CJUE, n° C-947/19, Arrêt de la Cour, Carmen Liaño Reig contre Conseil de résolution unique, 4 mars 2021

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 4 mars 2021, C-947/19
Numéro(s) : C-947/19
Arrêt de la Cour (huitième chambre) du 4 mars 2021.#Carmen Liaño Reig contre Conseil de résolution unique.#Pourvoi – Union économique et monétaire – Union bancaire – Redressement et résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Procédure de résolution – Adoption d’un dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular Español SA – Règlement (UE) nº 806/2014 – Article 24 – Instrument de cession des activités – Article 21 – Dépréciation et conversion d’instruments de fonds propres – Instruments de fonds propres de catégorie 2 – Recours en annulation – Annulation partielle – Caractère non détachable – Irrecevabilité.#Affaire C-947/19 P.
Précédents jurisprudentiels : 25 juin 2020, CSUE/KF, C-14/19 P, EU:C:2020:492
arrêt du 16 juillet 2020, Inclusion Alliance for Europe/Commission, C-378/16 P, EU:C:2020:575
arrêt du 16 juillet 2020, Nexans France et Nexans/Commission, C-606/18 P, EU:C:2020:571
arrêt du 20 mai 2010, Gogos/Commission, C-583/08 P, EU:C:2010:287
arrêt du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C-125/07 P, C-133/07 P, C-135/07 P et C-137/07 P, EU:C:2009:576
Commission/Conseil, C-425/13, EU:C:2015:483
Commission/Verhuizingen Coppens, C-441/11 P, EU:C:2012:778
Ipatau/Conseil, C-535/14 P, EU:C:2015:407
SolarWorld/Conseil, C-204/16 P, EU:C:2017:838
Tribunal de l' Union européenne du 24 octobre 2019, Liaño Reig/CRU ( T-557/17
Identifiant CELEX : 62019CJ0947
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2021:172
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Texte intégral

ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

4 mars 2021 ( *1 )

« Pourvoi – Union économique et monétaire – Union bancaire – Redressement et résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement – Mécanisme de résolution unique des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement (MRU) – Procédure de résolution – Adoption d’un dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular Español SA – Règlement (UE) no 806/2014 – Article 24 – Instrument de cession des activités – Article 21 – Dépréciation et conversion d’instruments de fonds propres – Instruments de fonds propres de catégorie 2 – Recours en annulation – Annulation partielle – Caractère non détachable – Irrecevabilité »

Dans l’affaire C-947/19 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 23 décembre 2019,

Carmen Liaño Reig, demeurant à Alcobendas (Espagne), représentée par Me F. López Antón, abogado,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Conseil de résolution unique (CRU), représenté par Mmes A. Valavanidou, S. Branca et J. King, en qualité d’agents, assistées de Mes B. Meyring et T. Klupsch, Rechtsanwälte, ainsi que de Me F. B. Fernández de Trocóniz Robles, abogado,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. N. Wahl (rapporteur), président de chambre, MM. F. Biltgen et J. Passer, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, Mme Carmen Liaño Reig demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 24 octobre 2019, Liaño Reig/CRU (T-557/17, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2019:771), par laquelle celui-ci a rejeté son recours visant, d’une part, à l’annulation de l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision SRB/EES/2017/08 du Conseil de résolution unique (CRU), du 7 juin 2017, concernant un dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular Español SA (ci-après « Banco Popular »), en ce que cette disposition prévoit la conversion des instruments de fonds propres de catégorie 2 identifiés par l’International Securities Identification Number (numéro international d’identification des valeurs mobilières, ISIN) XS 0550098569 en nouvelles actions de Banco Popular (ci-après la « décision de résolution »), ainsi que de la valorisation provisoire effectuée par l’expert indépendant et de la valorisation provisoire effectuée par le CRU et, d’autre part, à la compensation, consécutive à l’annulation qui était ainsi demandée, de la perte prétendument subie du fait de cette conversion.

Le cadre juridique

Le règlement (UE) no 806/2014

2

Selon l’article 3, paragraphe 1, points 30, 40, 44, 47 et 51, du règlement (UE) no 806/2014 du Parlement européen et du Conseil, du 15 juillet 2014, établissant des règles et une procédure uniformes pour la résolution des établissements de crédit et de certaines entreprises d’investissement dans le cadre d’un mécanisme de résolution unique et d’un Fonds de résolution bancaire unique, et modifiant le règlement (UE) no 1093/2010 (JO 2014, L 225, p. 1) :

« Aux fins du présent règlement, les définitions suivantes s’appliquent :

[…]

30.

“instrument de cession des activités”, le mécanisme permettant le transfert par une autorité de résolution à un acquéreur autre qu’un établissement-relais, conformément à l’article 24, de titres de propriété émis par un établissement soumis à une procédure de résolution ou d’actifs, de droits ou d’engagements d’un établissement soumis à une procédure de résolution ;

[…]

40.

“fonds propres”, les fonds propres au sens de l’article 4, paragraphe 1, point 118), du règlement (UE) no 575/2013 [du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d’investissement et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO 2013, L 176, p. 1, et rectificatifs JO 2013, L 208, p. 68, et JO 2013, L 321, p. 6)] ;

[…]

44.

“pouvoirs de dépréciation et de conversion”, les pouvoirs visés à l’article 21 ;

[…]

47.

“instruments de fonds propres de catégorie 2”, les instruments de capital ou les emprunts subordonnés qui remplissent les conditions de l’article 63 du règlement [no 575/2013] ;

[…]

51.

“instruments de fonds propres pertinents”, les instruments de fonds propres additionnels de catégorie 1 et les instruments de fonds propres de catégorie 2 ».

3

L’article 15, paragraphe 1, sous a), b), f) et g), du règlement no 806/2014 dispose :

« 1. Lorsqu’ils agissent dans le cadre de la procédure de résolution définie à l’article 18, le CRU, le Conseil [de l’Union européenne], la Commission [européenne] et, le cas échéant, les autorités de résolution nationales prennent toutes les dispositions appropriées afin que la mesure de résolution soit prise conformément aux principes suivants :

a)

les actionnaires de l’établissement soumis à une procédure de résolution sont les premiers à supporter les pertes ;

b)

les créanciers de l’établissement soumis à une procédure de résolution supportent les pertes après les actionnaires, conformément à l’ordre de priorité de leurs créances en vertu de l’article 17, sauf dispositions contraires expresses du présent règlement ;

[…]

f)

sauf dispositions contraires dans le présent règlement, les créanciers de même catégorie sont traités sur un pied d’égalité ;

g)

aucun créancier n’encourt des pertes plus importantes que celles qu’il aurait subies si une entité visée à l’article 2 avait été liquidée selon une procédure normale d’insolvabilité conformément aux mesures de sauvegarde prévues à l’article 29 ».

4

L’article 17 de ce règlement, intitulé « Ordre de priorité des créances », prévoit :

« 1. En cas d’application de l’instrument de renflouement interne à une entité visée à l’article 2 du présent règlement, et sans préjudice des engagements exclus du champ d’application de l’instrument de renflouement interne en vertu de l’article 27, paragraphe 3, du présent règlement, le CRU, la Commission ou, le cas échéant, les autorités de résolution nationales, décident de l’exercice des pouvoirs de dépréciation et de conversion, y compris l’éventuelle application de l’article 27, paragraphe 5, du présent règlement, et les autorités de résolution nationales exercent ces pouvoirs conformément aux articles 47 et 48 de la directive 2014/59/UE [du Parlement européen et du Conseil, du 15 mai 2014, établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d’investissement et modifiant la directive 82/891/CEE du Conseil ainsi que les directives du Parlement européen et du Conseil 2001/24/CE, 2002/47/CE, 2004/25/CE, 2005/56/CE, 2007/36/CE, 2011/35/UE, 2012/30/UE et 2013/36/UE et les règlements du Parlement européen et du Conseil (UE) no 1093/2010 et (UE) no 648/2012 (JO 2014, L 173, p. 190)], et selon l’ordre de priorité inverse des créances fixé par leur droit national, en particulier les dispositions transposant l’article 108 de ladite directive.

