Z… au motif qu’il ressortait avec certitude des faits de la cause « que René

Y…

a toujours entendu préserver sa vie privée de son vivant et après sa mort », qu’il avait « clairement pris parti pour la protection de la vie privée des auteurs », et que « le droit de divulgation se conjugue alors de façon claire et significative avec le droit au respect de la vie privée pour permettre à l’auteur et à lui seul d’imposer à tous et sans discussion possible, une frontière entre lui-même, son oeuvre et le public », tant sur le terrain du droit de divulgation que sur celui « du droit au secret des correspondances et du respect de l’intimité de la vie privée » ; qu’en se bornant, pour dire que Madame Marie-Claude

Y…

avait notoirement abusé du droit de divulgation dont elle est investie en sa qualité d’exécuteur testamentaire de René

Y…

en s’opposant à la publication de cette correspondance, à faire état de « l’intérêt de la publication envisagée qui, comme le souhaitent les Consorts X…, rendra compte de façon privilégiée de la collaboration intellectuelle et littéraire » de René

Y…

avec Tina Z…, sans rechercher ni préciser, ainsi qu’il lui était pourtant demandé, si le nécessaire respect dû à la vie privée et le secret des correspondances n’empêchaient pas de qualifier d’abus notoire dans l’exercice du droit de divulgation le refus opposé par cette dernière, en sa qualité d’exécuteur testamentaire, à la demande, formulée par les Consorts X…, de communication au public de la correspondance intime échangée entre René

Y…

et Tina Z…, la Cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle, de l’article 9 du Code civil et de l’article 8 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué infirmatif d’avoir donné acte à M. B… et Mme Paule X… qu’ils entendent faire publier un choix de lettres échangées entre René

Y…

et Tina Z…, qui rendent compte de leur relation et, de façon privilégiée, de leur collaboration intellectuelle, d’avoir dit qu’en opposant un refus à la publication par M. B… et Mme Paule X… d’un tel choix de lettres, Mme Marie-Claude

Y…

a fait un usage abusif du droit de divulgation dont elle est investie, de l’avoir en conséquence condamnée à verser à M. B… et à Mme Paule X… la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts, et d’avoir procédé à la fixation des droits d’auteur en disant que les droits d’auteur à provenir de la publication de ces lettres seront partagés par moitié entre les parties ;

Aux motifs que « aux termes de l’article L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle sur le fondement duquel l’action est engagée, " En cas d’abus notoire dans l’usage ou le non-usage du droit de divulgation de la part des représentants de l’auteur décédé visée à l’article L 121-2, le Tribunal de grande instance peut ordonner toute mesure appropriée ; qu’il suit que la personne investie du droit de divulgation post mortem ne dispose pas d’un droit absolu mais doit exercer celui-ci au service des oeuvres et de leur promotion, conformément à la volonté de leur auteur telle qu’elle a pu s’exprimer de son vivant et telle qu’elle a pu en avoir connaissance ; que lorsqu’elle s’oppose à la divulgation, il lui incombe alors de justifier de son refus en démontrant que l’auteur n’entendait pas divulguer l’oeuvre en cause et que sa divulgation n’apporterait aucun éclairage utile à la compréhension et à la valorisation des oeuvres déjà publiées ; qu’en l’espèce Madame C… expose que René

Y…

s’est toujours montré extrêmement réservé sur sa vie privée, et refusa tout entretien ou interview qui puisse en faire état, que s’il a fait don à la Bibliothèque Littéraire Jacques

D…

de ses archives et de celles de Yvonne E… avec qui il eut une relation très amoureuse et avec laquelle il entretint une correspondance de 1947 à 1970, il a donné des instructions « communication réservée jusqu’en 2025 » et « communication réservée jusqu’en 1995 des manuscrits, lettres à des tiers ayant un caractère polémique »… " Enfin, en ce qui concerne toutes les lettres, en particulier celles de Victor F…, de Nicolas G…, dont je suis le destinataire, leur autorisation ou celle de mes exécuteurs testamentaires Telles sont les conditions de la donation du fonds René

