Cour d'appel d'Angers, Chambre a - civile, 8 juin 2021, n° 20/01336

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, ch. a - civ., 8 juin 2021, n° 20/01336
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 20/01336
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – CIVILE

KR/IM

ARRET N°

AFFAIRE N° RG 20/01336 – N° Portalis DBVP-V-B7E-EWX5

Jugement du 18 Septembre 2020

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP du MANS

n° d’inscription au RG de première instance : 18-001700

ARRÊT DU 08 JUIN 2021

APPELANT :

Monsieur Y X

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par Me Emmanuel BRUNEAU substituant Me Frédéric BOUTARD de la SCP LALANNE – GODARD – HERON – BOUTARD – SIMON, avocat au barreau du MANS – N° du dossier 20171126

INTIMEES :

S.A. COMPAGNIE AERIENNE INTER REGIONALE EXPRESS (CAIRE) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentées par Me Inès RUBINEL, substituant Me Benoit GEORGE de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 214386 et Me Patrice REMBAUVILLE-NICOLLE et Me Emilie MINARD-DRISS, avocats plaidants au barreau de PARIS

S.A.S.U. GO VOYAGES agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[…]

[…]

Représentées par Me Inès RUBINEL, substituant Me Benoit GEORGE de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 214386

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue publiquement, à l’audience du 06 Avril 2021 à 14 H 00, Madame REUFLET, Conseiller, ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la Cour composée de :

Madame THOUZEAU, Présidente de chambre

Madame MULLER, Conseiller

Madame REUFLET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame LEVEUF

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 08 juin 2021 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine MULLER, Conseiller, en remplacement de Marie-Cécile THOUZEAU, Présidente de chambre empêchée, et par Christine LEVEUF, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[…]

Exposé du litige

Le 31 août 2017, en déplacement personnel en Guyane, M. X a réservé par l’intermédiaire de la société (SAS) Go Voyages, agence de voyages en ligne, un billet d’avion pour un trajet aller-retour Cayenne ' A-B via Pointe-à-Pitre, aller prévu le samedi 2 septembre 2017 à 20h25, et retour le mercredi 6 septembre 2017 à 16h15. Les deux vols de ce trajet étaient assurés par la société (SA) Compagnie Aérienne Inter Régionale Express (CAIRE), exerçant son activité sous la marque Air Antilles Express.

Le vol retour a été annulé en raison du passage de l’ouragan Irma qui s’est déployé dans l’océan Atlantique Nord du 30 août au 12 septembre 2017. M. X a finalement rejoint Cayenne, au moyen de deux vols successifs : A-B-Guadeloupe le 10 septembre 2017, puis Guadeloupe-Guyane le 12 septembre 2017.

Par lettres recommandées de son conseil du 27 juillet 2018, M. X a mis en demeure la SA CAIRE et la SAS Go Voyages de l’indemniser à hauteur de 5 700,50 euros.

La SA CAIRE et Go Voyage ont refusé de faire droit à sa demande, la première au motif que la fermeture de l’aéroport de A-B était une circonstance exceptionnelle indépendante de sa volonté, la deuxième car elle estimait n’avoir aucune responsabilité en sa qualité de tiers au contrat entre M. X et la SA CAIRE.

Par actes d’huissier des 18 et 19 septembre 2018, M. X a fait assigner la SA CAIRE et la SAS Go

Voyages devant le tribunal d’instance du Mans, la procédure ayant été transférée le 1er janvier 2020 au tribunal judiciaire du Mans, et a sollicité :

— le rejet de l’exception d’incompétence soulevée par la SA CAIRE,

— la condamnation solidaire de la SA CAIRE et de la SAS Go Voyages à lui payer la somme de 5 700,50 euros à titre de dommages-intérêts,

— la condamnation de la SA CAIRE seule à lui payer la somme de 250 euros au titre de son droit à indemnisation,

— la condamnation solidaire de la SA CAIRE et de la SAS Go Voyages au paiement de la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles,

— leur condamnation solidaire aux entiers dépens.

La SA CAIRE a soulevé l’exception d’incompétence du tribunal judiciaire du Mans, sollicitant un renvoi de l’affaire au tribunal de Cayenne, et à titre subsidiaire le rejet des demandes de M. X.

La SAS Go Voyages s’en est rapportée sur la compétence du tribunal judiciaire du Mans et a sollicité le rejet des prétentions de M. X et la validation de son offre d’indemniser le demandeur à hauteur de 831,76 euros, coût du voyage.

Par jugement du 18 septembre 2020, le tribunal judiciaire du Mans a :

Faisant droit à l’exception d’incompétence soulevée par la SA CAIRE,

— dit que la juridiction compétente est le tribunal judiciaire de Cayenne,

— ordonné, à l’expiration du délai d’appel, la transmission du dossier de l’affaire par le greffe avec une copie de la décision de renvoi,

— réservé les dépens.

Le tribunal a observé que le règlement CE 261/2004 du 11 février 2004 fondant la responsabilité des compagnies aériennes en cas d’annulation ou de retard de vol, ne traite pas de la compétence des juridictions.

