Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre d, 31 janvier 2019, n° 17/00835

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 1re ch. d, 31 janv. 2019, n° 17/00835
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 17/00835
Importance : Inédit
Sur renvoi de : Cour de cassation, 30 novembre 2016
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre D

ARRET DU 31 JANVIER 2019

Numéro d’inscription: N° RG 17/00835 – N° Portalis DBVK-V-B7B-NAZ5

Décisions déférées à la Cour :

Arrêt Cour de Cassation de PARIS, décision attaquée en date du 01 Décembre 2016,

Arrêt Cour d’Appel de NIMES, décision attaquée en date du 04 Juin 2015, enregistrée sous le n° 14/05998

Ordonnance Tribunal de Commerce de NIMES, décision attaquée en date du 03 Décembre 2014,

DEMANDERESSE A LA SAISINE:

S.A.S SYMPHONY EYC FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Sophie AMAR avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDERESSES A LA SAISINE

SARL SC METHODE Représentée en la personne de son gérant, domicilié es-qualité au dit siège social

[Adresse 2]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Alice ROBERT substituant Me François-Pierre LANI avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

SARL TRF SERVICES Représentée en la personne de son gérant, domicilié es-qualité au dit siège social

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Alice ROBERT substituant Me François-Pierre LANI avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 MARS 2018

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 03 DECEMBRE 2018, en audience publique, M. Daniel MULLER ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre

Madame Myriam GREGORI, Conseiller

Mme Nelly SARRET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Ginette DESPLANQUE

L’affaire, mise en délibéré au 24 janvier 2019 a été prorogée au 31 janvier 2019.

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

— signé par Monsieur Daniel MULLER, Président de Chambre, et par Mme Ginette DESPLANQUE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

— ----------

La société Symphony EYC France S.A.S., anciennement dénommée Aldata Solution, a pour activité la fourniture de solutions logicielles à destination des acteurs de la grande distribution, du commerce de détail et des industriels permettant l’optimisation des opérations de marketing, et de merchandising, de la gestion des stocks et de la productivité de la chaîne logistique.

Cette société, qui fait partie d’un groupe important intervenant dans les domaines informatiques et de télécommunications, édite notamment un produit s’adressant aux acteurs de la grande distribution, dénommé «'GOLD'», permettant d’exécuter et d’optimiser l’ensemble des opérations intervenant dans la chaîne de distribution des produits, et un produit dénommé «'Assortment Management'», s’adressant aux industriels, permettant d’analyser le poids d’une catégorie de produits dans un magasin par rapport à celui du marché global.

La Sarl SC Méthode est un éditeur de taille plus modeste qui propose une solution dénommée «'TRF Retail'» s’interfaçant avec les solutions dites d’exécution dans le domaine de la distribution, telles que «'GOLD'», permettant ainsi d’analyser les données fournies par ces systèmes et de proposer des recommandations opérationnelles.

La Sarl TRF Services est une société de conseil en informatique, exerçant son activité sous le nom commercial «'TRF Retail'», comme la sarl SC Méthode, et qui a également le même objet social et les mêmes dirigeants.

Ces derniers, Monsieur [F] [V] et Monsieur [G] [T], ont tous deux été salariés de la société Aldata Solution.

Un des fondateurs et associé de la sarl SC Méthode, Monsieur [A] [J], recruté en 1990 par la société Aldata Solution, occupe d’importantes fonctions au sein de la société Symphony EYC France S.A.S., et notamment dans le secteur «'GOLD'», avec un contrat de travail d’exclusivité.

Monsieur [A] [J] travaille notamment avec un autre cadre, chargé du secteur Asie du groupe Symphony, Monsieur [C] [H].

Estimant que ces deux salariés, licenciés pour faute lourde au mois de novembre 2014 pour des faits en relation avec le présent litige, se sont mis au service des sociétés «'TRF Retail'», profitant ainsi des relations personnelles antérieures résultant de leur travail au sein du groupe Symphony, en détournant ou tentant de détourner des cadres de la société Symphony, en s’appropriant le savoir-faire technologique, commercial et marketing, en profitant de leurs relations au sein de la société afin d’améliorer les solutions «'TRF Retail'» et d’améliorer leur activité en France et à l’étranger, en détournant des clients et des partenaires de la société Symphony et en créant à dessein une confusion totale entre Retail et Symphony, la société Symphony EYC France S.A.S. a saisi par voie de requête le président du tribunal de commerce de Nîmes lequel, par ordonnance du 29 septembre 2014, a autorisé des opérations multiples d’huissiers de saisies multiples d’informations au sein des sociétés SC Méthode et TRF Services.

