Cour d'appel d'Amiens, 1ère chambre civile, 9 janvier 2020, n° 19/02970

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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 1re ch. civ., 9 janv. 2020, n° 19/02970
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 19/02970
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRET

SAS CABOT FINANCIAL FRANCE

C/

Y

PM/CR

COUR D’APPEL D’AMIENS

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT

Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : N° RG 19/02970 – N° Portalis DBV4-V-B7D-HJFQ

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU JUGE DE L’EXECUTION DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’AMIENS DU 1ER AVRIL DEUX MILLE DIX NEUF

PARTIES EN CAUSE :

SAS CABOT FINANCIAL FRANCE SAS CABOT FINANCIAL FRANCE anciennement dénommée NEMO CREDIT MANAGEMENT et venant aux droits de la Société CETELEM, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Benoît LEGRU de la SELARL BENOIT LEGRU, avocat au barreau D’AMIENS

Ayant pour avocat plaidant, Me Renaud ROCHE, avocat au barreau de LYON

APPELANTE

ET

Monsieur X Y

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représenté par Me Patrice DUPONCHELLE de la SCP VAN MARIS-DUPONCHELLE, avocat au

barreau D’AMIENS

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2019/005174 du 04/06/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AMIENS)

INTIME

DEBATS :

A l’audience publique du 07 novembre 2019, l’affaire est venue devant M. Pascal MAIMONE, magistrat chargé du rapport siégeant sans opposition des avocats en vertu de l’article 786 du Code de procédure civile. Ce magistrat a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 09 janvier 2020.

La Cour était assistée lors des débats de Mme Charlotte RODRIGUES, greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Le magistrat chargé du rapport en a rendu compte à la Cour composée de Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Président, M. Pascal MAIMONE et Mme Sophie PIEDAGNEL, Conseillers, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE DE L’ARRET :

Le 09 janvier 2020, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, Président de chambre, et Mme Charlotte RODRIGUES, greffier.

*

* *

DECISION :

Mr X Y a contracté auprès de la SA CETELEM selon offre préalable du 30 mai 1992 un crédit à la consommation de 95000 Francs sous la forme d’un découvert en compte reconstituable, remboursable par mensualités de 2040 francs à taux variable par tranches de 19,92 % à 13,92 % l’an et révisable.

Les échéances étant impayées, la SACETELEM a prononcé la déchéance du terme, et a réclamé le remboursement de la créance restant due.

La SA CETELEM a obtenu du Tribunal d’Instance d’ABBEVILLE un jugement du 22 septembre 2006 qui a condamné Mr X Y à lui payer une somme de 12835,34 € en principal, outre intérêts moratoires au taux de 3,47 % à compter du 20 janvier 2005 avec exécution provisoire.

La même décision a accordé à Mr X Y un délai de grâce de 24 mois.

Ce jugement a été signifié par acte du 2 octobre 2006 à Mr X Y à sa personne.

La SA CETELEM devenue la SA BNP PERSONAL FINANCE a cédé sa créance à la SARL1640 INVESTMENT qui l’a elle-même cédée à « NEMO CREDIT MANAGEMENT devenue ensuite la SAS CABOT FINANCIAL France (ci-après la SAS CABOT).

Indiquant venir aux droits de la SA CETELEM, la SAS CABOT a fait signifier par acte du 11 juin 2018 à Mr X A un itératif commandement aux fins de saisie vente, avec signification de cession de créance, afin de recouvrer une somme de 15337,38 € dont la somme principale de 12835,34 € et 2228,15 € en intérêts échus depuis 5 ans.

Faisant valoir qu’il n’avait jamais eu connaissance du jugement du 22 septembre 2006, que la cession de la créance n’était pas justifiée et qu’en tout état de cause, la prescription de 10 ans de l’article L 111-4 alinéa du code des procédures civiles d’exécution était acquise depuis le 19 juin 2018 en dépit du commandement critiqué, par acte d’huissier du 13 septembre 2018, Mr X Y a fait assigner la SAS CABOT devant le juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance d’Amiens afin d’entendre ordonner l’annulation du commandement aux fins de saisie-vente.

Par jugement du 1er avril 2019, le juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance d’Amiens a :

— Prononcé l’annulation du commandement aux fins de saisie-vente que la SAS CABOT a fait signifier par acte du 11 juin 2018 à l’encontre de Mr X Y ;

— Condamné la SAS CABOT à payer à Mr X Y la somme de 400 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne la SA S CABOT aux entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 15 avril 2019, la SAS CABOT a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions transmises par la voie électronique le 4 juillet 2019, la SAS CABOT demande à la Cour de :

— Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

— Dire et juger qu’elle démontre parfaitement sa qualité à agir à l’encontre de Mr X Y ;

— Dire et juger régulier le commandement aux fins de saisie-vente qu’elle a fait signifier par acte du 11 juin 2018 à l’encontre de Mr X Y ;

En conséquence,

— Débouter Mr X Y de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

— Condamner Mr X Y à lui payer la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner Mr X Y aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, par Maître Benoit Legru, avocat.