Pour se déclarer incompétent territorialement, il a constaté que le voyage litigieux était resté national et ne combinait pas voyage et hébergement, et qu’en vertu de l’article 4 du règlement UE 1215/2012 qui prévoit que la compétence de principe pour les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre est celle des juridictions de cet État, et des règles de procédure civile relatives à la compétence territoriale du juge (articles 42 et 46 du code de procédure civile), la compétence territoriale appartenait en principe au tribunal du lieu où demeurait le défendeur, et que le demandeur était autorisé à saisir à son choix la juridiction du lieu où demeure l’un d’eux en cas de pluralité de défendeurs. Écartant les dispositions du code de la consommation sur le fondement de l’article 17 du règlement UE 1215/2012, le tribunal judiciaire du Mans a désigné le tribunal judiciaire de Cayenne comme compétent en vertu de l’article 81 du code de procédure civile.

Par déclaration du 7 octobre 2020, M. X a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il a, faisant droit à l’exception d’incompétence soulevée par la SA CAIRE, dit que la juridiction compétente est le tribunal judiciaire de Cayenne ; a ordonné, à l’expiration du délai d’appel, la transmission du dossier de l’affaire par le greffe avec une copie de la décision de renvoi ; a réservé les dépens ; intimant la SA CAIRE et la SAS Go Voyages.

Par ordonnance du 9 octobre 2020, le magistrat délégué par le premier président de la cour d’appel d’Angers, vu la requête déposée le 7 octobre 2020, a autorisé M. X à faire assigner la SA CAIRE et la SAS Go Voyages devant la cour d’appel d’Angers à l’audience du lundi 1er février 2021 à 14h.

Par acte d’huissier du 10 novembre 2020, M. X a signifié la déclaration d’appel et fait assigner la SA CAIRE et la SAS Go Voyages à comparaître devant la cour d’appel d’Angers pour l’audience précitée.

Les parties ont conclu et ont été avisées le 11 décembre 2020 de ce que l’affaire était finalement fixée à l’audience du 6 avril 2021.

Prétentions et moyens des parties

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement :

— du 6 avril 2021 pour M. X,

— du 29 janvier 2021 pour la SA CAIRE,

— du 29 janvier 2021 pour la SAS Go Voyages,

qui peuvent se résumer comme suit.

M. X demande à la cour, au vu des articles 1134 et 1147 anciens du code civil, du règlement (CE) 261/2004 du Parlement européen et du Conseil du 11 février 2004, de :

— infirmer le jugement du tribunal judiciaire du Mans en ce qu’il :

faisant droit à l’exception d’incompétence soulevée par la SA CAIRE,

* dit que la juridiction compétente est le tribunal judiciaire de Cayenne,

* ordonné, à l’expiration du délai d’appel, la transmission du dossier de l’affaire par le greffe avec une copie de la décision de renvoi,

* réservé les dépens,

— déclarer le tribunal judiciaire du Mans compétent,

— évoquer le fond et :

* débouter la SA CAIRE et la SAS Go Voyages de leurs entiers moyens, fins et demandes,

* donner acte à la SAS Go Voyages qu’elle est offrante de lui rembourser la somme de 831,76 euros,

* condamner solidairement la SA CAIRE et la SAS Go Voyages à lui payer la somme de 5 700,50 euros à titre de dommages et intérêts,

* condamner la SA CAIRE au paiement de la somme de 250 euros au titre des dispositions de l’article 7 du règlement (CE) n°261/2004,

— condamner solidairement la SA CAIRE et la SAS Go Voyages à lui payer la somme de 3 500 euros

au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner solidairement la SA CAIRE et la SAS Go Voyages aux entiers dépens.

M. X soutient que le tribunal judiciaire du Mans s’est à tort déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Cayenne. Il souligne qu’en l’espèce, il n’existe aucun élément d’extranéité dans le litige, toutes les parties étant domiciliées en France, de sorte que c’est l’article R.631-3 du code de la consommation qui est applicable et non l’article 42 du code de procédure civile contrairement à ce que, selon lui, a inexactement décidé le tribunal judiciaire en écartant l’application des dispositions de l’article R631-3 du code de la consommation par application de l’article 17 du Règlement UE 1215/2012.

Il sollicite que la cour se saisisse du fond du dossier sur le fondement de l’article 88 du code de procédure civile.

M. X affirme que les intimées, en tant que professionnelles, étaient tenues à son endroit d’un devoir de conseil et de mise en garde renforcée.

