Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 14 novembre 2019, n° 17/18277

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-4, 14 nov. 2019, n° 17/18277
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/18277
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Nice, 31 août 2017, N° F16/00665
Dispositif : Réouverture des débats

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT MIXTE

DU 14 NOVEMBRE 2019

N° 2019/

NT/

Rôle N° RG 17/18277 – N° Portalis DBVB-V-B7B-BBJSE

A B

C/

SARL Y

Copie exécutoire délivrée

le :

14 NOVEMBRE 2019

à :

— 

Me Philippe YOULOU, avocat au barreau de NICE

— 

Me Monica GRASSO, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de NICE en date du 01 Septembre 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 16/00665.

APPELANTE

Madame A B

demeurant […]

représentée par Me Philippe YOULOU, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

SARL Y, demeurant […]

représentée par Me Monica GRASSO, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Noëlle ABBA, Président de chambre

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2019.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 14 Novembre 2019

Signé par Madame Marie-Noëlle ABBA, Président de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Mme A B, embauchée le 1er juin 2006 en qualité de coiffeuse par la société Hair G, exploitant un salon de coiffure à l’enseigne E-F G à Nice qui a été repris le 1er janvier 2008 par la société Y, a été licenciée par lettre datée du 10 décembre 2015 ainsi rédigée :

« (')Suite à notre entretien du 4 décembre 2015, je suis dans l’obligation de prononcer votre licenciement pour les motifs suivants :

- A plusieurs reprises, vous avez tenu à vos collègues de travail des propos injurieux inacceptables à mon encontre tant par SMS que sur le réseau social Facebook,

- dans le cadre de vos fonctions, vous ne cessez de me dénigrer et de déformer mes propos auprès des salariés ce qui a pour conséquence de créer une ambiance délétère au sein du salon et de générer une démotivation du personnel.

Votre comportement est préjudiciable à l’activité de mon salon de coiffure et dans ces conditions, je suis contraint de vous notifier votre licenciement par la présente.

Je vous informe que vous devez effectuer un préavis de deux mois qui débutera à réception de la présente.

Je vous dispense d’effectuer ce préavis et vous percevrez une indemnité compensatrice de préavis pour la période de préavis non effectuée (…) ».

Le conseil de prud’hommes de Nice, saisi par Mme A B, a, par jugement du 1er

septembre 2017, dit son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et condamné la société Y au paiement de 2 400 € à titre de rappel de salaire assorti de la qualification de co-manager pour les années 2013 et 2014 et de 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme A B a relevé appel le 9 octobre 2017 de cette décision dont elle a reçu notification à une date non déterminable. La Sarl Y qui a reçu notification du jugement le 14 septembre 2017, en a également relevé appel par déclaration du 12 octobre 2017.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 2 juillet 2019, Mme A B évoque l’imprécision des motifs de son licenciement qu’elle conteste, le caractère privé des échanges dont l’employeur fait état et soutient qu’elle exerçait, au sein du salon de coiffure, les fonctions de responsable-manager depuis 2011 sans pour autant avoir reçu la rémunération conventionnelle minimum et les primes correspondant à cet emploi.

Elle demande à la cour de dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de condamner la société Y à lui délivrer, sous astreinte, des bulletins de salaire rectifiés et à lui payer :

1 964,40 € à titre de rappel de salaire et primes pour l’année 2012,

1 788,48 €à titre de rappel de salaire et primes pour l’année 2013,

2 285,17 € à titre de rappel de salaire et primes pour l’année 2014,

834,64 € à titre de rappel de salaire et primes pour les mois de janvier, février, novembre et décembre 2015,

1 034, 97 € à titre de régularisation de l’indemnité de préavis,

4 077, 96 € à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

11 000 € à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse en réparation de son préjudice financier,

302,40 € à titre de compensation de sa perte d’indemnités journalières,

1 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées le 12 février 2018, la Sarl Y conclut, au contraire, à la régularité de la lettre de licenciement comme au bien-fondé de la rupture du contrat de travail en raison des propos injurieux tenus par la salariée, via, notamment, le site Facebook, à l’encontre du gérant du salon de coiffure ainsi que de l’entreprise qui ont détérioré les relations entre les salariés en créant une ambiance délétère.

L’intimée conteste, en outre, la qualification de « responsable manager » revendiquée par Mme A B qui exerçait, à partir de 2011, les fonctions de co-manager, c’est-à-dire d’assistante du manager qui en l’espèce était M. X, le gérant de l’entreprise.

Elle sollicite en conséquence, le rejet de toutes les demandes de la salariée qu’elle tient pour partie prescrite et sa condamnation au paiement de 2 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 26 août 2019.

La cour renvoie pour plus ample exposé aux écritures reprises et soutenues par les conseils des parties à l’audience d’appel tenue le 9 septembre 2019.