2. Les États membres participants informent la Commission et le CRU du rang des créances sur les entités visées à l’article 2 dans les procédures nationales d’insolvabilité le 1er juillet de chaque année ou immédiatement lorsqu’il se produit un changement de rang.

Lorsque l’instrument de renflouement interne est appliqué, le système de garantie des dépôts compétent est responsable selon les modalités prévues à l’article 79. »

5

En vertu de l’article 21, paragraphes 1, 7, 10 et 11, dudit règlement :

« 1. Le CRU n’exerce le pouvoir de dépréciation ou de conversion des instruments de fonds propres pertinents en agissant selon la procédure définie à l’article 18, à l’égard des entités et des groupes visés à l’article 7, paragraphe 2, et des entités et des groupes visés à l’article 7, paragraphe 4, [sous] b), et paragraphe 5, lorsque les conditions d’application de ces paragraphes sont remplies, que s’il estime, en session exécutive, après réception d’une communication conformément au deuxième alinéa ou de sa propre initiative, qu’une ou plusieurs des conditions suivantes sont remplies :

a)

dans le cas où il a été établi que les conditions de déclenchement d’une procédure de résolution précisées aux articles 16 et 18 ont été remplies, avant de prendre une mesure de résolution ;

b)

l’entité ne sera plus viable à moins que les instruments de fonds propres pertinents ne soient dépréciés ou convertis en actions ;

c)

dans le cas d’instruments de fonds propres pertinents émis par une filiale et lorsque ces instruments de fonds propres pertinents sont comptabilisés aux fins du respect des exigences de fonds propres sur une base individuelle et sur base consolidée, sauf dépréciation ou conversion de ces instruments, le groupe ne sera plus viable ;

d)

dans le cas d’instruments de fonds propres pertinents émis au niveau de l’entreprise mère et lorsque ces instruments de fonds propres pertinents sont comptabilisés aux fins du respect des exigences de fonds propres sur une base individuelle au niveau de l’entreprise mère ou sur base consolidée, sauf dépréciation ou conversion de ces instruments, le groupe ne sera plus viable ;

e)

l’entité ou le groupe a besoin d’un soutien financier public exceptionnel, excepté dans l’une des circonstances fixées à l’article 18, paragraphe 4, [sous] d)[,] iii).

L’appréciation des conditions visées au premier alinéa, [sous] a), c) et d), est effectuée par la [Banque centrale européenne (BCE)], après consultation du CRU. Le CRU en session exécutive peut effectuer lui aussi cette appréciation.

[…]

7. Si l’une ou plusieurs des conditions visées au paragraphe 1 sont remplies, le CRU, agissant selon la procédure définie à l’article 18, détermine si les pouvoirs de dépréciation ou de conversion des instruments de fonds propres pertinents doivent être exercés indépendamment ou, conformément à la procédure définie à l’article 18, en combinaison avec une mesure de résolution.

[…]

10. Le CRU veille à ce que les autorités de résolution nationales exercent, sans retard, les pouvoirs de dépréciation ou de conversion selon l’ordre de priorité des créances visé à l’article 17 et d’une manière qui donne les résultats suivants :

a)

les instruments de fonds propres de base de catégorie 1 sont réduits en premier lieu en proportion des pertes et dans la mesure de leur capacité ;

b)

le montant principal des instruments de fonds propres additionnels de catégorie 1 est déprécié ou converti en instruments de fonds propres de base de catégorie 1, ou les deux, dans la mesure requise pour atteindre les objectifs de la résolution énoncés à l’article 14 ou jusqu’à la limite de la capacité des instruments de fonds propres pertinents, le montant à retenir étant le plus faible des deux ;

c)

le montant principal des instruments de fonds propres de catégorie 2 est déprécié ou converti en instruments de fonds propres de base de catégorie 1, ou les deux, dans la mesure requise pour atteindre les objectifs de la résolution énoncés à l’article 14 ou jusqu’à la limite de la capacité des instruments de fonds propres pertinents, le montant à retenir étant le plus faible des deux.

11. Les autorités de résolution nationales exécutent les instructions du CRU et procèdent à la dépréciation ou à la conversion des instruments de fonds propres pertinents conformément à l’article 29. »

6

Selon l’article 22, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 :

« Lorsque le CRU décide d’appliquer un instrument de résolution à une entité ou un groupe visé à l’article 7, paragraphe 2, ou à une entité ou un groupe visé à l’article 7, paragraphe 4, [sous] b), et paragraphe 5, lorsque les conditions d’applications de ces paragraphes sont remplies, et que cette mesure de résolution se traduirait par des pertes à charge des créanciers ou par une conversion de leurs créances, le CRU donne instruction aux autorités de résolution nationales d’exercer le pouvoir de dépréciation et de conversion des instruments de fonds propres pertinents conformément à l’article 21 immédiatement avant l’application de l’instrument de résolution ou simultanément. »

7

L’article 24 de ce règlement dispose :

« 1. Dans le cadre du dispositif de résolution, l’instrument de cession des activités consiste à transférer à un acquéreur qui n’est pas un établissement-relais :

a)

les titres de propriété émis par un établissement soumis à une procédure de résolution ; ou

b)

tous les actifs, droits ou engagements d’un établissement soumis à une procédure de résolution ou l’un quelconque de ceux-ci.

2. En ce qui concerne l’instrument de cession des activités, le dispositif de résolution prévoit :

a)

les instruments, actifs, droits et engagements qui doivent être transférés par l’autorité de résolution nationale conformément à l’article 38, paragraphe 1, et paragraphes 7 à 11, de la directive [2014/59] ;

b)

les conditions commerciales, compte tenu du contexte ainsi que des coûts et charges liés à la procédure de résolution, auxquelles l’autorité de résolution nationale procède au transfert conformément à l’article 38, paragraphes 2, 3 et 4, de la directive [2014/59] ;

c)

la possibilité ou non pour l’autorité de résolution nationale d’exercer plus d’une fois les pouvoirs de transfert conformément à l’article 38, paragraphes 5 et 6, de la directive [2014/59] ;

d)

les dispositions en vue de la vente, par l’autorité de résolution nationale, de l’entité ou des instruments, actifs, droits et engagements concernés, conformément à l’article 39, paragraphes 1 et 2, de la directive [2014/59] ;

e)

les conditions dans lesquelles le respect, par l’autorité de résolution nationale, des exigences concernant la vente serait de nature à compromettre la réalisation des objectifs de la résolution au sens du paragraphe 3 du présent article.

3. Le CRU applique l’instrument de cession des activités sans se conformer aux exigences concernant la vente fixées au paragraphe 2, [sous] e), lorsqu’il établit que le fait de s’y conformer serait de nature à compromettre la réalisation d’un ou de plusieurs des objectifs de la résolution, et, en particulier, si les conditions suivantes sont remplies :

a)

il considère que la défaillance ou défaillance potentielle de l’établissement soumis à une procédure de résolution fait peser une menace importante sur la stabilité financière ou aggrave une telle menace ; et

b)

il considère que le respect des exigences en question risquerait de nuire à l’efficacité de l’instrument de cession des activités en limitant sa capacité de parer à la menace ou d’atteindre les objectifs de la résolution énoncés à l’article 14, paragraphe 2, [sous] b). »

Le règlement no 575/2013

8

L’article 4, paragraphe 1, point 118, du règlement no 575/2013 définit la notion de « fonds propres » comme étant « la somme des fonds propres de catégorie 1 et des fonds propres de catégorie 2 ».