Par conclusions transmises par la voie électronique le 2 juillet 2019, Mr X Y demande à la Cour de :

— Dire et juger la SA CABOT FINANCIAL France mal fondé en son appel et l’en débouter ;

— Confirmer le jugement entrepris ;

— Condamner la SA CABOT à payer à Mr X Y la somme de 693,40 € TTC en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner la SA CABOT aux dépens.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.

Par ordonnance du 7 novembre 2019, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture et renvoyé l’affaire pour plaidoiries à l’audience du même jour.

L’action en justice opposant les parties ayant été introduite après le 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-31 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, celle-ci est applicable au présent litige ; il sera donc fait référence aux articles du code civil selon leur numérotation postérieure à cette entrée en vigueur.

CECI EXPOSE, LA COUR,

Sur l’existence d’un titre exécutoire au profit de la SAS CABOT :

L’article L111-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution.

Par ailleurs, en matière de cession de créance, l’article 1689 ancien du code civil disposait que dans le transport d’une créance, d’un droit ou d’une action sur un tiers, la délivrance s 'opère entre le cédant et le cessionnaire par la remise du titre.

En outre, l’article 1690 du code civil ancien précisait que le cessionnaire n 'est saisi à l’égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur.

Néanmoins, le cessionnaire peut être également saisi par l’acceptation du transport faite par le débiteur dans un acte authentique.

En application de ces articles, il était considéré :

— que les formalités de l’article 1690 précité ne sont exigées qu’en matière de cession de créance et non pas lorsqu’il y a transmission des éléments actifs et passifs à titre universel, comme en cas de fusion entre sociétés et d’absorption d’une société par une autre ;

— que les formalités de l’article 1690 précité ne sont pas non plus exigées en cas de simple changement de dénomination sociale ;

— que si la signification de la cession ou l’acceptation authentique est en principe nécessaire pour que le cessionnaire puisse opposer aux tiers le droit acquis par lui, le défaut d’accomplissement de ces formalités ne rend pas le cessionnaire, irrecevable à réclamer du débiteur cédé l’exécution de son obligation quand cette exécution n’est susceptible de faire grief à aucun droit advenu depuis la naissance de la créance, soit audit débiteur cédé, soit à une autre personne étrangère ;

— que la cession de créance peut intervenir dans une assignation en paiement ou même en cours d’instance ;

— que la cession d’une créance a pour effet de transférer les titres exécutoires qui sont les accessoires de la créance cédée.

Les nouveaux articles 1689 et 1690 du code civil, applicables en la cause sont rédigés en des termes similaires aux précédentes rédactions si ce n’est qu’il n’est plus fait référence à la cession des créances mais uniquement à celle des droits et actions.

Cependant, cette nouvelle rédaction qui procède de la volonté du législateur de donner au texte une portée plus générale est sans incidence sur l’application à une créance de ces dispositions, la cession d’une créance constituant une cession de droits et d’actions.

En l’espèce, il ressort des éléments de la cause :

— que la SAS CABOT justifie que la société CETELEM a changé de dénomination pour devenir la société BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE ;

— que ce changement de dénomination qui ne constitue pas une cession de créance n’avait pas à être notifié à Mr X Y ;

— qu’en appel, la SAS CABOT produit la convention par laquelle la société BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE a cédé à la société 1640 INVESTMENT un ensemble de créances alors qu’en première instance, elle avait produit un contrat par lequel la société BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE a cédé à la société 1640 INVESTMENT 2 un ensemble de créance qui ne contenait pas la créance litigieuse ;

— que ce contrat produit en cause d’appel comporte une annexe mentionnant la créance à l’encontre de Mr X Y ;

— qu’en outre cet acte qui vaut par lui-même transmission du titre exécutoire est produit avec l’original du titre exécutoire rendu au profit de la société CETELEM à l’encontre de Mr X Y ;

— que cependant, il n’est pas établi que cette cession a été signifiée à Mr X Y ;

— que certes, la SAS CABOT a fait référence à cette cession dans ses conclusions de première instance dont la date est inconnue mais qui ne peuvent avoir été prises avant l’assignation du 13 septembre 2018 par laquelle Mr X Y a saisi le premier juge ;

