Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 7, 25 avril 2017, n° 16/22365

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 7, 25 avr. 2017, n° 16/22365
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/22365
Dispositif : Autre décision ne dessaisissant pas la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 5 – Chambre 5-7 ARRÊT DU 25 AVRIL 2017

(n° 28, 6 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 2016/22365

Décision déférée à la Cour : n° 16-D-20 rendue le 29 septembre 2016

par l’ AUTORITE DE LA CONCURRENCE

DEMANDERESSE À L’INCIDENT :

— La société Marilyn Agency, S.A.S.

Prise en la personne de son représentant légal

XXX

Elisant domicile au Cabinet de Maître François TEYTAUD

XXX

Représentée par :

— Maître François TEYTAUD,

avocat au barreau de PARIS,

toque : J125

XXX

— Maître Thomas ELKINS et Pierre ZELENKO,

avocats au barreau de PARIS

LINKLATERS LLP

XXX

EN PRÉSENCE DE :

— La société Smith & Smith Characters, SARL

Prise en la personne de son représentant légal Dont le siège social : XXX

Elisant domicile au Cabinet de Maître François TEYTAUD

XXX

Représentée par :

— Maître François TEYTAUD,

avocat au barreau de PARIS,

toque : J125

XXX

— La société METROPOLITAN MODELS, S.A.S

Prise en la personne de son représentant légal

Dont le siège social : XXX

Elisant domicilie au Cabinet de Maître Nada SALEH CHERABIEH

XXX

Ayant pour avocat :

— Maître Nada SALEH CHERABIEH,

avocate au barreau de PARIS,

toque : J125

XXX

— L’AUTORITE DE LA CONCURRENCE

Représentée par sa présidente

Ayant son siège : XXX

représentée à l’audience par Mme Elodie CAMOUS-LEONARD, munie d’un pouvoir

— M. X DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES

XXX

Bât.5,

XXX

non représenté COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 avril 2017, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Y Z-AMSELLEM, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

— Mme Y Z-AMSELLEM, présidente de chambre, présidente

— M. Olivier DOUVRELEUR, président de chambre

— Mme Laurence FAIVRE, conseillère

GREFFIER, lors des débats : Benoit TRUET-CALLU

MINISTERE PUBLIC :

L’affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

— avant dire droit

— réputé contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Y Z-AMSELLEM, présidente et par M. Benoit TRUET-CALLU, greffier.

********

Vu la décision n° 16-D-20 rendue par l’Autorité de la concurrence le 29 septembre 2016, qui a sanctionnée pour des pratiques d’entente anticoncurrentielle plusieurs sociétés exerçant l’activité d’agence de mannequins et notamment, les sociétés Marilyn Agency, Smith & Smith Characters et Metropolitan Models, ainsi que les sociétés Elite Model Management, XXX et XXX ;

Vu les recours introduits devant la Cour d’appel de Paris aux fins d’annulation et/ou de réformation de cette décision par la société Smith & Smith Characters, le 10 novembre 2016 et par les sociétés Marilyn Agency, et Metropolitan Models le 18 novembre 2016 ;

Vu la sommation de communiquer adressée par la société Marilyn Agency à l’Autorité de la concurrence et déposée au greffe de la cour le 13 mars 2017 ;

Vu les observations déposées par l’AdlC, sur le fond, le 17 février 2017 et sur l’incident, le 22 mars 2017 ;

Vu les conclusions en réponse déposées par la société Marilyn Agency au greffe de la cour le 24 mars 2017 ; Après avoir entendu à l’audience publique du 18 avril 2017, les conseils de la société Marilyn Agency, ainsi que le représentant de l’Autorité de la concurrence, X de l’économie et le parquet général, avertis de l’audience, ayant fait savoir qu’ils n’y interviendraient pas, la société Marilyn Agency ayant été mise en mesure de répliquer et eu la parole en dernier.