9

Aux termes de l’article 63, sous n), de ce règlement, dans la version applicable à la date d’adoption de la décision de résolution :

« Des instruments de capital et des emprunts subordonnés sont éligibles en tant qu’instruments de fonds propres de catégorie 2 si les conditions suivantes sont remplies :

[…]

n)

lorsque les instruments ne sont pas directement émis par un établissement ou lorsque les emprunts subordonnés ne sont pas levés directement par l’établissement, selon le cas, les deux conditions suivantes doivent être remplies :

i)

les instruments sont émis ou les emprunts subordonnés sont levés, selon le cas, via une entité incluse dans le périmètre de consolidation en vertu de la première partie, titre II, chapitre 2 ;

ii)

l’établissement en question peut immédiatement disposer du produit de ces instruments ou emprunts, sans limitation et sous une forme qui satisfasse les conditions énoncées au présent paragraphe. »

Les antécédents du litige

10

Les antécédents du litige sont résumés comme suit aux points 1 à 11 de l’ordonnance attaquée :

« 1

La requérante, Mme […] Liaño Reig, était propriétaire d’un bon de valeur nominale de 50000 euros émis par BPE Financiaciones, SA, identifié par l’[ISIN] XS 0550098569, avant l’adoption d’un dispositif de […] résolution à l’égard de [Banco Popular].

2

Le 7 juin 2017, le [CRU] a adopté la décision [de résolution], sur le fondement du [règlement no 806/2014].

3

Préalablement à l’adoption de la décision de résolution, une valorisation de Banco Popular a été réalisée conformément à l’article 20 du règlement no 806/2014. Cette valorisation comprend deux rapports qui sont annexés à la décision de résolution. Le premier rapport de valorisation (ci-après la “valorisation 1”), daté du 5 juin 2017, a été rédigé par le CRU en application de l’article 20, paragraphe 5, sous a), du règlement no 806/2014 et avait pour objectif de fournir les éléments permettant de déterminer si les conditions de déclenchement d’une procédure de résolution, telles que définies à l’article 18, paragraphe 1, du règlement no 806/2014, étaient réunies. Le deuxième rapport de valorisation (ci-après la “valorisation 2”), daté du 6 juin 2017, a été rédigé par un expert indépendant […] en application de l’article 20, paragraphe 10, du règlement no 806/2014. La valorisation 2 avait pour but d’estimer la valeur de l’actif et du passif de Banco Popular, de fournir une estimation sur le traitement dont les actionnaires et les créanciers auraient bénéficié si Banco Popular avait fait l’objet d’une procédure normale d’insolvabilité, ainsi que de fournir les éléments permettant de prendre la décision concernant les actions et les titres de propriété à transférer et permettant au CRU de déterminer ce que constituent des conditions commerciales aux fins de l’instrument de cession des activités.

4

Dans l’article 5, paragraphe 1, de la décision de résolution, le CRU a décidé que :

“l’instrument de résolution appliqué à Banco Popular consistera en une cession des activités en vertu de l’article 24 du règlement no 806/2014 par le transfert des actions à un acquéreur. La dépréciation et la conversion des instruments de fonds propres seront effectuées immédiatement avant l’application de l’instrument de cession des activités.”

5

L’article 6 de la décision de résolution concerne la dépréciation des instruments de fonds propres et l’instrument de cession des activités. Dans le paragraphe 1 de cet article, le CRU a indiqué quelles mesures il avait décidées en application de son pouvoir de dépréciation prévu à l’article 21 du règlement no 806/2014.

6

Ainsi, dans l’article 6, paragraphe 1, de la décision de résolution, le CRU a décidé :

a)

d’abord, de déprécier le montant nominal du capital social [de] Banco Popular d’un montant de 2098429046 euros, ce qui conduira à l’annulation de 100 % des actions de Banco Popular ;

b)

ensuite, de convertir la totalité du montant principal des instruments de fonds propres additionnels de catégorie 1 émis par Banco Popular et en circulation à la date de la décision de résolution en des actions nouvellement émises de Banco Popular, les “nouvelles actions I” ;

c)

ensuite, de déprécier à zéro la valeur nominale des “nouvelles actions I” ce qui conduira à l’annulation de 100 % de ces “nouvelles actions I”,

d)

enfin, de convertir la totalité du montant principal des instruments de fonds propres de catégorie 2 émis par Banco Popular et en circulation à la date de la décision de résolution en des actions nouvellement émises de Banco Popular, les “nouvelles actions II”. Les instruments de fonds propres de catégorie 2 concernés sont convertis en “nouvelles actions II”.

7

L’article 6, paragraphe 3, de la décision de résolution prévoit que ces mesures de dépréciation et de conversion sont fondées sur la valorisation 2, corroborée par les résultats d’un processus de vente transparent et ouvert réalisé par l’autorité de résolution espagnole, le Fondo de Reestructuración Ordenada Bancaria (FROB, Fonds de restructuration ordonnée des établissements bancaires).

8

Dans l’article 6, paragraphe 5, de la décision de résolution, le CRU a indiqué qu’il exerçait les pouvoirs qui lui étaient conférés par l’article 24, paragraphe 1, sous a), du règlement no 806/2014, relatif à l’instrument de cession des activités et ordonnait que les “nouvelles actions II” soient transférées à Banco Santander, SA, libres et quittes de tout droit ou privilège d’un tiers, en contrepartie du paiement d’un prix d’achat de 1 euro. Il est précisé que l’acquéreur a déjà consenti au transfert.

9

Le 7 juin 2017, la Commission […] a adopté la décision (UE) 2017/1246, approuvant le dispositif de résolution à l’égard de Banco Popular [SA] (JO 2017, L 178, p. 15).

10

Le même jour, le FROB a adopté les mesures nécessaires pour mettre en œuvre la décision de résolution, conformément à l’article 29 du règlement no 806/2014. Dans ce cadre, le FROB a donné son accord au transfert des nouvelles actions de Banco Popular issues de la conversion des instruments de fonds propres de catégorie 2 à Banco Santander.

11

Le 28 septembre 2018, à la suite d’une fusion par absorption, Banco Santander a succédé à titre universel à Banco Popular. »

Le recours devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

11

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 août 2017, la requérante a introduit un recours visant, d’une part, à l’annulation de l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution, en ce que cette disposition prévoit la conversion des instruments de fonds propres de catégorie 2 identifiés par l’ISIN XS 0550098569 en nouvelles actions de Banco Popular, ainsi que de la valorisation provisoire effectuée par l’expert indépendant et de la valorisation provisoire effectuée par le CRU et, d’autre part, à la compensation, consécutive à l’annulation qui était ainsi demandée, de la perte prétendument subie du fait de cette conversion.

12

Le 14 février 2018, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, le Tribunal a invité le CRU à produire certains documents. Le CRU a répondu à cette demande dans le délai imparti.

13

Le 6 juillet 2018, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, le Tribunal a posé des questions écrites aux parties portant notamment sur l’intérêt à agir et la qualité pour agir de la requérante. Les parties ont répondu à ces questions dans le délai imparti.

14

Le 17 mai 2019, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, le Tribunal a posé des questions écrites aux parties relatives à la recevabilité du recours. Ces questions portaient, en particulier, sur l’annulation partielle de la décision de résolution et le caractère détachable de certaines dispositions de cette décision. Les parties ont répondu à ces questions dans le délai imparti.

15

Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a, sur le fondement de l’article 129 de son règlement de procédure, décidé de statuer par voie d’ordonnance motivée sur les fins de non-recevoir d’ordre public et a rejeté le recours comme manifestement irrecevable sans statuer sur les moyens soulevés par la requérante.

