Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 mai 2016, n° 14/08610

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Sur la décision

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2016

N°2016/

Rôle N° 14/08610

M AB AC

C/

CENTRE SOCIAL S-Q R

Grosse délivrée le :

à :

Me Michel CABRILLAC, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

Me Isabelle GUITTARD, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de prud’hommes – Formation de départage d’AIX-EN-PROVENCE – section AD – en date du 24 Mars 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 12/42.

APPELANTE

Mademoiselle M AB AC, demeurant XXX – 13100 AIX-EN-PROVENCE

comparante en personne, assistée de Me Michel CABRILLAC, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

CENTRE SOCIAL S-Q R, demeurant 217 Avenue S-Q R – 13100 AIX-EN-PROVENCE

représentée par Me Isabelle GUITTARD, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 23 Mars 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Sylvie ARMANDET, Conseiller, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Madame Sylvie ARMANDET, Conseiller

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur K L.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2016, prorogé au 13 Mai 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2016

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur K L, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme M AB AC a été engagée par le centre social S Q R suivant contrat d’engagement éducatif (CEE) du 3 septembre 2008, modifié le 3 novembre 2008, à effet du 3 septembre au 17 décembre 2008, en qualité d’animateur occasionnel du jardin d’enfants Pagnol, moyennant une rémunération journalière forfaitaire brute de 41,49 € pour un nombre de 13 jours travaillés.

Elle a été une nouvelle fois embauchée par le centre social S Q R selon contrat d’accompagnement à l’emploi (CAE) du 22 décembre 2008, à effet du 5 janvier au 4 juillet 2009, en qualité d’assistante animateur, moyennant la perception d’une rémunération mensuelle brute de 748,20 € pour un horaire hebdomadaire de travail de 20 heures. Ce contrat a été renouvelé le 10 juin 2009 pour une durée de 6 mois, soit jusqu’au 4 janvier 2010 et le 15 juin 2010 pour une durée de 6 mois, soit jusqu’au 4 janvier 2011, sa rémunération étant portée à 816,20 € brut par mois pour un horaire hebdomadaire de travail de 20 heures.

Par la suite, la salariée a été embauchée en qualité d’animateur occasionnel suivant :

— contrat d’engagement éducatif signé le 10 janvier 2011, à effet du 10 janvier au 30 juin 2011, moyennant une rémunération journalière forfaitaire brute de 41,49 € pour 45 jours travaillés ;

— contrat d’engagement éducatif signé le 30 juin 2011, pour la période courant du 1er au 31 juillet 2011, moyennant une rémunération journalière forfaitaire brute de 41,49 € pour 16 jours travaillés ;

— contrat d’engagement éducatif signé le 25 août 2011, à effet du 25 août au 31 décembre 2011, moyennant une rémunération journalière forfaitaire brute de 41,49 € pour 68 jours travaillés.

Dans le dernier état de la relation contractuelle, sa rémunération mensuelle brute s’élevait à la somme de 736 €.

Le 11 janvier 2012, sollicitant la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée et à temps complet, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes d’Aix-en-Provence, activités diverses, lequel s’est déclaré en partage de voix le 25 juin 2012. Par jugement en date du 24 mars 2014, le juge départiteur a :

— débouté la salariée de l’intégralité de ses demandes ;

— condamné la salariée à payer à l’employeur la somme de 800 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire de la présente décision ;

— condamné la salariée aux entiers dépens de l’instance.

Le 29 avril 2014, la salariée a interjeté régulièrement appel de ce jugement.

Vu les écritures déposées par Mme M N, le 23 mars 2016, aux termes desquelles elle demande à la cour, au visa des articles L 1152-1 du code du travail, 1383 du code civil et de la convention collective applicable en l’espèce de :

— réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

— constater qu’elle est victime d’une exécution fautive et déloyale du contrat de travail et de harcèlement moral ;

— requalifier les contrats de travail à durée déterminée et à temps partiel en contrat de travail à durée indéterminée et à temps complet ;

— constater l’imputabilité de la rupture du contrat aux torts exclusifs de l’employeur en raison de ses manquements graves et répétés à ses obligations contractuelles ;

