Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 octobre 2021, 20-85.644, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

N° E 20-85.644 F-D

N° 01242

CK

19 OCTOBRE 2021

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,

DU 19 OCTOBRE 2021

Le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence a formé un pourvoi contre l’ordonnance du premier président de la cour d’appel de Paris, chambre 5-15, en date du 7 octobre 2020, qui a annulé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention l’autorisant à effectuer des opérations de visite et de saisie en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles.

Des mémoires en demande et en défense ainsi que des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de Mme de Lamarzelle, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat du rapporteur général de l’Autorité de la concurrence, les observations de la SCP Célice,Texidor, Périer, avocat de la société Swarovski France, et les conclusions de M. Lesclous, avocat général, les avocats ayant eu la parole en dernier, après débats en audience publique du 21 septembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme de Lamarzelle, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, M. Lesclous, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par requête du 25 juin 2019, le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence a saisi le juge des libertés et de la détention, en application de l’article L. 450-4 du code de commerce, d’une demande aux fins d’autorisation d’opérations de visite et de saisie dans les locaux de la société Swarovski France à [Localité 1] et des sociétés du même groupe situées à la même adresse, aux fins d’établir si ces sociétés se livraient à des pratiques prohibées par les articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

3. Par ordonnance du 1er juillet 2019, le juge des libertés et de la détention a autorisé les opérations sollicitées, qui se sont déroulées les 2 et 3 juillet suivants.

4. La société Swarovski France a fait appel de cette décision et elle a formé un recours contre le déroulement des opérations de visite et saisie.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a annulé en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris en date du 1er juillet 2019 à l‘encontre de la société Swarovski France, a déclaré irrégulières les opérations de visite et saisie auxquelles ont procédé les agents de l’Autorité les 2 et 3 juillet 2019 ainsi que les opérations d’ouverture du scellé fermé provisoire qui se sont tenues le 30 juillet 2019 dans les locaux de la société Swarovski France sis [Adresse 1], ordonné la restitution à la société Swarovski France de l’intégralité des pièces saisies lors des opérations de visite et saisie susvisées, sans possibilité pour l’Autorité de la concurrence d’en conserver la copie et de les utiliser directement ou indirectement, en original ou en copie, rejeté toute autre demande, dit qu’il convenait de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et d’accorder la somme 15 000 euros à la société Swarovski France et dit que la charge des dépens serait supportée par l’Autorité de la concurrence, alors :

« 1°/ que la demande d’autorisation de procéder à des visites et saisies présentée par le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence au juge des libertés et de la détention doit comporter les éléments d’information en possession du demandeur de nature à justifier la visite ; que le juge doit vérifier que la demande d’autorisation qui lui est soumise est fondée en autorisant le cas échéant les opérations au vu des seules pièces produites par le rapporteur général, qui n’est tenu de produire que les éléments qu’il estime de nature à justifier la visite ; que pour accueillir le moyen de la société Swarovski tiré du « caractère incomplet du dossier transmis au juge des libertés et de la détention », juger que « les pièces versées (étaient) incomplètes » et que l’Autorité de la concurrence avait « transmis un dossier incomplet au JLD » et en conséquence annuler l’ordonnance d’autorisation, le premier président a relevé que certains documents joints à la requête (procès-verbaux ou saisine) faisaient eux-mêmes état de documents ou pièces remis aux rapporteurs de l’Autorité de la concurrence par la société Perlo Mondo, distributeur de produits de la société Swarovski, qui n’étaient « pas joints à la requête », et qu’une pièce jointe à la requête n’était « accompagnée que d’une traduction partielle en français » ; qu’en statuant ainsi, tandis qu’aucune obligation d’exhaustivité dans l’invocation d’éléments à l’appui de sa requête en autorisation ne pèse sur le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence, qui n’a pas à produire à l’appui de sa requête l’intégralité du dossier dont il dispose, mais seulement les éléments qu’il estime de nature à justifier la visite, peu important que certains éléments produits se réfèrent à d’autres non produits, le premier président a violé les articles L. 450-4, L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, 101 et 102 TFUE et 591 du code de procédure pénale ;

