Tribunal administratif de Paris, 4 mai 2017, n° 1706139

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blog.landot-avocats.net · 12 mars 2024

Nouvelle diffusion Marchés : mettre fin à un risque de conflit d'intérêt peut se régler par un « sans suite ». Non sans prudences… Voyons ceci ensemble via une vidéo et un article. I. VIDEO Voici déjà une vidéo de 4 mn 13 : https://youtu.be/KXH1qaCUkuM II. ARTICLE Voir : III. SOURCES CE, 25 janvier 1957 Société Cracco : rec., p. 56 ; art. 432-12 du Code pénal ; article L. 2141-10 du code de la commande publique (CCP) ; Conseil d'État, 7ème / 2ème SSR, 14/10/2015, 390968 ; CE, 25 novembre 2021, Corsica Networks a c/ collectivité de Corse et NXO France, n° …

 

blog.landot-avocats.net · 2 février 2024

Réponse oui… parfois. C'est ce que vient de juger, ce 2 février 2024, le Conseil d'Etat, confirmant la position du le juge des référés du TA de Paris, dans le prolongement de sa jurisprudence antérieure. Mais alors s'imposera toujours une délicate analyse au cas par cas… et cette solution ne pourra être utilisée, en tout état de cause, que si les offres intermédiaires en cause semblent (boule de cristal à l'appui) proches, très proches, de ce qui allait être leur version finalisée. I. Bourde informatique : l'espion malgré lui II. Solution pratique : l' « interruption – …

 

louislefoyerdecostil.fr · 15 janvier 2024

En synthèse : Les marchés publics imposent, dans certains cas, une reprise du personnel. Dans un tel cas, les éléments concrets afférents à cette reprise ont une importance déterminante pour les candidats. Dès lors, la question des éléments d'information qu'un candidat est en droit d'obtenir se pose. L'information concernant la masse salariale (cumul des rémunérations brutes au sein d'un établissement hors charges patronales) constituée par les salariés devant être repris, ainsi que son coût doit être indiquée dans le document de la consultation lorsqu'elle est déterminante dans le …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Paris, 4 mai 2017, n° 1706139
Juridiction : Tribunal administratif de Paris
Numéro : 1706139

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PARIS

N°1706139/9

SOCIETE JCDECAUX FRANCE

M. X Mme Y M. A E des référés

Audience du 25 avril 2017 Ordonnance du 4 mai 2017

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le juge des référés, statuant dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L. 511-2 du code de justice administrative 39-02-02 39-08-015-01 54-03-05 54-05-03-01 C+

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2017, et des mémoires, enregistrés les 14 avril, 22 avril et 25 avril 2017, la société JCDecaux France, agissant tant en son nom propre qu’en qualité de mandataire du groupement constitué avec les sociétés RATP International SA et SNCF Participations, représentée par la SCP Lyon-Caen et Z, demande au juge des référés statuant en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative :

1°) d’enjoindre au syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole de lui communiquer le prix des prestations résultant de l’offre de l’attributaire du marché de vélos en libre-service « Vélib’ », en distinguant la somme actualisée des montants forfaitaires annuels (intégrant l’engagement de recettes complémentaires), le montant total du détail estimatif ainsi que, le cas échéant, le montant correspondant à la réutilisation d’équipements actuels, ainsi que tous éléments de comparaison entre son offre et l’offre retenue, notamment la composition et le dimensionnement des équipes affectées aux différentes tâches d’exploitation du service, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir ;

2°) de suspendre la procédure de passation du marché de vélos en libre-service « Vélib’ » lancée par le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole, jusqu’à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle il aura été procédé à la communication des documents demandés ;

3°) d’annuler la décision d’attribution du marché de vélos en libre-service « Vélib’ » au groupement Smoove SAS – Marfina SL – Indigo Infra SA – Mobivia Groupe ainsi que la décision rejetant l’offre du groupement JCDecaux France – RATP International SA – SNCF Participations ;

4°) d’annuler la procédure de passation du marché de vélos en libre-service « Vélib’ » lancée par le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole ;

5°) de mettre la somme de 6 000 euros à la charge, d’une part, du syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole, d’autre part, de la société Smoove S.A.S, de la société Marfina SL, de la société Indigo Infra S.A. et de la société Mobivia Groupe en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société JCDecaux France soutient que :

— le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole a méconnu le II de l’article 99 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 en ne produisant pas, dans les lettres reçues le 31 mars et le 13 avril 2017 par la société JCDecaux, les éléments permettant de connaître, sur plusieurs points, les raisons concrètes pour lesquelles son offre a été rejetée et celle du groupement Smoovengo retenue ; c’est le cas, dans le courrier du 31 mars 2017, concernant les critères n° 2 et n° 3, pour lesquels le pouvoir adjudicateur, s’est borné à mentionner les notes attribuées aux deux candidats, sans les accompagner de commentaires relatifs aux éléments de comparaison entre les offres et portant notamment sur la capacité du groupement lauréat de gérer un parc de plus de 20 000 vélos ; c’est également le cas concernant le critère financier, pour lequel l’information donnée, y compris dans le courrier du 13 avril 2017, est incomplète en l’absence du montant correspondant au détail estimatif ainsi qu’aux recettes complémentaires ; la communication est également incomplète en l’absence de transmission, d’une part, du référentiel de notation utilisé en l’espèce, d’autre part, d’informations sur les conditions de reprise des salariés affectés à la gestion du service Vélib’ ; le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole a également méconnu le II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 en ne communiquant pas à la société JCDecaux les caractéristiques et les avantages de l’offre retenue, malgré la demande faite en ce sens par courrier du 31 mars 2017 ; ces manquements du syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ont été de nature à léser la société JCDecaux, eu égard à la faible différence de notation entre les deux offres concurrentes (0,47 point sur 10) ; il reviendra donc au juge des référés précontractuels d’enjoindre au pouvoir adjudicateur de se conformer à ses obligations, dans le cas où celui-ci ne le ferait pas avant que le juge ne statue, et dans des délais lui permettant de contester utilement son éviction ;