Par acte du 7 novembre 2014 les sociétés SC Méthode et TRF Services ont fait assigner la société Symphony EYC France S.A.S. devant le président du tribunal de commerce de Nîmes aux fins de rétractation de cette ordonnance.

Par ordonnance du 3 décembre 2014, le président du tribunal de commerce de Nîmes a rétracté son ordonnance rendue le 29 septembre 2014 et a condamné la société Symphony EYC France S.A.S. à payer à chacune des parties demanderesses en application de l’article 700 du code de procédure civile la somme de 4000 €.

La société Symphony EYC France S.A.S. a interjeté appel de cette ordonnance.

Par arrêt du 4 juin 2015, la cour d’appel de Nîmes a réformé l’ordonnance de référé rendue le 3 décembre 2014 par le président du tribunal de commerce de Nîmes en rétractation de son ordonnance sur requête rendue le 29 septembre 2014, statuant à nouveau, a dit n’y avoir lieu à rétractation de l’ordonnance rendue le 29 septembre 2014 sur requête de la société Symphony EYC France S.A.S. contre les sociétés SC Méthode et TRF Services, a ordonné la restitution à la société Symphony EYC France S.A.S. de l’ensemble des éléments d’information recueillis au terme de leurs interventions respectives par les huissiers SCP [F]-[U]-[Z] et SCP [M]-[D]-[P] en application de l’ordonnance du 29 septembre 2014, y compris les procès-verbaux de constat d’huissier et de leurs annexes, a rappelé que l’arrêt de réformation implique de plein droit le remboursement de toute somme payée par la société Symphony EYC France S.A.S. en application de l’ordonnance réformée, notamment au titre de l’article 700 du code de procédure civile ou des frais, et a condamné les sociétés SC Méthode et TRF Services à payer à la société Symphony EYC France S.A.S. la somme de 4500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés SC Méthode et TRF Services ont formé un pourvoi contre cet arrêt et, par arrêt du 1er décembre 2016, la Cour de cassation, deuxième chambre civile, a cassé et annulé, sauf en ce qu’il à dit recevable l’appel de la société Symphony EYC France S.A.S., l’arrêt rendu le 4 juin 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Nîmes'; et a remis, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant cette cour.

