Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 20 octobre 2016, n° 15/10096

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 20 oct. 2016, n° 15/10096
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 15/10096
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Marseille, 12 mai 2015, N° 14/05991

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

1re chambre C

ARRÊT AVANT DIRE DROIT

DU 20 OCTOBRE 2016

N° 2016/1019

Rôle N° 15/10096

Société civile SACEM

C/

X Y

Z A

Association COMITÉ DES FÊTES DE
QUISSAC

Grosse délivrée

le :

à :

SCP ERMENEUX

Me B

Décision déférée à la cour :

Ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de grande instance de Marseille en date du 13 mai 2015 enregistrée au répertoire général sous le n° 14/05991.

APPELANTE

LA SACEM

dont le siège est 225 avenue du Général de
Gaulle -

XXX-Seine cédex

représentée par Me Laurence LEVAIQUE de la SCP
ERMENEUX-LEVAIQUE-ARNAUD &
ASSOCIES, avocat au barreau d’Aix-en-Provence

assistée par Me Jean-Marc MOJICA, avocat au barreau de
Paris, plaidant

INTIMÉS

Monsieur X Y

né le XXX à XXX

demeurant XXX
Quissac

Monsieur Z A

né le XXX à XXX

demeurant XXX
Quissac

L’ ASSOCIATION COMITÉ DES FÊTES DE LA VILLE DE
QUISSAC

dont le siège est 1 place Charles Mourier – 30260
Quissac

représentés par Me Alain ROUSTAN, avocat au barreau d’Aix-en-Provence

assistés par Me Sabine MANCHET-FRONTIN, avocat au barreau de Nîmes, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 20 septembre 2016 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame Lise Leroy-Gissinger, conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La cour était composée de :

Monsieur Serge KERRAUDREN, président

Mme Danielle DEMONT, conseiller

Madame Lise LEROY-GISSINGER, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie
MASSOT.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2016,

Signé par Monsieur Serge KERRAUDREN, président et Madame Sylvie MASSOT, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

La Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (la Sacem) a assigné le 16 décembre 2014, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Marseille le comité des fêtes de la commune de Quissac, ainsi que ses présidents successifs, entre 2008 et 2013, M. Y et M. A, aux fins de les voir condamnés à lui payer des provisions au titre de la diffusion de musique de son répertoire au cours de bals publics qui s’étaient tenus dans cette commune au cours de ces années et de les voir condamnés à lui communiquer sous astreinte le programme des oeuvres exécutées.

Par ordonnance du 13 mai 2015, cette juridiction a :

— condamné solidairement l’association Comité des fêtes de Quissac et M. X
Y à payer à titre provisionnel à la Sacem la somme de 5 059,79 euros au titre des bals des mois d’août 2008, 2009 et 2010,

— condamné solidairement l’association Comité des fêtes de Quissac et M. A à payer à titre provisionnel à la Sacem la somme de 21 214,21 euros au titre des bals des mois d’août 2011, 2012, 2013 et 2014,

— dit n’y avoir lieu à référé pour le surplus,

— rejeté la demande de délais de paiement,

— condamné solidairement l’association, M. Y et M. A à payer à la Sacem la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

Le juge a rejeté la demande de provision s’agissant des années 2008 et 2009 en retenant qu’une contestation sérieuse s’y opposait, prise de l’acquisition de la préscription quinquénnale prévue à l’article 2224 du code civil.

Par déclaration du 5 juin 2015, la Sacem a formé un appel général contre cette décision.

Par ses dernières conclusions du 25 avril 2016, la Sacem demande à la cour, en substance, de confirmer l’ordonnance en ce qu’elle a retenu la responsabilité in solidum de M. Y et et M. A avec le Comité des fêtes et de l’infirmer en ce qu’elle l’a déboutée de sa demande de provision au titre des années 2008 et 2009 et de sa demande de remise de programme sous astreinte.

Elle sollicite :

— la condamnation in solidum de l’association et de M. Y, à titre personnel, pour les bals organisés en 2008, 2009 et 2010 à la somme provisionnelle de 17 338,06 euros TTC,

— leur condamnation à lui remettre le programme des oeuvres exécutées au cours des bals de 2008, 2009 et 2010, sous astreinte de 80 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

— la condamnation in solidum de l’association et de M. A, à titre personnel, pour les bals organisés en 2011, 2012, 2013 et 2014 à la somme provisionnelle de 21 214,21 euros
TTC,

— leur condamnation à lui remettre le programme des oeuvres exécutées au cours des bals de ces mêmes années, sous astreinte de 80 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,

— la condamnation in solidum de l’association et de M. Y et de M. A, à titre personnel, à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

S’agissant de la prescription, elle invoque le principe selon lequel la prescription ne court pas lorsque la créance, même périodique, dépend d’éléments qui ne sont pas connus du créancier et doivent résulter de déclarations que le débiteur est tenu de faire et qu’en l’espèce, les intimés n’ont remis à la Sacem les éléments de calcul de la redevance d’auteur qu’au mois de janvier 2015, c’est-à-dire après l’engagement de la procédure en décembre 2014.