— l’offre du groupement attributaire est irrégulière au sens de l’article 59 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, en raison de la violation par cette offre de la législation sociale relative à la reprise du personnel aujourd’hui affecté à la gestion du service Vélib’ ; le groupement attributaire avait l’obligation de reprendre des salariés de la société Cyclocity, filiale de JCDecaux, au sein de laquelle sont employés les personnels prenant en charge le dispositif Vélib', en application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail qui sont d’ordre public ; en effet, d’une part, l’activité d’exploitation du réseau Vélib’ constitue une entité économique autonome, d’autre part, la poursuite de Vélib’ dans le cadre du nouveau marché s’accompagne du transfert d’éléments corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l’exercice de l’activité (clientèle, abonnements en cours, archives, cartes d’utilisation, marqué et charte graphique, noms de domaine et outil de communication, droits d’utilisation du domaine public), caractéristique d’une continuité économique qui doit s’apprécier à la date du transfert ; or, il résulte de l’instruction que le pouvoir adjudicateur n’a pas exigé, dans les documents de la consultation, le respect de cette obligation de reprise du personnel, et que le groupement attributaire ne l’a pas prévue ; le pouvoir adjudicateur devait également rappeler dans les documents de la consultation que l’article L. 1224-1 du code du travail s’appliquait en l’espèce ; enfin, aucune régularisation de l’offre du groupement Smoovengo ne serait aujourd’hui acceptable sur le fondement du III de l’article 59 du décret du 25 mars 2016, car il s’agirait d’une modification substantielle de l’offre ;

— la procédure de passation du marché en cause est entachée d’une violation du principe d’impartialité ; en effet, M. N… M…, actionnaire et consultant de la société Inddigo, mandataire du groupement titulaire du marché d’assistance à la maîtrise d’ouvrage passé par la ville de Paris pour préparer la procédure du futur marché portant sur le renouvellement du dispositif Vélib', qui est aussi l’un des rédacteurs de l’étude technique de mars 2016 orientant la définition des besoins du pouvoir adjudicateur, est le frère du président de la société Smoove, M. L… M… ; la société Inddigo a également participé à la rédaction du premier programme fonctionnel, alors que la procédure de passation du marché était déjà lancée ; en outre, MM. L… et N… M… ont été simultanément salariés et actionnaires de la société Inddigo ; or, l’assistant à maîtrise d’ouvrage a incontestablement été susceptible d’influencer l’issue de la procédure ; en effet, les études élaborées par la société Inddigo en mars 2016 pour le renouvellement du service Vélib’ ont, de façon partiale et au prix d’inexactitudes matérielles, valorisé les solutions proposées par la société Smoove, et systématiquement dénigré ou passé sous silence celles de la société JCDecaux, (exclusion par principe du système de batterie portative, limitation arbitraire du poids des vélos, préconisation de la solution d’intelligence embarquée proposée par Smoove) ; il résulte de l’ensemble de ces éléments qu’en retenant comme assistant à maître d’ouvrage le groupement dont la société Inddigo était le mandataire, et en n’éliminant pas la société Smoove du dialogue compétitif, le syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole a violé le principe d’impartialité et méconnu les obligations de mise en concurrence rappelées à l’article 48 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ; que ce manquement a été de nature à léser le groupement JCDecaux/RATP/SNCF, eu égard à la faible différence de notation entre les deux offres concurrentes (0,47 point sur 10) ainsi qu’à la circonstance que le seul sous-critère non financier sur lequel le groupement attributaire a obtenu la meilleure note est précisément celui tiré de la « qualité fonctionnelle, structurelle et environnementale des équipements et du système de gestion », qui est majoritairement affecté par les orientations fonctionnelles partiales de l’étude de l’assistant à maîtrise d’ouvrage ;

— la procédure de passation du marché en cause est viciée en raison de l’irrégularité des conditions dans lesquelles le comité syndical du syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole s’est réuni le 12 avril 2017 pour autoriser la présidente du syndicat à signer le contrat avec le groupement Smoovengo ; en effet, la décision de tenir cette réunion à huis clos n’a pas été prise par le comité syndical lui-même, ainsi qu’en dispose l’article 9.4 des statuts du syndicat ;

— le syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole a dénaturé l’offre du groupement JCDecaux/RATP/SNCF ; en premier lieu, s’agissant du sous-critère n° 1 du critère n° 3, le syndicat a considéré, ainsi qu’il ressort de la lettre du 13 avril 2017 adressée à la société JCDecaux, que « en ce qui concerne les stations, on relève dans votre offre qu’en cas de déconnexion de la station avec le système central, le système permet uniquement la dépose d’un vélo », alors que l’offre du groupement évincé prévoit que le totem de chaque station comporte un système de secours en cas de déconnexion permettant « la restitution des vélos pour tout le monde et leur emprunt par les abonnés longue durée » ; en deuxième lieu, s’agissant du sous-critère n° 1 du critère n° 2, le syndicat a considéré que, « en ce qui concerne les moyens affectés à la régulation, votre offre part de l’hypothèse que les usagers assureront la moitié des besoins en régulation », alors qu’il s’agit d’un constat objectif et factuel rapporté aux critères fixés par le programme fonctionnel du marché ; en troisième lieu, s’agissant du sous-critère n° 3 du critère n° 2, le syndicat a dénaturé l’offre du groupement JCDecaux/RATP/SNCF relative à l’empreinte environnementale et à la consommation énergétique liée à l’exploitation du dispositif, en considérant qu’il ne pouvait être valorisé que partiellement ; ces dénaturations ont eu une influence sur les notes attribuées à l’offre du groupement JCDecaux/RATP/SNCF, et donc sur la décision du pouvoir adjudicateur.