Vu les conclusions notifiées par la voie électronique le 19 février 2018 par les sociétés SC Méthode et TRF Services, lesquelles demandent à la cour, de les dire et juger recevables et bien fondées en leurs demandes fins et prétentions, en conséquence, à titre principal, de dire et juger que la société Symphony EYC France S.A.S. ne peut pas se prévaloir des éléments saisis ni du déroulement/des suites des mesures d’instruction litigieuses pour justifier leur légitimité, de dire et juger que la société Symphony EYC France S.A.S. n’a pas caractérisé de motif légitime recevable pour justifier la mesure 145 du CPC ordonnée, de dire et juger que la société Symphony EYC France S.A.S. ne justifie pas de circonstances nécessitant une dérogation au principe du contradictoire, de dire et juger que les mesures ordonnées ne sont pas légalement admissibles, en conséquence, d’écarter des débats les pièces saisies en vertu de l’ordonnance sur requête critiquée, ainsi que leur contenu et tout argument/ écritures fondés sur celles-ci ou le déroulement/ les suites de l’exécution des mesures 145, de confirmer l’ordonnance entreprise du 3 décembre 2014 en ce qu’elle a considéré qu’il y avait lieu à rétracter l’ordonnance du 29 septembre 2014 et, statuant à nouveau, de rétracter l’ordonnance du 29 septembre 2014, de débouter la société Symphony EYC France S.A.S. de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions, d’ordonner la restitution aux sociétés SC Méthode et TRF Services de l’intégralité des éléments saisis et des procès-verbaux de constat dressés dans les cinq jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir sous astreinte de 1000 € par jour de retard passé ce délai, d’ordonner la destruction de toute copie de ces éléments qui auraient été effectuée et d’en justifier par la remise d’une attestation sur l’honneur au plus tard, dans les cinq jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir, sous astreinte de 1000 € par jour de retard, passé ce délai, d’ordonner la restitution des sommes versées par TRF Services et SC Méthode en exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Nîmes et en trop-perçues par suite de l’arrêt de la Cour de cassation du 1er décembre 2016 d’un montant total de 8237,72 euros dans le délai maximum de cinq jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir sous astreinte de 1000 € par jour de retard passé ce délai,, à titre subsidiaire, de limiter les mesures de l’ordonnance du 29 septembre 2014 aux mesures strictement nécessaires à l’établissement de faits précis de prétendue concurrence déloyale de TRF Retail dont la preuve est recherchée et qui ne peuvent être obtenues aisément de manière contradictoire, d’ordonner la mise sous séquestre de l’ensemble des éléments, informations et documents sur quelque support que ce soit, recueillis par les huissiers instrumentaires, lesquels seront examinés dans le cadre d’un débat contradictoire au fond afin qu’il soit statué sur leur communication, d’ordonner la restitution par la société Symphony EYC France S.A.S. aux huissiers instrumentaires de l’ensemble des éléments saisis jusqu’à ce qu’il soit statué sur leur communicabilité par les juges du fond, en tout état de cause, de rejeter toute demande contraire, de déclarer irrecevable la demande de cantonnement des mesures 145 sollicitée au stade de la rétractation par la société Symphony EYC France S.A.S., de déclarer irrecevable et mal fondée toute demande de restitution des pièces saisies, des procès-verbaux établis en vertu de l’ordonnance sur requête du 29 septembre 2014 et toute demande de remise de sommes versées en exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Nîmes faute pour Symphony EYC France S.A.S. de justifier avoir elle-même restitué et remis ces sommes, avant l’arrêt à intervenir, aux sociétés TRF Services et SC Méthode, de condamner la société Symphony EYC France S.A.S. à verser la somme de 20'000 € à SC Méthode et la somme de 20'000 € à TRF Services au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Vu les conclusions notifiées par la voie électronique le 19 mars 2018 par la société Symphony EYC France S.A.S., laquelle demande à la cour de la dire et juger recevable et bien fondée en son appel, de la dire et juger recevable et bien fondée en ses demandes fins et conclusions, in limine litis, de dire et juger irrecevables les sociétés SC Méthode et TRF Services en leur demande de rejet des pièces n° 64 à 67 formulée pour la première fois en cause appel, à titre principal, d’infirmer l’ordonnance de référé rendue le 3 décembre 2014 par Monsieur le président du tribunal de commerce de