2°/ que la demande d’autorisation de procéder à des visites et saisies présentée par le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence au juge des libertés et de la détention doit comporter les éléments d’information en possession du demandeur de nature à justifier la visite ; que le rapporteur général est libre de choisir les éléments qu’il estime devoir présenter au soutien de sa demande d’autorisation ; que pour infirmer l’autorisation de procéder à des visites et saisies dans les locaux de la société Swarovski, le premier président a affirmé que l’impossibilité pour cette société de consulter des pièces en possession du rapporteur de l’Autorité de la concurrence, qui n’avaient pas été jointes à sa requête, constituait « une violation des droits de la défense » ; qu’en statuant ainsi, sans expliquer en quoi les pièces en possession du rapporteur général non annexées à sa requête, et donc sur lesquelles il ne se fondait pas, auraient été de nature à remettre en cause le bien-fondé de l’autorisation délivrée au vu des seules pièces produites, le premier président a statué par des motifs impropres à justifier légalement sa décision au regard des articles L. 450-4, L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, 101 et 102 TFUE et 591 du code de procédure pénale ;

3°/ que la demande d’autorisation de procéder à des visites et saisies présentée par le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence au juge des libertés et de la détention doit comporter les éléments d’information en possession du demandeur de nature à justifier la visite ; que le premier président a constaté que le rapporteur général était en possession d’autres éléments d’information, qui n’étaient « pas joints à la requête », ce dont il résultait qu’ils n’étaient pas invoqués par le rapporteur général à l’appui de sa demande d’autorisation ; qu’en énonçant néanmoins, pour annuler l’autorisation, que l’Autorité avait « transmis un dossier incomplet au JLD du fait de l’absence de la transmission de nombreuses pièces sur lesquelles pourtant l’Autorité a fondé sa requête », le premier président n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, et a ainsi violé les articles L. 450-4, L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, 101 et 102 TFUE et 591 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L.450-4, alinéa 2, du code de commerce :

6. Selon ce texte, la demande de l’administration tendant à être autorisée à effectuer des opérations de visite et de saisie doit comporter tous les éléments d’information en possession du demandeur de nature à justifier la visite.

7. Il s’en déduit que l’administration n’est pas tenue de transmettre au juge chargé de vérifier le bien-fondé de sa demande l’ensemble des pièces en sa possession, fussent-elles annexées à des procès-verbaux faisant l’objet d’une transmission.

8. En l’espèce, pour annuler la décision du juge des libertés et de la détention autorisant les opérations de visite et de saisie, l’ordonnance attaquée retient que les pièces versées par l’Autorité de la concurrence au soutien de sa requête sont incomplètes, en ce que d’une part les procès-verbaux communiqués font référence à des annexes qui, pour certaines, n’ont pas été transmises, d’autre part a été produit un document en langue anglaise dont une seule page a été traduite en français.

9. Le juge ajoute que l’impossibilité pour la société Swarovski de consulter les pièces manquantes dans le cadre de son recours contre l’ordonnance d’autorisation constitue une violation des droits de la défense.

10. En statuant ainsi, le premier président a méconnu le texte susvisé et les principes ci-dessus énoncés.

11. D’une part, c’est en considération des seules pièces produites devant lui qu’il appartenait au juge des libertés et de la détention d’apprécier, comme il l’a fait, si était ou non établie l’existence de présomptions de pratiques anticoncurrentielles.

12. D’autre part, l’accès au complet dossier et la discussion des pièces produites pourra s’exercer en cas d’engagement des poursuites pendant la phase juridictionnelle, lors de laquelle le principe du contradictoire est garanti.

13. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.

Et sur les deuxième et troisième moyens

14. Le deuxième moyen critique l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a annulé en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris en date du 1er juillet 2019 à l’encontre de la société Swarovski France, déclaré irrégulières les opérations de visite et saisie auxquelles ont procédé les agents de l’Autorité les 2 et 3 juillet 2019 ainsi que les opérations d’ouverture du scellé fermé provisoire qui se sont tenues le 30 juillet 2019 dans les locaux de la société Swarovski France sis [Adresse 1], a ordonné la restitution à la société Swarovski France de l’intégralité des pièces saisies lors des opérations de visite et saisie susvisées, sans possibilité pour l’Autorité de la concurrence d’en conserver la copie et de les utiliser directement ou indirectement, en original ou en copie, rejeté toute autre demande, dit qu’il convenait de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et d’accorder la somme 15 000 euros à la société Swarovski France et dit que la charge des dépens serait supportée par l’Autorité de la concurrence, alors :