Par un mémoire enregistré le 21 avril 2017 et deux mémoires enregistrés le 25 avril 2017, le syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole, représenté par la SCP F-B, conclut au rejet de la requête et demande au juge des référés de mettre à la charge de la société JCDecaux France la somme de 6 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole soutient que :

— il a communiqué au groupement JCDecaux/RATP/SNCF l’ensemble des informations requises au II de l’article 99 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, tant par la lettre reçue le 31 mars informant la société JCDecaux du rejet de son offre, que par celle du 13 avril 2017 répondant à la demande de communication de cette société, y compris en ce qui concerne le prix de l’offre de l’attributaire ; en tout état de cause, une éventuelle méconnaissance des dispositions du II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 ne conduirait pas à l’annulation de la procédure, mais à une simple injonction de communication ;

— la procédure de passation du contrat n’est entachée d’aucune erreur concernant la reprise du personnel aujourd’hui affecté à la gestion du service Vélib’ ; en effet, le pouvoir adjudicateur n’avait nullement l’obligation de déterminer lui-même si cette reprise devait être mise en œuvre en application de l’article L. 1224-1 du code du travail ; il n’était tenu que d’informer les candidats du nombre de salariés que l’attributaire était susceptible de devoir reprendre sur ce fondement, ce qu’il a fait à plusieurs stades de la procédure ; en tout état de cause, l’absence de prise de position du pouvoir adjudicateur n’a pas lésé les intérêts du groupement JCDecaux/RATP/SNCF ; enfin, à titre subsidiaire, l’article L. 1224-1 du code du travail ne s’appliquait pas en l’espèce, en l’absence de transfert, dans le cadre de changement d’attributaire du marché en cause, d’une entité économique ayant conservé son identité et une activité identique ;

— la procédure de passation du marché en cause n’a été entachée d’aucune violation du principe d’impartialité ; d’une part, M. N… M… n’a eu qu’un rôle limité dans le travail confié à la société Inddigo dans le cadre du marché d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, alors notamment qu’il a pris une année sabbatique à compter du 4 mars 2016 ; d’autre part, M. L… M… n’a plus travaillé pour la société Altermodal, liée à la société Inddigo, depuis 2008, date à laquelle il a également vendu l’ensemble des actions qu’il détenait dans la société Inddigo après sa fusion avec la société Altermodal ; en tout état de cause, la société Inddigo n’a pu avoir aucune influence sur le déroulement et l’issue de la procédure de dialogue compétitif, eu égard aux missions qui lui ont été confiées ; elle n’a notamment pas participé à la phase de définition du programme fonctionnel définitif, ni au processus de sélection des offres ; à titre subsidiaire, la société JCDecaux ne justifie pas d’un intérêt lésé par l’intervention de l’assistant à la maîtrise d’ouvrage ;

— les moyens tirés de la dénaturation de l’offre du groupement dont la société JCDecaux est mandataire sont inopérants, dans la mesure où ladite société remet en cause l’appréciation portée par le pouvoir adjudicateur sur son offre, ce qui ne relève pas de l’office du juge du référé précontractuel ; en tout état de cause, aucune dénaturation de cette offre n’a été commise ; à titre subsidiaire, l’obtention par le groupement JCDecaux/RATP/SNCF de la note maximum aux trois sous-critères contestés ne lui aurait pas permis de se voir attribuer le marché ;

— la séance du comité syndical du syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole du 12 avril 2017, au cours de laquelle la présidente du syndicat a été autorisée à signer le contrat avec le groupement Smoovengo, s’est déroulée publiquement ; en tout état de cause, ce moyen est inopérant car la société JCDecaux ne justifie sur ce point d’aucune lésion de ses intérêts.

Par des mémoires, enregistrés les 21 avril et 25 avril 2017, la société Smoove S.A.S, la société Marfina SL, la société Indigo Infra S.A. et la société Mobivia Groupe, représentées par la SELARL Symchowicz-Weissberg et associés et par la SELARL Reinhart-Marville-Torre, concluent au rejet de la requête de la société JCDecaux France et de l’intervention volontaire du comité d’entreprise de Cyclocity, du syndicat SUD commerces et services Ile-de-France et du syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne, et demande au juge des référés de mettre à la charge de la société JCDecaux France la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Smoove S.A.S, la société Marfina SL, la société Indigo Infra S.A. et la société

Mobivia Groupe soutiennent que :

— l’intervention volontaire du comité d’entreprise de Cyclocity, du syndicat SUD commerces et services Ile-de-France et du syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne est irrecevable, faute pour ceux-ci de justifier d’un intérêt pour agir dans le cadre du référé précontractuel, dès lors qu’ils ne justifient pas d’un tel intérêt en lien avec l’objet de cette procédure ; en effet, l’attribution du marché Vélib’ au groupement Smoovengo est sans incidence sur la reprise du personnel aujourd’hui affecté à la gestion du service Vélib’ ; en outre, les intervenants ne justifient pas que les personnes par lesquelles elles agissent devant le tribunal auraient qualité pour les représenter ;

— l’offre du groupement Smoovengo n’était pas irrégulière au sens de l’article 59 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ; en effet, à titre principal, le pouvoir adjudicateur n’avait nullement l’obligation de déterminer lui-même si une reprise du personnel aujourd’hui affecté à la gestion du service Vélib’ devait être mise en œuvre en application de l’article L. 1224-1 du code du travail ; la régularité des offres des candidats ne dépendait donc pas du respect de cette obligation ; en outre, la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail est sans incidence sur la régularité d’une offre d’un candidat à un marché public, dès lors que l’obligation légale qu’elles posent est étrangère à l’exécution du contrat et ne peut s’apprécier qu’après la conclusion de celui-ci ; à titre subsidiaire, l’article L. 1224-1 ne s’appliquait pas en l’espèce, en l’absence de transfert, dans le cadre de changement d’attributaire du marché en cause, d’une entité économique ayant conservé son identité et une activité identique ;