— requalifier la rupture du contrat de travail en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— constater que l’attitude de l’employeur lui cause un préjudice moral ;

en conséquence,

— débouter l’employeur de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions

— condamner l’employeur à lui payer les sommes de

*29.440 € à titre de rappel de salaire ;

*2.944 € au titre des congés payés y afférents ;

*1.224 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;

*17.664 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

*1.472 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

*147 € au titre des congés payés y afférents ;

*20.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat ;

*15.000 à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

*3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner l’employeur à lui délivrer sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir une attestation destinée à Pôle Emploi et un certificat de travail;

— condamner l’employeur aux entiers dépens ;

— ordonner la publication du jugement à intervenir aux frais de l’employeur dans un grand quotidien régional.

Vu les écritures du centre social S Q R déposées le 23 mars 2016, par lesquelles il demande à la cour de :

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté purement et simplement la salariée de toutes ses demandes, fins et conclusions et l’a condamnée au versement d’une somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner en cause d’appel la salariée au paiement d’une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— la condamner au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel.

Pour un plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures ci-dessus visées et réitérées oralement à l’audience du 23 mars 2016.

SUR CE

Sur la requalification des contrats à temps partiel en contrat à temps complet:

La salariée soutient avoir effectué au minimum 8 à 9 heures par jour sur 4 jours par semaine, soit au minimum 32 heures, voire 36 heures de travail par semaine.

Cependant, elle ne produit aucun élément au soutien de ses allégations. Elle n’a jamais contesté les mentions figurant sur ses bulletins de salaire. Elle ne conteste pas davantage le fait qu’elle travaillait pour un autre employeur 15 heures par semaine.

De son côté, l’employeur verse au dossier l’attestation du comptable de l’association, Mme A, laquelle a attesté que si la salariée avait effectué des heures complémentaires ou supplémentaires, sa responsable l’aurait signalé sur les plannings comme elle le fait pour les arrêts maladie, les congés payés etc.

En outre, l’article L 432-2 du code de l’action sociale et des familles prévoit que ne sont pas applicables à une personne titulaire d’un contrat d’engagement éducatif les dispositions de la 3e partie du code du travail, à savoir la durée du travail, la répartition et l’aménagement des horaires, les dispositions relatives au repos quotidien et au repos hebdomadaire, ainsi que les dispositions relatives au salaire minimum interprofessionnel de croissance et à la rémunération mensuelle minimale.

La salariée ne peut donc pas obtenir la requalification des contrats à temps partiel en contrat à temps complet au motif que le contrat ne comporte pas les mentions obligatoires de l’article L 3123-14 du code du travail.

Il convient par conséquent de confirmer la décision déférée qui l’a déboutée de ce chef de demande.

Sur la requalification des CAE en CDI :

Selon l’article L 5134-25 du code du travail, la durée du contrat d’accompagnement dans l’emploi ne peut être inférieure à 6 mois.

L’alinéa 2 de cet article précise que les dispositions relatives au nombre maximum des renouvellements, prévus par l’article L 1243-13 ne sont pas applicables.

En l’espèce, les parties ont conclu deux contrats d’accompagnement dans l’emploi d’une durée de 6 mois chacun, renouvelés une fois pour 6 mois, soit une période totale de 24 mois, du 5 janvier 2009 au 4 janvier 2011.

Ces contrats ayant pour objet de faciliter l’insertion professionnelle des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi, le fait que le poste occupé corresponde à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise est sans incidence sur la légalité de la convention.

Il convient par conséquent de confirmer la décision déférée qui a débouté la salariée de sa demande tendant à obtenir la requalification de ces contrats en contrat à durée indéterminée.

Sur la requalification des CEE en CDI :

Conformément à l’article L 432-4 alinéa 1 du code de l’action sociale et des familles, «le nombre de jours travaillés par une personne titulaire d’un contrat d’engagement éducatif ne peut excéder un plafond de 80 jours, apprécié sur chaque période de 12 mois consécutifs.»