Nîmes en toutes ses dispositions, statuant à nouveau, de confirmer l’ordonnance du 29 septembre 2014 rendue par Monsieur le président du tribunal de commerce de Nîmes en toutes ses dispositions, de confirmer les mesures d’instruction in futurum conduites les 20 et 24 octobre 2014 par la SCP [F]-[U]-[Z] et la SCP [M]-[D]-[P] en application de l’ordonnance du 29 septembre 2014, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de leur demande de rétractation, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de leurs demandes subsidiaires relatives à (i) la limitation des mesures de l’ordonnance du 29 septembre 2014, (ii) à la mise sous séquestre de l’ensemble des éléments, informations et documents recueillis par les huissiers instrumentaires afin qu’ils soient examinés dans le cadre d’un débat contradictoire au fond afin qu’il soit statué sur leur communication, (iii) à la restitution de l’ensemble des éléments saisis jusqu’à ce qu’il soit statué sur leur communicabilité par les juges du fond, en conséquence, d’ordonner la restitution à la société Symphony EYC France S.A.S. de l’ensemble des éléments recueillis par la SCP [F]-[U]-[Z] et la SCP [M]-[D]-[P] au terme de leurs interventions respectives y inclus les procès-verbaux de constat et leurs annexes, de dire et juger que la société Symphony EYC France S.A.S. est autorisée à se prévaloir de l’intégralité des documents saisis et des procès-verbaux de constat dressés par la SCP [F]-[U]-[Z] et la SCP [M]-[D]-[P] au terme de leurs interventions respectives y inclus leurs annexes respectives en application de l’ordonnance du 29 septembre 2014, à titre subsidiaire, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de leur demande de rétractation, de confirmer les mesures d’instruction in futurum conduites les 20 et 24 octobre 2014 par la SCP [F]-[U]-[Z] et la SCP [M]-[D]-[P] en application de l’ordonnance du 29 septembre 2014, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de leurs demandes subsidiaires relatives à (i) la limitation des mesures de l’ordonnance du 29 septembre 2014 et de (ii) restitution et de destruction de l’ensemble des éléments saisis, de désigner la SCP [F]-[U]-[Z] en qualité de séquestre de l’intégralité des éléments qu’elle a recueillis au terme de son intervention au sein de SC Méthode en exécution de l’ordonnance du 29 septembre 2014 y inclus le procès-verbal de constat d’huissier et les annexes, de désigner la SCP [M]-[D]-[P] en qualité de séquestre de l’intégralité des éléments qu’elle a recueillis au terme de son intervention au sein de TRF Services en exécution de l’ordonnance du 29 septembre 2014 y inclus le procès-verbal de constat d’huissier et les annexes, de dire et juger qu’il appartiendra au tribunal de Commerce de Paris statuant au fond d’ordonner la mainlevée de ces séquestres et de déterminer les pièces qui seront communiquées entre les parties dans le cadre de l’instance pendante au fond pour concurrence déloyale, enrôlée sous le numéro RG n°2016 073093, en tout état de cause, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de leur demande de restitution des éléments saisis et des procès-verbaux de constat dressés, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de leur demande de destruction de toute copie de ces éléments et de remise d’une attestation sur l’honneur en justifiant, de condamner les sociétés SC Méthode et TRF Services à rembourser à la société Symphony EYC France S.A.S. la somme de 8000 € qui avait été versée par la société Symphony EYC France S.A.S. au titre de l’article 700 du code de procédure civile en application de l’ordonnance de référé du 3 décembre 2014, de débouter les sociétés SC Méthode et TRF Services de leur demande de remboursement des dépens d’appel pour la procédure d’appel devant la cour d’appel de Nîmes, des dépens de première instance pour la procédure devant le président du tribunal de commerce de Nîmes, de la somme de 8000 € qui avait été versée par les sociétés SC Méthode et TRF Services à la société Symphony EYC France S.A.S. en remboursement des sommes payées par la société Symphony EYC France S.A.S. au titre de l’article 700 du code de procédure civile en application de l’ordonnance de référé du 3 décembre 2014, de condamner solidairement et conjointement les sociétés SC Méthode et TRF Services à payer la somme de 26'000 € à la société Symphony EYC France S.A.S. au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens relatifs à la requête du 26 décembre 2014, aux dépens de première instance devant le tribunal de commerce de Nîmes et aux dépens d’appel devant la cour d’appel de Nîmes et la cour de céans.

