Cour d'appel d'Amiens, 25 février 2016, n° 14/03229

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

ARRET

Y

C/

FEDERATION NATIONALE DES JARDINS FAMILIAUX ET COLLECTIFS

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE L’OISE

WM/FD

COUR D’APPEL D’AMIENS

CHAMBRE SOCIALE TASS

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 25 FEVRIER 2016

************************************************************

RG : 14/03229

JUGEMENT DU TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE de BEAUVAIS (REFERENCE DOSSIER N° RG 365-13) en date du 28 mai 2014

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur B Y

XXX

XXX

non comparant, représenté par Me Olivia MAITRE-FAURIE, avocat au barreau de LA ROCHELLE

ET :

INTIMÉES

FEDERATION NATIONALE DES JARDINS FAMILIAUX ET COLLECTIFS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce domiciliès audit siège

XXX

XXX

non comparante, représentée par Me Brigitte BEZIAN, avocat au barreau de PARIS

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE L’OISE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce domiciliès audit siège

XXX

XXX

XXX

comparante en la personne de Mme Marie José BOURGEOIS, dûment mandatée

DÉBATS :

A l’audience publique du 07 Janvier 2016, devant M. F G, Conseiller, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

— M. F G en son rapport,

— les avocats et la représentante de la Caisse en leurs observations.

M. F G a avisé les parties que l’arrêt sera prononcé le 25 Février 2016 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ,

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme H I

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. F G en a rendu compte à la formation de la 5e chambre sociale TASS de la Cour composée en outre de :

Mme Brigitte GUIEN-VIDON, Président de Chambre

Mme Valérie CAZENAVE, Conseiller

qui en a délibéré conformément à la Loi

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 25 Février 2016, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Brigitte GUIEN-VIDON, Président de Chambre et Mme H I, Greffier.

*

* *

DÉCISION :

Vu le jugement du 28 mai 2014, par lequel le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Beauvais, statuant dans le litige opposant M. D Y à La Fédération Nationale des Jardins Familiaux, en présence de la Caisse primaire d’assurance maladie de l’Oise, a débouté M. Y de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable dirigée contre La Fédération Nationale des Jardins Familiaux à la suite de l’accident du travail du 21 avril 2012 et de ses demandes subséquentes, déclaré le jugement commun à la Caisse primaire d’assurance-maladie de l’Oise ;

Vu l’appel interjeté le 12 juin 2014 par M. Y à l’encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 30 mai 2014;

Vu les conclusions et observations orales des parties à l’audience des débats du 7 janvier 2015, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel ;

Vu les conclusions de M. Y enregistrées au greffe le 24 novembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience, soutenant que La Fédération Nationale des Jardins Familiaux a commis une faute inexcusable à l’origine de l’agression dont il a été victime le 21 avril 2012 par M. X en ce qu’elle avait nécessairement conscience des risques auxquels il était exposé compte tenu des tensions qui régnaient et des incidents intervenus antérieurement qui avaient été portés à sa connaissance, mais qu’elle n’a pas pris les mesures propres à le préserver des risques encourus, qu’il est bien fondé à solliciter la réparation de ses préjudices et une indemnité réparant la perte de son emploi du à la faute inexcusable de l’employeur à l’origine de son licenciement pour inaptitude, demande à la Cour de dire que l’accident dont il a été victime le 21 avril 2012 est du à la faute inexcusable de son employeur, de fixer la majoration du capital représentatif de la rente d’accident du travail à la somme de 1948,44 euros, d’ordonner une expertise médicale afin de permettre l’évaluation de ses préjudices, de condamner La Fédération Nationale des Jardins Familiaux à lui payer une indemnité de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens qui comprendront les frais d’expertise ;