En ce qui concerne la remise sous astreinte des programmes, elle fait valoir que l’article L.
132-21 du code de la propriété intellectuelle prévoit que l’entrepreneur de spectacles est tenu de déclarer à l’auteur ou à ses représentants le programme exact des représentations ou exécutions publiques et que cette obligation ne repose pas sur les prestataires engagés par l’entrepreneur de spectacle.

Par leurs dernières conclusions du 23 octobre 2015, les intimés qui forment un appel incident, demandent à la cour de confirmer l’ordonnance de référé en ce qui concerne la prescription retenue pour les années 2008 et 2009 et le rejet de la demande de communication sous astreinte, mais son infirmation pour le surplus.
Ils sollicitent :

— la mise hors de cause de Messieurs Y et A en l’absence de démonstration d’une faute détachable de leurs fonctions,

— la condamnation de la Sacem à verser à M. A la somme de 8000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la saisie pratiquée sur son compte bancaire,

— qu’il soit constaté l’absence de justificatifs des taux retenus et par voie de conséquence, l’existence d’une contestaiton réelle et sérieuse sur les sommes sollicitées,

— le débouté de la Sacem de l’ensemble de ses demandes et à titre subsidiaire,l’octroi des plus larges délais pour pouvoir s’acquitter des condamnations,

— en tout état de cause, la condamnation de la Sacem à verser à chacun des défendeurs la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Le juge des référés tient de l’article 809 du code de procédure civile le pouvoir d’accorder une provision au créancier, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Le montant de la provision n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.

Il résulte des articles L. 122-1, L. 122-4, L. 132-18 et
L. 132-21 du code de la propriété intellectuelle que l’entrepreneur de spectacles est tenu de déclarer à la Sacem le programme exact des représentations et de lui fournir un état justifié de ses recettes afin que puisse être déterminé le montant des redevances stipulées au contrat qu’il a conclu avec la Sacem.

L’association Comité des fêtes de la commune de
Quissac (le Comité des fêtes) a organisé chaque été entre 2008 et 2014 des fêtes au cours desquelles de la musique du répertoire de la
Sacem était diffusée ou interprétée. Aucun contrat n’a été signé pour ces manifestations entre le Comité des fêtes et la Sacem, malgré une réunion initiale entre le délégué régional de la
Sacem et M. Y, alors président du comité des fêtes, en vue de la signature de tels

contrats en juillet 2008. La Sacem a fait établir pour chaque manifestation des années 2008 à 2014 des procès-verbaux par ses agents assermentés, conformément à l’article L.331-2 du code de la propriété intellectuelle, constatant la diffusion d’oeuvres de son répertoire.

Les intimés ne discutent pas le fait qu’ils ont, aux dates indiquées par la Sacem, diffusé de la musique dans des conditions ouvrant droit à perception de rémunération par la Sacem et ne contestent pas les constatations faites par les agents assermentés de celle-ci.

Ils invoquent, en revanche, d’une part, la prescription de la créance de la Sacem au titre des années 2008 et 2009, d’autre part, que le montant de la redevance forfaitaire appliquée pour les années 2011 à 2014 est erroné et que les taux retenus ne sont pas justifiés.

Sur la prescription au titre des années 2008 et 2009 :

Pour soutenir que son obligation au titre des années 2008 et 2009 est sérieusement contestable, le Comité des fêtes invoque la prescription quinquennale de l’action en paiement du créancier en ce qui concerne les redevances dues pour ces années.

Il n’est pas contesté que la prescription applicable à l’action en paiement des redevances dues à la Sacem est la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil.

Cependant, la Sacem soutient à juste titre que la prescription prévue par cet article ne commence pas à courir lorsque la créance, même périodique, dépend d’éléments qui ne sont pas connus du créancier. Or, en l’espèce, la Sacem agit en paiement d’une provision au titre de redevances de droits d’auteur dont le montant dépend d’éléments, recettes et dépenses afférentes aux soirées durant lesquelles la musique a été diffusée, que le débiteur était tenu de communiquer et qui n’étaient pas connus du créancier.
Dans ces conditions, la prescription n’a commencé à courir en l’espèce qu’en janvier 2015, lorsque le débiteur a transmis ces informations à la Sacem, de sorte que le moyen pris de la prescription invoqué par le débiteur ne constitue pas une contestation sérieuse du droit à provision du créancier, pour les années 2008 et 2009.

Sur la demande de remise de pièces sous astreinte :

Il résulte de l’article L. 132-21 du code de la propriété intellectuelle que l’entrepreneur de spectacle est tenu de déclarer à l’auteur ou ses représentants le programme exact des représentations ou exécutions publiques.Cette obligation pèse bien sur l’entrepreneur de spectacle et non sur l’artiste ou la personne physique chargée de la diffusion de la musique.