MOTIFS

Il convient en liminaire d’observer que la demande de rejet des conclusions de la société Symphony EYC France S.A.S. en raison de la proximité de l’ordonnance de clôture du 19 mars 2018, demande formalisée par des conclusions notifiées par la voie électronique le 22 mars 2018, n’a plus d’objet alors que l’affaire a été renvoyée à l’audience du 3 décembre 2018, avec une nouvelle clôture, et qu’au demeurant les parties n’ont pas estimé utile de conclure à nouveau durant ce délai.

La Symphony EYC France S.A.S. invoque des faits de concurrence déloyale et de parasitisme commis à son encontre.

Aux termes des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, «'s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de fait dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissible peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé'».

Il convient par voie de conséquence de rechercher l’existence d’un motif légitime justifiant le recours à une mesure d’instruction et, alors que la Symphony EYC France S.A.S. a choisi de procéder par voie de requête, de vérifier si la requête et l’ordonnance rendue sur son fondement exposent les circonstances exigeant que la mesure réclamée ne soit pas prise contradictoirement.

Il convient également d’opérer un contrôle de proportionnalité à l’effet de vérifier si les mesures de constat sollicitées ne révèlent pas des mesures d’investigation générales excédant les prévisions des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile.

À cet égard, les diverses pièces obtenues dans le cadre de l’exécution de la mesure en cause, produites par la Symphony EYC France S.A.S., ne peuvent qu’être écartées des débats saufs à enlever toute portée à ce contrôle de proportionnalité si des pièces obtenues au moyen d’une mesure d’instruction non conforme aux prévisions de l’article 145 du code de procédure civile étaient admises pour qualifier l’existence d’un motif légitime, étant observé que la demande formée à cet égard par les sociétés SC Méthode et TRF Services est le complément nécessaire, au sens des dispositions de l’article 566 du code de procédure civile, de la demande aux fins de contestation de la mesure ayant permis à la société Symphony EYC France S.A.S. d’en disposer.

Au demeurant, étant observé que le recours aux dispositions de l’article 145 du code de procédure civile tend non seulement à la conservation des preuves mais également à l’établissement de celles-ci, la Symphony EYC France S.A.S. produit deux courriels, des 14 et 25 août 2014, qualifiant un intérêt légitime au sens des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile.

Le premier de ces documents, rédigé par le Vice Président ventes et opérations Amérique du Nord, fait état d’une proposition qui lui aurait été faite par Monsieur [A] [J] aux fins de «'représentation de TRF auprès des clients américains de EYC'», tout en continuant à travailler officiellement pour le groupe Symphony, et ce en gardant «'confidentiels tous les arrangements entre TRF et moi'».

Le deuxième document est un courriel adressé le 25 août 2014, à partir d’une adresse email TRF Retail, par Monsieur [C] [H] aux dirigeants de TRF Retail, Messieurs [T] et [V], avec en copie Monsieur [A] [J], également sur une adresse email TRF Retail, pour partager des remarques à la suite d’une formation portant par ailleurs le nom d’un distributeur avec lequel travaille Symphony.

Ces échanges de courriels, antérieurs au licenciement des deux salariés en cause, alimentent, a minima, une suspicion de collusion entre des salariés stratégiques de la société Symphony EYC France S.A.S. et les sociétés exerçant sous l’enseigne TRF Retail, elles-mêmes dirigées par d’anciens salariés de la société Aldata Solution, ainsi qu’une tentative de collaboration clandestine entre un responsable du groupe SYMPHONY et les sociétés de l’enseigne TRF Retail, et permettent, à eux seuls, de retenir un motif légitime permettant l’instauration des mesures d’instruction sollicitées sans que puissent être opposés le secret des affaires, dès lors que la mesure ordonnée procède d’un motif légitime et est nécessaire à la protection des droits de la partie qui l’a sollicitée, ou encore une atteinte à la vie privée des personnes physiques concernées, dès lors que l’ordonnance a encadré la consultation des courriels dans le temps, en limitant l’examen aux courriels échangés entre le 1er octobre 2010 et la date d’intervention des huissiers commis, et en considération du contenu des courriels par une liste limitative de mots-clés.

La société Symphony EYC France S.A.S. a énoncé un risque de dépérissement des preuves tenant au risque de perte de certains documents ou de modification des messageries électroniques professionnelles alors que les agissements qu’elle dénonce concerneraient plusieurs pays du monde et, surtout, en raison de l’ancienneté de Monsieur [A] [J] au sein de Symphony et de son niveau d’expertise.

Cette motivation, que le premier juge s’est appropriée, suffit à caractériser des circonstances exigeant que la mesure réclamée ne soit pas prise contradictoirement.

Pour autant, l’examen de la mission ordonnée fait apparaître, pour partie, une véritable mesure d’investigation générale au regard des chefs de mission suivants':

— «'faire sur place toutes recherches et constatations utiles en vue d’obtenir, se faire produire et prendre copie des documents nécessaires à la manifestation de la vérité'» (…)

— «'se faire communiquer les codes d’accès administrateur et tout autre code permettant d’accéder à l’intégralité du (des) réseau(x) informatiques ou serveurs de ces deux sociétés'» (…)

— «'rechercher tout document social, comptable, administratif ou financier depuis le 1er octobre 2010 susceptible d’établir la preuve, l’origine, et l’étendue du détournement de personnel, du savoir-faire, des partenaires commerciaux et de la clientèle de la société Symphony par TRF Retail ainsi que l’étendue du préjudice de la société Symphonie, à l’aide notamment des mots-clés suivants'» (').