— que toutefois, Mr X Y invoque que cette absence de signification fait grief à l’un de ses droits advenus depuis la naissance de la créance puisqu’il fait état de ce qu’en raison de cette absence de signification ou plus exactement de sa tardiveté, de l’inopposabilité de la cession à son égard qui en résulte, le commandement serait nul et la prescription serait acquise ;

— que cette absence de signification est donc susceptible d’avoir une incidence sur le droit de la société 1640 INVESTMENT à réclamer à Mr X Y, l’exécution de son obligation et en conséquence sur le droit des cessionnaires subséquents de lui réclamer l’exécution de son obligation ;

Il convient donc de rechercher si l’absence de signification à Mr X Y, ou plus exactement la signification tardive après le 13 septembre 2018, de la cession par la société BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE à la société 1640 INVESTMENT fait grief au droit advenu de Mr X Y depuis la naissance de la créance de faire état de la prescription du titre exécutoire.

Sur la nullité du commandement :

Avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, selon l’article 2262 ancien du code civil, la prescription applicable au titre exécutoire était de trente ans.

Depuis le 19 juin 2008, date d’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, il résulte de l’article L

114-4 du code des procédures civiles d’exécution, que l’exécution d’un titre exécutoire peut être poursuivie pendant 10 ans.

De plus, en application de l’article 2222 du code civil, les dispositions de la loi de juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

En l’espèce, il ressort des éléments de la cause :

— que le titre exécutoire litigieux a été rendu le 22 septembre 2006 ;

— que du 22 septembre 2006 à la date d’entrée en vigueur de la réforme, il s’était écoulé 1 an 8 mois et 27 jours sur les 30 ans dont disposait alors le créancier pour agir ;

— que la réforme de 2008 a fait repartir un délai de prescription de 10 ans à compter du 19 juin 2008 expirant le 19 juin 2018 ;

— que le seul acte interruptif de prescription dont se prévaut la SAS CABOT est le commandement de payer aux fins de saisie vente délivré le 11 juin 2018 ;

— que ce commandement a été signifié à la requête de la SAS CABOT venant aux droits de la société NEMO CREDIT MANAGEMENT venant elle-même aux droits de la société 1640 INVESTMENT ;

— que ce commandement ne précise pas que la société 1640 INVESTMENT vient aux droits de BNP PERSONNAL FINANCE en vertu d’une cession de créance ;

— que ce commandement ne vaut donc pas signification à Mr X Y de la cession opérée par BNP PERSONNAL FINANCE laquelle ne lui avait pas antérieurement été signifiée;

— qu’à la date de la délivrance de ce commandement, le défaut de signification de la cession de créance effectuée par la société BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE fait donc grief au droit de Mr X Y de se prévaloir de la prescription de la créance ;

— que ce faisant, Mr X Y est en droit de se prévaloir de l’inopposabilité à son égard de la cession effectuée par la société BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE et de la nullité du commandement délivré alors que cette cession ne lui été par opposable ;

— que la circonstance que la SAS CABOT a fait référence à cette cession dans ses conclusions de première instance dont la date est inconnue mais qui ne peut qu’être postérieure à l’assignation du 13 septembre 2018 par laquelle Mr X Y a saisi le premier juge est sans incidence en la cause puisqu’à cette date la prescription se trouvait déjà acquise ;

— qu’il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé l’annulation du commandement aux fins de saisie vente du 11 juin 2018 ;

— que toutefois, la Cour adoptant une motivation sensiblement différente de celle du premier juge, il convient de préciser que cette confirmation intervient par substitution et adoption de nouveaux motifs ;

— que Mr X Y bien qu’il fonde son argumentation sur la prescription ne réclamant dans le dispositif de ses conclusions que la nullité du commandement et non que l’action de la SAS CABOT soit déclarée irrecevable comme étant prescrite, conformément à l’article 954 du code de procédure civile il n’y a pas lieu de statuer sur ce dernier point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La SAS CABOT succombant, il convient :

— de la condamner aux dépens d’appel ;

— de la débouter de sa demande au titre des frais irrépétibles pour la procédure d’appel ;

— de confirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée aux dépens de première instance ;

— de confirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles pour la procédure de première instance.

L’équité commandant de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de Mr X Y, il convient de lui allouer de ce chef la somme de 1 000 € et de confirmer le jugement en ce qu’il lui a accordé à ce titre la somme de 400 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort :

Confirme, par adoption et substitution de nouveaux motifs, le jugement rendu entre les parties le 1er avril 2019 par le juge de l’exécution du Tribunal de Grande Instance d’Amiens ;

Y ajoutant :

Condamne la SAS CABOT FINANCIAL France à payer à Mr X Y la somme de 1 000 € par application en appel des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs plus amples demandes ;

Condamne la SAS CABOT FINANCIAL France aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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