« 1°/ que le juge des libertés et de la détention peut autoriser les visites et saisies dès lors que la demande d’autorisation qui lui est soumise est fondée, c’est-à-dire comporte un ou plusieurs indices permettant de présumer l’existence d’une ou plusieurs pratiques anticoncurrentielles dont la preuve est recherchée ; que pour infirmer l’ordonnance d’autorisation, le premier président a affirmé que « les pièces annexées à la requête de l’ADLC [étaient] insuffisantes pour établir les indices des pratiques anticoncurrentielles présumées » ; qu’en exigeant à tort la caractérisation de plusieurs indices ou présomptions, tandis qu’un seul indice, caractérisé en l’espèce, était suffisant pour confirmer l’autorisation délivrée, le premier président a violé les articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, 101 et 102 TFUE et 591 du code de procédure pénale ;

2°/ que l’autorisation de visites et saisies est fondée dès lors qu’un indice ou un faisceau d’indices permet de présumer l’existence d’une pratique anticoncurrentielle ; que l’appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d’appel pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit ; que pour annuler l’autorisation, le premier président s’est borné à énoncer que « la démonstration du juge des libertés et de la détention concernant les 4 indices de pratiques anticoncurrentielles présumées de la part de Swarovski ne repos[ait] que sur 6 annexes, constituées pour la plupart d’échanges de mails peu précis et tirés de leur contexte, de la plainte de la société Perlo Mondo (en litige commercial avec Swarovski) et des contrats entre les sociétés Swarovski France et Perlo Mondo », pour en déduire que « les pièces annexées à la requête de l’ADLC [étaient] insuffisantes pour établir les indices de pratiques anticoncurrentielles présumées » et que le juge des libertés et de la détention n’aurait « pas procédé à la vérification du fondement de la requête de l’Autorité » ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher lui-même si un indice de pratique anticoncurrentielle résultait d’une partie des annexes dont il n’a pas analysé la valeur, ainsi qu’il résulte de la mention de l’analyse de « la plupart » seulement des annexes, ou des courriels, même « peu précis », pris en compte par le juge des libertés et de la détention, le premier président a méconnu son office et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 450-4, L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, 101 et 102 TFUE, 561 du code de procédure civile et 593 du code de procédure pénale ;

3°/ que, s’agissant d’une mesure destinée à rechercher des éléments de preuve, un indice de participation à une pratique anticoncurrentielle suffit à justifier l’autorisation de visites et saisies ; que pour autoriser les opérations, le juge des libertés et de la détention avait caractérisé « une série de quatre pratiques anticoncurrentielles » prohibées suspectées ; que pour accueillir le moyen de la société Swarovski tiré du défaut de contrôle et de caractérisation de présomptions par le juge des libertés et de la détention « en l’absence de caractérisations des conditions posées par l’article L. 450-4 al. 2 du code de commerce », le premier président a considéré que « la motivation de l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris [était] insuffisante pour démontrer une présomption d’abus de position dominante » (ibid.) ; qu’en statuant ainsi, par des motifs impropres à exclure la suspicion des trois autres pratiques suspectées dans l’ordonnance d’autorisation, consistant, non pas en un abus de position dominante, mais en des ententes anticoncurrentielles prohibées, le premier président a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 et L. 450-4 du code de commerce, 101 TFUE et 591 du code de procédure pénale. »

15. Le troisième moyen critique l’ordonnance attaquée en ce qu’elle a annulé en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris en date du 1er juillet 2019 à l’encontre de la société Swarovski France, déclaré irrégulières les opérations de visite et saisie auxquelles ont procédé les agents de l’Autorité les 2 et 3 juillet 2019 ainsi que les opérations d’ouverture du scellé fermé provisoire qui se sont tenues le 30 juillet 2019 dans les locaux de la société Swarovski France sis [Adresse 1], ordonné la restitution à la société Swarovski France de l’intégralité des pièces saisies lors des opérations de visite et saisie susvisées, sans possibilité pour l’Autorité de la concurrence d’en conserver la copie et de les utiliser directement ou indirectement, en original ou en copie, rejeté toute autre demande, dit qu’il convenait de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et d’accorder la somme 15 000 euros à la société Swarovski France et dit que la charge des dépens serait supportée par l’Autorité de la concurrence, alors :

