Cour de cassation, Chambre civile 2, 4 juin 2015, 14-13.406, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Contexte : Par cet arrêt rendu le 4 juin 2015, la deuxième chambre civile confirme sa jurisprudence excluant toute possibilité pour le juge des référés d'allouer une provision ad litem à partir du moment où il subsiste un doute sur la responsabilité des Laboratoires Servier recherchée en tant que fabricant du Benfluorex commercialisé sous le nom de Mediator®. Litige : Une personne justifie avoir été traitée, entre avril 2004 et novembre 2009, par administration du Mediator®. Depuis lors, elle souffre d'anomalies de la valve aortique découvertes en février 2011 qui n'existaient pas en …

 

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France > Droit privé > Droit de la santé > Auteur : Sophie Hocquet-Berg Professeur de droit privé et de sciences criminelles - Université de Lorraine (Metz) Avocat au barreau de Metz http://www.sophie-hocquet-berg-avocat.com Cass. 1re civ., 29 juin 2016, n° 15-20.269, non publié au bulletin Décision(s) citée(s): Cour de cassation, 2 civ., 4 juin 2015, pourvoi numéro 14-13406, non publié Contexte : Par cet arrêt rendu le 29 juin 2016, comme dans deux autres arrêts rendus le même jour (15-20.270 ; 15-20.271), la première chambre civile persiste à exclure toute possibilité …

 

Revue Générale du Droit

Contexte : Par cet arrêt rendu le 29 juin 2016, comme dans deux autres arrêts rendus le même jour (15-20.270 ; 15-20.271), la première chambre civile persiste à exclure toute possibilité pour le juge des référés d'allouer une provision à partir du moment où il subsiste un doute sur la responsabilité des Laboratoires Servier recherchée en tant que fabricant du Benfluorex commercialisé sous le nom de Mediator®. Litige : Une personne justifie avoir été traitée, en janvier 2002, puis de mai 2008 à novembre 2009, par administration du Mediator®. Depuis lors, elle souffre d'une insuffisance …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. 2e civ., 4 juin 2015, n° 14-13.406
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 14-13.406
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 19 novembre 2013
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000030688123
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2015:C200895
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Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles 1386-11 du code civil et 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X…, se plaignant de diverses pathologies, a assigné la société Les laboratoires Servier (la société) pour obtenir la désignation d’un expert afin d’établir la preuve d’un lien de causalité entre celles-ci et la prise du médicament Médiator, produit par la société, et le paiement de certaines sommes à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice et sur les frais de procédure ;

Attendu que pour condamner la société à payer à Mme X… une certaine somme à titre de provision sur les frais d’instance au titre de la procédure de référé et de l’expertise, l’arrêt retient que l’historique et le contenu des premiers signalements publiés, de ses propres recherches, des études menées et publiées en France et à l’étranger ayant conduit au retrait du Médiator du marché ne permettant pas d’établir à l’évidence que l’état des connaissances scientifiques et techniques n’aurait pas permis à la société de déceler l’existence du défaut au moment de la mise en circulation du Médiator à l’occasion de chacune des prescriptions dont a bénéficié Mme X…, la société ne rapporte pas la preuve qui lui incombe des conditions d’exonération de sa responsabilité civile de plein droit prévues à l’article 1386-11 du code civil ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’invocation d’une cause d’exonération de responsabilité constitue une contestation dont le sérieux doit être examiné par le juge des référés sans que puisse être exigée l’évidence de la réunion des conditions de l’exonération, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné la société Les laboratoires Servier à payer à Mme X…, à titre de provision sur frais d’instance au titre de la procédure de référé appel inclus et de l’expertise, la somme de 2 000 euros, l’arrêt rendu le 20 novembre 2013, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris ;

Condamne Mme X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Les laboratoires Servier.