En l’espèce, les parties ont conclu 4 contrats d’engagement éducatif :

— du 3 septembre au 17 décembre 2008 : 17 jours travaillés ;

— du 10 janvier au 30 juin 2011 : 62 jours effectués ;

— du 1er au 31 juillet 2011 : 16 jours travaillés ;

— du 25 août au 31 décembre 2011 : 70 jours effectués.

Il apparaît ainsi que pour l’année 2011 la salariée a travaillé 148 jours sous l’égide d’un contrat d’engagement éducatif.

L’employeur soutient que le plafond n’a jamais été dépassé, dans la mesure où le centre socioculturel fonctionne sur deux cycles saisonniers du 1er janvier au 31 juillet, puis du 1er septembre au 31 décembre et que la salariée n’a effectué que 78 jours cumulés sur le premier cycle et 70 jours cumulés sur le 2e cycle.

Cependant, admettre ce raisonnement conduirait à permettre de doubler le plafond institué par l’article L 432-4 précité, ce qui est contraire à l’esprit du texte.

Il convient par conséquent de réformer la décision déférée qui a débouté la salariée de sa demande de requalification et de requalifier les contrats d’engagement éducatif conclus à compter du 10 janvier 2011 en contrat à durée indéterminée.

Lorsque le juge fait droit à une demande de requalification d’un CDD en CDI, il doit d’office condamner l’employeur à verser à l’intéressé une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

L’employeur doit donc être condamné à régler à la salariée la somme de 736 € à titre d’indemnité de requalification.

La rupture du contrat, requalifié en contrat à durée indéterminée, doit intervenir dans les mêmes conditions qu’un contrat à durée indéterminée. La rupture du contrat à son terme, qui a eu lieu sans convocation à entretien préalable et sans lettre de licenciement motivée, s’analyse donc en un licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.

Tenant l’âge de la salariée au moment de la rupture de son contrat de travail (25 ans), de son ancienneté (1 ans)et de son salaire moyen mensuel brut (736 €), il y a lieu de lui allouer l’indemnisation suivante :

-736 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

-73,60 € au titre des congés payés y afférents ;

-368 € à titre d’indemnité de licenciement.

En application de l’article L 1235-5 du code du travail, le salarié qui avait moins de deux années d’ancienneté, peut prétendre à une indemnité correspondant au préjudice qu’il a subi.

La salariée ne conteste pas qu’à la fin de son contrat de travail, en janvier 2012, elle est partie pour une mission d’environ un mois au Canada pour garder les enfants d’une des familles membres de l’association du centre socioculturel S-Q R et que dès son retour, en février 2012, elle a intégré un poste au sein de la crèche des Lierres à Aix-en-Provence.

Eu égard à ces éléments, il convient de ramener la demande de dommages-intérêts à la somme de 500 €.

Sur le harcèlement moral :

Selon l’article L. 1152-1 du code du travail « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.»

La reconnaissance du harcèlement moral suppose trois conditions cumulatives : des agissements répétés ; une dégradation des conditions de travail ; une atteinte aux droits, à la dignité, à la santé physique ou mentale ou à l’avenir professionnel du salarié.

En application de l’article L.1154-1 du code du travail, il appartient au salarié qui prétend avoir été victime de harcèlement moral, d’établir des faits précis et concordants permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral et il incombe à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l’espèce, la salariée soutient qu’elle a fait l’objet d’un harcèlement moral de la part de son employeur à la suite de la réception du courrier expédié par son avocat le 15 décembre 2011 le mettant en demeure de lui établir un contrat de travail à durée indéterminée sous huitaine, sous peine de saisine du conseil de prud’hommes. Elle expose qu’elle a subi des pressions dans le cadre d’un entretien ayant duré plus de 4 heures ; que la directrice, Mme G et les membres du personnel lui ont lancé des regards railleurs et menaçants ; qu’elle a été convoquée plusieurs fois dans le bureau de la directrice pour y subir une manipulation mentale et éhontée, qu’elle a été discréditée auprès de son autre employeur dans l’intention de lui nuire et que ces faits ont altéré son état de santé.