« 1°/ que le juge des libertés et de la détention peut autoriser les visites et saisies dès lors que la demande d’autorisation qui lui est soumise est fondée, c’est-à-dire comporte un ou plusieurs indices permettant de présumer l’existence de pratiques anticoncurrentielles dont la preuve est recherchée ; que lorsqu’un abus de position dominante est suspecté, la position dominante de l’entreprise n’a pas à être établie, mais doit seulement être plausible ; que pour retenir que « l’allégation d’une présomption d’abus de position dominante concernant la société Swarovski France dans le secteur de la distribution des composants en cristal, justifiant la mise en oeuvre de l’article L. 450-4 al. 2 du code de commerce, est dénuée de fondement » et annuler l’autorisation délivrée, le premier président a affirmé que « la situation de position dominante de Swarovski sur le marché des composants en cristal ne peut se déduire » des éléments retenus par le juge des libertés et de la détention ; qu’en exigeant ainsi à tort la preuve de la détention d’une position dominante par la société Swarovski, tandis que la simple suspicion d’une telle position, caractérisée en l’espèce, était suffisante, le premier président a violé les articles L. 450-4 et L. 420-2 du code de commerce, 102 TFUE et 591 du code de procédure pénale ;

2°/ qu’on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes moeurs ; qu’une clause de confidentialité d’un contrat ne peut faire obstacle à la transmission du contrat aux autorités pour préserver les droits de la défense de l’un des cocontractants, a fortiori lorsque ledit contrat est présumé constituer la mise en oeuvre d’un abus de position dominante prohibé ; que pour écarter la présomption d’abus de position dominante retenue par le juge des libertés et de la détention sur le fondement de contrats conclus entre les sociétés Swarovski et Perlo Mondo, et annuler l’autorisation, le premier président a relevé que lesdits contrats comportaient une clause de confidentialité, en sorte que « la légalité de [leur] production (…) sans l’accord de la société Swarovski France interroge[ait] » ; qu’en statuant ainsi, le premier président a violé les articles 6 et 1108 du code civil dans sa version applicable au litige, ainsi que les articles L. 450-4 et L. 420-2 du code de commerce, 102 TFUE et 591 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

16. Les moyens sont réunis.

Vu l’article L. 450-4 du code de commerce :

17. Aux termes de ce texte, les opérations de visite et saisie sont justifiées dès lors qu’il existe des présomptions de pratiques anticoncurrentielles.

18. Pour dire mal fondée l’autorisation des opérations de visite et de saisie et annuler l’ordonnance du juge des libertés et de la détention, l’ordonnance attaquée énonce qu’il ne se déduit des études économiques produites par l’Autorité de la concurrence aucune situation de position dominante de la société Swarovski France sur le marché des composants en cristal.

19. Le juge ajoute que la légalité de la production, par l’Autorité de la concurrence, des contrats entre les sociétés Swarovski France et Perlo Mondo interroge dès lors que ces documents comportent une clause de confidentialité.

20. Il relève encore que les autres documents produits par l’administration, notamment constitués d’échanges de courriels peu précis tirés de leur contexte et de la plainte de la société Perlo Mondo en litige avec la société Swarovski, ne sont pas de nature à corroborer les présomptions de pratiques anticoncurrentielles invoquées au soutien de la requête.

21. En se déterminant ainsi, le premier président a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

22. En premier lieu, c’est à tort qu’il a estimé que la position dominante de la société Swarovski France sur le marché des composants en cristal aurait dû résulter des éléments produits par l’Autorité de la concurrence, quand il suffisait, à ce stade, que soit caractérisée la présomption d’une telle position sur le marché concerné.

23. En second lieu, le juge ne pouvait s’abstenir d’analyser les contrats de distribution entre les sociétés Perlo Mondo et Swarovski France au motif qu’ils contiennent une clause de confidentialité, dès lors que ces documents ont été régulièrement obtenus par l’Autorité de la concurrence dans le cadre des pouvoirs d’enquête qu’elle tient de l’article L.450-3 du code de commerce.

24. Enfin, il ne résulte pas de la motivation de l’ordonnance que le premier président ait procédé lui-même à une réelle analyse des pièces produites par l’Autorité de la concurrence au soutien de sa requête, en particulier des courriels à partir desquels le juge des libertés et de la détention avait retenu l’existence de présomptions d’ententes prohibées sur les prix, présomptions sur lesquelles l’ordonnance attaquée omet en outre de prononcer.

25. Il en résulte que la cassation est également encourue de ces chefs.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’ordonnance susvisée du premier président de la cour d’appel de Paris, en date du 7 octobre 2020, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction du premier président de la cour d’appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe du premier président près la cour d’appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l’ordonnance annulée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf octobre deux mille vingt et un.

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