CAA de MARSEILLE, 4ème chambre, 6 février 2024, 23MA00803, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 4e ch.-formation à 3, 6 févr. 2024, n° 23MA00803
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 23MA00803
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 6 février 2023, N° 2105285
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 13 février 2024
Identifiant Légifrance : CETATEXT000049121763

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B A a demandé au tribunal administratif de Marseille, d’une part, d’annuler l’arrêté du 28 décembre 2020 par lequel la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence a suspendu son traitement sur la période du 7 au 18 septembre 2020 inclus, pour absence de service fait, ensemble la décision implicite portant rejet de son recours gracieux, d’autre part, d’enjoindre à cette métropole de lui verser le traitement dû au titre de cette même période et d’assortir cette somme des intérêts de retard au taux légal à compter de la date d’introduction de sa demande de première instance, et, enfin, de mettre à la charge de ladite métropole la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2105285 du 7 février 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande présentée par M. A et a mis à la charge de ce dernier la somme de 400 euros à verser à la métropole Aix-Marseille-Provence au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 avril et 5 octobre 2023, M. A, représenté par Me Roze, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2023 ;

2°) d’annuler cet arrêté de la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence du 28 décembre 2020 ;

3°) d’enjoindre à la métropole Aix-Marseille-Provence, en application des dispositions de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, d’une part, de lui accorder une autorisation d’absence pour la période du 7 au 15 septembre 2020 inclus et, d’autre part, de procéder à la régularisation de sa situation indemnitaire sur cette même période ;

4°) de mettre à la charge de la métropole Aix-Marseille-Provence une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— sur la régularité du jugement attaqué :

. en méconnaissance des dispositions de l’article R. 741-2 du code de justice administrative, le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu’il indique deux dates de lecture différentes ;

. le tribunal administratif de Marseille a dénaturé les écritures des parties et principalement, celle de la métropole Aix-Marseille-Provence ;

— sur le bien-fondé du jugement attaqué :

. l’administration a fait montre de mauvaise foi ;

. en retenant que le règlement intérieur du conseil de territoire Istres-Ouest-Provence, qui n’a pas été versé aux débats de première instance, imposait, pour bénéficier d’autorisations d’absence pour garde d’enfants de fournir des originaux des certificats médicaux des enfants et un certificat attestant de l’incapacité de son conjoint et de prendre contact à son retour avec le référent « temps de travail », le tribunal administratif de Marseille a entaché son jugement d’une erreur de droit ; à supposer même que ce règlement impose de telles obligations, il faudrait considérer que ces règles ont été incompétemment prises et qu’elles n’ont fait l’objet d’aucune publication en méconnaissance de l’article L. 221-2 du code des relations entre le public et l’administration, de sorte qu’elles ne sont pas entrées en vigueur et ne peuvent être opposées comme motif de refus d’une autorisation d’absence pour enfant malade ;

. l’administration a commis une erreur manifeste d’appréciation en procédant à une retenue sur son traitement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 septembre et 6 novembre 2023, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me Semeriva, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

— les moyens de la requête de M. A ne sont pas fondés ;

— M. A n’a respecté ni la procédure en cas d’absence d’un agent, ni le quota annuel des douze jours maximum d’absence autorisée pour garde d’enfant malade.

Un courrier du 11 août 2023, adressé aux parties en application des dispositions de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d’appeler l’affaire à l’audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l’instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 613-1 et le dernier alinéa de l’article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 12 décembre 2023, la clôture de l’instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l’article R. 613-1 du code de justice administrative.

En application de l’article R. 613-1-1 du code de justice administrative, la Cour a demandé, le 18 décembre 2023, au conseil de la métropole Aix-Marseille-Provence de produire une copie lisible de la pièce jointe n° 6 intitulée « Logiciel de temps de travail Horoquartz de M. B A » qu’il a produite devant le tribunal administratif de Marseille, à l’appui de son mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2022.