— la procédure de passation du marché en cause n’est entachée d’aucune violation du principe d’impartialité au sens de l’article 48 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ; d’une part, M. N… M… n’a pu avoir aucune influence sur le déroulement et l’issue de la procédure de dialogue compétitif, eu égard aux missions qui ont été confiées dans le cadre de l’assistance à la maîtrise d’ouvrage ; au surplus, le syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole n’a pas retenu l’ensemble des conclusions du rapport issu de l’assistance à la maîtrise d’ouvrage pour l’élaboration de son programme fonctionnel, lequel n’est au demeurant qu’un élément du dialogue compétitif ; d’autres organismes ont conseillé le syndicat dans la définition de ses besoins pour le marché en cause ; en tout état de cause, le rapport de l’assistance à la maîtrise d’ouvrage présente de manière objective les innovations du marché et les attentes des usagers ; au demeurant, M. N… M… a pris une année sabbatique à compter du 4 mars 2016 ; à titre subsidiaire, la société JCDecaux ne justifie pas d’un intérêt lésé par l’intervention de l’assistant à la maîtrise d’ouvrage ;

Par une intervention, enregistrée le 21 avril 2017, le comité d’entreprise de Cyclocity, le syndicat SUD commerces et services Ile-de-France et le syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne, représentés par Me D, demandent que le juge des référés fasse droit aux conclusions de la requête présentée par la société JCDecaux France.

Les intervenants soutiennent que :

— leurs interventions sont recevables car ils justifient d’un intérêt à contester le contrat en cause ; d’une part, les droits à l’information que le comité d’entreprise de Cyclocity tire de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002, de l’article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et des dispositions du code du travail ont été méconnus ; d’autre part, le droit d’action en justice d’un syndicat de salariés est prévu par les dispositions de l’article L. 2132-3 du code du travail, et la présente action tend à l’application de dispositions légales protégeant le droit des salariés ;

— le groupement attributaire a l’obligation de reprendre des salariés de la société Cyclocity en application des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail qui sont d’ordre public ; en effet, d’une part, l’activité d’exploitation du réseau Vélib’ constitue une entité économique autonome, d’autre part, la même activité sera poursuivie par le nouvel attributaire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code du travail ;

— l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 ;

— le décret n° 2016-86 du 1 er février 2016 ;

— le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 ;

— le code de justice administrative.

Le président du tribunal a décidé que la nature de l’affaire justifiait qu’elle soit jugée, en application du dernier alinéa de l’article L. 511-2 du code de justice administrative, par une formation composée de trois E des référés et a désigné M. X, président de section, Mme Y, président de chambre, et M. A, premier conseiller, pour statuer sur la demande de référé présentée par la société JCDecaux France.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. A,

— les observations de Me Z, représentant la société JCDecaux France, de Me B, représentant le syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole, de Me C et Me Levain, représentant la société Smoove S.A.S, la société Marfina SL, la société Indigo Infra S.A. et la société Mobivia Groupe, et de Me D, représentant le comité d’entreprise de Cyclocity, le syndicat SUD commerces et services Ile-de-France et le syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne, les intéressés reprenant les conclusions et moyens énoncés dans leurs mémoires.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation par les pouvoirs adjudicateurs de contrats administratifs ayant pour objet l’exécution de travaux, la livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée par un prix ou un droit d’exploitation, la délégation d’un service public ou la sélection d’un actionnaire opérateur économique d’une société d’économie mixte à opération unique. (…) / Le juge est saisi avant la conclusion du contrat. » ; que l’article L. 551-2 du même code dispose que : « Le juge peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre l’exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat, sauf s’il estime, en considération de l’ensemble des intérêts susceptibles d’être lésés et notamment de l’intérêt public, que les conséquences négatives de ces mesures pourraient l’emporter sur leurs avantages. / Il peut, en outre, annuler les décisions qui se rapportent à la passation du contrat et supprimer les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui méconnaissent lesdites obligations (…) » ;

2. Considérant qu’il appartient au juge administratif, saisi en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, de se prononcer sur le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à l’administration ; qu’en vertu de cet article, les personnes habilitées à agir pour mettre fin aux manquements du pouvoir adjudicateur à ses obligations de publicité et de mise en concurrence sont celles qui sont susceptibles d’être lésées par de tels manquements ; qu’il appartient, dès lors, au juge des référés précontractuels de rechercher si l’opérateur économique qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l’avoir lésé ou risquent de le léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant un opérateur économique concurrent ;

3. Considérant que le syndicat d’études Vélib’ Métropole, devenu par la suite le syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole, a engagé une procédure de dialogue compétitif en vue de la passation d’un marché public ayant pour objet la conception, la fabrication, la pose, la mise en service, l’entretien, la maintenance et la gestion d’un dispositif de vélos en libre-service à Paris et en région parisienne, en remplacement du dispositif Vélib’ actuellement en service à Paris et dans trente communes riveraines, par un avis d’appel public à concurrence, transmis au Bulletin officiel des annonces des marchés publics le 6 avril 2016 avec une rectification transmise le 13 avril 2016 ; qu’un dialogue compétitif s’est engagé avec quatre candidats ayant déposé une offre, parmi lesquels un groupement constitué de la société JCDecaux France, de RATP International SA et de SNCF Participations, ainsi que le groupement Smoovengo constitué des sociétés Smoove S.A.S, Marfina SL, Indigo Infra S.A. et Mobivia Groupe ; qu’après communication du dossier de consultation, composé notamment d’un programme fonctionnel technique et administratif modifié à plusieurs reprises au cours du dialogue compétitif, et audition des groupements candidats, ceux-ci ont été invités à remettre leur offre finale pour le 7 février 2017 ; que la commission d’appel d’offres du syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole a classé en première position l’offre du groupement Smoovengo, et en deuxième position l’offre du groupement dont la société JCDecaux France est le mandataire ; que par un courrier reçu le 31 mars 2017, la présidente du syndicat mixte Autolib’et Vélib’ Métropole a informé la société JCDecaux France que l’offre qu’elle avait proposée n’était pas retenue et que le marché était attribué au groupement Smoovengo ; que, par la requête susvisée, la société JCDecaux France, agissant tant en son nom propre qu’en qualité de mandataire du groupement constitué avec les sociétés RATP International SA et SNCF Participations, demande au juge du référé précontractuel, sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, notamment, d’annuler la procédure de passation en cause ainsi que les décisions portant attribution dudit marché au groupement Smoovengo et rejet de son offre ;