Sur le fondement de l’article 5 §1 du règlement CE n°261/2004 qui prévoit qu’en cas d’annulation d’un vol, les passagers concernés se voient offrir par le transporteur aérien effectif, notamment […] une assistance conformément à l’article 9 §1 point a) et §2, de l’article 5§2 qui prévoit que lorsqu’ils en sont informés, les passagers se voient fournir des renseignements concernant d’autres transports possibles, de l’article 5 §3 qui prévoit qu’un transporteur aérien effectif n’est pas tenu de verser l’indemnisation prévue à l’article 7 s’il est en mesure de prouver que l’annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises, de l’article 5 §4 qui prévoit qu’il incombe au transporteur de prouver qu’il a informé les passagers de l’annulation d’un vol ainsi que le délai dans lequel il l’a fait, de l’article 14 qui impose au transporteur aérien effectif une obligation d’informer les passagers de leurs droits, M. X sollicite l’indemnisation de ses préjudices consécutifs à des fautes contractuelles.

M. X reproche aux intimées de ne pas l’avoir renseigné sur la menace que représentait l’ouragan Irma pour son voyage, alors qu’à la date où il a embarqué, elles savaient nécessairement qu’il existait un risque important lié à l’arrivée de cet ouragan sur l’île de A-B. Il relève que la préfecture de Guadeloupe avait publié un communiqué de presse annonçant la mise en place d’une vigilance orange alors que, de son côté, il se trouvait dans un village guyanais, sans accès à la télévision ni internet, à l’exception du moment où il s’est déplacé chez un ami pour effectuer la réservation des vols. Il soutient qu’elles ne justifient pas l’avoir informé de l’annulation de son vol et des modalités de remplacement de celui-ci.

Il fait grief à la SA CAIRE de ne pas lui avoir fourni les prises en charge et l’information auxquelles lui donnaient droit les articles 9 et 14 précités et l’estime malvenue à lui reprocher d’avoir pris des mesures unilatérales, alors qu’elle ne justifie pas lui avoir offert de prendre en charge son hébergement.

M. X prétend que les intimées ne peuvent pas opposer à ses demandes indemnitaires l’existence de circonstances extraordinaires, dès lors que celles-ci ne font obstacle au versement d’une indemnisation que dans le cadre des articles 5 et 7 du règlement n°261/2004, et que ses demandes sont fondées sur les articles 5 §1 1 a) et b), 9 et 14 sus-évoqués.

Il soutient que la SAS Go Voyages ne peut davantage chercher à s’exonérer de sa responsabilité. Il se prévaut d’un arrêt de la Cour de cassation (Cass. civ. 1re 7 février 2006 n°03-17642) en vertu duquel l’agence de voyage a l’obligation, en tant que professionnel mandataire de son client à qui elle vend un billet d’avion, de l’informer des conditions précises d’utilisation du billet, parmi lesquelles figurent les formalités d’entrée sur le territoire de l’État de destination. Il considère que les mentions

du site internet de la SAS Go Voyages ne l’informaient pas suffisamment de l’existence d’un risque imminent sur le bon déroulement de son voyage. Il reproche à l’agence de voyage de ne pas l’avoir informé de ses droits en tant que passager d’un vol annulé et de n’avoir entrepris aucune démarche. Il demande qu’il soit donné acte à cette dernière de son offre d’indemnisation.

Il affirme qu’en conséquence de ces manquements, il a subi un préjudice matériel du fait des frais supplémentaires de séjour exposés pour 700,50 euros (hôtel, restauration, déplacement en taxi, location de véhicule) outre un préjudice moral qu’il chiffre à 5 000 euros pour avoir été laissé au dépourvu sur l’île de A-B qu’il ne connaissait pas, en proie à la panique et au désespoir, exposé à un danger de mort, pour avoir dû chercher seul un lieu de refuge pour ne pas être victime de l’ouragan -qu’il a trouvé mais situé à distance de l’aéroport-, pour s’alimenter et organiser son rapatriement sans aucun soutien ni repère sur l’île. Il affirme qu’il n’a eu d’autre moyens que de louer un véhicule pour pouvoir se déplacer. Il ajoute n’avoir pu contacter ses proches, inquiets de n’avoir eu de nouvelles de lui pendant 5 jours, que lors de son arrivée en Guadeloupe.

La SA CAIRE demande à la cour, au vu du règlement 261/2004, du règlement dit 'Bruxelles 1' , de l’article 700 du code de procédure civile et des pièces, de :

— confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire du Mans en ce qu’il s’est déclaré incompétent pour connaître du litige et a renvoyé l’affaire devant le tribunal judiciaire de Cayenne,

à titre subsidiaire et si la cour entendait évoquer l’affaire au fond,

— dire et juger que M. X n’est pas fondé à demander l’allocation de l’indemnité prévue par l’article 7 du règlement n°261/2004.

— dire et juger que M. X n’est pas fondé à demander le remboursement de frais exposés unilatéralement et dont la nécessité n’est aucunement démontrée,

— dire et juger que M. X n’est pas fondé à demander une indemnisation à raison d’un prétendu préjudice moral, ni démontré ni prévisible,

en conséquence,

— débouter M. X de l’ensemble de ses demandes,

en toute hypothèse,

— dire et juger qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA CAIRE les frais irrépétibles et dépens de la procédure,

en conséquence,

— condamner M. X à verser la somme de 3.500 euros à la SA CAIRE au titre de l’article 700, ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure.