Vu les conclusions de La Fédération Nationale des Jardins Familiaux enregistrées au greffe le 7 janvier 2016, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience, soutenant que le salarié a commis une faute intentionnelle en étant à l’origine de la rixe qui l’a opposé à M. X, qu’en dépit des vifs propos échangés antérieurement par les deux protagonistes, elle ne pouvait avoir conscience que M. Y pourrait faire preuve d’un comportement d’une telle violence dans le cadre du différend l’opposant à M. X pour un problème de stationnement de véhicule alors que les tensions paraissaient s’être apaisées, qu’elle avait néanmoins envisagé d’aménager son site afin d’empêcher le stationnement irrégulier de M. X dés qu’elle a été de nouveau alertée par M. Y sur le renouvellement de ses pratiques en mars 2012, qu’à partir du mois de février 2012 M. Y avait adopté un comportement agressif et menaçant dénoncé par plusieurs salariés, demande à la Cour de confirmer le jugement déféré, de rejeter les demandes de M. Y dans l’attente des résultats de l’expertise, à supposer que la Cour y fasse droit et de condamner ce dernier à lui payer la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions de la Caisse primaire d’assurance-maladie de l’Oise enregistrées au greffe le 2 décembre 2015, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience, soutenant qu’elle s’en rapporte à justice sur la demande de reconnaissance de la faute inexcusable et sur la nécessité d’une expertise médicale qui sera nécessairement une expertise judiciaire et non une expertise technique, laquelle n’a pas vocation à s’appliquer dans le cadre d’un litige opposant l’assuré à son employeur sur la reconnaissance d’une faute inexcusable, que le capital représentatif de la rente s’élève à la somme de 1950,38 euros, qu’elle s’oppose à la demande de majoration des indemnités journalières qui constituent uniquement un revenu de remplacement à la victime pendant sa période d’incapacité temporaire et qui n’ont pas le caractère d’une rente susceptible de faire l’objet d’une majoration en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, qui demande également à la Cour de dire qu’elle pourra récupérer auprès de La Fédération Nationale des Jardins Familiaux le montant des indemnités susceptibles d’être allouées à M. Y au titre de l’indemnisation de ses préjudices personnels ainsi que le montant de la rente majorée susceptible de lui être versée en cas de reconnaissance de la faute inexcusable.

CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR

Employé depuis le 21 avril 2009 par La Fédération Nationale des Jardins Familiaux en qualité de coordinateur de travaux chargé d’organiser les travaux sur les différents sites de jardins gérés par l’association, M. D Y a été blessé sur son lieu de travail le 21 avril 2012 par M. X à l’occasion d’une rixe avec celui-ci.

Cet accident a été pris en charge d’emblée au titre de la législation professionnelle par la Caisse primaire d’assurance maladie de l’Oise suivant décision du 22 mai 2012.

M. Y a ensuite engagé le 18 juillet 2012, une procédure de reconnaissance de faute inexcusable à l’encontre de son employeur, puis après échec de la tentative de conciliation mise en oeuvre par la Caisse primaire d’assurance maladie, il a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Beauvais qui a statué ainsi que cela a été rappelé précédemment.

En vertu du contrat de travail l’employeur est tenu envers ses salariés d’une obligation de sécurité de résultat notamment en ce qui concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles et le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

M. Y soutient qu’en raison de plusieurs incidents précédents avec M. X pour des questions d’occupation d’espace et de stationnement de véhicule sur le site des jardins de la SAUSSAIE, l’employeur qui en avait été informé à plusieurs reprises, avait nécessairement conscience des risques auxquels il était exposé et qu’il n’avait pris aucune mesure pour l’en préserver.

Il résulte des éléments du dossier et notamment des attestations et mails versés aux débats, qu’il existait des tensions entre La Fédération Nationale des Jardins Familiaux et d’autres occupants jardiniers du site de la SAUSSAIE, notamment avec M. X pour des questions d’occupation d’espace et de places de stationnement, que le 24 mars 2011 M. Y avait déposé une main-courante auprès de la police, se plaignant du comportement menaçant et agressif de M. X, qu’une autre altercation se serait produite le 9 septembre 2011 ainsi que cela est rapporté par M. J K, qu’il convient de relever cependant qu’aucun échange de coups n’avait eu lieu entre les différents protagonistes et que la situation paraissait s’être apaisée.