SUR CE

La société Marilyn Agency demande à la cour d’enjoindre à l’Autorité de la concurrence :

À titre principal,

— de produire les tableaux figurant dans son dossier et recensant les valeurs des ventes des agences sanctionnées et toutes explications utiles à la compréhension de ces calculs, dans un délai de dix jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

À titre subsidiaire,

— de produire une version non confidentielle des tableaux de valeurs des ventes des agences sanctionnées comprenant un indice permettant de comprendre les composantes des valeurs des ventes des agences sanctionnées.

Elle expose qu’il résulte des observations de l’Autorité déposées le 17 février 2017 que le calcul des amendes a été exclusivement fixé au regard de la valeur des ventes des sociétés en cause et que compte tenu de la différence majeure entre les sanctions imposées, elle a acquis la certitude que l’Autorité a commis des erreurs soit dans les calculs de la valeur des ventes, soit dans les choix des éléments pris en compte pour les déterminer.

Elle fait valoir sur ce point que la proportion de la valeur des ventes retenue au regard du chiffre d’affaires réalisé est nettement supérieure dans son cas que dans celui des autres sociétés. Se fondant sur les « fourchettes » fournies par l’Autorité dans sa décision, elle fait observer une proportion se situant entre 18 et 60 % pour les principales agences concernées, contre 99,7 % dans son cas.

Elle expose que la valeur des ventes est l’élément exclusif sur lequel l’Autorité s’est fondée pour fixer le montant des sanctions. Elle ajoute que compte tenu de la proximité des chiffres d’affaires réalisés par elle et d’autres sociétés de même taille (Elite, IMG ou Viva) il est incohérent que les montants de valeur des ventes déclarées soient si différents, alors même que les demandes de l’Autorité étaient très détaillées et précises.

Enfin, la société Marilyn soutient que ces pièces ne sont pas protégées par le secret des affaires, compte tenu, d’une part, de leur ancienneté et d’autre part, de leur nécessité à l’exercice de ses droits de la défense.

L’Autorité de la concurrence s’oppose à la communication des pièces réclamées.

Elle indique, d’une part, qu’elle a communiqué l’ensemble des pièces de la procédure à la cour d’appel dans une version confidentielle et non confidentielle, d’autre part, que les éléments demandés sont couverts par le secret des affaires.

Selon l’Autorité, la cour d’appel peut en consultant la version confidentielle des tableaux des valeur des ventes constater que n’ont été reportées dans les tableaux que les données communiquées et certifiées par les entreprises en cause sans aucun retraitement et qu’elle n’a donc pu commettre aucune erreur.

Enfin, elle précise que quand bien même les données seraient anciennes, elles recèlent des informations sur la « structure des ventes propre à chaque entreprise » et demeurent sensibles pour cette raison. Elle ajoute sur ce point que la société Marilyn Agency peut parfaitement, au regard des éléments qui lui ont été communiqués dans le cadre de la présente procédure, faire valoir ses moyens de défense dès lors que la cour d’appel est en mesure de vérifier au vu des pièces du dossier la réalité des donnés chiffrées communiquées. Elle ajoute sur ce point qu’elle a fourni, dans ses observations sur le fond du recours, des fourchettes sur les valeurs des ventes communiquées par les entreprises citées à titre d’exemple par la société Marilyn Agency qui lui permettent de présenter utilement sa défense.

***

L’Autorité a précisé aux points 496 et suivants que compte tenu des caractéristiques propres des pratiques reprochées et de la grande disparité, notamment, de taille entre les entreprises impliquées qui, pour certaines d’entre elles, avaient connu une forte baisse de chiffre d’affaires, la méthode décrite dans le communiqué sanction n’était pas adaptée et qu’un mode de fixation forfaitaire des sanctions était préférable.