16

À cet effet, s’agissant, premièrement, de la demande d’annulation partielle de la décision de résolution, le Tribunal a rappelé que, selon la jurisprudence (arrêt du 16 juillet 2015, Commission/Conseil, C-425/13, EU:C:2015:483, point 94 et jurisprudence citée), l’annulation partielle d’un acte de l’Union européenne n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de cet acte. Le Tribunal a également relevé qu’il n’est pas satisfait à cette exigence de séparabilité lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de celui-ci. En ce qui concerne la vérification du caractère détachable des dispositions contestées, celle-ci suppose l’examen de la portée de ces dispositions, afin de pouvoir évaluer si leur annulation modifierait l’esprit et la substance de la décision dont l’annulation est sollicitée. Enfin, le Tribunal a indiqué que, dans la mesure où il était saisi d’une demande d’annulation partielle d’une décision, il importait de vérifier si une telle annulation partielle était possible. En effet, si tel n’était pas le cas, le recours devrait être rejeté comme étant irrecevable, le Tribunal ne pouvant prononcer la nullité d’un acte dans son ensemble, s’il a seulement été saisi d’une demande de nullité partielle, sauf à statuer ultra petita.

17

Par conséquent, afin de déterminer si la disposition de la décision de résolution dont l’annulation était sollicitée, à savoir la disposition prévoyant la conversion des instruments de fonds propres de catégorie 2 détenus par la requérante, est détachable de l’ensemble du dispositif de résolution de Banco Popular, le Tribunal a rappelé que les titres émis par BPE Financiaciones et détenus par la requérante étaient des instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular, identifiés à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution parmi les instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular devant être dépréciés et convertis en « nouvelles actions II ». À cet égard, le Tribunal a ajouté que, selon l’article 6 de la décision de résolution, l’instrument de résolution appliqué, à savoir la cession des activités, supposait, dans le cas de Banco Popular, au préalable la conversion de tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 identifiés dans la décision de résolution en « nouvelles actions II ». Le Tribunal a encore relevé que, selon l’article 6, paragraphe 3, de la décision de résolution, ces mesures de dépréciation et de conversion étaient fondées sur la valorisation 2, corroborée par les résultats d’un processus de vente transparent et ouvert réalisé par le FROB. Or, Banco Santander ayant proposé d’acheter les actions de Banco Popular pour le prix de 1 euro, ce qui impliquait notamment la conversion de 100 % des instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular, la conversion de l’ensemble de ces instruments était un préalable nécessaire à la réalisation de la vente à Banco Santander laquelle n’aurait pu avoir lieu dans les mêmes conditions si certains des instruments de fonds propres de catégorie 2 en circulation à la date de la décision de résolution n’avaient pas été convertis. Enfin, le Tribunal a écarté les autres arguments invoqués par la requérante quant au caractère détachable de la décision de convertir les instruments de fonds propres de catégorie 2 de l’ensemble de la décision de résolution.

18

S’agissant, deuxièmement, de la demande d’annulation des valorisations 1 et 2, le Tribunal a considéré que la demande d’annulation partielle de la décision de résolution ayant été rejetée comme irrecevable, cette demande devait également être déclarée irrecevable.

19

S’agissant, troisièmement, de la demande de compensation, le Tribunal a estimé que la demande en annulation ayant été rejetée comme irrecevable, cette demande devait également être rejetée, sans préjudice de la possibilité pour la requérante d’introduire ultérieurement un éventuel recours indemnitaire.

Les conclusions des parties

20

Par son pourvoi, Mme Liaño Reig demande à la Cour :

d’accueillir le pourvoi et d’annuler l’ordonnance attaquée s’agissant du rejet du recours introduit devant le Tribunal pour irrecevabilité et de sa condamnation aux dépens, qui figurent respectivement aux points 1 et 3 du dispositif de cette ordonnance, et

de statuer elle-même définitivement sur le litige soumis au Tribunal, en accueillant toutes ses demandes exposées dans la requête de première instance si elle estime que ce litige est en état d’être jugé ou, à défaut, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue, en réservant les dépens.

21

Le CRU demande à la Cour :

de rejeter le pourvoi et

de condamner la requérante aux dépens de la présente procédure et de la procédure devant le Tribunal.

Sur le pourvoi

22

À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève quatre moyens. Par le premier moyen, subdivisé en huit branches, la requérante conteste l’ordonnance attaquée en ce que le Tribunal a estimé que la disposition dont l’annulation était sollicitée n’était pas détachable des autres éléments du dispositif de résolution sans modifier la substance de cette décision. Par le deuxième moyen, subdivisé en trois branches, la requérante conteste l’ordonnance attaquée en ce que le Tribunal a considéré que l’annulation partielle de la décision de résolution était contraire au principe d’égalité de traitement entre les créanciers appartenant à une même catégorie. Par le troisième moyen, la requérante conteste l’irrecevabilité de la demande d’annulation des valorisations 1 et 2. Enfin, par le quatrième moyen, la requérante conteste l’irrecevabilité de la demande de compensation.

Sur les première, troisième, quatrième et sixième à huitième branches du premier moyen

Argumentation des parties

23

Par les première, troisième, quatrième et sixième à huitième branches du premier moyen, qu’il convient d’examiner ensemble et en premier lieu, la requérante fait valoir que l’ordonnance attaquée et, notamment, les points 30 et 35, 31 et 32, 40 et 42 de celle-ci sont entachés d’un défaut de motivation et que le Tribunal n’a pas répondu à certains de ses arguments.

24

Le Tribunal aurait, ainsi, omis d’identifier la substance de la décision de résolution, n’aurait pas motivé l’affirmation selon laquelle la conversion des bons BPE Financiaciones en actions de Banco Popular était importante pour la cession de l’intégralité de son capital social à Banco Santander, ni expliqué les raisons pour lesquelles l’argumentation de la requérante était « illogique ». Le Tribunal aurait également omis d’expliciter le critère objectif sur lequel il a fondé l’irrecevabilité du recours. En outre, le Tribunal n’aurait pas motivé son appréciation selon laquelle il était nécessaire, aux fins du transfert à Banco Santander de la totalité du capital social de Banco Popular, de convertir tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 en tant que préalable à l’exécution de l’instrument de résolution consistant en la cession des activités. Enfin, le Tribunal n’aurait pas motivé le rejet de plusieurs allégations de la requérante relatives au défaut de validité de la valorisation 2, à l’absence de caractère significatif du montant des titres qu’elle détenait au regard de l’ensemble des instruments de fonds propres de Banco Popular qui ont été dépréciés et convertis ainsi qu’à l’application de l’article 21, paragraphe 1, sous c), du règlement no 806/2014.

25

Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

Appréciation de la Cour

26

Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation qui incombe au Tribunal lui impose de faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement qu’il a suivi, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la décision prise et à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel (arrêt du 16 juillet 2020, Inclusion Alliance for Europe/Commission, C-378/16 P, EU:C:2020:575, point 95 et jurisprudence citée).

27

Ensuite, selon une jurisprudence également constante de la Cour en matière de pourvois, la motivation d’une décision du Tribunal peut être implicite, à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les motifs sur lesquels le Tribunal se fonde et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (arrêt du 16 juillet 2020, Nexans France et Nexans/Commission, C-606/18 P, EU:C:2020:571, point 101 et jurisprudence citée). Ainsi, l’obligation de motivation n’impose pas au Tribunal de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige (arrêt du 25 juin 2020, CSUE/KF, C-14/19 P, EU:C:2020:492, point 96 et jurisprudence citée).

28

Enfin, l’obligation de motivation incombant au Tribunal doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs sur lesquels est fondée l’ordonnance attaquée [voir, en ce sens, arrêts du 18 juin 2015, Ipatau/Conseil, C-535/14 P, EU:C:2015:407, point 37, et du 30 avril 2019, Italie/Conseil (Quota de pêche de l’espadon méditerranéen), C-611/17, EU:C:2019:332, point 48], de telle sorte que le fait que le Tribunal soit, sur le fond, parvenu à une conclusion différente de celle de la partie requérante ne saurait en soi entacher cette ordonnance d’un défaut de motivation (arrêt du 20 mai 2010, Gogos/Commission, C-583/08 P, EU:C:2010:287, point 35 et jurisprudence citée).