En réponse, par une lettre, enregistrée le 22 décembre 2023 et qui n’a pas été communiquée, la métropole Aix-Marseille-Provence, représentée par Me Semeriva, indique ne plus avoir accès au logiciel de temps de travail Horoquartz.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la loi n° 61-825 du 29 juillet 1961 de finances rectificative pour 1961 ;

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Lombart,

— les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

— et les observations de Me Semeriva, représentant la métropole Aix-Marseille-Provence.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 28 décembre 2020, la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence a suspendu le traitement de M. A, adjoint administratif de 2ème classe, qui exerçait les fonctions de développeur économique territorial, pour la période du 7 au 18 septembre 2020, pour absence de service fait. M. A relève appel du jugement du 7 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant principalement à l’annulation de cet arrêté et de la décision implicite portant rejet de son recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D’une part, aux termes de l’article 20 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au présent litige : « Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. () ». Selon l’article 87 de la loi susvisée du

26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au présent litige : « Les fonctionnaires régis par le présent titre ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l’article 20 du titre Ier du statut général. » Aux termes de l’article 4 de la loi susvisée du 29 juillet 1961 de finances rectificatives pour 1961, dans sa rédaction applicable au présent litige :

«  () L’absence de service fait, pendant une fraction quelconque de la journée, donne lieu à une retenue dont le montant est égal à la fraction du traitement frappée d’indivisibilité en vertu de la réglementation prévue à l’alinéa précédent. / Il n’y a pas service fait : / 1°) Lorsque l’agent s’abstient d’effectuer tout ou partie de ses heures de services ; / 2°) Lorsque l’agent, bien qu’effectuant ses heures de service, n’exécute pas tout ou partie des obligations de service qui s’attachent à sa fonction telles qu’elles sont définies dans leur nature et leurs modalités par l’autorité compétente dans le cadre des lois et règlements. () ". Il résulte de ces dispositions que le fonctionnaire n’a droit au paiement de son traitement qu’en contrepartie de l’accomplissement de son service.

3. D’autre part, aux termes du II de l’article 21 de la même loi, dans sa rédaction applicable au présent litige : « II.- Les fonctionnaires en activité bénéficient d’autorisations spéciales d’absence liées à la parentalité et à l’occasion de certains évènements familiaux. Ces autorisations spéciales d’absence n’entrent pas en compte dans le calcul des congés annuels () / Un décret en Conseil d’Etat détermine la liste des autorisations spéciales d’absence et leurs conditions d’octroi et précise celles qui sont accordées de droit. » Ce décret d’application auquel ces dispositions renvoient n’a pas été adopté.

4. La retenue sur rémunération en litige a été opérée du 7 au 18 septembre 2020, par l’arrêté contesté de la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence du 28 décembre 2020, au seul motif que : « M. A n’a fourni aucun justificatif pour son absence » et après un signalement fait par une note signée le 5 octobre 2020 par la directrice de l’économie du conseil de territoire Istres-Ouest-Provence. Si, dans cette même note, cette directrice commence par affirmer que M. A est en absence injustifiée pour la période du « 2 au 18 septembre 2020 », elle détaille, par la suite, et de façon contradictoire avec cette première affirmation, la situation administrative de l’appelant, sur cette même période, en indiquant tout à la fois qu’il était en situation de garde d’enfants, du « 2 au 4 septembre 2020 », en formation le « 3 septembre 2020 » et que ses absences du « 7 au 18 septembre 2020 » n’étaient pas justifiées. Avant de reprocher à M. A d’avoir à nouveau fait preuve de non-respect de sa hiérarchie et des procédures, la directrice ajoute, toujours dans cette note, que : " M. A m’a informée de ses absences par téléphone ou par mail mais ne m’a pas fourni de certificats les justifiant. / Effectivement, j’ai reçu un appel téléphonique le 2 septembre m’indiquant qu’en raison de problèmes de santé rencontrés par sa conjointe, Il serait absent pour garde d’enfant (sa fille) jusqu’au

11 septembre 2020 soit 8 jours. Puis par mail datant du 14 septembre 2020, il nous informait de sa prolongation d’absence pour garde d’enfant (son fils) jusqu’au 18 septembre 2020, soit

5 jours supplémentaires, sans transmission de certificats originaux pour le justifier. Toutefois, Il semblerait que M. A ait adressé à sa référente RH des photos des certificats médicaux pour garde d’enfant. / () Lors de sa reprise le 21 septembre dernier, M. B A ne s’est pas rapproché de [la] référente gestion du temps au sein de ma Direction, afin de régulariser sa situation alors qu’il le faisait auparavant ". Nonobstant le caractère confus de ces indications, il en ressort que, comme il l’est d’ailleurs corroboré par les pièces versées au dossier, M. A a dès les 2 et 15 septembre 2020 informé son administration de ses absences, par des courriels auxquels étaient joints la photographie des certificats médicaux de ses enfants. En réponse à ces deux courriels, un agent de la direction générale adjointe des ressources humaines s’est borné à indiquer à M. A qu’il transmettait ces documents au service gestion des temps, sans lui demander aucun complément, ni régularisation. De même, dans son courriel du