Y…

et du fonds Yvonne E… à l’Université de Pans pour la Bibliothèque

D…

5 mars 1970 ", qu’il agit de même avec des instructions plus précises s’agissant de sa correspondance avec André H…; qu’elle ajoute que lorsque Y… donnait l’autorisation de publier quelques unes de ses lettres, il le faisait toujours après s’être assuré du contexte de la publication et de l’objectif poursuivi ; qu’il avait en outre pour habitude de regrouper certaines des lettres qu’il recevait en les plaçant dans des enveloppes de réexpédition sur lesquelles il portait diverses mentions manuscrites telles « secret » ou « Lettres » T mai 1960 « A brûler sans ouvrir au cas ou je mourrais » ; que parmi celles-ci se trouvaient des lettres de Tina Z…; qu’elle ajoute que si René

Y…

l’a désignée en qualité d’exécuteur testamentaire, c’est en raison de la confiance qu’il lui accordait pour respecter sa volonté et décider à sa place de divulguer ou non ses oeuvres posthumes, ce qu’elle s’applique à faire en évitant surtout de mettre la vie privée de l’auteur en avant de son oeuvre ; que cependant René

Y…

dont l’oeuvre a été publiée de son vivant dans la collection « La Pléiade » n’ignorait pas l’intérêt que pouvait présenter la publication de l’abondante correspondance qu’il avait entretenue avec des personnalités les plus diverses et avec ses compagnes, et que certaines des lettres révélaient sa vie privée ; qu’ainsi, dans l’ouvrage intitule Rencontres avec René

Y…

(Corti 1991) que lui consacra Jean I…, il devait préciser ses intentions en se démarquant d’une publication consacrée à Saint John Perse qui faisait la part belle à un ensemble de discours, d’hommages et de correspondances ; qu'" ce qui me concerne, je réduirai au maximum ce qui n ‘ est pas ma poésie proprement dite. Quant à ma correspondance, je n’en consens pas de copies, sauf exception/ On retrouvera mes lettres, ici ou là, après ma mort. Comme j’ai gardé beaucoup de celles que j’ai reçues, ça pourrait faire un second volume de la Pléiade, à titre posthume " page 227 ; qu’en outre, le caractère privé et intime de sa correspondance avec Yvonne E… n’a pas été un obstacle à son versement a la Bibliothèque littéraire

D…

; qu’il a simplement mentionné « communication réservée jusqu’en 2025 » ; que pour d’autres correspondances, Y… a manifesté clairement ses intentions à Edmond J… par exemple (« Je vous demande de bien vouloir me communiquer ce que vous aurez préféré ») ; qu’il suit que Y… était pleinement conscient du fait que sa correspondance allait inévitablement faire l’objet de demandes de publication après son décès, que quand bien même pouvait-il estimer qu’elle présentait un intérêt littéraire secondaire-ce qui n’aurait pas été un moyen suffisant pour en interdire la publication-, ou qu’elle pouvait témoigner de sa vie privée, il n’a pris aucune disposition générale la concernant et n’a manifesté sa volonté d’en retarder la communication au public que pour celle qu’il a entretenue avec Yvonne E…; qu’il n’a d’évidence pas voulu soustraire à un projet de publication la correspondance qu’il a échangée avec Tina Z… alors que tant pai son volume que par la personnalité de Tina Z… qu’il désigne dans son testament comme « sa collaboratrice littéraire », il était vraisemblable qu’elle allait appeler un projet de publication ; qu’enfin s’il a pu classer certaines des lettres qu’il recevait dans des enveloppes sur lesquelles il portait la mention « à brûler » ou « à ne pas ouvrir », il n’est pas établi que ces enveloppes aient contenu des lettres de Tina Z…; qu’au surplus, l’intimée qui précise avoir scrupuleusement respecté la volonté de Y… ne prétend pas qu’elle ne s’est pas conformée aux instructions figurant sur les enveloppes ; que s’agissant de l’intérêt de la publication envisagée qui comme le souhaitent les appelants, rendra compte de façon privilégiée de la collaboration intellectuelle et littéraire des correspondants, Madame