La SA CAIRE fait valoir que puisque M. X souhaite obtenir des indemnités dans le cadre d’un litige concernant l’application d’un contrat de transport aérien (vol sec), le règlement n°1215/2012 du 12 décembre 2012 dit Bruxelles 1 doit s’appliquer.

Elle prétend que le demandeur disposait simplement d’une option de compétence entre le lieu du domicile du défendeur, en vertu de l’article 4 du règlement Bruxelles 1 refondu (ancien article 2), ou le lieu d’exécution de la prestation, en vertu de l’article 7 du même règlement (ancien article 5), c’est-à-dire le lieu où les services ont été ou auraient dû être fournis. Elle souligne que suivant une

jurisprudence constante (arrêt Peter Rehder c/ Air Baltic Corporation C-204/08), seuls les lieux de départ et d’arrivée prévus de l’avion présentent un lien direct avec la fourniture du service. Elle observe que, conformément à l’article 63 du règlement n°1215/2012, les sociétés et personnes morales sont domiciliées au lieu de leur siège statutaire, de leur administration centrale ou de leur principal établissement, et souligne qu’à tout point de vue, elle est domiciliée en Guyane et non au Mans. Elle en déduit que les juridictions compétentes ne pouvaient se trouver qu’à Cayenne ou à A-B.

Subsidiairement, au fond, elle invoque l’existence d’une circonstance extraordinaire ayant conduit à l’annulation du vol du 6 septembre 2017, qui n’aurait pas pu être évitée même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises, au sens des articles 5 et 7 du règlement n°261/2004, privant les passagers d’un vol annulé du droit à ce qu’elle leur verse une indemnité forfaitaire, et l’exonérant ainsi de toute responsabilité. Elle observe que l’intempérie qu’avait constitué l’ouragan Irma entrait, au vu de la proposition unanime de tous les pays européens pour les besoins de l’interprétation du règlement précité, dans le champ des conditions météorologiques incompatibles avec la réalisation des vols en cause et exonératoires. Elle estime que si la survenance d’ouragan n’était pas inédite à A-B lors de la délivrance du billet, l’impossibilité de vol le 6 septembre 2017, consécutive à la fermeture de l’aéroport de A-B en raison de l’ouragan, ne pouvait être alors connue, affirmant n’avoir eu connaissance du passage en vigilance rouge que le 5 septembre 2017.

Elle rappelle qu’en matière de transport aérien, l’obligation de sécurité du transporteur aérien prime sur celle de célérité.

A titre subsidiaire, relevant que M. X a choisi d’organiser lui-même son rapatriement, elle soutient que le droit à prise en charge prévu par l’article 9 du règlement n°261/2004 ne consiste pas en un droit à remboursement de frais unilatéralement exposés et sans lien direct avec l’attente d’un ré acheminement. Elle constate que selon une communication du 10 juin 2016 de la Commission, la prise en charge de tels frais (hébergement, location de véhicule, etc) par le transporteur aérien est exclue. Elle considère qu’il n’est pas démontré par l’appelant que la location d’un véhicule était nécessaire.

Elle conclut au rejet de l’indemnisation du préjudice moral allégué par M. X, observant qu’elle n’était pas à l’origine directe de sa situation, et estimant que l’appelant ne justifie pas du montant du préjudice allégué à hauteur de 5 000 euros, ni du caractère prévisible de celui-ci au sens de l’article 1231-3 du code civil.

La SAS Go Voyages demande à la cour, au vu de l’absence de faute de Go Voyages dans la vente du billet d’avion, de l’absence de faute de Go Voyages dans la communication des informations à son client, de l’absence de preuve d’une quelconque faute commise par la société Go Voyages de nature à engager sa responsabilité dans le cadre de ce dossier, des dispositions du code du tourisme, des dispositions du code civil et notamment l’article 1984, des dispositions du code de la consommation, des articles 6 et 9 du code de procédure civile, qu’elle :

— reçoive la société Go Voyages en ses conclusions, l’en dise bien fondée et ce faisant,

concernant la compétence territoriale,

— donne acte à la société Go Voyages qu’elle s’en rapporte à justice concernant la compétence territoriale du tribunal judiciaire d’Angers,

concernant le fond de l’affaire et si la cour entendait évoquer l’affaire au fond,

— déboute M. X de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de la société Go Voyages,

— dise et juge que la société Go Voyages n’a commis aucune faute dans l’exercice de son rôle de mandataire,

— dise et juge qu’aucune preuve pour faute prouvée dans le cadre de sa mission de mandataire par la société Go Voyages n’est apportée par M. Y X,

— dise et acte que seule la somme de 831,76 euros sera remboursée à M. Y X,

en conséquence,

— condamne M. X à verser à la société Go Voyages la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamne M. X aux entiers dépens.