Les pouvoirs les plus larges donnés ainsi aux huissiers chargés du constat, qui n’est pas une expertise, implique nécessairement de la part de ces derniers une analyse de l’ensemble des documents des sociétés SC Méthode et TRF Services pour ne retenir que ceux susceptibles de qualifier les actes de concurrence déloyale et le parasitisme dénoncés par la Symphony EYC France S.A.S., supposant ainsi de la part de ces huissiers une appréciation au fond des pièces sélectionnées, sans limitation quant à cette sélection alors que cette recherche, par l’emploi de l’adverbe «'notamment'», n’est finalement pas encadrée par les mots-clés énumérés par l’ordonnance, et pas davantage la copie des documents.

La mission ainsi confiée aux huissiers, de la page 1 de l’ordonnance («' autorisons l’huissier commis à faire sur place toutes recherches (…)'») jusqu’à la fin de la page 3 («'(') «'[S] [B]'» ) ne peut dès lors qu’être analysée en une mesure d’investigation générale, laquelle excède les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile.

Il apparaît par ailleurs que la mission consistant à':

«'accéder aux messageries professionnelles hébergées sur les réseaux informatiques ou serveurs de la société SC Méthodes et de la société TRF Services ou à partir des ordinateurs de Monsieur [F] [V] et Monsieur [G] [T], Rechercher et relever copie par tout moyen de l’ensemble des courriels échangés par les dirigeants et salariés des sociétés SC méthodes et TRF Services, en priorité depuis les adresses e-mails suivantes':

[Courriel 1], [Courriel 2], [Courriel 3], [Courriel 4],

remplissant les conditions suivantes':

i. Ces courriels ont été échangés entre le 1er octobre 2010 et la date de l’intervention du/des huissiers commis';

i. ces courriels comportent dans leur objet, dans le corps du texte ou dans l’adresse e-mail du destinataire l’un ou l’autre des mots ou expressions suivants entre guillemets (au singulier ou au pluriel, en lettres minuscules ou majuscules)':

— «'G.O.L.D.'» ou «'gold'»

— «'Symphony'»

— «'EYC'» ou «'SEYC'»

— «'Aldata'»

— «'Aldata Solution'»

— «'Cosmic'»

— «'Apollo'»

— «'Range Manager'»

— «'I2E'»

— «'Hypertrade'»

— «'Distributeurs': «'Tesi'», «'Retail Heart'», «'Retail Synergy'», «'Invel'», «'Hypertrade'»

— Clients': «'Mercator'», «'Carrefour Brésil'» ou «'Carrefour Brasil'», «'big C'», «'Body Shop'», «'Migros'», «'Schiever'», «'Match'», «'Meddis'»

— «'[A] [J]'»

— «'[C] [H]'»

— «'[L] [W]'» ou «'[L]'»

— «'[B] [Q]'»

— «'[V] [X]'»

— «'Itemica'»

— «'[S] [B]'»

correspond à la recherche des actes dénoncés, et ce par des moyens proportionnés qui n’excèdent pas les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile alors qu’elle n’implique pas les huissiers commis dans l’appréciation au fond des pièces sélectionnées et que la collecte des pièces s’effectue au moyen de mots clés limitativement énumérés.

Il convient par voie de conséquence, alors qu’en vertu des dispositions de l’article 497 du code de procédure civile «'le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l’affaire'» de réformer partiellement l’ordonnance entreprise et, statuant à nouveau sur le tout, de rétracter l’ordonnance du 29 septembre 2014 pour les chefs de mission énoncés de la page 1 de l’ordonnance («' autorisons l’huissier commis à faire sur place toutes recherches (…)'») jusqu’à la fin de la page 3 («'(') «'[S] [B]'» ), de rejeter la demande de rétractation en ce qu’elle vise la mission de recherche des courriels échangés par les dirigeants et salariés des sociétés SC méthodes et TRF Services dont les termes ont été rappelés ci-dessus, à charge pour les huissiers commis de supprimer de leurs constats les éléments ou données collectées ne relevant pas de ce seul chef de mission et, enfin, d’ordonner la restitution aux sociétés SC Méthode et TRF Services de l’intégralité des autres éléments saisis et/ou collectés, Sans qu’il y ait lieu, s’agissant de la restitution des éléments saisis par les huissiers, à astreinte et, s’agissant des copies remises à la société Symphony EYC France S.A.S., d’en ordonner la destruction, cette dernière devant en justifier par la remise aux sociétés SC Méthode et TRF Services d’une attestation sur l’honneur au plus tard dans les huit jours suivant la signification du présent arrêt.