Le 10 mars 2011, M. Y a attiré l’attention de sa responsable sur la réapparition du véhicule de M. X sur le site sans pour autant faire état d’une nouvelle altercation avec ce dernier.

Par mail du 28 mars 2012, le directeur de La Fédération Nationale des Jardins Familiaux a demandé à sa responsable d’envisager des mesures de délimitation de l’espace devant la porte d’entrée du garage en installant éventuellement des plots susceptibles d’être rabattus, à charge pour M. Y, qui avait été mis en copie du mail, d’en étudier le coût.

Il y a lieu de relever que parallèlement, par mail du 1er février 2012 adressé à la responsable des jardins franciliens, M. A salarié de l’association qui se plaignait du comportement général de M. Y a indiqué : « Le jardinier que M. Y dit gênant avec son véhicule devant l’atelier à la SAUSSAIE ne nous gêne en aucun cas mais M. Y de mauvaise foi ne veut pas charger ou décharger les camions ».

Il résulte également d’autres mails adressés à la direction de l’association par différents salariés, que le comportement de M. Y qui rencontrait des difficultés avec son employeur, devenait agressif, menaçant, voire violent, que notamment par un mail adressé au directeur de l’association le 19 avril 2012, soit trois jours avant le fait accidentel, M. Z, animateur, a indiqué que certaines tensions au sein du service des jardins franciliens étaient initiées et entretenues par M. Y, qu’il ressort également de la procédure pénale que le jour de la rixe, M. Y est descendu de son camion et s’est dirigé vers M. X exaspéré par le fait que ce dernier avait a nouveau stationné son véhicule à un endroit inapproprié selon lui, que si l’enquête pénale n’a pas permis de déterminer avec précision les responsabilités dans l’origine de la rixe, force est de constater que M. Y n’a rien fait pour apaiser la situation avec M. X et éviter la bagarre qui s’en est suivie, qu’il a au contraire pris une part active à celle-ci en blessant très sérieusement M. X nettement plus âgé que lui, en lui fracturant plusieurs côtes.

Les éléments de fait et de preuve du dossier ne permettent pas par conséquent de considérer comme rapportée la preuve de la faute inexcusable de l’employeur en ce qu’il ne pouvait avoir conscience que le différend portant sur l’occupation d’une place de stationnement par M. X serait à l’origine d’une rixe violente avec M. Y résultant d’un comportement inadapté et disproportionné de ce dernier, alors que l’employeur était en droit d’attendre de lui qu’il fasse preuve de retenue et de modération en sa qualité d’ancien gendarme et d’encadrant de l’équipe présente sur place. En outre, il est établi que lorsque la direction de l’association a eu connaissance par M. Y de la réapparition de M. X sur le site en mars 2012, elle a envisagé de prendre des mesures destinées à mettre un terme au stationnement « sauvage » en confiant précisément l’étude des aménagements à réaliser à M. Y. Il ne peut dès lors être retenu que l’employeur n’a pas pris des mesures propres à préserver son salarié de nouvelles tensions susceptibles de se produire avec les autres occupants du site.

Par conséquent, il convient de rejeter les demandes de M. Y et vu la solution donnée au litige, il n’y a pas lieu de statuer sur les moyens et demandes plus amples des parties.

Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

Pour des considérations d’équité, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, le litige opposant les parties s’inscrivant manifestement dans contexte conflictuel de la relation de travail entre le salarié et son employeur.

Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions.

M. Y appelant qui succombe, sera condamné au paiement du droit prévu à l’article R 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.

La procédure devant les juridictions de la sécurité sociale étant gratuite et sans frais, il n’y a pas lieu de statuer sur les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale de Beauvais du 28 mai 2014,

Y ajoutant :

Rejette les demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne M. D Y au paiement du droit prévu à l’article R 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, liquidé à la somme de 321,80 € .

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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