La SAS Go Voyages fait valoir que dans le cadre de l’achat d’un vol sec, comme en l’espèce, elle agit en qualité de mandataire du transporteur aérien, son mandat se terminant le jour de la remise du titre de transport, et soutient en conséquence que dès lors qu’elle n’est pas soumise à une responsabilité de plein droit applicable uniquement en cas de vente d’un forfait touristique, sa responsabilité ne saurait être engagée que si elle a commis une faute dans l’exercice de son mandat. Elle souligne que seule la responsabilité de la SA CAIRE peut être engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle en cas d’inexécution de la prestation de transport, en particulier de sa garantie de bon acheminement des passagers et des bagages à destination.

La SAS Go Voyages se prévaut avoir observé toutes ses obligations de mandataire, au visa des articles 1984 et 1998 du code civil. Elle souligne qu’elle n’était tenue que de réserver, émettre, payer et délivrer des billets comportant la date, le nom de la compagnie aérienne, les lieux de départ et de convocation corrects. Elle précise que puisque les titres de transports voulus par M. X ont été réservés, émis et payés auprès de la compagnie Air Guyane, marque déposée de la SA CAIRE, elle a pu valablement délivrer les billets électroniques à son client. Elle en déduit qu’elle n’a commis aucun manquement dans l’exercice de sa mission de mandataire du transporteur choisi par M. X, que par suite, elle n’était qu’un tiers au contrat de transport liant seulement l’appelant à la SA CAIRE.

Elle considère avoir respecté son devoir pré-contractuel d’information envers M. X. Elle indique retranscrire à ses clients les informations relatives aux titres de transport avant comme après la validation de commande, leur donner accès à toutes les informations concernant notamment les conditions d’annulation des compagnies aériennes. Elle constate ainsi qu’avant de valider sa réservation de billets d’avion, M. X avait certifié avoir pris connaissance des conditions générales de vente ainsi que celles du titre de transport, qui en l’occurrence n’était ni remboursable ni modifiable.

Elle fait valoir que M. X a effectué sa réservation d’autant plus en connaissance de cause, que partant de Cayenne et ayant transité par la Guadeloupe, il avait nécessairement les moyens d’être informé de la situation météorologique, par la presse télévisée et écrite, avant sa réservation et son départ, qui plus est alors qu’il allait voyager dans une région des Antilles où de telles intempéries sont fréquentes à la période considérée. Elle précise en sus qu’elle met à disposition de ses clients, sur son site Internet, par le biais d’un lien diplomatie.gouv.fr, des informations de dernière minute en cas d’événements importants, relatives notamment aux destinations, à la sécurité des personnes, aux moyens de transport disponibles, aux spécificités des législations locales, au climat.

Elle considère que M. X ne peut prétendre qu’au paiement d’une somme de 831,76 euros, somme qu’elle a obtenue de la SA CAIRE, en remboursement intégral du titre de transport aller-retour, et que l’appelant a refusé après qu’il lui a été proposé de la lui verser suivant protocole d’accord.

Elle prétend que M. X ne fait qu’invoquer des préjudices sans en justifier l’existence alors qu’il a seul procédé à la réservation litigieuse.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la compétence de la juridiction du Mans

Le contrat entre M. X et la SA CAIRE a été conclu en Guyane avec une compagnie aérienne française pour un trajet Cayenne ' A-B. M. X fonde son action à l’encontre de la SA CAIRE et SAS GO Voyages sur le règlement CE 261/2004 établissant les règles d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas d’annulation de vol.

Le règlement 261/2004 ne prévoyant pas de règles de compétence déterminant la juridiction territorialement compétente pour connaître des litiges relatifs à son application, ainsi qu’en a jugé la CJCE dans un arrêt Peter R. contre Air Baltic du 9 juillet 2009 (C-204/08), la demande fondée sur ce règlement doit être examinée au regard des règles de compétence édictées par le règlement CE n°44/2001 relatif à la compétence judiciaire, à la reconnaissance et à l’exécution des décisions en matière civile et commerciale. Ce Règlement dit «Bruxelles I» a été refondu dans le Règlement (UE) no 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 applicable au litige.

L’article 4 du Règlement Bruxelles I dispose que, sous réserve du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre. Le Règlement renvoie donc aux règles de compétence du droit national, sous réserves de dispositions spécifiques justifiant d’y déroger.

En l’espèce, l’article 7 du règlement Bruxelles I prévoyant des règles de compétence spécifiques en matière contractuelles, dont la possibilité d’attraire dans l’État membre du demandeur le défendeur domicilié dans un autre État membre, ne peut être utilement invoqué par la SA CAIRE, dès lors qu’il ne s’applique que lorsque les deux parties ne sont pas domiciliées dans le même État membre comme il ressort expressément de ce texte et qu’il l’a été rappelé par la CJCE dans la décision précitée.

Les parties s’accordent sur le fait que les règles spéciales applicables aux contrats conclus par les consommateurs, édictées aux articles 15 à 17 du règlement Bruxelles I, ne s’appliquent pas «aux contrats de transport autres que ceux, qui, pour un prix forfaitaire, combinent voyage et hébergement», c’est à dire aux «vols secs», et ne sont donc pas applicables en l’espèce.