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir condamné la société LES LABORATOIRES SERVIER à payer à Madame X… à titre de provision sur frais d’instance au titre de la procédure de référé appel inclus et de l’expertise, la somme de 2.000 euros ;

AUX MOTIFS QUE « si le juge des référés dispose du pouvoir d’accorder une provision pour frais d’instance sur le fondement de l’article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile qui ne prévoit aucune restriction quant à la nature ou l’objet des provisions susceptibles d’être allouées, c’est, nécessairement, dans les conditions précisément et strictement définies par celui-ci. Sur le fondement de ce texte, la provision pour frais d’instance peut être accordée sous deux conditions ; la première est la justification du caractère non sérieusement contestable de la prétention au fond, la seconde la justification de la nécessité d’engager des frais pour lesquels la provision est demandée. Ces deux conditions sont cumulatives, nécessaires et ensemble suffisantes, toute autre considération étant indifférente. Mme Nurcan X… entend rechercher la responsabilité des LABORATOIRES SERVIER sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du Code civil, prévoyant que le producteur est de plein droit responsable du dommage causé par un défaut de son produit, sauf à lui de justifier de l’existence d’une cause d’exonération et notamment, en application de l’article 1386-11 alinéa 4 du même code, en établissant que l’état des connaissances scientifiques et techniques au moment où il a mis le produit en circulation n’a pas permis de déceler l’existence du défaut. Il incombe à Mme Nurcan X… en premier lieu, dans la présente instance, de rapporter la preuve de l’existence d’un dommage, de ce que le Médiator peut recevoir la qualification de produit défectueux, et du lien de causalité entre son dommage et la prise de Médiator mis en circulation par les LABORATOIRES SERVIER. Il est constant que le Médiator (Benfluorex) a été commercialisé en France à partir de 1997, ayant pour indication initiale le traitement des hypertriglycéridémie et diabète de type II, mais étant de fait également prescrit dans des proportions non négligeables dans un but d’amaigrissement. Il a fait l’objet d’une décision de suspension d’AMM en novembre 2009 puis de retrait en juin 2010, en raison de sa toxicité cardio-vasculaire, caractérisée par un risque de HTAP et valvulopathies. Les éléments produits aux débats permettent aujourd’hui de considérer le Médiator comme un produit défectueux au sens de l’article 1386-4 du Code civil, en ce qu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, en raison du déséquilibre défavorable avantage/risque démontré par les études réalisées et sanctionné par le retrait du marché, mais également de l’absence totale d’information figurant sur les notices accompagnant le produit tel que distribué au patient, l’expert commis par l’ordonnance entreprise ayant relevé que même en 2009, celle-ci ne contenaient aucune indication quant au risque, même présenté comme marginal ou exceptionnel, d’apparition d’une HTAP ou d’une valvulopathie. Mme Nurcan X… justifie avoir été traitée par administration du Médiator du 2 avril 2004 au 30 novembre 2009 ; du rapport déposé le 26 février 2013 par l’expert désigné par l’ordonnance entreprise, qui ne fait l’objet d’aucune critique sur ce point, il ressort que Mme Nurcan X… souffre d’anomalies de la valve aortique découvertes en février 2011, qui n’existaient pas en 2004 ; cette atteinte est liée à l’administration du Médiator de manière vraisemblable, exclusive, initiale et déterminante. Ces éléments suffisent pour retenir l’existence d’un dommage physique subi par Mme Nurcan X…, en relation directe avec l’administration du Médiator, médicament devant être qualifié de produit défectueux, dont il n’est pas discuté qu’il était mis en circulation par les LABORATOIRES SERVIER. L’historique et le contenu des premiers signalements publiés, de ses propres recherches, des études menées et publiées en France et à l’étranger ayant conduit au retrait du Médiator du marché, ne permettent pas d’établir à l’évidence que l’état des connaissances scientifiques et techniques n’aurait pas permis aux LABORATOIRES SERVIER de déceler l’existence du défaut ou, à tout le moins, de signaler le risque possible d’atteintes cardiovasculaires au moment de la mise en circulation du Médiator à l’occasion de chacune des prescriptions dont a bénéficié Mme Nurcan X… entre 2004 et 2009. La responsabilité sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du Code civil étant une responsabilité de plein droit, et les LABORATOIRES SERVIER ne rapportant pas la preuve dont la charge leur incombe de ce que les conditions d’exonération prévues à l’article 1386-11 alinéa 4 du même code seraient réunies, la prétention au fond de Mme Nurcan X… apparaît en l’état non sérieusement contestable. Mme Nurcan X… bénéfice depuis la première instance de l’aide juridictionnelle totale, à laquelle elle n’a pas renoncé ; elle bénéficie ainsi de l’assistance d’un avocat envers lequel elle n’est débitrice d’aucun honoraire et se trouve dispensée de l’avance des frais d’expertise. Mais compte tenu des frais que Mme Nurcan X… a dû exposer pour se rendre aux opérations d’expertise, de la nécessité de recourir au concours d’un médecin, justifiée par la technicité particulière du dossier à préparer et soutenir à l’encontre des LABORATOIRES SERVIER et dont l’intervention ressort des termes mêmes des écritures de son conseil, il convient de faire droit à sa demande de provision pour frais d’instance, à hauteur de la somme de 2.000 €, sans qu’il y ait lieu d’exiger préalablement la production des justificatifs demandés par les LABORATOIRES SERVIER, l’allocation de la provision n’étant pas soumise à conditions de ressources. L’ordonnance entreprise sera réformée en ce sens » ;