17 septembre 2020, et suite au second certificat médical adressé par M. A, sa supérieure hiérarchique directe lui a écrit : « OK j’ai bien compris qu’il s’agissait d’un prolongement d’absence pour enfant malade ». Il est, par ailleurs, constant que les services de la métropole intimée n’ont adressé aucune demande à M. A postérieurement à ces transmissions et avant que sa présidente ne prenne l’arrêté contesté. Si la métropole Aix-Marseille-Provence fait valoir que l’appelant ne pouvait pas ignorer que son compte sur le logiciel de temps de travail dénommé « Horoquartz » était en anomalie, les captures d’écran afférentes qu’elle a versées aux débats sont illisibles et, en réponse à la mesure d’instruction susvisée diligentée par la Cour, son conseil a indiqué que ses services n’avaient plus accès à ce logiciel. Dans ces conditions, M. A doit être regardé, contrairement à ce que lui reproche la présidente de la métropole

Aix-Marseille-Provence dans son arrêté contesté, comme ayant justifié ses absences, sans que l’intimée ne puisse utilement lui reprocher de ne pas s’être rapproché de la référente « Temps de travail » à son retour et de ne pas avoir pas transmis les originaux des certificats médicaux de ses enfants, ni un certificat médical attestant que son épouse se trouvait dans l’incapacité de s’occuper desdits enfants, comme l’exigerait le règlement intérieur relatif au temps partiel, aux congés et au compte épargne temps. En effet, ces exigences ne ressortent pas de la lecture de ce règlement, à supposer que celui-ci soit applicable à la situation de l’appelant, et, au contraire, il ressort de son article 28 qui est relatif à la « Maladie d’un enfant » que : « Faute de production du justificatif adéquat dans un délai de 8 jours après la pose du congé, la période concernée sera décomptée sur les congés de l’agent ».

5. En outre, si la métropole Aix-Marseille-Provence fait valoir, dans ses écritures en défense, que M. A avait épuisé son quota annuel de douze jours maximum d’absence autorisée pour garde d’enfant malade, et que M. A reconnaît dans ses écritures s’être trompé sur le reliquat de congés qu’il lui restait à ce titre, il ne résulte pas de l’instruction que l’administration aurait pris la même décision de suspension de traitement si elle s’était fondée initialement sur ce seul motif.

6. Il résulte de ce tout qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de sa requête, M. A est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, dont il n’est pas nécessaire d’examiner la régularité, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté de la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence du 28 décembre 2020 et la décision implicite portant rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

7. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. / La juridiction peut également prescrire d’office cette mesure. »

8. Eu égard à ses motifs, l’exécution du présent arrêt n’implique pas que M. A se voit attribuer, pour la période que lui-même circonscrit du 7 au 15 septembre 2020 inclus, une « autorisation d’absence ». En revanche, en sollicitant également qu’il soit enjoint à la métropole Aix-Marseille-Provence, en application des dispositions précitées de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, " de procéder à la régularisation de [s]a situation indemnitaire " sur cette même période, M. A doit être regardé comme demandant le versement des sommes correspondant aux retenues irrégulièrement opérées sur son traitement du 7 au 15 septembre 2020. Il y a ainsi lieu d’enjoindre à la présidente de la métropole intimée d’y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

9. Aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent et le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. ».

10. D’une part, ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la métropole

Aix-Marseille-Provence sollicite au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

11. D’autre part, il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions par l’appelant.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2105285 du tribunal administratif de Marseille du 7 février 2023, l’arrêté de la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence du 28 décembre 2020 et la décision implicite portant rejet du recours gracieux présenté par M. A sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence de verser, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, à M. A, les sommes correspondant aux retenues irrégulièrement opérées sur son traitement entre le 7 et le 15 septembre 2020 inclus.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B A et à la métropole Aix-Marseille-Provence.

Délibéré après l’audience du 23 janvier 2024, où siégeaient :

— M. Marcovici, président,

— M. Revert, président assesseur,

— M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 février 2024.

No 23MA00803

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