Dès lors ce sont nécessairement les dispositions générales du règlement qui s’appliquent puisque les deux parties résident sur le territoire du même État membre, le tribunal compétent devant être désigné par les règles de compétence territoriale interne auxquelles renvoie l’article 4 du règlement, sans que puisse être utilement invoqué un conflit avec la règle communautaire, dont il a été indiqué qu’elle était inapplicable.

En effet, l’exclusion par le règlement européen, qui traite des rapports entre les États membres, de l’option offerte au consommateur en cas de prestation de vol unique n’a pas pour conséquence de rendre inapplicable le droit interne français s’il trouve à s’appliquer lorsque la partie défenderesse est attraite devant les juridictions de l’État sur le territoire duquel elle a élu domicile.

Contrairement à ce que soutient la SA CAIRE, il est indifférent que l’article 63 du Règlement prévoit que pour son application, les sociétés et personnes morales sont domiciliées là où est situé leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement, la possibilité offerte au demandeur d’attraire le défendeur selon les règles du droit national ne l’obligeant nullement à le faire devant la juridiction du domicile du défendeur.

En définitive, selon les règles de compétence territoriale applicables au litige en application de

l’article 4 du Règlement Bruxelles I, et celles notamment édictées à l’article R.631-3 du code de la consommation, le consommateur peut saisir le tribunal du domicile du défendeur, ou celui du lieu de la livraison effective de la chose ou de l’exécution de la prestation de services, ou encore celui du lieu où il demeurait lors de la conclusion du contrat, quel que soit ce contrat.

En conséquence, alors même qu’il n’est pas discuté de la qualité de consommateur de M. X et de sa domiciliation dans le ressort du tribunal judiciaire du Mans lors de l’achat de son billet, c’est par une inexacte application des dispositions précitées que le premier juge a retenu l’exception d’incompétence soulevée par la société SA CAIRE et renvoyé l’affaire devant le tribunal judiciaire de Cayenne. Sa décision sera infirmée et le tribunal judiciaire du Mans désigné comme territorialement compétent.

Sur l’évocation

En application de l’article 88 du code de procédure civile, lorsque la cour est juridiction d’appel relativement à la juridiction qu’elle estime compétente, elle peut évoquer le fond si elle estime de bonne justice de donner à l’affaire une solution définitive après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d’instruction.

En l’espèce, la cour estime de bonne justice d’évoquer le fond, ainsi que le sollicite le demandeur, étant précisé que les parties ont d’ores et déjà conclu sur l’ensemble des points en litige.

' Sur la demande d’indemnisation de M. X

Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, et se résolvent en dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution ou de la mauvaise exécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution par le débiteur de son obligation, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêché par la force majeure (articles 1103 et 1217 du code civil).

Selon le dispositif de ses dernières écritures, M. X sollicite, outre la condamnation de la SA CAIRE à lui payer la somme forfaitaire de 250 euros au titre des dispositions de l’article 7 du règlement CE n°261/2004, la condamnation solidaire de la SA CAIRE et Go Voyage à l’indemniser à hauteur de 5 700,50 euros à titre de dommages et intérêt pour inexécution du contrat.

Toutefois, la responsabilité contractuelle se limitant à l’exécution du contrat et à ses conséquence immédiates et directes, M. X est mal fondé à demander la condamnation solidaire des deux défenderesses alors que les obligations contractuelles de chacune différaient en vertu de deux contrats distincts, transport de voyageur pour la SA CAIRE et vente d’un titre de transport comme mandataire pour la SAS Go Voyage, et que le non-respect allégué de leurs obligations contractuelles respectives doit être examiné séparément.

' Sur les obligations contractuelles de la SA CAIRE

Aux termes de ses dernières écritures, M. X fonde sa demande à l’encontre de la SA CAIRE sur l’article 7 du règlement CE n°261/2004 qui prévoit une indemnisation forfaitaire des passagers en cas d’annulation d’un vol, ainsi que sur les articles 5§1, 9 prévoyant que les passagers concernés se voient offrir par le transporteur aérien effectif une assistance et des informations.

Selon l’article 5 §3 du règlement précité, un transporteur aérien n’est pas tenu de verser l’indemnisation prévue à l’article 7 s’il est en mesure de prouver que l’annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n’auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises ; selon l’article 5 §4, il incombe au transporteur de prouver qu’il a informé les passagers de l’annulation d’un vol ainsi que le délai dans lequel il l’a fait.

Selon la jurisprudence de la CJUE, peuvent être qualifiés de circonstances extraordinaires, au sens de ce texte, les événements qui, par leur nature ou leur origine, ne sont pas inhérents à l’exercice normal de l’activité du transporteur aérien concerné et échappent à la maîtrise effective de celui-ci (CJCE, arrêt du 22 décembre 2008, Wallentin-Hermann, C-549/07 ; arrêt du 17 avril 2018, Krüsemann e.a., C-195/17, C-197/17 à C-203/17, C-226/17, C-228-17, C-254/17, C-274/17, C-275/17, C-278/17 à C-286/17 et C-290/17 à C-292/17).

