Cour d'appel de Paris, Pôle 2 chambre 1, 25 avril 2017, n° 15/13799

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Chronologie de l’affaire

Commentaires3

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 2 ch. 1, 25 avr. 2017, n° 15/13799
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/13799
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 17 juin 2015, N° 13/12168
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 16 mai 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRET DU 25 AVRIL 2017

(n° 169 , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/13799

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 13/12168

APPELANT

Monsieur [C] [M]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Philippe BERN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0984

INTIMEES

Madame [H] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 2]

née le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 3]

Représentée par Me Olivier HILLEL, avocat au barreau de PARIS, toque : E0257

Ayant pour avocat plaidant Me Cécile JARROSSAY, avocat au barreau de PARIS, toque : E1624, substituant Me Olivier HILLEL, avocat au barreau de PARIS, toque : E0257

SCP [E] [K]

[Adresse 3]

[Localité 4]

N° SIRET : [K]

Représentée par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0435

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 07 Février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jacques BICHARD, Président de chambre

Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier.

*****

Mme [H] [Y], héritière de sa mère [K] [W] décédée le [Date décès 1] 2008 qui exploitait sous la forme d’une EURL un fonds de commerce d’antiquités à Paris, a assigné en responsabilité M. [M] auquel en sa qualité d’avocat fiscaliste elle avait demandé une consultation et la SCP de notaires [K] anciennement SCP [X], chargée du règlement de la succession pour ne lui avoir pas conseillée de solliciter le bénéfice des dispositions de l’article 787 du code général des impôts, devant le tribunal de grande instance de Paris dont M. [M] a interjeté appel du jugement rendu le 18 juin 2005 qui, après avoir dit que [W] [X] et lui même avaient manqué à leurs obligations professionnelles, l’a condamné avec la SCP [K] à payer à Mme [H] [Y] la somme de 977 632 euros avec intérêts à compter du 15 février 2011 et application des dispositions de l’article 1154 du code civil, outre une indemnité de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions communiquées par la voie électronique le :

— infirmer le jugement déféré,

— débouter Mme [H] [Y] de ses demandes,

— condamner Mme [H] [Y] à lui payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive et attentatoire à son honneur professionnel, outre une indemnité de 10 000 euros outre une indemnité de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

— confirmer le jugement déféré sur la condamnation de M. [M] et la SCP [K] au paiement de la somme de 977 632 euros avec intérêts à compter du 15 février 2011 et application des dispositions de l’article 1154 du code civil,

— infirmer le jugement entrepris pour le surplus et statuant à nouveau :

* condamner in solidum la SCP [K] et M. [M] à lui payer la somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice moral,

* une indemnité au titre des frais irrépétibles de 20 000 euros pour la procédure de première instance et de 20 000 euros également pour la procédure d’appel.

La SCP [K] qui a constitué avocat n’a cependant pas conclu.

SUR QUOI LA COUR,

Faisant état de ce qu’il aurait été saisi par Mme [H] [Y] d’une consultation ponctuelle portant sur une question précise, à savoir la possibilité d’obtenir de l’administration fiscale des délais pour pouvoir s’acquitter des droits de succession dont elle était redevable, M. [M] indique avoir répondu à la demande de sa cliente en évoquant les dispositions de l’article 397-A du code général des impôts dont celle-ci avait effectivement bénéficié.

Certes dans sa lettre du 16 octobre 2008 adressée à M. [M], Mme [H] [Y] écrivait notamment:' Il est bien évident que n’ayant aucune liquidité personnelle et n’héritant d’aucun autre actif, je n’aurais la possibilité de régler les impôts dus qu’à condition que l’Administration Fiscale m’accorde un délai important et que je puisse gagner cet argent avec la galerie'.

Pour autant en sa qualité d’avocat, par ailleurs spécialisé en droit fiscal, M. [M] interrogé par sa cliente sur les droits fiscaux qu’elle avait à régler et informé des difficultés financières qui étaient les siennes devait non seulement répondre à la question précise qui lui était posée, mais également lui faire part de la possibilité qui s’offrait à elle de bénéficier sous certaines conditions des dispositions de l’articles 787 C du code général des impôts et de l’exonération qu’elles prévoient à hauteur de 75 % de la valeur des biens meubles ou immeubles, corporels ou incorporels affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle ayant une activité commerciale transmise par décès.

Le défaut de délivrance de cette information, peu important par ailleurs que Mme [H] [Y] ne fut pas une cliente habituelle de son cabinet, qui n’était en rien étrangère à la question qui était initialement posée, constitue donc une faute susceptible de mettre en oeuvre la responsabilité de M. [M].

Tout autant le notaire ainsi que l’a retenu à juste titre le tribunal devait également éclairer le choix de Mme [H] [Y] en l’informant de la possibilité pour elle de bénéficier de l’exonération prévue par l’article 787 C sus mentionné dans les conditions qu’il prévoit, à savoir la conservation des titres pendant quatre ans et l’annexion de cet engagement à la déclaration fiscale.