29

S’agissant des première et troisième branches du premier moyen, la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir identifié, au point 40 de l’ordonnance attaquée, la substance de la décision de résolution et, partant, de ne pas avoir tenu compte de la jurisprudence selon laquelle, afin d’apprécier la recevabilité d’une demande d’annulation partielle d’un acte de l’Union, il convient de déterminer, au regard d’un critère objectif, si une telle annulation modifierait la substance de l’acte en cause.

30

À cet égard, premièrement, il convient de relever que, aux points 27 à 36 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a apprécié le caractère détachable de l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution dont l’annulation était demandée par la requérante.

31

À cette fin, le Tribunal a analysé les dispositions de cette décision et en a déduit que, d’une part, la dépréciation et la conversion de tous les instruments de fonds propres additionnels de catégorie 1 et la conversion de tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 constituaient un préalable à la mise en œuvre de l’instrument de cession des activités et, d’autre part, la conversion de l’ensemble des instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular était un préalable nécessaire à la réalisation de la vente à Banco Santander.

32

Or, même si le Tribunal ne l’a pas expressément indiqué, de tels éléments révèlent la teneur et la substance de la décision de résolution. En outre, cette analyse du Tribunal montre que, ce faisant, celui-ci a, conformément à la jurisprudence (arrêt du 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C-441/11 P, EU:C:2012:778, point 38), apprécié sur le fondement d’un critère objectif, à savoir la teneur de la décision de résolution, si l’élément de cette décision dont l’annulation était demandée était séparable du reste de ladite décision et si l’annulation partielle de la même décision aurait pour effet d’en modifier la substance.

33

Deuxièmement, il convient de relever que le point 40 de l’ordonnance attaquée vise à répondre à l’argument de la requérante rappelé au point 39 de cette ordonnance et non à apprécier, stricto sensu, le caractère détachable de l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la requérante, le Tribunal expose, au point 40 de ladite ordonnance, de façon claire et non équivoque, la raison pour laquelle il qualifie d’« illogique » son argument. Ainsi, il découle de la seconde phrase de ce point, introduite, du reste, par la locution « en effet », que cet argument est « illogique », car si les titres que la requérante détenait n’avaient pas été convertis en « nouvelles actions II », il serait impossible de considérer que la totalité du capital social de Banco Popular avait été transféré à Banco Santander.

34

Il s’ensuit que les première et troisième branches du premier moyen doivent être écartées.

35

S’agissant de la quatrième branche du premier moyen, la requérante soutient que les points 30 et 35 de l’ordonnance attaquée sont entachés d’un défaut de motivation concernant la nécessité de convertir tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 en tant que préalable à l’exécution de l’instrument de résolution consistant en la cession des activités.

36

À cet égard, il convient d’emblée de souligner que le Tribunal s’est, au point 30 de l’ordonnance attaquée, limité à identifier la substance de la décision de résolution en rappelant la teneur de l’article 6 de cette décision sans procéder à une quelconque appréciation de la nécessité de convertir tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 en tant que préalable indispensable à l’exécution de l’instrument de résolution.

37

Quant au point 35 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal y indique que, pour les raisons qu’il vient d’énumérer, la conversion de l’ensemble des instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular était un préalable nécessaire à la réalisation de la vente à Banco Santander, que cette vente n’aurait pu avoir lieu dans les mêmes conditions si certains des instruments de fonds propres de catégorie 2 en circulation à la date de la décision de résolution n’avaient pas été convertis et que l’annulation de la conversion de certains de ces instruments serait de nature à modifier la substance de la décision de résolution.

38

Ce point ne saurait être par conséquent lu séparément des points 28 à 34 de l’ordonnance attaquée qui le précèdent dans lesquels le Tribunal a, conformément aux exigences rappelées au point 26 du présent arrêt, exposé les motifs l’ayant conduit à estimer que la conversion de tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 était un préalable nécessaire à l’exécution de l’instrument de résolution.

39

Il s’ensuit que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, l’appréciation du Tribunal figurant au point 35 de l’ordonnance attaquée est suffisamment motivée.

40

La requérante soutient également que le Tribunal a, au point 35 de l’ordonnance attaquée, commis une erreur de droit dans la mesure où, au regard des différents arguments qu’elle a invoqués, il aurait été justifié de conclure que si les bons BPE Financiaciones n’avaient pas été convertis en actions de Banco Popular, Banco Santander n’aurait ni renoncé à présenter son offre pour l’acquisition des activités de Banco Popular ni réduit le prix d’achat offert, de telle sorte que la conversion des bons BPE Financiaciones en actions de Banco Popular ne supposait pas la modification des conditions de la vente des actions de Banco Popular à Banco Santander et que l’annulation demandée n’avait aucune incidence sur la substance de la décision de résolution.

41

À cet égard, il y a lieu de relever que la requérante se prévaut des arguments invoqués quant à la légalité de la disposition de la décision de résolution. Or, la question de la légalité de cette décision doit être distinguée de celle de la recevabilité de la demande d’annulation partielle de ladite décision, de telle sorte que, dans le cadre de l’appréciation de la recevabilité d’un recours en annulation contre cette décision, le Tribunal n’est pas tenu d’apprécier et de répondre aux arguments invoqués à l’encontre de sa légalité.

42

Partant, la requérante ne saurait reprocher au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit et une violation de l’obligation de motivation en omettant d’apprécier des arguments relatifs à la légalité de la décision de résolution.

43

Par conséquent, la quatrième branche du premier moyen doit être écartée.

44

S’agissant des sixième et huitième branches du premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal n’a pas tenu compte, aux points 31 et 32 de l’ordonnance attaquée, de ses allégations concernant la valorisation 2 et qu’il a également ignoré son allégation relative à l’application de l’article 21, paragraphe 1, sous c), du règlement no 806/2014 concernant le respect de la condition du caractère détachable.

45

Premièrement, il importe de rappeler que, aux points 31 et 32 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal s’est limité à exposer les dispositions de la décision de résolution et, en particulier, l’article 6, paragraphe 4, de celle-ci.

46

Si, ce faisant, le Tribunal a fait mention de la valorisation 2, force est de constater que la requérante lui reproche d’avoir, lors de l’appréciation de la recevabilité de sa demande d’annulation partielle de la décision de résolution, omis de tenir compte de certains arguments invoqués dans la réplique à l’encontre de la légalité de cette décision.

47

Or, ainsi que cela ressort du point 41 du présent arrêt, dans le cadre de l’appréciation de la recevabilité d’un recours en annulation contre un acte de l’Union, la question de la légalité de cet acte doit être distinguée de celle de la recevabilité de la demande d’annulation partielle de ladite décision.

48

Deuxièmement, il convient de relever que, en réponse à la question 2 posée au titre de la mesure d’organisation de la procédure du 17 mai 2019, la requérante a indiqué que, ainsi qu’elle l’avait fait valoir au point 37 de la réplique, même si les bons émis par BPE Financiaciones étaient considérés comme un instrument de fonds propres pertinent et même si une mesure de résolution pouvait être appliquée à des instruments de fonds propres émis par une filiale ne relevant pas du règlement no 806/2014, celui-ci exige, à son article 21, paragraphe 1, sous c), pour la dépréciation et la conversion des bons, que le groupe cesse d’être viable à moins que ne soit utilisée la compétence de dépréciation ou de conversion des instruments de fonds propres émis par la filiale.

49

Il est vrai que le Tribunal n’a pas, dans l’ordonnance attaquée, explicitement pris position sur cet argument de la requérante.