En l’espèce, il est constant que le vol A-B-Cayenne opéré par la SA CAIRE a été annulé en raison d’un phénomène météorologique exceptionnel, le passage d’un cyclone, ayant imposé la fermeture de l’aéroport et rendant impossible la réalisation du vol prévu. Il résulte des pièces produites que ce n’est que le 5 septembre 2017, lors du placement des Antilles françaises en zone de vigilance rouge, que la compagnie aérienne a été informée de la fermeture de l’aéroport et a elle-même mis à jour son site internet pour informer les passagers. Par conséquent, les circonstances de l’espèce sont des circonstances extraordinaires au sens de la réglementation européenne et privent M. X de son droit à indemnisation forfaitaire telle que prévue à l’article 7 du Règlement CE 261/2004, la SA CAIRE, confrontée à la fermeture de l’aéroport, n’ayant pu prendre aucune mesure permettant d’éviter que ces circonstances extraordinaires ne conduisent à l’annulation du vol. M. X sera donc débouté de sa demande d’indemnité forfaitaire de 250 euros.

En application des articles 5 et 9 du Règlement CE n°261/2004, en cas d’annulation d’un vol, le passager concerné a droit à une prise en charge qui se détaille comme suit :

a) des rafraîchissements et des possibilités de se restaurer en suffisance compte tenu du délai d’attente;

b) un hébergement à l’hôtel aux cas où :

— un séjour d’attente d’une ou plusieurs nuits est nécessaire, ou

— lorsqu’un séjour s’ajoutant à celui prévu par le passager est nécessaire ;

c) le transport depuis l’aéroport jusqu’au lieu d’hébergement (hôtel ou autre).

En outre, le passager se voit proposer la possibilité d’effectuer gratuitement deux appels téléphoniques ou d’envoyer gratuitement deux télex, deux télécopies ou deux messages électroniques.

Conformément aux dispositions de l’article 1353 du code civil aux termes duquel celui qui se prétend libéré d’une obligation doit justifier le fait qui a produit l’extinction de son obligation, c’est sur la SA CAIRE que pèse la charge de prouver qu’elle a exécuté les obligations contractuelles ci-dessus rappelées ou qu’elle a tenté de le faire et en a été empêchée par la force majeure (article 1231-1 du code civil).

Dans ses écritures, la SA CAIRE, sans produire aucune pièce, se contente de critiquer le choix fait par M. X d’organiser lui-même son hébergement et de solliciter le remboursement des frais qu’il a exposés, sans pour autant prouver, comme il le lui incombe, qu’elle a exécuté ses obligations en proposant les prestations auxquelles elle était tenue en application du contrat et des dispositions du règlement CE 261/2004 précitées.

Par conséquent M. X est bien fondé à demander le remboursement, par la SA CAIRE, des prestations qu’elle aurait dû lui offrir et dont il a été contraint d’avancer les frais face à la défaillance de la compagnie aérienne, laquelle est mal fondée à critiquer les prestations choisies par M. X alors qu’il lui appartenait de les lui garantir dans des conditions qu’elle aurait eu toute latitude de déterminer si elle avait rempli ses obligations.

Au regard des justificatifs produits par M. X, la SA CAIRE sera condamnée à lui payer la somme de 315,50 euros (frais d’hébergement 2 nuits du 10 au 12 septembre 2017, restauration et taxi vers l’aéroport), les frais de location de voiture, qui ne correspondent à aucune des obligations qui incombaient à la SA CAIRE, ne pouvant être indemnisés.

Le préjudice moral dont M. X demande réparation est, aux termes de ses écritures, caractérisé par le fait d’avoir été livré à lui-même, laissé sans assistance, au cours du passage du cyclone Irma. Il reproche à la SA CAIRE de l’avoir «exposé à un danger de mort, à l’isolement, au désespoir et à la panique».

Le contrat de transport liant M. X et la SA CAIRE ne comporte aucune obligation d’assistance ou de protection autre que celle prévue à l’article 9 du règlement CE 261/2004. Si la peur que M. X a éprouvée à l’idée de se savoir exposé à un phénomène météorologique extrême mettant en danger les personnes et les biens, amplifiée par son isolement et son impossibilité de joindre ses proches, a certainement occasionné un préjudice moral, que M. X estime à 5 000 euros sans toutefois apporter les éléments permettant de l’évaluer, seul le préjudice moral lié à l’inexécution de ses obligations par la SA CAIRE ouvre droit à réparation. En l’espèce, seul le préjudice lié à l’obligation dans laquelle s’est trouvé M. X de rechercher seul un lieu d’hébergement et de restauration est directement en lien avec les manquements contractuels de la SA CAIRE. Compte tenu du fait que M. X se trouvait à A-B pour plusieurs jours, en voyage touristique, et qu’il ne fait pas état de difficultés excessives dans ses recherches d’un lieu d’hébergement et de restauration après avoir déjà passé plusieurs jours sur place, son préjudice moral sera justement indemnisé par la condamnation de la SA CAIRE à lui payer la somme de 200 euros.