En méconnaissant ce devoir d’information dont ne le dispensait nullement la consultation donnée par M. [M] ou l’avis que celui-ci aurait pu émettre oralement , le notaire, chargé de régler la succession de la mère de Mme [H] [Y], a également commis une faute .

S’agissant de l’existence d’un lien de causalité entre les fautes retenues à l’encontre de l’avocat et du notaire et le préjudice invoqué par Mme [H] [Y], il est rappelé que l’article 787 C précité prévoit en son paragraphe b que l’engagement de conserver l’ensemble des biens affectés à l’exploitation de l’entreprise pendant quatre ans pris par l’héritier doit l’être dans la déclaration de succession.

Au cas d’espèce la déclaration de succession de la mère de l’intimée, décédée le [Date décès 1] 2008, a été déposée tardivement le 16 janvier 2009, donc largement après l’expiration du délai de six mois prévu par l’article 641 du code général des impôts.

Pour rejeter la demande d’exonération présentée par Mme [H] [Y] l’administration fiscale dans sa réponse du 7 juillet 2009, a relevé d’une part que la déclaration de succession était tardive, d’autre part que la réclamation du 9 avril 2009 tendant à obtenir le bénéfice de l’exonération avait été envoyée plus de trois mois après le dépôt de la déclaration et plus de onze mois après le décès, précisant que l’article 787 C instaure un régime de faveur d’interprétation stricte qui n’autorise pas une prise d’engagement rétroactive.

M. [M] n’a été consulté par Mme [H] [Y] que le 16 octobre 2008, alors même que les attestations produites aux débats émanant du père de l’intimé, de M. [Q] [U] et de Mme [Y] [V] ne permettent pas de retenir avec certitude qu’antérieurement à cette date l’avocat serait intervenu à propos de la situation fiscale de Mme [Y] en sa qualité d’héritière alors que le courriel du 17 mai 2008 que celle-ci lui a adressé ne fait référence qu’à la seule situation fiscale et professionnelle de sa mère.

Ainsi bien qu’intervenant postérieurement à l’expiration du délai de six mois de l’article 641 du code général des impôts, M. [M] s’il avait informé Mme [H] [Y] des dispositions de l’article 787 C du même code lui aurait permis de prendre l’engagement qu’il prévoit concomitamment au dépôt de sa déclaration de succession, quoique celle-ci fut tardive mais alors qu’aurait été respectée l’exigence, apparaissant essentielle pour l’administration fiscale, d’une prise d’engagement dans la déclaration de succession.

Il en est de même de la faute du notaire qui devait dés le début des opérations de liquidation informer sa cliente de l’existence et des conditions de mise en oeuvre dudit article 787 C.

Pour autant les fautes respectives de ces deux professionnels ne sont constitutives pour Mme [H] [Y], ainsi que le soutient M. [M] à titre subsidiaire, que d’une perte de chance d’avoir pu bénéficier de l’exonération des droits de mutation dont s’agit.

En effet il doit être tenu compte du fait que Mme [H] [Y] devait faire face à la dette fiscale importante, d’un montant de 539 187, 50 euros, laissée par sa mère qui s’était engagée à l’apurer par versements mensuels de 60 000 euros chacun, alors même que dans sa lettre précitée du 16 octobre 2008 elle déclarait ne détenir aucune liquidité et que la déclaration de succession mentionne du mobilier pour environ 200 000 euros ce ne lui permettant d’envisager qu’ une activité commerciale réduite.

Il existait en conséquence un risque important que Mme [H] [Y] ne puisse poursuivre celle-ci et respecter le délai de quatre ans de l’article 787 C du code général des impôts.

L’indemnisation de cette perte de chance sera donc limitée à la somme de 90 000 euros.

Le manquement au devoir d’information et de conseil de M. [M] et de [W] [X] est également constitutif pour Mme [H] [Y] d’un préjudice moral spécifique et justifie à ce titre l’allocation d’une somme de 3 000 euros.

Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en sa disposition relative à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

La solution du litige eu égard à l’équité commande d’accorder à Mme [H] [Y] au titre de la procédure d’appel une indemnité d’un montant de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a dit que [W] [X] et M. [M] ont manqué à leurs obligations professionnelles, ordonné l’application des dispositions de l’article 1154 ancien du code civil, condamnés la SCP [K] et M. [M] à payer à Mme [H] [Y] une indemnité d’un montant de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et les a condamnés aux dépens.

L’infirme pour le surplus et statuant à nouveau,

Condamne la SCP [K] in solidum avec M. [M] à payer à Mme [H] [Y] la somme de 90 000 euros en réparation de son préjudice financier.

Condamne la SCP [K] in solidum avec M. [M] à payer à Mme [H] [Y] la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice moral.

Condamne la SCP [K] in solidum avec M. [M] à payer à Mme [H] [Y] une indemnité de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette toute autre demande.

Condamne la SCP [K] et M. [M] aux dépens.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

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