À la suite de cette précision, l’Autorité a qualifié les éléments prévus par l’article L. 464-2 du code de commerce, la gravité des faits et le dommage à l’économie. À ce titre, elle a examiné les parts du chiffre d’affaires mondial des activités des agences de mannequins établies en France, des membres du Synam et des agences concernées par le grief n°2, ainsi que la part de leur chiffre d’affaires réalisé en France et à l’étranger. Elle a aussi tenu compte de l’effet d’entraînement que la pratique avait pu exercer sur les agences n’ayant pas participé à la pratiques visée au grief n°2. Enfin, l’Autorité a retenu plusieurs éléments de nature à atténuer l’ampleur de la pratique en cause, tels que la concurrence que peuvent exercer les agences étrangères sur le marché français et, notamment, dans les zones frontalières du nord de la France, l’incorporation dans les chiffres d’affaires de revenus, parfois importants, générés par des prestations, n’ayant pas nécessairement été affectés par les pratiques en cause, tels que la gestion de certains droits à l’image. L’Autorité a, enfin, examiné les caractéristiques du secteur et les effets conjoncturels de la pratique, par renvoi aux développements sur ces points concernant le grief n°1.

Dans ses observations déposées le 16 février 2017, l’Autorité indique aux points 133 et suivants qu’elle a, dans son appréciation du poids économique des agences en cause, tenu compte de la valeur des ventes des services concernés par les pratiques et non du chiffre d’affaires.

Par ailleurs, aux points 137 et suivants, concernant le moyen selon lequel la société Marilyn Agency aurait été victime d’une rupture d’égalité au regard des sociétés Viva, Elite et IMG, l’Autorité précise que plusieurs éléments distinguaient les situations de ces sociétés et que les comparaisons effectuées par la société Marilyn de son propre chiffre d’affaires avec celui de ces concurrentes est inopérante puisqu’elle a tenu compte de la valeur des ventes et non des chiffres d’affaires.

Elle a enfin indiqué que le montant des valeurs des ventes avait été utilisé non comme montant de base pour établir la sanction, mais pour établir des catégories entre les entreprises sanctionnées pour fixer un montant forfaitaire par catégorie.

Il s’en déduit que la valeur des ventes a été en l’espèce un élément central dans l’appréciation du montant des sanctions.

La société Marilyn Agency expose que dans sa décision l’Autorité n’a pas fourni d’indications précises sur les valeurs des ventes utilisées et qu’elle n’a pas eu accès, dans le cadre de la procédure de sanction, aux documents recensant les valeurs des ventes des agences sanctionnées. Elle en conclut qu’elle ne peut en conséquence vérifier si la détermination de la valeur des ventes a fait ou non l’objet d’une erreur. Il est exact que la décision n’apporte aucune précision à ce sujet. Cependant, l’Autorité indique dans ses observations que la valeur des ventes déclarées par les sociétés Elite et IMG est inférieure à 6 millions d’euros tandis que celle déclarée par la société Marilyn Agency est de 12 millions d’euros.

Par ailleurs, ainsi qu’elle le précise, elle n’a pas pu commettre d’erreur de calcul, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté, dans la mesure où les services d’instruction ont adressé à chaque entreprise un tableau vierge préparé par eux, dont elles devaient elles-mêmes remplir les cases, les données mentionnées étant, au surplus, certifiées par le commissaire aux comptes des sociétés.

Les intitulés de ce tableau étaient, par ailleurs, particulièrement précis et rendaient impossible une erreur d’interprétation des données demandées. Elle correspondaient en effet aux :

1°) chiffre d’affaires HT pour les prestations d’agence pour prises de vue publicitaire, tournages publicitaires et défilés pour 2009, et 2010, étant précisé que devaient être inclus le montant des cessions des droits pour la presse ou les catalogues VPC pour un an en France et la commission d’agence ;

2°) chiffre d’affaires HT pour les prestations d’agence pour prises de vue réalisées exclusivement à la demande des organes de presse écrite afin d’illustrer un article rédactionnel pour 2009, et 2010 étant précisé que la commission d’agence devait être incluse ;

3°) chiffre d’affaires HT « autres ».

Les deux premières cases correspondent aux prestations concernées par le grief n°2.