Sur l’intervention volontaire du comité d’entreprise de Cyclocity, du syndicat SUD commerces et services Ile-de-France et du syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne :

4. Considérant qu’est recevable à former une intervention devant le juge des référés toute personne qui justifie d’un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l’objet du litige ; que, compte tenu de l’objet de la procédure de référé prévue par les dispositions des articles L. 551-1 et L. 551-2 du code de justice administrative citées au point 1, ni le comité d’entreprise de Cyclocity, société à laquelle appartiennent les salariés affectés à la gestion du service Vélib’ dans le cadre du marché en cours, ni le syndicat SUD commerces et services Ile-de-France ni le syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne, ne justifient d’un intérêt propre auquel la décision à intervenir serait susceptible de préjudicier, dès lors qu’ils ne se prévalent pas d’un intérêt à conclure le contrat dont la procédure de passation est contestée ; que, par suite, leur intervention n’est pas recevable ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative :

Sur le moyen tiré de la méconnaissance du II de l’article 99 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 :

5. Considérant qu’aux termes du II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 susvisé : « Pour les marchés publics passés selon une procédure formalisée, l’acheteur, dès qu’il décide de rejeter une candidature ou une offre, notifie à chaque candidat ou soumissionnaire concerné le rejet de sa candidature ou de son offre en lui indiquant les motifs de ce rejet. / Lorsque cette notification intervient après l’attribution du marché public, elle précise, en outre, le nom de l’attributaire et les motifs qui ont conduit au choix de son offre. Elle mentionne également la date à compter de laquelle l’acheteur est susceptible de signer le marché public dans le respect des dispositions du I de l’article 101. / A la demande de tout soumissionnaire ayant fait une offre qui n’a pas été rejetée au motif qu’elle était irrégulière, inacceptable ou inappropriée, l’acheteur communique dans les meilleurs délais et au plus tard quinze jours à compter de la réception de cette demande : (…) / 2° Lorsque le marché public a été attribué, les caractéristiques et les avantages de l’offre retenue. » ;

6. Considérant que l’information sur les motifs du rejet de son offre dont est destinataire l’entreprise en application des dispositions précitées de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 a, notamment, pour objet de permettre à la société non retenue de contester utilement le rejet qui lui est opposé devant le juge du référé précontractuel saisi en application de l’article L. 551-1 du code de justice administrative ; que, par suite, l’absence de respect de ces dispositions constitue un manquement aux obligations de transparence et de mise en concurrence ; que, cependant, un tel manquement n’est plus constitué si l’ensemble des informations mentionnées à l’article 99 du décret du 25 mars 2016 a été communiqué au candidat évincé à la date à laquelle le juge des référés statue sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, et si le délai qui s’est écoulé entre cette communication et la date à laquelle le juge des référés statue a été suffisant pour permettre à ce candidat de contester utilement son éviction ;

7. Considérant que les motifs du rejet de l’offre du groupement représenté par la société JCDecaux ainsi que les motifs qui ont conduit au choix par le pouvoir adjudicateur de l’offre du groupement Smoovengo se déduisent nécessairement, contrairement à ce que la société requérante soutient, des termes de la lettre adressée par la présidente du syndicat mixte Autolib’ Vélib’ Métropole à la société JCDecaux le 31 mars 2017, qui mentionnait le classement de son offre en deuxième position, les notes qui lui avaient été attribuées pour chaque critère et chaque sous-critère, et celles qu’avait reçues l’offre retenue ; qu’en tout état de cause, la présidente du syndicat mixte Autolib’ Vélib’ Métropole a, par courrier du 13 avril 2017 faisant suite à la demande de la société JCDecaux, porté à la connaissance de cette société des éléments détaillés relatifs aux appréciations portées sur ces deux offres, pour chaque critère et chaque sous-critère ; que cette lettre mentionnait également le montant forfaitaire actualisé de l’offre du groupement Smoovengo, ainsi que le montant total de cette offre comprenant le montant total du détail estimatif ; qu’ainsi, la société JCDecaux a été mise à même de contester utilement les motifs du rejet de son offre et du choix de l’offre concurrente devant le juge du référé précontractuel ; que, par suite, le moyen tiré de la violation du II de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 doit être écarté ;

Sur les moyens tirés de l’irrégularité de la procédure et de l’irrégularité de l’offre du groupement Smoovengo en raison de l’absence de respect de l’obligation posée par l’article L. 1224-1 du code du travail :

8. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 1224-1 du code du travail : « Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise. » ; que ces dispositions trouvent à s’appliquer en cas de transfert par un employeur à un autre employeur d’une entité économique autonome, conservant son identité, et dont l’activité est poursuivie et reprise par le nouvel employeur ;

9. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 59 du décret du 25 mars 2016 susvisé : « I. – L’acheteur vérifie que les offres qui n’ont pas été éliminées en application du IV de l’article 43 sont régulières, acceptables et appropriées. / Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation notamment parce qu’elle est incomplète, ou qui méconnaît la législation applicable notamment en matière sociale et environnementale. / Une offre inacceptable est une offre dont le prix excède les crédits budgétaires alloués au marché public tels qu’ils ont été déterminés et établis avant le lancement de la procédure. / Une offre inappropriée est une offre sans rapport avec le marché public parce qu’elle n’est manifestement pas en mesure, sans modification substantielle, de répondre au besoin et aux exigences de l’acheteur formulés dans les documents de la consultation. / II. – Dans les procédures d’appel d’offres et les procédures adaptées sans négociation, les offres irrégulières, inappropriées ou inacceptables sont éliminées. Toutefois, l’acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses. / III. – Dans les autres procédures, les offres inappropriées sont éliminées. Les offres irrégulières ou inacceptables peuvent devenir régulières ou acceptables à l’issue de la négociation ou du dialogue, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses. / Lorsque la négociation ou le dialogue a pris fin, les offres qui demeurent irrégulières ou inacceptables sont éliminées. Toutefois, l’acheteur peut autoriser tous les soumissionnaires concernés à régulariser les offres irrégulières dans un délai approprié, à condition qu’elles ne soient pas anormalement basses. / IV. – La régularisation des offres irrégulières ne peut avoir pour effet de modifier des caractéristiques substantielles des offres. » ;