Enfin, s’agissant des demandes de restitution des sommes versées dans le cadre de l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Nîmes, il ne peut qu’être constaté que l’obligation de remboursement résulte de plein droit de la décision de cassation, sans que la cour de renvoi ait à cet égard à ajouter ou à retrancher.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu’elles ont pu exposer.

Les dépens resteront à la charge de la société Symphony EYC France S.A.S. alors que la mission initialement donnée aux huissiers a finalement été, pour sa plus grande part, réformée.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Constate que la demande de rejet des conclusions de la société Symphony EYC France S.A.S. est devenue sans objet,

Écarte des débats les pièces n° 64 à 67 produites par la société Symphony EYC France S.A.S.,

Réforme l’ordonnance entreprise,

Statuant à nouveau,

Rétracte l’ordonnance du 29 septembre 2014 pour les chefs de mission énoncés de la page 1 de l’ordonnance («' autorisons l’huissier commis à faire sur place toutes recherches (…)'») jusqu’à la fin de la page 3 («'(') «'[S] [B]'» ),

Rejette la demande de rétractation en ce qu’elle vise la mission permettant aux huissiers commis de':

«'accéder aux messageries professionnelles hébergées sur les réseaux informatiques ou serveurs de la société SC Méthodes et de la société TRF Services ou à partir des ordinateurs de Monsieur [F] [V] et Monsieur [G] [T], Rechercher et relever copie par tout moyen de l’ensemble des courriels échangés par les dirigeants et salariés des sociétés SC méthodes et TRF Services, en priorité depuis les adresses e-mails suivantes':

[Courriel 1], [Courriel 2], [Courriel 3], [Courriel 4],

remplissant les conditions suivantes':

i. Ces courriels ont été échangés entre le 1er octobre 2010 et la date de l’intervention du/des huissiers commis';

i. ces courriels comportent dans leur objet, dans le corps du texte ou dans l’adresse e-mail du destinataire l’un ou l’autre des mots ou expressions suivants entre guillemets (au singulier ou au pluriel, en lettres minuscules ou majuscules)':

— «'G.O.L.D.'» ou «'gold'»

— «'Symphony'»

— «'EYC'» ou «'SEYC'»

— «'Aldata'»

— «'Aldata Solution'»

— «'Cosmic'»

— «'Apollo'»

— «'Range Manager'»

— «'I2E'»

— «'Hypertrade'»

— «'Distributeurs': «'Tesi'», «'Retail Heart'», «'Retail Synergy'», «'Invel'», «'Hypertrade'»

— Clients': «'Mercator'», «'Carrefour Brésil'» ou «'Carrefour Brasil'», «'big C'», «'Body Shop'», «'Migros'», «'Schiever'», «'Match'», «'Meddis'»

— «'[A] [J]'»

— «'[C] [H]'»

— «'[L] [W]'» ou «'[L]'»

— «'[B] [Q]'»

— «'[V] [X]'»

— «'Itemica'»

— «'[S] [B]'»

à charge pour les huissiers commis de supprimer de leurs constats les éléments ou données collectées ne relevant pas de ce seul chef de mission,

Ordonne la restitution aux sociétés SC Méthode et TRF Services de l’intégralité des autres éléments saisis et/ou collectés, sans qu’il y ait lieu, s’agissant de la restitution des éléments saisis par les huissiers, à astreinte et, s’agissant des copies remises à la société Symphony EYC France S.A.S., ordonne la destruction desdites copies, cette dernière devant en justifier par la remise aux sociétés SC Méthode et TRF Services d’une attestation sur l’honneur au plus tard dans les huit jours suivant la signification du présent arrêt,

Rappelle, s’agissant des demandes de restitution des sommes versées dans le cadre de l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Nîmes, que l’obligation de remboursement résulte de plein droit de la décision de cassation,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Symphony EYC France S.A.S. aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

DM

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre d, 31 janvier 2019, n° 17/00835