50

Néanmoins, il convient de relever que le Tribunal a, au point 42 de l’ordonnance attaquée, exposé de façon claire et non équivoque les raisons pour lesquelles devait être écarté l’argument selon lequel l’absence de conversion des titres détenus par la requérante n’aurait pas empêché le transfert de la totalité des actions à Banco Santander dans les mêmes conditions.

51

En outre, le Tribunal a, aux points 43 à 51 de l’ordonnance attaquée, exposé à suffisance de droit les motifs pour lesquels le respect du principe d’égalité entre tous les créanciers de même catégorie et l’article 21 du règlement no 806/2014 ne s’opposaient pas à ce que la décision de résolution vise des instruments de fonds propres tels que ceux détenus par la requérante, à savoir des instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular émis par une filiale entièrement détenue par celle-ci.

52

Il en découle que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 27 du présent arrêt, le Tribunal a implicitement considéré que l’allégation de la requérante relative à l’application de l’article 21, paragraphe 1, sous c), du règlement no 806/2014 ne pouvait permettre de démontrer que l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution, dont l’annulation était demandée par la requérante, était détachable de cette décision.

53

Au demeurant, il importe encore d’indiquer que cette allégation de la requérante selon laquelle les conditions prévues par ce règlement pour la dépréciation et la conversion des instruments de fonds propres en cause n’étaient pas remplies portait sur la légalité de l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution et non sur la question du caractère détachable de cette disposition. Il ne saurait, par conséquent, être reproché au Tribunal de ne pas y avoir explicitement répondu.

54

Il convient dès lors d’écarter les sixième et huitième branches du premier moyen.

55

S’agissant de la septième branche du premier moyen, la requérante fait valoir que le point 42 de l’ordonnance attaquée est entaché d’une erreur de droit en raison d’un défaut de motivation. Le Tribunal n’aurait pas motivé le rejet de l’argument de la requérante mentionné au point 41 de l’ordonnance attaquée ni la nécessité de convertir tous les instruments de fonds propres avant de procéder à la mise en œuvre de l’instrument de cession des activités via le transfert à Banco Santander de la totalité du capital social de Banco Popular.

56

À cet égard, d’une part, dans la mesure où la requérante soutient que le point 42 de l’ordonnance attaquée est entaché du même défaut de motivation que le point 30 de cette ordonnance, il suffit de rappeler que, ainsi que la Cour l’a relevé au point 36 du présent arrêt, le Tribunal s’est limité, au point 30 de ladite ordonnance, à identifier la substance de la décision de résolution en rappelant la teneur de l’article 6 de la décision de résolution.

57

D’autre part, il convient de relever que, au point 42 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a écarté l’argument de la requérante en indiquant que le fait que les titres qu’elle détenait ne représentaient qu’un faible montant était indifférent dans la mesure où l’exercice du pouvoir de dépréciation et de conversion préalablement au transfert devait porter sur la totalité des instruments de fonds propres de Banco Popular.

58

Il s’ensuit que le Tribunal a justifié le rejet de l’argument de la requérante. Celle-ci ne saurait, en outre, faire valoir que le Tribunal n’a pas motivé la nécessité de convertir tous les instruments de fonds propres avant de procéder à la mise en œuvre de l’instrument de cession des activités via le transfert à Banco Santander de la totalité du capital social de Banco Popular dès lors qu’une telle motivation figure explicitement aux points 28 à 35 de l’ordonnance attaquée.

59

Partant, la septième branche du premier moyen doit être écartée.

60

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’écarter comme non fondées les première, troisième, quatrième et sixième à huitième branches du premier moyen.

Sur la deuxième branche du premier moyen et le deuxième moyen

Argumentation des parties

61

Par la deuxième branche du premier moyen et le deuxième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution n’était pas détachable de cette décision.

62

Le point 40 de l’ordonnance attaquée serait erroné faute pour le Tribunal d’avoir tenu compte des données relatives aux montants des instruments de fonds propres de catégorie 2 visés à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution et convertis en actions de Banco Popular. En outre, la requérante ne se serait pas limitée à indiquer que BPE Financiaciones ne pouvait être soumise à résolution et n’aurait jamais fait valoir que cette entité faisait l’objet du dispositif de résolution, mais aurait allégué que le règlement no 806/2014, et, en particulier, son article 21, relatif à l’exercice du pouvoir de conversion et de dépréciation d’instruments de fonds propres, ne lui serait pas applicable. Le Tribunal aurait également commis une erreur de droit, aux points 45 et 46 de l’ordonnance attaquée, en appliquant indûment aux bons émis par BPE Financiaciones le principe général de résolution prévu à l’article 15, paragraphe 1, sous f), du règlement no 806/2014 alors que cette entité ne relèverait pas du champ d’application de ce règlement et que ce principe ne lui serait pas applicable. Enfin, le Tribunal aurait commis une erreur de droit, aux points 44 à 46 et 51 de l’ordonnance attaquée, en appliquant à tort le principe d’égalité de traitement aux bons émis par BPE Financiaciones.

63

Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

Appréciation de la Cour

64

À titre liminaire, il convient de souligner que la décision de résolution comprend deux volets. D’une part, le CRU a indiqué, aux articles 1er à 4 de cette décision, qui en composent le « titre I », les raisons pour lesquelles Banco Popular devait faire l’objet d’une résolution. D’autre part, le CRU a exposé, aux articles 5 à 7 de ladite décision, qui en composent le « titre II », l’instrument de cette résolution. En particulier, l’article 5 de la décision de résolution explicite l’instrument de résolution mis en œuvre, en l’espèce l’instrument de cession des activités, et l’article 6 de cette décision précise que, préalablement à la cession, le CRU fait usage de son pouvoir de dépréciation et de conversion des instruments de fonds propres de Banco Popular.

65

Quant à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution dont l’annulation était sollicitée par la requérante, le CRU y a indiqué que tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular devaient être dépréciés et convertis en « nouvelles actions II » et a dressé une liste de ces instruments incluant les instruments de fonds propres de catégorie 2 émis par BPE Financiaciones, identifiés par l’ISIN XS 0550098569.

66

Il s’ensuit que le recours devant le Tribunal visait à l’annulation d’un élément individuel de la liste d’instruments de fonds propres pertinents mentionnés à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution.

67

À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de cet acte. La Cour a itérativement jugé qu’il n’est pas satisfait à cette exigence lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de celui-ci (arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C-204/16 P, EU:C:2017:838, point 36 et jurisprudence citée).

68

Il s’ensuit que la vérification du caractère détachable d’éléments d’un acte de l’Union suppose l’examen de la portée de ceux-ci, afin d’évaluer si une annulation de ces éléments modifierait l’esprit et la substance de cet acte (arrêt du 9 novembre 2017, SolarWorld/Conseil, C-204/16 P, EU:C:2017:838, point 37 et jurisprudence citée).

69

En l’espèce, ces conditions ne sont pas réunies.

70

En effet, les éléments de la décision de résolution relatifs à la dépréciation et à la conversion des instruments de fonds propres ne peuvent être détachés des autres éléments de cette décision, et, notamment, du choix de recourir à l’instrument de résolution consistant en la cession des activités.

71

La substance d’une décision de résolution telle que celle en cause en l’espèce comprend non seulement le choix de l’instrument de résolution, mais également le choix de le combiner avec l’exercice du pouvoir de dépréciation et de conversion des instruments de fonds propres ainsi que des modalités de leur mise en œuvre.

72

Partant, ainsi que la Cour l’a indiqué aux points 31 et 32 du présent arrêt, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en concluant que l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution était intrinsèquement lié à la substance même de la décision de résolution et que l’annulation partielle de cette décision porterait atteinte à la substance de ladite décision qui suppose que tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular soient dépréciés, puis convertis en « nouvelles actions II ».