10. Considérant, en premier lieu, que la société JCDecaux soutient que la procédure de passation du marché en cause est entachée d’illégalité, faute pour le syndicat mixte Autolib et Vélib’ Métropole d’avoir mentionné, dans les documents de la consultation, l’obligation, découlant de l’article L. 1224-1 du code du travail, de reprise par l’attributaire du marché du personnel salarié au sein de la société Cyclocity, affecté à la gestion du système Vélib’ dans le cadre du marché arrivant à expiration au 31 décembre 2017 ; que, toutefois, il ne résulte ni des dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, ni d’aucune disposition légale ou réglementaire, que le pouvoir adjudicateur aurait dû se prononcer sur l’applicabilité de cet article au marché en cause et prévoir expressément dans les documents de la consultation la reprise des salariés, laquelle constitue, si les conditions sont réunies à la date du transfert de l’activité, une obligation légale pour le nouvel attributaire, dont ce dernier ne saurait, en tout état de cause, s’affranchir du fait du silence du contrat sur ce point ; que si, dès lors que l’entreprise attributaire était susceptible de devoir reprendre les salariés du titulaire du précédent marché sur le fondement de l’article L. 1224-1 du code du travail, le coût de la masse salariale correspondante était un élément essentiel du marché qui devait être communiqué aux candidats, il résulte de l’instruction, et il n’est d’ailleurs par contesté par la société JCDecaux, que le syndicat mixte Autolib et Vélib’ Métropole s’est conformé à cette obligation en mentionnant cette information dans les documents de la consultation, et en rappelant que l’article L. 1224-1 du code du travail était susceptible de s’appliquer ; que, par suite, la société JCDecaux n’est pas fondée à soutenir que le pouvoir adjudicateur aurait sur ce point manqué à ses obligations en matière de publicité et de mise en concurrence ;

11. Considérant, en second lieu, que la société JCDecaux soutient que l’offre du groupement attributaire est irrégulière au sens de l’article 59 du décret du 25 mars 2016, dès lors qu’elle ne respecte pas la législation sociale ; que la société requérante fait valoir, au soutien de ce moyen, que le groupement Smoovengo avait l’obligation de reprendre les salariés de la société Cyclocity, filiale de JCDecaux, qui assurent la maintenance du système Vélib', en application des dispositions d’ordre public de l’article L. 1224-1 du code du travail, et qu’en ne le prévoyant pas, l’offre qu’elle a présentée est d’un montant sous-évalué ; que, toutefois, si le coût correspondant à la reprise de salariés imposée par l’article L. 1224-1 du code du travail, lorsque ces dispositions sont susceptibles de s’appliquer, constitue un élément essentiel du marché, dont la connaissance peut permettre aux candidats d’apprécier les charges du cocontractant et d’élaborer utilement une offre, le prix de cette offre ne doit pas nécessairement assurer la couverture intégrale de ce coût, compte tenu des possibilités pour l’entreprise lauréate de le compenser, notamment par le redéploiement des effectifs en son sein ou, si l’exécution de ce marché n’assure pas un emploi à l’ensemble des salariés concernés, de la possibilité de leur donner d’autres attributions et donc de n’imputer, pour le calcul du prix de l’offre, qu’un coût salarial correspondant aux heures effectives de travail requises par la seule exécution du marché ; que ni les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail, ni aucune autre disposition légale ou réglementaire, n’interdisent que les salariés de la société Cyclocity affectés à la gestion du système Vélib’ dans le cadre du marché en cours soient, après leur éventuelle reprise par les sociétés composant le groupement Smoovengo, affectés à d’autres tâches au sein de ces sociétés, dans le respect des clauses particulières attachées à leur contrat avec la société Cyclocity et sous réserve du maintien de leurs éléments de rémunération ; que, dès lors, dans le cas où les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail trouveraient à s’appliquer, le coût de la reprise des salariés de Cyclocity par l’attributaire, s’il doit être intégralement supporté par ce dernier, ne peut être imputé au nouveau marché qu’à raison de l’affectation de ces personnels à ce marché ; qu’il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la société JCDecaux, il ne peut être déduit de ce que l’offre du groupement Smoovengo n’intègre pas le coût de la reprise des salariés actuellement employés par la société Cyclocity, et ne prévoit pas, à supposer cette circonstance établie, un nombre identique de personnes affectées à l’exécution du futur marché, que les sociétés composant ce groupement ne respecteront pas l’obligation prévue à l’article L. 1224-1 du code du travail, si les conditions d’applications en sont réunies, et que, de ce fait, son offre serait sous-évaluée ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin de déterminer si les critères d’application de l’article L. 1224-1 du code du travail sont remplis en l’espèce, la société JCDecaux n’est pas fondée à soutenir que l’offre du groupement Smoovengo est irrégulière au sens de l’article 59 du décret du 25 mars 2016 ;

Sur le moyen tiré de l’existence d’un conflit d’intérêts et de la violation du principe d’impartialité :

12. Considérant qu’aux termes de l’article 48 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 : « I. – Les acheteurs peuvent exclure de la procédure de passation du marché public : / (…) 5° Les personnes qui, par leur candidature, créent une situation de conflit d’intérêts, lorsqu’il ne peut y être remédié par d’autres moyens. Constitue une situation de conflit d’intérêts toute situation dans laquelle une personne qui participe au déroulement de la procédure de passation du marché public ou est susceptible d’en influencer l’issue a, directement ou indirectement, un intérêt financier, économique ou tout autre intérêt personnel qui pourrait compromettre son impartialité ou son indépendance dans le cadre de la procédure de passation du marché public. / II. – Un opérateur économique ne peut être exclu en application du I que s’il a été mis à même par l’acheteur d’établir, dans un délai raisonnable et par tout moyen, que son professionnalisme et sa fiabilité ne peuvent plus être remis en cause et, le cas échéant, que sa participation à la procédure de passation du marché public n’est pas susceptible de porter atteinte à l’égalité de traitement. » ;