Si la société Marilyn estime pouvoir détecter une incohérence dans la disproportion entre les valeurs des ventes déclarées par ses concurrentes les sociétés Elite et Viva Models Management (la société Viva), qui réalisent un chiffre d’affaires comparable au sien, ou la société XXX (société IMG), dont le chiffre d’affaires est le double du sien, alors qu’elles ont des activités semblables aux siennes, cette incohérence ne peut donc procéder d’une erreur de l’Autorité. Si une incohérence devait être relevée sur ce point, elle ne pourrait, ainsi que la requérante le reconnaît elle même dans ses conclusions, résulter que d’une répartition différente, selon les entreprises, des chiffre d’affaires par catégorie au moment de la déclaration de la valeur des ventes et, notamment, de différences de classement d’activités dans la catégorie « autres », non considérée comme en lien avec le grief.

Or si une erreur avait été commise par les entreprises concurrentes que cite la requérante, dans la classification des chiffres d’affaires des activités entre les postes 1, 2 et 3 du tableau, cette erreur des autres entreprises ne changerait rien à sa propre classification, ni au montant de ses propres valeurs des ventes telles qu’elle les a détaillées dans le document qu’elle a adressé à l’Autorité.

Par ailleurs, il n’est pas contesté que les services de l’Autorité, lorsqu’ils ont demandé les déclarations et pièces justificatives des parties sur leurs valeurs des ventes, ont précisé que ces pièces ne seraient pas soumises au contradictoire et ne seraient communiquées qu’au collège ainsi qu’au commissaire du Gouvernement. Dès lors, ces pièces ont bénéficié du statut de la protection du secret des affaires, quand bien même la procédure prévue à cet effet n’a pas été appliquée.

Ainsi que l’a fait observer l’Autorité, quand bien même ces données seraient elles anciennes de plus de 5 ans, elles n’en demeurent pas moins sensibles en ce qu’elles révèlent la structure des ventes propres à chaque agence ce qui constitue un élément hautement stratégique pour chaque entreprise.

Il n’est pas possible de contourner cette difficulté en communiquant à la société requérante les intitulés des catégories de chiffre d’affaires prises en compte dans la catégorie n°3 « CA HT Autres » en remplaçant les détails de montants par des indices base 100 (100 représentant la totalité du chiffre d’affaires des agences) représentant la part de chaque chiffre d’affaires pris en compte. En effet, ce procédé, proposé par elle à titre subsidiaire, lui donnerait accès à la structure des ventes, élément stratégique important pour chaque entreprise, ainsi qu’il vient d’être précisé.

Il se déduit de ce qui précède que les données dont la société Marilyn Agency demande la communication doivent continuer à bénéficier de la protection du secret des affaires dans le cadre du recours introduit devant la cour. Cette protection ne pourrait être levée que si les éléments en cause étaient indispensables à l’exercice des droits de la société Marilyn Agency.

Or ainsi que l’a relevé la cour précédemment, la commission d’une erreur par les autres entreprises citées par la requérante dans leurs déclarations ne changerait rien à sa propre classification des chiffres d’affaires qu’elle a déclarés et à l’exactitude de ceux ci. En conséquence, la communication des données n’est donc pas indispensable à l’exercice de ses droits.

En revanche, la cour relève que par ses conclusions au fond déposées le 13 avril 2017, la société Marilyn Agency fait valoir plusieurs moyens relatifs à la différence des sanctions, fondés, notamment, sur les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination. Dans ce cadre, la cour examinera les données communiquées et leur cohérence.

Il s’ensuit que la demande de communication des pièces réclamées par la société Marilyn Agency doit être rejetée.

PAR CES MOTIFS

— Rejette l’incident de communication des pièces demandées par la société Marilyn Agency

— Réserve les dépens sur lesquels il sera statué dans le cadre de l’examen du fond du recours.

LE GREFFIER,

Benoit TRUET-CALLU

LA PRÉSIDENTE,

Y Z-AMSELLEM

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