73

Ainsi, premièrement, il découle des dispositions combinées de l’article 15, paragraphe 1, sous b), de l’article 17, de l’article 21, paragraphe 10, sous c), et de l’article 22, paragraphe 1, du règlement no 806/2014 que, lorsqu’une entité fait l’objet d’une mesure de résolution, la dépréciation des instruments de fonds propres dépend du niveau de pertes de cette entité. Dès lors, la dépréciation complète des instruments de fonds propres de catégorie 2 s’impose si les pertes atteignent ce niveau de priorité des créances.

74

Deuxièmement, l’instrument de résolution choisi en l’espèce, à savoir l’instrument de cession des activités, suppose une rencontre entre une offre et une demande, de telle sorte que la remise en cause de la dépréciation et de la conversion d’un instrument de fonds propres de catégorie 2, tel que celui visé par la demande d’annulation de la requérante, porterait nécessairement atteinte au prix proposé par Banco Santander et, partant, à la cession des activités à cette entité et à l’application de l’instrument de résolution.

75

Cette appréciation n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal a, au point 40 de l’ordonnance attaquée, commis une erreur faute d’avoir tenu compte des données relatives aux montants des instruments de fonds propres de catégorie 2 visés à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution et convertis en actions de Banco Popular.

76

En effet, d’une part, la délimitation des instruments de fonds propres de catégorie 2 devant faire l’objet d’une dépréciation ou d’une conversion préalablement à la mise en œuvre de l’instrument de résolution est, conformément à l’article 15, paragraphe 1, sous b), à l’article 17 et à l’article 21, paragraphe 10, sous c), du règlement no 806/2014, déterminée par le niveau de pertes de l’entité ainsi que par les règles relatives à la priorité des créances.

77

D’autre part, contrairement à ce que soutient la requérante, quels que soient les montants de chacun de ces instruments de fonds propres, il ne pourrait être considéré que la totalité des instruments identifiés à l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution a été convertie si un de ces instruments représentant une partie même non significative desdits instruments n’avait pas été déprécié. En effet, ainsi que l’a souligné, à juste titre le Tribunal, dans une telle hypothèse, il serait impossible de considérer que la totalité du capital social de Banco Popular a été transféré à Banco Santander.

78

Doit également être écarté l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal a commis, aux points 48 et 51 de l’ordonnance attaquée, une erreur d’appréciation de ses allégations dans la mesure où elle ne se serait pas limitée à faire valoir que BPE Financiaciones ne pouvait être soumise à résolution et n’aurait jamais fait valoir que cette entité faisait l’objet du dispositif de résolution, mais aurait allégué que ladite entité, en raison de son activité, ne figurait pas parmi les établissements visés à l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2014/59 et à l’article 2 du règlement no 806/2014 auxquels ces actes, et en particulier l’article 21 dudit règlement, sont applicables.

79

À cet égard, il convient de relever que, en réponse à la première question, sous b), de la mesure d’organisation de la procédure du Tribunal du 17 mai 2019, la requérante a fait valoir qu’il existait une différence objective essentielle entre les bons émis par BPE Financiaciones et les autres instruments de fonds propres de catégorie 2 convertis en actions de Banco Popular en vertu de l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution. En particulier, la requérante a indiqué que ces bons étaient le seul instrument de fonds propres de catégorie 2 converti en actions de Banco Popular ayant été émis par une entité, à savoir BPE Financiaciones, ne pouvant faire l’objet d’une résolution.

80

Or, en indiquant, au point 48 de l’ordonnance attaquée, que la requérante avait fait valoir que l’absence de conversion des titres émis par BPE Financiaciones qu’elle détenait était compatible avec le respect du principe d’égalité de traitement entre les créanciers appartenant à une même catégorie et qu’elle se prévalait d’une différence objective entre les titres qu’elle détenait et les autres instruments de fonds propres de catégorie 2 ayant été convertis résidant dans le fait que les titres qu’elle détenait n’avaient pas été émis par Banco Popular, mais par BPE Financiaciones, et que cette entité émettrice ne remplissait pas les conditions pour faire l’objet d’une résolution, le Tribunal n’a pas commis d’erreur d’appréciation des allégations de la requérante.

81

Quant au point 51 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal y a indiqué que l’argument de la requérante selon lequel l’absence de conversion des titres émis par BPE Financiaciones qu’elle détenait était compatible avec le respect du principe d’égalité de traitement entre les créanciers appartenant à une même catégorie procédait d’une confusion. En particulier, le Tribunal a relevé que, dans la mesure où le pouvoir de conversion et de dépréciation, prévu à l’article 21 du règlement no 806/2014, est exercé à l’égard des instruments de fonds propres de l’entité faisant l’objet de la résolution, à savoir, en l’espèce, Banco Popular, le fait que ces instruments aient été émis par une filiale entièrement détenue par Banco Popular ne signifiait pas que l’entité ayant émis les instruments était l’objet du dispositif de résolution et n’est pas de nature à établir une différence de situation avec les autres instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular. Ce faisant, le Tribunal n’a pas commis d’erreur d’appréciation des allégations de la requérante.

82

L’argument de la requérante selon lequel le Tribunal aurait commis une erreur de droit, aux points 45 et 46 de l’ordonnance attaquée, en appliquant indûment aux bons émis par BPE Financiaciones, entité ne relevant pas du champ d’application du règlement no 806/2014, le principe général de résolution prévu à l’article 15, paragraphe 1, sous f), de ce règlement, doit également être écarté.

83

À cet égard, il convient de rappeler que, aux points 45 et 46 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a considéré que le principe général régissant la résolution consacré à l’article 15, paragraphe 1, sous f), du règlement no 806/2014 selon lequel les créanciers d’une même catégorie sont traités sur un pied d’égalité serait remis en cause s’il était possible d’annuler uniquement la décision de résolution en ce qu’elle prévoit la conversion de certains instruments de fonds propres de catégorie 2. Le Tribunal en a conclu que ce principe s’opposait également à l’annulation de la conversion de certains instruments de fonds propres de catégorie 2.

84

Une telle appréciation ne constitue pas une erreur de droit.

85

En effet, l’article 3, paragraphe 1, point 47, du règlement no 806/2014 dispose que, aux fins de ce règlement, la notion d’« instruments de fonds propres de catégorie 2 » s’entend des instruments de capital ou des emprunts subordonnés qui remplissent les conditions de l’article 63 du règlement no 575/2013. Selon cette disposition, des instruments qui ne sont pas directement émis par un établissement ou lorsque les emprunts subordonnés ne sont pas levés directement par l’établissement peuvent, sous réserve de remplir certaines conditions, toutefois être éligibles en tant qu’instruments de fonds propres de catégorie 2.

86

Il en découle que le pouvoir de conversion et de dépréciation prévu à l’article 21 du règlement no 806/2014 ne dépend pas de l’entité ayant émis les bons, mais des caractéristiques de ces bons.

87

La requérante n’ayant contesté, ni devant le Tribunal ni devant la Cour, que les titres émis par BPE Financiaciones constituent des instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular, et n’ayant émis aucun grief à l’encontre du point 28 de l’ordonnance attaquée, elle ne conteste pas que ces titres constituent un instrument de fonds propres d’un établissement faisant l’objet d’une résolution.

88

Par conséquent, le Tribunal a indiqué, à juste titre, que, d’une part, le cadre juridique applicable permettait de considérer comme des instruments de fonds propres de catégorie 2 les titres émis par BPE Financiaciones et, d’autre part, que de tels instruments pouvaient être soumis au pouvoir de dépréciation et de conversion en vertu de l’article 21 du règlement no 806/2014 et au principe d’égalité entre tous les créanciers de même catégorie consacré à l’article 15, paragraphe 1, sous f), du règlement no 806/2014.