ALORS QUE, D’UNE PART, c’est seulement dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable que le juge des référés peut accorder une provision au créancier, qu’il s’agisse d’une provision sur dommages-intérêts ou d’une provision ad litem ; qu’une contestation sérieuse survient lorsque la prétention du demandeur repose sur des fondements incertains, l’applicabilité au litige de la règle de droit invoquée étant raisonnablement discutable ; qu’en affirmant en l’espèce que le « Médiator » devait être à l’évidence qualifié de produit défectueux « en raison du déséquilibre défavorable avantage/risque démontré par les études réalisées et sanctionné par le retrait du marché », cependant que la circonstance, invoquée par la société LES LABORATOIRES SERVIER, que l’ensemble des documents diffusés par l’AFSSAPS indiquaient que la balance bénéfice-risque n’avait été jugée défavorable qu’à la fin de l’année 2009, raison pour laquelle la décision de suspension d’AMM n’avait été prise qu’à cette date, constituait une contestation sérieuse quant à la qualification de produit défectueux appliquée au « Médiator » à la date des faits litigieux, Madame X… ayant été traitée par administration du « Médiator » du 2 avril 2004 au 30 novembre 2009, la Cour d’appel, qui a ainsi tranché une contestation sérieuse, a violé l’article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, D’AUTRE PART, c’est seulement dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable que le juge des référés peut accorder une provision au créancier, qu’il s’agisse d’une provision sur dommages-intérêts ou d’une provision ad litem ; qu’une contestation sérieuse survient lorsque la prétention du demandeur repose sur des fondements incertains, l’applicabilité au litige de la règle de droit invoquée étant raisonnablement discutable ; qu’en affirmant en l’espèce que le « Médiator » devait être à l’évidence qualifié de produit défectueux en raison de l’absence, même encore en 2009, de toute information sur sa notice quant à l’existence d’effets indésirables, cependant que la connaissance de ceux-ci par la société LES LABORATOIRES SERVIER suscitait une contestation sérieuse du fait qu’aucun signal significatif de toxicité cardiaque n’avait été relevé par les autorités de santé et de pharmacovigilance avant la fin de l’année 2009, contestation qu’il n’appartenait donc pas au juge des référés de trancher, la Cour d’appel a derechef violé l’article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile ;

ALORS QU’ENFIN, c’est seulement dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable que le juge des référés peut accorder une provision au créancier, qu’il s’agisse d’une provision sur dommages-intérêts ou d’une provision ad litem ; qu’une contestation sérieuse survient lorsque l’un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n’apparaît pas immédiatement et à l’évidence voué à l’échec ; qu’en exigeant à l’inverse en l’espèce que le risque de développement, de nature à exonérer la société LES LABORATOIRES SERVIER de toute responsabilité, soit établi « à l’évidence », cependant que le doute raisonnable existant sur ce point, compte tenu des publications scientifiques qui n’ont réellement évoqué un rôle possible du Benfluorex dans la survenance de troubles cardiaques qu’à compter de la fin de l’année 2009 et de l’attitude adoptée par les autorités de santé et de pharmacovigilance jusqu’à cette date, suffisait à rendre sérieusement contestable l’obligation alléguée par Madame X… à l’encontre de la société exposante, la Cour d’appel a violé l’article 809, alinéa 2, du Code de procédure civile.

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