Aucune contestation sérieuse ne s’oppose donc à ce qu’il soit ordonné à l’association, in solidum avec M. Y et M. A, chacun pour la période qui le concerne et sous atreinte, dans les termes du dispositif ci-après, de remettre à la Sacem la liste des oeuvres diffusées lors des fêtes qu’elle a organisées.

Sur la condamnation personnelle de Messieurs Y et A :

Il n’est pas contesté que M. Y était président de l’association
Comité des fêtes de
Quissac en 2008, 2009 et 2010 et que M. A l’était pour les années ultérieures concernées par les redevances réclamées.

M. Y ne dément pas les affirmations de la Sacem selon lesquelles il a participé le 25 juillet 2008 à une réunion avec le délégué régional de celle-ci en vue de préparer les contrats relatifs à la diffusion des oeuvres du répertoire lors des fêtes prévues en août de la même année, contrat finalement non signé. Il résulte par ailleurs des pièces produites par la Sacem

que le 10 septembre 2008 et le 4 août 2010 il a reçu en personne les actes d’huissier de justice portant sommation de payer les droits afférents aux soirées qui s’étaient tenues au mois d’août et de remettre, notamment, les budgets détaillés des dépenses engagées. En 2009, le 'Comité des fêtes M. Y’ a été destinataire d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception signé, lui demandant de régulariser la situation au regard des fêtes s’étant déroulées en août 2009.

Pour sa part, M. A a été destinataire chaque année entre 2011 et 2013 de lettres recommandées avec demande d’avis de réception, qui toutes sont revenues 'non réclamée'.
Les sommations de payer qui lui ont été délivrées chaque année à son adresse personnelle ont toutes été signifiées en l’étude de l’huissier de justice, l’exactitude de l’adresse ayant été vérifiée par celui-ci.

Dans ces conditions, il n’est pas sérieusement contestable que les présidents de l’association
Comité des fêtes de Quissac ont, au delà de leurs fonctions, engagé leur responsabilité, par leur refus réitéré et délibéré d’exécuter, fût-ce partiellement, les obligations légales qui pesaient sur l’association qu’ils dirigeaient et qui leur avaient été rappelées à plusieurs reprises. Dès lors, leur condamnation in solidum avec l’association est justifiée, chacun pour la période d’exercice de ses fonctions.

Sur la demande de provision formée par la Sacem :

Les intimés demandent le débouté la demande de provision formée par la Sacem en indiquant qu’elle ne justifie pas des taux retenus et notamment du montant de la redevance forfaitaire appliquée en cas d’absence de recettes et de dépenses ou lorsque ces deux postes sont de faible importance. Elle soutient ainsi qu’il existe une contestation sérieuse.

Cependant, la Sacem indique dans ses conclusions qu’elle justifie des sommes réclamées par le production du barème RFM pour chacune des années concernées, pièces 93, 94 et 95. Or, la Sacem n’a communiqué et produit en cause d’appel que 76 pièces.

Il y a donc lieu de rouvrir les débats sur ce point en l’invitant à produire les pièces qu’elle vise dans ses conclusions.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

— Infirme l’ordonnance, en ce qu’elle a déclaré la demande de provision prescrite pour les années 2008 et 2009 et a rejeté la demande de communication de pièces,

Statuant à nouveau de ces chefs,

— Dit qu’aucune contestation sérieuse ne s’oppose à la condamnation provisionnelle de l’association Comité des fêtes de Quissac et de M. Y au titre des redevances dues pour les années 2008 et 2009,

— Ordonne à l’association Comité des fêtes de
Quissac, in solidum avec M. Y, de remettre à la Sacem le programme des oeuvres exécutées au cours des bals des 12, 13, 14, 15, 16 et 17 août 2008, des bals des 7, 8, 12, 13, 14, 15 et 16 août 2009 et de ceux organisés les 11, 12, 13, 14, 15, et 16 août 2010, dans un délai de 1 mois suivant la signification de la présente décision, sous astreinte, passé ce délai, de 50 euros, par jour de retard, pendant un délai de 3 mois,

— Ordonne à l’association Comité des fêtes de
Quissac, in solidum avec M. A, de remettre à la Sacem le programme des oeuvres exécutées au cours des bals des 10, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 août 2011, des bals des 9, 10, 11, 12, 13, 14 et 15 août 2012, des bals organisés les 13, 14, 15, 16, 17, 18 et 19 août 2013 et de ceux organisés les 13, 14, 15, 16, 17 et 18 août 2014 dans un délai de 1 mois suivant la signification de la présente décision, sous astreinte, passé ce délai, de 50 euros, par jour de retard, pendant un délai de 3 mois,

Avant dire droit sur toutes les autres demandes,

— Invite la Sacem à communiquer et produire les pièces 93, 94 et 95 qu’elle vise dans ses conclusions du 25 avril 2016,

— Sursoit à statuer sur toutes les autres demandes,

— Renvoie l’affaire à l’audience du :

lundi 23 janvier 2017 à 08 heures 15 – salle A -
Palais Verdun,

date à laquelle l’instruction sera déclarée close.

Le greffier, Le président,

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