Au soutien de ses allégations, elle produit les éléments suivants :

— le certificat médical du Docteur Y, psychiatre, en date du 11 janvier 2012, duquel il ressort qu’elle a présenté un trouble anxio-dépressif nécessitant un traitement spécialisé par seroplex et noctamide, ainsi qu’un suivi spécialisé régulier ;

— l’attestation de son concubin, M. B rédigée en ces termes : «M a été très atteinte moralement au fur et à mesure des problèmes liés à la fin de son contrat au centre S-Q R. Elle en a beaucoup souffert, avec les symptômes évidents de début de dépression : moral en baisse, souvent les larmes aux yeux, perte d’appétit. Elle a vécu comme une injustice les pressions visant à la faire culpabiliser et cela s’est répercuté sur son apparence physique, l’air tout le temps triste et fatigué.»

— L’attestation de Mlle Z, aux termes de laquelle celle-ci relate : «Ayant occupé ces dernières années un poste d’animatrice enfance aux côtés de Mme M N, pour le centre socioculturel S-Q R, je désire vous soumettre mon ressentiment sur la façon dont les choses se sont déroulées.

Sans aucune explication, du jour au lendemain, nous avons été convoquées dans le bureau de la directrice afin d’apprendre que notre contrat se terminait quelque semaines plus tard et qu’il ne pourrait être renouvelé pour raisons financières.

En effet, j’ai été en contrat CAE un temps, sur lequel s’est enchaîné un contrat CEE, pendant plusieurs mois.

Je pense qu’il est important de souligner dans cette affaire que nous avons toujours fournie un travail exemplaire et toujours été là lorsque le centre en avait besoin, acceptant de travailler avec des contrats tels que ceux là. La situation a été d’autant plus dure à supporter, qu’il n’y a eu aucune reconnaissance, ni aucun remerciement de la part de la direction.

Les jours qui suivirent cette nouvelle, furent éprouvants moralement spécialement pour Mme M N qui a subi une intense pression suite à l’annonce de poursuites judiciaires envers le centre social. En effet, celle-ci fut convoquée pendant plusieurs jours et plusieurs heures dans le bureau de la directrice. J’ai pu voir l’évolution de la situation jour après jour et l’état de santé de Mme M N qui se dégradait au fil du temps.

Les mois qui suivirent notre fin de contrat furent difficiles moralement pour moi aussi.

Et je peux vous assure aujourd’hui que si je n’attaque pas le centre en justice, c’est uniquement par respect pour ma maman qui est salariée au sein du centre social.»

— l’attestation de M. C rédigé ainsi : « Le 2 janvier 2012, Mme G et la présidente de l’institut S-Q R se sont présentées à moi pour me demander des renseignements au sujet de Mme M N concernant son contrat de travail au sein de la structure DIA. Elle m’a exposé le fait qu’une action prud’homale était en cours au sujet de son contrat chez JP R et qu’elle ne comprenait pas pourquoi une telle action car elles avaient toujours été dans le dialogue.['] »

Ces éléments, pris dans leur ensemble, sont susceptibles de permettre de présumer l’existence d’un harcèlement moral. Il appartient par conséquent à l’employeur de démontrer que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Les faits de harcèlement invoqués par la salariée se seraient déroulés du 16 au 21 décembre 2011, date à partir de laquelle Mme G est partie en vacances.

L’employeur établit par les nombreuses attestations qu’il verse au dossier que le vendredi 16 décembre, lors du repas de D, la salariée a déclaré devant plusieurs dizaines de personnes, dont la directrice, à quel point son expérience au centre avait été positive et enrichissante tant professionnellement qu’humainement et qu’elle était contente d’y avoir travaillé. À cette occasion, elle a remercié la directrice et l’équipe du centre et distribué des fleurs et des cadeaux. (Cf : attestations de Mme A, Mme X, Mme I, Mme E, Mme J,Mme F)

Le samedi 17 et dimanche 18 décembre, la salariée, comme la directrice du centre, ne travaillaient pas.

L’employeur reconnaît que la salariée a été convoquée le lundi 19 décembre 2011 pour faire le point sur ses demandes en rapport avec le courrier reçu de son avocat le vendredi 16 décembre 2011. Il établit qu’à cette occasion des simulations de CDI ont été étudiée avec la salariée.