M. X reproche également à la SA CAIRE d’avoir manqué à son obligation d’information tel qu’énoncée à l’article 14 du Règlement CE n°261/2004. Toutefois, les dispositions en question mettent à la charge du transporteur aérien une obligation d’information du passager quant à ses droits en cas d’annulation ou de retard de vol. Par conséquent, la SA CAIRE ne peut voir sa responsabilité contractuelle engagée pour n’avoir pas informé M. X de l’existence d’une menace cyclonique lors de l’achat de son titre de transport. En revanche, la SA CAIRE ne justifie pas avoir satisfait à son obligation d’information de l’annulation du vol et des droits qui en découlent, et il ne peut être considéré qu’elle a satisfait à son obligation du fait de l’existence, indépendante de sa volonté, d’un communiqué de presse de la Préfecture de Guadeloupe. Nonobstant cette abstention fautive de la SA CAIRE, M. X a finalement obtenu, par d’autres moyens, toutes les informations utiles pour lui permettre de faire valoir ses droits. Le défaut d’information sur ses droits en cas d’annulation du vol n’ayant aucun lien de causalité démontré avec le préjudice moral allégué, M. X ne peut donc prétendre à une indemnisation de ce chef.

' Sur les obligations contractuelles de la SAS Go Voyage

Il résulte de l’article 1991 du code civil que le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.

En vertu de l’article 1992 du même code, le mandataire répond des fautes qu’il commet dans la gestion.

Aux termes de ses écritures, M. X fait grief à la SAS Go Voyage, mandataire de la SA CAIRE, d’avoir manqué à son obligation d’information, d’une part lors de la vente du titre de transport de ce qu’une menace cyclonique risquait de compromettre le bon déroulement du voyage, d’autre part, lors de l’annulation du vol, des modalités de remplacement de celui-ci.

Il ressort des pièces versées aux débats que lors de l’achat de son billet d’avion par M. X auprès de l’agence Go Voyages le 31 août 2017, aucun élément ne laissait présumer que l’aéroport de A-B serait fermé quelques jours plus tard et que le vol A-B ' Cayenne prévu le 6

septembre 2017 ne pourrait pas être opéré.

L’arrivée imminente d’un ouragan, annoncée le 2 septembre 2017 par la préfecture de Guyane, mais dont la trajectoire n’était alors pas certaine (pièce n°7 appelant mentionnant un ouragan se dirigeant «globalement vers l’ouest»), n’est pas un événement entraînant inéluctablement la fermeture de l’aéroport. Par conséquent il ne peut être fait grief à l’agence Go Voyage de n’avoir pas informé M. X d’un risque d’annulation du vol qui, le 31 août 2017, était encore très aléatoire.

Il ne peut pas davantage être reproché à la SAS Go Voyage, dans le cadre du contrat, de n’avoir pas satisfait la demande de M. X de quitter A-B avant le 6 septembre alors que Go Voyage n’était que le mandataire de la SA CAIRE pour la vente d’un titre de transport, que le contrat était exécuté dès lors que les billets avaient été délivrés à M. X, et qu’elle ne peut être tenue responsable de l’absence de places disponibles sur d’autres vols, aux dates des 4 et 5 septembre 2017, dont l’existence n’est au demeurant pas établie.

Enfin, l’obligation d’information de M. X quant à ses droits consécutifs à l’annulation du vol ne reposait pas sur la SAS Go Voyages mais sur la SA CAIRE, transporteur aérien, l’obligation d’information de l’agence de voyage, s’agissant de la vente d’un vol sec, portant uniquement sur les conditions d’utilisation du billet d’avion.

M. X sera donc débouté de sa demande à l’encontre de la SAS Go Voyages, aucune faute contractuelle ne pouvant être retenue à l’encontre de cette dernière.

La cour constate cependant que la SAS Go Voyages offre une indemnisation à M. X à hauteur de 831,76 euros, et qu’il y a donc lieu de dire que seule cette somme sera due à M. X.

Sur les demandes accessoires

Partie succombante, la SA CAIRE sera condamnée à verser à M. X la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens de première instance et d’appel.

La SAS Go Voyage sera déboutée de sa demande formée contre M. X au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Évoquant le fond du litige et ajoutant au jugement,

REJETTE l’exception d’incompétence soulevée par la SA CAIRE ;

DIT que la juridiction compétente est le tribunal judiciaire du Mans ;

CONDAMNE la SA CAIRE à payer à M. Y X la somme de 515,50 euros à titre de dommages et intérêts ;

DIT que seule la somme de 831,76 euros sera remboursée à M. X par la SAS Go Voyages ;

DEBOUTE M. X de ses autres demandes ;

DEBOUTE la SA CAIRE de ses demandes ;

DEBOUTE la SAS Go Voyage de ses demandes ;

CONDAMNE la SA CAIRE à payer à M. X la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA CAIRE au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPECHE

C. LEVEUF C. MULLER



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Cour d'appel d'Angers, Chambre a - civile, 8 juin 2021, n° 20/01336