13. Considérant qu’au nombre des principes généraux du droit qui s’imposent au pouvoir adjudicateur comme à toute autorité administrative figure le principe d’impartialité, dont la méconnaissance est constitutive d’un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ; que lorsqu’une personne a participé à la procédure d’attribution d’un marché dans des conditions lui permettant d’influencer l’issue de la procédure litigieuse par sa contribution personnelle à la rédaction des documents de la consultation ou à l’analyse des offres des candidats, alors qu’elle a des liens significatifs avec l’entreprise attributaire, une telle situation peut faire légitimement naître un doute sur l’existence d’un conflit d’intérêts et, par voie de conséquence, sur l’impartialité de la procédure suivie par le pouvoir adjudicateur ; que, le cas échéant, il appartient au pouvoir adjudicateur de mettre en œuvre toute mesure en vue de lever ce doute légitime, par exemple en écartant cette personne de la procédure d’analyse des offres ;

14. Considérant que la société JCDecaux soutient que la procédure de passation du marché en cause a été entachée d’une violation du principe d’impartialité, dès lors que M. N… M…, actionnaire et consultant de la société Inddigo, mandataire du groupement titulaire du marché d’assistance à la maîtrise d’ouvrage passé par la ville de Paris pour préparer la procédure contestée, qui est aussi l’un des rédacteurs de l’étude technique de mars 2016 orientant la définition des besoins du pouvoir adjudicateur, est le frère du président de la société Smoove, M. L… M…, lequel a lui-même travaillé par le passé au sein de la société Inddigo dont il détenu des parts ; que la société JCDecaux fait valoir, en outre, que le rapport technique de mars 2016 a de façon partiale valorisé les solutions proposées par la société Smoove, et systématiquement dénigré ou passé sous silence celles de JCDecaux ;

15. Considérant, en premier lieu, qu’il est constant que M. N… M…, salarié de la société Inddigo dont il possède des parts, est le frère de M. L… M…, président de la société Smoove ; qu’en revanche, si la société JCDecaux relève l’appartenance passée de M. L… M… à la société Inddigo, il résulte de l’instruction que celui-ci a quitté cette société en mars 2008, date à laquelle il a cédé l’ensemble des actions de cette société qu’il détenait, soit plus de sept ans avant l’attribution du marché d’assistance à la maîtrise d’ouvrage à un groupement dont la société Inddigo était l’un des trois membres, et plus de huit ans avant le début de la procédure d’attribution du marché portant sur le renouvellement de l’offre de vélos en libre-service « Vélib’ » ;

16. Considérant, en second lieu, qu’il résulte de l’instruction, d’une part, que dans le cadre du marché d’assistance à la maîtrise d’ouvrage auquel a participé la société Inddigo, au sein d’un groupement comprenant deux autres sociétés, un rapport, remis le 22 mars 2016, a été rédigé par ce groupement, portant sur une analyse technique et financière des solutions existantes en matière de vélo en libre-service, ainsi que sur les attentes des usagers d’un tel service ; que seul un extrait de cette étude, portant sur des données d’offre et d’usage du service « Vélib’ », a été communiqué aux candidats dans le cadre du dialogue compétitif ; que deux bons de commande ont été délivrés au groupement d’assistance à la maîtrise d’ouvrage en février et avril 2016, portant sur la participation à l’élaboration du programme pré-fonctionnel et du programme fonctionnel n° 1 élaborés dans le cadre du dialogue compétitif ; qu’un troisième bon de commande a été délivré en juin 2016, relatif à l’étude d’un système de location de longue durée, prestation technique qui n’a pas été retenue dans le cadre du marché ; qu’en revanche, le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole a décidé de ne pas faire participer l’assistance à la maîtrise d’ouvrage à la suite de la procédure de dialogue compétitif, et notamment à l’élaboration du programme fonctionnel n° 2 et du programme fonctionnel définitif, lesquels comportaient des évolutions significatives par rapport aux programme fonctionnel n° 1 ; qu’il est constant que l’assistant à la maîtrise d’ouvrage, qui n’a eu qu’un rôle très limité après que les noms des candidats à l’obtention du marché ont été connus en mai 2016, n’a pas davantage participé au processus d’évaluation des offres des candidats ; qu’il résulte également de l’instruction que M. N… M…, s’il a participé, avec trois autres membres du groupement d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, à la rédaction du rapport remis le 22 mars 2016, s’est mis en disponibilité de la société Inddigo dès le 4 mars 2016 pour une période d’une année, et qu’il a dès cette date entamé un voyage le menant de la France jusqu’au Japon ;

17. Considérant qu’eu égard au rôle de l’assistance à la maîtrise d’ouvrage, dont la société Inddigo n’était qu’un des membres, à l’implication personnelle limitée de M. N… M… dans l’élaboration des documents de la consultation, qui ne lui a pas permis d’influencer l’issue de la procédure, enfin à l’ancienneté des liens entre M. L… M… et la société Inddigo, la société JCDecaux n’est pas fondée à soutenir que l’égalité entre les candidats aurait été rompue par un défaut d’impartialité imputable au recours du pouvoir adjudicateur aux conseils de la société Inddigo ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d’impartialité et de l’exigence de résolution des conflits d’intérêts doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de la dénaturation de l’offre du groupement constitué par les sociétés JCDecaux, RATP International SA et SNCF Participations :