Y…

peut d’autant moins le contester qu’elle même déclara « il reste la correspondance qui est comme une antichambre de son oeuvre, qui devra peu à peu voir le jour » (revue TDC, n° 931- pièce 27) ; qu’en conséquence, le refus qu’elle oppose au projet de publication ne peut qu’être qualifie d’abusif au sens de l’article L 121-3 précité ; qu’il convient de la condamner à verser aux appelants la somme de 1 euro a titre de dommages et intérêts ; que par ailleurs le contenu de l’oeuvre n’étant pas encore arrêté, il ne sera pas fait droit à la demande d’autorisation de sa publication, qu’en revanche, il sera donné acte aux appelants qu’ils feront un choix qui rendra compte de la relation des correspondants et qui privilégiera leur collaboration intellectuelle » ;

Alors que, d’une part, l’exercice du droit de divulgation d’une oeuvre posthume par le représentant de l’auteur décédé ne peut être contesté en justice qu’en cas d’abus notoire dans l’usage ou le non-usage de ce droit ; qu’en retenant que Madame Marie-Claude

Y…

avait fait un usage abusif du droit de divulgation en opposant un refus à la publication d’un choix de lettres échangées entre René

Y…

et Tina Z…, choix proposé par les Consorts X… pour rendre compte « de façon privilégiée de la collaboration intellectuelle et littéraire des correspondants », alors qu’elle constatait dans les motifs de son arrêt que « le contenu de l’oeuvre n’était pas encore arrêté » par les Consorts X…, ce qui ne lui permettait pas de faire droit à la demande d’autorisation du projet de publication de ces derniers, la Cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle ;

Alors que, d’autre part, l’auteur jouit du droit au respect de son oeuvre ; que les ayants droit de l’auteur décédé peuvent s’opposer à toute atteinte à l’intégrité de l’oeuvre en exerçant le droit moral attaché à cette dernière ; que tant dans les motifs que dans le dispositif de sa décision, la Cour d’appel a déclaré abusif au sens de l’article L. 121-3 du Code de la propriété intellectuelle le refus opposé par Madame Marie-Claude

Y…

à la publication d’un choix de lettres par les Consorts X…« rendant compte de la collaboration intellectuelle » entre René

Y…

et Tina Z…; qu’en subordonnant la publication de lettres issues de la correspondance privée échangée entre René

Y…

et Tina Z… à la condition que ces lettres expriment la collaboration intellectuelle des deux correspondants, ce qui n’a pas pour effet de priver Madame

Y…

de la possibilité de s’opposer à la publication de tous les autres passages de ces lettres qui ne rendent pas compte d’une telle collaboration, et notamment des passages, qui constituent l’essentiel de chaque lettre, concernant la relation intime du poète et de sa maîtresse, la Cour d’appel, qui en autorisant de la sorte le morcellement de la correspondance litigieuse en permettant la communication au public de simple extraits de chaque lettre, rompant ainsi l’unité de l’oeuvre constituée par cette correspondance, a porté atteinte à l’intégrité de l’oeuvre de René

Y…

, en violation de l’article L. 121-1 du Code de la propriété intellectuelle.

Moyens produits au pourvoi incident éventuel par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour les consorts X….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir condamné les consorts X… à payer à Mme

Y…

la somme de 3. 000 euros pour avoir divulgué dans leurs écritures la teneur de lettres échangées entre René

Y…

et Tina Z…,

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur les lettres litigieuses et leur production, Tina Z… et René

Y…

ont conservé soigneusement les lettres reçues de l’autre ; qu’au décès de Tina Z…, Mme

Y…

remit aux appelants les lettres que leur mère avait écrites à Y…; que ces lettres ne sont pas produites aux débats alors pourtant que les premiers juges ont justement précisé que si la demande de produire ces documents (qui se heurtent au secret des correspondances) avait été présentée au juge de la mise en état, ce dernier l’aurait vraisemblablement accueillie mais en la limitant dans son volume et en fixant le mode de production, à savoir en pièces communiquées et non dans le corps des conclusions ; que les dispositions de l’article L. 331-4 du code de la propriété intellectuelle, selon lesquelles les droits mentionnés au livre I ne peuvent faire échec aux actes nécessaires à l’accomplissement d’une procédure juridictionnelle, ne dispensaient pas les demandeurs de saisir le juge de la mise en état avant de produire et donc de divulguer un choix tiré de la correspondance en litige ; que c’est dès lors à bon droit que les premiers juges, relevant que les appelants avaient d’eux-mêmes cité dans leurs écritures de très nombreux passages de ces lettres, les ont condamnés à verser à Mme