C’est ainsi que Mme A, comptable, atteste : «J’étais à mon poste le lundi 19 décembre quand la directrice O G, qui recevait Mme M N est venue dans mon bureau et m’a demandé le chiffrage d’uncontrat CDI à l’indice 330 et d’un contrats CDI à l’indice 365.

J’étais également présente quand Mme M N sortait du bureau de la directrice et elle ne me paraissait pas ébranlée ou effondrée par les échanges qu’elle venait d’entretenir avec la directrice. Elle nous a même dit au revoir et souhaité de bonnes vacances le dernier soir. »

Mme E relate avoir croisé la salariée à la sortie de son entretien avec Mme G et qu’elle n’avait perçu aucun signe de détresse de sa part.

L’employeur soutient que le deuxième entretien que la salariée a eu avec le direction le 20 décembre 2011 avait pour but de lui confirmer que les membres du bureau allaient se réunir en janvier, après les vacances de D, pour étudier les simulations de CDI évoquées la veille.

Il verse au dossier la lettre recommandée qu’il a adressée à la salariée le 6 janvier 2012 pour l’informer que les membres du bureau avaient accepté sa requête et lui proposaient la signature d’un contrat de travail à durée indéterminée pour un poste d’animatrice petite enfance au coefficient 330 de la convention collective moyennant un salaire brut mensuel de 828 € par mois sur une base de 20 heures hebdomadaires, avec possibilité d’un passage à plein temps par la suite.

La salariée n’a donné aucune suite à ce courrier.

Il apparaît ainsi que les deux convocations de la salarié à des entretiens avec son employeur avaient pour objet de rechercher une solution au différend qui les opposait et qu’elles étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La décision déférée qui a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral sera donc confirmée.

Sur l’exécution fautive du contrat de travail :

Le fait de conclure avec la salariée un contrat à durée déterminée irrégulier, ne permet pas à lui seul de caractériser une exécution fautive et déloyale du contrat par l’employeur, ayant généré un préjudice distinct de celui déjà réparé par l’octroi de l’indemnité de requalification et des indemnités de rupture.

Il convient par conséquent de confirmer la décision querellée qui a débouté la salarié de ce chef de demande.

Sur les autres demandes :

Les intérêts au taux légal avec capitalisation sur le fondement de l’article 1154 du code civil sur les sommes sus visées seront dus dans les conditions précisées au dispostif.

La remise de l’attestation Pôle Emploi et d’un bulletin rectificatif conforme au présent arrêt s’impose sans qu’il y ait lieu de prévoir une astreinte.

La demande de la salariée tendant à obtenir la publication de l’arrêt à intervenir aux frais de l’employeur dans un grand quotidien régional n’apparaissant pas justifiée doit être rejetée.

La décision déférée qui a condamné la salariée à payer à son employeur la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance doit être réformée.

Il y a lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel et d’allouer à la salariée à ce titre la somme de 800 €.

L’employeur qui succombe partiellement doit être tenu aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a débouté la salarié de sa demande de requalification des CEE en CDI et des demandes subséquentes et condamné la salariée à régler à l’employeur la somme de 800 € en paiement de ses frais irrépétibles et à supporter les dépens.

Statuant à nouveau sur les points réformés et y ajoutant,

Requalifie les contrats d’engagement éducatif conclus à compter du 10 janvier 2011 en contrat à durée indéterminée.

Condamne en conséquence le centre social S Q R à payer à Mme M N les sommes suivantes :

-736 € à titre d’indemnité de requalification ;

-736 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

-73,60 € au titre des congés payés y afférents ;

-368 € à titre d’indemnité de licenciement ;

-500 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-800 € à titre d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dit que les intérêts au taux légal avec capitalisation en application de l’article 1154 du code civil sont dus sur la créance salariale (indemnités de licenciement et de préavis) à compter du date de l’accusé de réception de la convocation de l’employeur devant le bureau de jugement et à compter du présent arrêt pour les autres sommes.

Ordonne la remise par le centre social S Q R à Mme M N de l’attestation Pôle Emploi et d’un certificat de travail conformes au présent arrêt.

Condamne le centre social S Q R aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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