18. Considérant qu’il n’appartient pas au juge du référé précontractuel, qui doit seulement se prononcer sur le respect, par le pouvoir adjudicateur, des obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation d’un contrat, de se prononcer sur l’appréciation portée sur la valeur d’une offre ou les mérites respectifs des différentes offres ; qu’il lui appartient, en revanche, lorsqu’il est saisi d’un moyen en ce sens, de vérifier que le pouvoir adjudicateur n’a pas dénaturé le contenu d’une offre en en méconnaissant ou en en altérant manifestement les termes et procédé ainsi à la sélection de l’attributaire du contrat en méconnaissance du principe fondamental d’égalité de traitement des candidats ;

19. Considérant, en premier lieu, que, concernant le sous-critère n° 1 du critère n° 3, le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole a considéré, ainsi qu’il ressort de la lettre du 13 avril 2017 adressée à la société JCDecaux, que « en ce qui concerne les stations, on relève dans votre offre qu’en cas de déconnexion de la station avec le système central, le système permet uniquement la dépose d’un vélo » ; que si l’offre du groupement évincé prévoit, au chapitre 3.1.2.1, que le totem de chaque station comporte un système de secours en cas de déconnexion, ce système ne permet l’emprunt d’un vélo, pour les seuls abonnés longue durée, que si la station est déconnectée depuis moins de cinq minutes ; que, par suite, eu égard au caractère très limité de la possibilité d’emprunt ainsi ouverte, le pouvoir adjudicateur n’a pas dénaturé l’offre du groupement dont la société JCDecaux en portant l’appréciation susmentionnée ;

20. Concernant, en deuxième lieu, que le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole a considéré, pour l’appréciation de l’offre du groupement mené par la société JCDecaux au regard du sous-critère n° 1 du critère n° 2, que « en ce qui concerne les moyens affectés à la régulation, votre offre part de l’hypothèse que les usagers assureront la moitié des besoins en régulation » ; qu’en mentionnant cette donnée, le pouvoir adjudicateur n’a pas dénaturé l’offre du groupement évincé, laquelle indiquait, au chapitre 3.2.3.1., sur la base d’un constat réalisé dans le cadre du précédent marché dont la société JCDecaux était titulaire, que 50 % des stations présentaient des besoins de régulation par les personnels du prestataire, les 50 % restants étant régulées par l’utilisation des usagers ; que si la société JCDecaux fait valoir que le pouvoir adjudicateur ne pouvait lui faire grief d’une telle mention, cet argument n’est pas opérant dès lors qu’il relève d’une contestation de l’appréciation de la valeur de son offre, laquelle ne ressortit pas à la compétence du juge du référé précontractuel ;

21. Considérant, en troisième lieu, que si la société JCDecaux soutient que, s’agissant du sous-critère n° 3 du critère n° 2, le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole a dénaturé l’offre du groupement JCDecaux/RATP/SNCF relative à l’empreinte environnementale et à la consommation énergétique liée à l’exploitation du dispositif, en considérant qu’elle ne pouvait être valorisée que partiellement, ce moyen n’est pas opérant dès lors qu’il relève d’une contestation de l’appréciation de la valeur de son offre, laquelle, ainsi qu’il a été dit au point 18, ne ressortit pas à la compétence du juge du référé précontractuel ;

22. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la dénaturation par le pouvoir adjudicateur de l’offre présentée par le groupement constitué par les sociétés JCDecaux, RATP International SA et SNCF Participations, doit être écarté ;

Sur le moyen tiré de l’irrégularité de la délibération du comité syndical du syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole dans sa réunion du 12 avril 2017 :

23. Considérant que la société JCDecaux soutient que la procédure de passation du marché en cause a été viciée en raison de l’irrégularité des conditions dans lesquelles le comité syndical du syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole s’est réuni, selon elle à huis clos, le 12 avril 2017, pour autoriser la présidente du syndicat à signer le contrat avec le groupement Smoovengo, ; que la société JCDecaux fait valoir, à l’appui de ce moyen, que la procédure prévue par l’article 9.4 des statuts du syndicat pour décider une réunion à huis clos n’a pas été respectée ; que, toutefois, il ne résulte pas de l’instruction que la société JCDecaux soit susceptible d’avoir été lésée ou d’être lésée par une telle irrégularité, à la supposer avérée ; que, par suite, le moyen est inopérant et doit en conséquence être écarté ;

24. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la société JCDecaux France n’est pas fondée à demander l’annulation de la procédure de passation du marché public en cause ainsi que des décisions de rejet de l’offre du groupement dont elle est le mandataire et d’attribution de ce marché au groupement constitué de Smoove SAS – Marfina SL – Indigo Infra SA – Mobivia Groupe ; que les conclusions de la société JCDecaux France tendant à ce qu’il soit enjoint au syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Metropole de communiquer des documents au titre de l’article 59 du décret du 25 mars 2016 doivent également être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

25. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société JCDecaux France les sommes que le syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole et les sociétés Smoove S.A.S, Marfina SL, Indigo Infra S.A. et Mobivia Groupe demandent au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par ailleurs, les dispositions du même article font obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par la société JCDecaux France soient mises à la charge du syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole et des sociétés Smoove S.A.S, Marfina SL, Indigo Infra S.A. et Mobivia Groupe, qui ne sont pas les parties perdantes ;

O R D O N N E :

Article 1 er : L’intervention du comité d’entreprise de Cyclocity, du syndicat SUD commerces et services Ile-de-France et du syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne n’est pas admise.

Article 2 : La requête de la société JCDecaux France est rejetée.

Article 3 : Les conclusions du syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole et des sociétés Smoove S.A.S, Marfina SL, Indigo Infra S.A. et Mobivia Groupe tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à la société JCDecaux France, au comité d’entreprise de Cyclocity, au syndicat SUD commerces et services Ile-de-France, au syndicat CGT des salariés Decaux de la région parisienne, à la société Smoove S.A.S, à la société Marfina SL, à la société Indigo Infra S.A., à la société Mobivia Groupe et au syndicat mixte Autolib’ et Vélib’ Métropole.

Fait à Paris, le 4 mai 2017.

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Tribunal administratif de Paris, 4 mai 2017, n° 1706139