Y…

une somme de 3. 000 euros à titre de dommages et intérêts ; que curieusement, aucune demande n’a été présentée en cause d’appel au conseiller de la mise en état pour obtenir l’autorisation de produire aux débats tout ou partie de cette correspondance ; que la cour relève d’une part, que Mme

Y…

, qui ne conteste pas avoir une pleine connaissance des lettres en cause, n’en isole pas certaines pour démontrer que leur divulgation porterait atteinte à l’oeuvre, à la volonté de Y… ou aux droits de tiers, préférant porter une appréciation indifférenciée sur cette correspondance ; que d’autre part, les parties qui s’expriment peu dans leurs écritures sur le contenu de celle-ci, conviennent cependant qu’elle rend compte de la passion de la liaison amoureuse de Y… et de Z… mais aussi de leurs échanges intellectuels ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE Mme Marie-Claude

Y…

demande au tribunal de sanctionner la faute commise par les demandeurs qui ont reproduit de façon large des extraits des lettres échangées entre René

Y…

et Tina Z…, ou entre René

Y…

et eux-mêmes ou leur grand-mère sans y être autorisés par elle-même et sans que cela soit nécessaire à la démonstration qu’ils entendaient faire ou sans y avoir été autorisés par le juge pour les nécessités de la procédure ; que sur les 18 premières pages des conclusions qui en comprennent 30, 16 sont constituées de reproductions de lettres litigieuses ; qu’il est constant que ces lettres ont été reproduites sans l’autorisation de Mme Marie-Claude

Y…

et sans avoir fait la demande au juge de la mise en état ; qu’il est tout aussi vrai que la production de ces lettres était utile à la démonstration qu’entendaient faire M. Gilles X… et Mme Paule X… de l’intérêt de la publication de ces textes pour mieux comprendre l’homme et que si la demande d’autorisation de produire ces documents se heurtant au secret des correspondances en avait été faite au juge de la mise en état, ce dernier l’aurait vraisemblablement autorisée mais en la limitant dans son volume et en en fixant le mode de production, à savoir en pièces communiquées et non dans le corps des conclusions ; que ce faisant, les demandeurs ont donc commis une faute qui a causé un préjudice moral à Mme Marie-Claude

Y…

qui sera réparé par l’allocation de 3. 000 euros ;

1) ALORS QUE les droits mentionnés au livre I du code de la propriété intellectuelle ne peuvent faire échec aux actes nécessaires à l’accomplissement d’une procédure juridictionnelle ; qu’ayant constaté que la révélation de la teneur des lettres en litige était utile à la démonstration du bien-fondé des prétentions des consorts X…, la cour d’appel a néanmoins retenu, pour leur imputer à faute la reproduction de certaines lettres dans leurs écritures, de ne pas avoir sollicité l’autorisation préalable du juge de la mise en état ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel, qui a ajouté à la loi une condition qu’elle ne prévoit pas, a violé l’article L. 331-4 du code de la propriété intellectuelle ;

2°) ALORS QUE les lettres missives peuvent être produites en justice, nonobstant le secret des correspondances, dans la mesure nécessaire à l’exercice des droits de la défense ; qu’en affirmant que le secret des correspondances s’opposait en l’espèce à la reproduction des lettres en litige dans les conclusions des consorts X…, lesquelles n’auraient pu être versées aux débats qu’avec l’autorisation du juge de la mise en état, la cour d’appel a violé l’article 9 du code civil et le principe du respect des droits de la défense.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir retenu la responsabilité des consorts X… pour avoir tenu des propos dénigrants à l’encontre de Mme

Y…

dans le cadre de la procédure de première instance et de les avoir en conséquence condamnés à payer à Mme

Y…

la somme de 1. 000 euros à titre de dommages et intérêts,

AUX MOTIFS PROPRES QUE, sur le dénigrement, les appelants font grief à la décision déférée de les avoir condamnés pour dénigrement alors que dans le corps de la décision les premiers juges relèvent :