89

Enfin, doit être écarté l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal a commis une erreur de droit et une erreur de motivation, aux points 44 à 46 et 51 de l’ordonnance attaquée, en appliquant à tort le principe d’égalité de traitement aux bons émis par BPE Financiaciones.

90

En effet, il convient de rappeler que, aux points 44 à 46 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a estimé que les détenteurs d’instruments de fonds propres de catégorie 2 d’un établissement sont une catégorie de créanciers devant être traités de la même manière dans le cadre de l’exercice par le CRU de son pouvoir de dépréciation et de conversion des instruments de fonds propres. Il en a déduit que ce principe général d’égalité en matière de résolution serait remis en cause s’il était possible d’annuler uniquement la décision de résolution en ce qu’elle prévoit la conversion de certains instruments de fonds propres de catégorie 2 et que, par conséquent, le respect du principe d’égalité entre tous les créanciers de même catégorie s’opposait également à l’annulation de la conversion de seulement certains instruments de fonds propres de catégorie 2.

91

Au point 51 de cette ordonnance, le Tribunal a conclu son appréciation de cet argument de la requérante en indiquant que celui-ci procédait d’une confusion. Il a souligné que les pouvoirs de conversion et de dépréciation, prévus à l’article 21 du règlement no 806/2014, étaient exercés à l’égard des instruments de fonds propres de l’entité faisant l’objet de la résolution, à savoir, en l’espèce, Banco Popular. Il a ajouté que le fait que ces instruments aient été émis par une filiale entièrement détenue par Banco Popular ne signifiait pas que l’entité ayant émis les instruments soit l’objet du dispositif de résolution et n’était pas de nature à établir une différence de situation avec les autres instruments de fonds propres de catégorie 2 de Banco Popular.

92

Pour autant que la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir répondu à certaines de ses allégations, il convient de rappeler que, conformément aux points 26 à 28 et 41 du présent arrêt, le Tribunal n’est pas tenu de répondre à tous les arguments soulevés devant lui et, en particulier, à ceux portant sur la légalité de la disposition dont l’annulation est demandée. En effet, dans la mesure où l’analyse du caractère détachable d’une disposition est menée au stade de l’appréciation de la recevabilité du recours, apprécier et, le cas échéant, répondre à des arguments invoqués quant à la légalité de l’acte en cause est prématuré.

93

En outre, la requérante se borne à invoquer de tels arguments et à faire valoir que l’article 6, paragraphe 1, sous d), de la décision de résolution étant illégal, cette disposition est détachable du reste de cette décision, sans démontrer concrètement les différences entre les détenteurs des bons émis par BPE Financiaciones et les détenteurs des autres instruments de fonds propres de catégorie 2 visés à ladite disposition, justifiant un traitement distinct de ceux-ci et une annulation partielle de la décision de résolution.

94

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’écarter comme non fondés la deuxième branche du premier moyen et le deuxième moyen.

Sur la cinquième branche du premier moyen

Argumentation des parties

95

Par la cinquième branche du premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal, en se fondant, aux points 33 et 34 de l’ordonnance attaquée, sur l’offre ferme soumise par Banco Santander le 7 juin 2017 alors que ce document n’a pas été versé au dossier de l’affaire, a commis une erreur de droit et a violé les droits de la défense. Elle reproche également au Tribunal de ne pas avoir adopté de mesure d’organisation de la procédure afin de pallier cette insuffisance du dossier. Enfin, elle soutient que, dans ce contexte et compte tenu de l’importance que le Tribunal lui a accordée, avoir connaissance de cette offre lui aurait permis de démontrer, ainsi que cela ressort de la note en bas de page 37 de la duplique déposée par le CRU devant le Tribunal, que dans ladite offre, Banco Santander n’avait formulé aucune condition ou exigence concernant les instruments de fonds propres de catégorie 2 à convertir.

96

Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

Appréciation de la Cour

97

Premièrement, pour autant que la requérante soutienne que Banco Santander n’avait formulé aucune condition ou exigence concernant les instruments de fonds propres de catégorie 2 à convertir et que le Tribunal a dénaturé l’offre soumise par Banco Santander le 7 juin 2017, une telle argumentation doit être écartée. En effet, ainsi que la requérante le souligne elle-même, il n’a pas eu accès à ce document.

98

Deuxièmement, il convient de rappeler que le Tribunal est seul juge de la nécessité éventuelle de compléter les éléments d’information dont il dispose sur les affaires dont il est saisi (arrêt du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C-125/07 P, C-133/07 P, C-135/07 P et C-137/07 P, EU:C:2009:576, point 319 et jurisprudence citée). Par conséquent, la requérante ne saurait reprocher au Tribunal de ne pas avoir demandé au CRU la production de cette offre.

99

Troisièmement, force est de constater que, d’une part, le Tribunal s’est indirectement fondé sur l’offre ferme de Banco Santander et, d’autre part, les appréciations de celui-ci reposent sur d’autres documents versés au dossier de l’affaire.

100

En effet, si le Tribunal a effectivement mentionné, aux points 33 et 34 de l’ordonnance attaquée, l’offre ferme de Banco Santander, il n’a toutefois pas fait référence au contenu de cette offre, mais s’est reporté aux éléments figurant dans la décision de résolution relatifs à ladite offre ainsi qu’aux éléments produits par le CRU.

101

En outre, il découle de la lettre de procédure du FROB du 6 juin 2017, mentionnée dans la décision de résolution ainsi qu’aux points 33 et 34 de l’ordonnance attaquée, laquelle lettre de procédure a été versée au dossier par la requérante et figure sur le site Internet du CRU, que l’offre de Banco Santander devait nécessairement respecter les indications énoncées dans cette lettre de procédure. Or, ladite lettre de procédure indiquait que tous les instruments de fonds propres de catégorie 2 énumérés à son annexe 2, dont ceux détenus par la requérante, devaient être convertis en actions, puis transférés à Banco Santander.

102

Partant, la circonstance que l’offre de Banco Santander n’ait pas été versée au dossier ne constitue pas une violation des droits de la défense de la requérante.

103

Il s’ensuit que la cinquième branche du premier moyen doit être écartée comme non fondée.

Sur les troisième et quatrième moyens

Argumentation des parties

104

Par les troisième et quatrième moyens, la requérante conteste, respectivement, l’irrecevabilité de la demande d’annulation des valorisations 1 et 2 ainsi que celle de la demande de compensation. Elle fait valoir que ces irrecevabilités sont justifiées, aux points 55 et 66 de l’ordonnance attaquée, par la seule irrecevabilité de la demande d’annulation partielle de la décision de résolution. Par conséquent, si le rejet de cette dernière demande était annulé, la demande d’annulation des valorisations 1 et 2 ainsi que la demande de compensation devraient être jugées recevables.

105

Le CRU conteste l’argumentation de la requérante.

Appréciation de la Cour

106

Force est de constater que la requérante n’a invoqué aucun argument autonome au soutien des troisième et quatrième moyens, mais qu’elle s’est limitée à faire valoir que si les premier et deuxième moyens de pourvoi étaient accueillis et le rejet, par le Tribunal, de la demande d’annulation partielle annulé, la demande d’annulation des valorisations 1 et 2 ainsi que la demande de compensation devraient être jugées recevables.

107

Les premier et deuxième moyens de pourvoi ayant été écartés comme étant non fondés, les troisième et quatrième moyens de celui-ci doivent également être écartés et, partant, le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

108

En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement de procédure, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

109

Le CRU ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par le CRU.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) déclare et arrête :

1)

Le pourvoi est rejeté.

2)

Mme Carmen Liaño Reig est condamnée aux dépens.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’espagnol.

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CJUE, n° C-947/19, Arrêt de la Cour, Carmen Liaño Reig contre Conseil de résolution unique, 4 mars 2021