MOTIFS DE LA DECISION

1) Sur le licenciement

Attendu qu’il n’y a pas lieu de considérer, contrairement à ce que soutient l’appelante, que la lettre de licenciement est insuffisamment motivée du fait dés lors que les faits reprochés, à savoir des propos injurieux et dénigrants tenus par SMS et sur le réseau social Facebook ayant conduit à une détérioration des relations dans l’entreprise, sont, même non détaillés, parfaitement circonscrits et susceptibles d’être vérifiés ou discutés dans le cadre de cette instance ;

Attendu que la société Y se prévaut de « textos » échangés par Mme D B en septembre 2015 avec sa collègue de travail Monclin et d’extraits de son compte Facebook, datant des mois d’août et septembre 2015 (pièces 11 à 17), comportant des propos ouvertement péjoratifs et insultants à l’égard du gérant du salon, M. Y Z, de l’entreprise ou de certains salariés (« il n’a pas de couille », « c’est un con », « pas de patron, pas de serviette, salon de merde », « il part en couille », « organisation de merde »…) avec, à l’appui, la photo de chiens se reniflant ; qu’il sera constaté que les SMS envoyés à un seul destinataire à partir de la ligne téléphonique personnelle de Mme D B relevaient, ainsi que cette dernière le soutient, d’une conversation purement privée dont l’employeur ne pouvait faire état dans le cadre du licenciement ; que pour les extraits du compte Facebook, aucun pièce ne dément l’affirmation de l’appelante qu’il s’agissait d’échanges privés, manifestement dans le cadre d’un groupe restreint de correspondants, étant observé que M. Y X précise avoir eu connaissance de ces échanges non pas en allant sur internet mais à la suite de leur communication, lors d’une réunion, par les salariées Monclin et Brugnaro, correspondantes de Mme D B ; qu’en l’état de l’ensemble de ces constatations et eu égard au respect de la correspondance privée du salariée s’imposant à l’employeur, le grief sera écarté ;

Attendu que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige reproche également à Mme A B d’être responsable d’une dégradation des relations au sein du salon de coiffure ; que cependant, les attestations produites par l’employeur (ses pièces 18 à 22) mettant en cause l’attitude de Mme A B et qui sont contredites sur ce point par celles dont cette dernière se prévaut, présentent des garanties d’objectivité insuffisantes pour démontrer que l’appelante qui était absente depuis huit mois en raison d’un congé parental et dont la procédure de licenciement a été engagée le 24 novembre 2015, jour de son retour dans l’entreprise, serait responsable des mauvaises relations au sein du salon ou d’un mal être du personnel pouvant avoir de multiples autres causes ; que le doute devant en toute hypothèse profiter à la salariée, ce grief sera écarté ;

Attendu qu’en l’état de l’ensemble de ces constatations, le licenciement sera déclaré sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que compte tenu de l’ancienneté de Mme A B, soit approximativement 9 ans et demi au service d’une entreprise employant moins de 11 salariés, de la rémunération qu’elle a perdue et en l’absence de toute pièce produite sur son évolution professionnelle, il lui sera alloué, en réparation de l’intégralité de son préjudice, une indemnité de licenciement abusif arbitrée à 5000€ en application de l’article L1235-5 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ;

2) Sur la classification professionnelle

Attendu que Mme A B qui soutient avoir exercé à compter du 1er janvier 2012 les fonctions de responsable de boutique sollicite le paiement de rappels de salaire et d’indemnités

correspondant à la classification manager niveau III échelon I de la convention collective de la coiffure et des profession connexes ; que si la salariée a bien suivi une formation de deux jours à la fonction de co-manager au mois de juillet 2011 et portait, selon le « dress code » de l’entreprise, une tenue noire distincte de la tenue blanche des coiffeuses, il résulte cependant des pièces et explications convaincantes de l’intimée que le seul responsable du salon de coiffure ayant le pouvoir d’engager l’entreprise auprès des tiers et fournisseurs était son gérant, M. Y X, possédant seul la qualification « franchise manager » (pièce 27), lequel était assisté mais non substitué dans sa tâche par Mme A B exerçant des fonctions relevant, selon la nomenclature de la convention collective, de la classification assistant manager ou co-manager, niveau II, échelon 3 ; que les réclamations salariales de Mme A B au titre de la classification manager niveau III échelon 1 n’apparaissent donc pas justifiées et seront écartées ;

Attendu qu’en revanche, il est constant que Mme A B n’a pas perçu, au cours de la relation de travail, la rémunération correspondant au niveau II échelon 3 ; que pour l’année 2012 et compte tenu de la saisine de la juridiction prud’homale le 30 mai 2016, l’intimée oppose, la prescription triennale prévue par l’article L3245-1 du code du travail (ses conclusions page 8), mais cette fin de non-recevoir sera écartée dès lors que les dispositions transitoires de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 (article 21) prévoient que la prescription triennale s’applique aux prescriptions en cours à compter du 16 juin 2013 sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure soit 5 ans ; que les éléments produits par les parties, en l’absence de calcul précis figurant dans leurs écritures, ne permettent pas de vérifier quelles sommes restent dues à ce jour à la salariée au titre de la classification niveau II échelon 3 ; que les débats seront dont rouverts sur ce point et il sera sursis à statuer sur tout autre demande ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l’article 450 du code de procédure civile :

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Nice du 1er septembre 2017 en ce qu’il a dit le licenciement de Mme A B justifié et rejeté ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail ;

Statuant à nouveau :

Dit le licenciement de Mme A B dépourvu de cause réelle et sérieuses et condamne la Sarl Y à lui payer 5 000 € à titre d’indemnité de licenciement abusif ;

Dit que Mme A B relève de la classification co-manager ou assistant manager, niveau II échelon 3 de la convention collective de la coiffure et des professions connexes ;

Ecarte la prescription triennale opposée par la société Selem ;

Sursoit à statuer sur les autres demandes, rouvre les débats et invite les parties à présenter un calcul des rappels d’indemnités, primes et salaires pouvant être dus à Mme A B sur la base de la classification co-manager ou assistant manager, niveau II échelon 3 de la convention collective de la coiffure et des professions connexes ;

Dit que l’affaire sera à nouveau appelée à l’audience du lundi 2 mars 2020 à 9 heures, le présent arrêt valant convocation ;

Dit que l’ordonnance de clôture interviendra le 17 février 2020.

Réserve les dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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