« aucune volonté de nuire à Madame Marie-Claude

Y…

n’est démontrée » ; qu’ils ajoutent qu’il appartenait à Mme

Y…

de solliciter le retrait des passages incriminés par application de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881, ce qu’elle n’a pas fait ; que l’absence de demande de retrait des passages litigieux ne rend pas l’intimée irrecevable à solliciter la réparation du préjudice que les propos qu’elle incrimine lui aurait causé ; que les premiers juges ont fondé leur décision sur les dernières écritures échangées en première instance qui insinuaient qu’elle aurait laissé perdre certains documents déposés à la bibliothèque

D…

et qu’elle ferait en sorte de faire disparaître toutes traces des autres compagnes ou amantes de René

Y…

; que les appelants incriminent l’absence de caractérisation du caractère diffamatoire des propos en cause ; que la lecture de l’énoncé des dénigrements précités retenus par le jugement fondent précisément la condamnation querellée ; que l’accueil de leurs prétentions commande d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle les a condamnés au titre du caractère prétendument abusif de la procédure et en réparation des dénigrements mensongers à verser la somme globale de 5. 000 euros ; que la condamnation étant désormais limitée à la réparation des seuls propos dénigrants, il convient de condamner les appelants à verser à l’intimée une somme de 1. 000 euros ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE Mme Marie-Claude

Y…

sollicite également réparation du fait de la procédure abusive initiée par M. Gilles X… et Mme Paule X…; que, si cette action montre que les demandeurs persistent à croire qu’ils ont un droit sur les oeuvres de René

Y…

, aucune volonté de nuire à Mme Marie-Claude

Y…

du fait de la procédure n’est démontrée ; que, par contre, il ressort de la lecture des conclusions des demandeurs que ceux-ci mettent en cause la façon dont cette dernière défend l’oeuvre de René

Y…

notamment en insinuant qu’elle a oeuvré en sa qualité de vice-présidente de D… Littérature pour laisser perdre des documents que détenait Mme Anne K… avec laquelle le poète a vécu pendant 20 ans, documents qu’elle a tenté de léguer à la bibliothèque et qui ont finalement été vendus aux enchères pour 600. 000 euros le 5 décembre 2007 ; qu’ils sous-entendent qu’elle a fait en sorte de faire disparaître toutes traces des autres compagnes ou amantes de René

Y…

; que ces allégations qui ne sont étayées sur aucun fait et qui sont parfaitement contradictoires avec l’action de Mme Marie-Claude

Y…

qui a aidé à faire paraître deux biographies en 2004 et 2007, des extraits de correspondance avec d’autres auteurs, Mambrino en 2005 et Camus plus tard, sont parfaitement dénigrantes et portent atteinte à sa réputation ;

1) ALORS QUE l’immunité instituée par l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881, destinée à garantir le libre exercice du droit d’agir ou de se défendre en justice, couvre les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux et ne reçoit exception que dans le cas où les faits diffamatoires sont étrangers à la cause ; qu’en retenant, pour condamner les exposants à verser à Mme Marie-Claude

Y…

la somme de 1. 000 euros, que leurs conclusions de première instance contenaient des propos dénigrants insinuant qu’elle aurait laissé perdre des documents déposés à la bibliothèque

D…

et qu’elle ferait en sorte de faire disparaître toute trace des autres compagnes ou amantes de René

Y…

, quand de tels propos, mesurés et étayés, visaient précisément à établir, en lien direct avec la cause, que le refus opposé par Mme Marie-Claude

Y…

à la divulgation de la correspondance en litige était abusif, la cour d’appel a violé l’article susvisé ;

2) ALORS QU’en toute hypothèse, en se bornant à retenir, pour condamner les exposants à verser à Mme Marie-Claude

Y…

la somme de 1. 000 euros, que leurs conclusions de première instance contenaient des propos dénigrants insinuant qu’elle aurait laissé perdre des documents déposés à la bibliothèque

D…

et qu’elle ferait en sorte de faire disparaître toutes traces des autres compagnes ou amantes de René

Y…

, sans rechercher ni établir si de tels propos étaient étrangers à la cause, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881.

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Cour de cassation, Chambre civile 1, 9 juin 2011, 10-13.570, Publié au bulletin