Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 19 juillet 2017, n° 15/06108

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 1 a, 19 juill. 2017, n° 15/06108
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 15/06108
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Strasbourg, 3 novembre 2015
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

CD/SD

MINUTE N° 571/2017

Copie exécutoire à

—  Me Gérard CAHN

—  Me Laurence FRICK

Le 20.07.2017

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 19 Juillet 2017

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A 15/06108

Décision déférée à la Cour : 04 Novembre 2015 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG

APPELANT – INTIME SUR APPEL INCIDENT :

Monsieur A B X

XXX

XXX

Représenté par Me Gérard CAHN, Avocat à la Cour

INTIME – APPELANT SUR APPEL INCIDENT :

Monsieur A Y

XXX

XXX

Représenté par Me Laurence FRICK, Avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 27 Mars 2017, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme PANETTA, Présidente de chambre, et Mme DORSCH, Conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

Mme DORSCH, Conseillère

M. ROBIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Mme C-D

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par Mme Corinne PANETTA, Présidente, et Mme Corinne C-D, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Le 3 août 2009 Monsieur A Y, masseur kinésithérapeute, a conclu avec Monsieur A-B X, exerçant la même profession, un contrat d’assistant collaborateur à effet au 7 septembre 2009. Aux termes de ce contrat Monsieur X s’engageait à effectuer les soins aux patients du cabinet sis 7, rue Salzmann à Strasbourg, et à reverser 25 % des honoraires perçus à Monsieur Y. Le contrat a été convenu à durée indéterminée, avec un préavis de rupture de 2 mois, sauf faute professionnelle. Il prévoyait également une clause de non-concurrence d’une durée de 2 ans interdisant l’exercice de la profession dans un rayon de 300 mètres autour du cabinet, et dans six établissements strasbourgeois, et dont la violation entraînait le payement d’une indemnité égale à 3 mois de chiffre d’affaires du cabinet au cours de l’année civile écoulée.

Par lettre du 18 octobre 2012 Monsieur Y a notifié à Monsieur X sa décision de résilier le contrat à effet au 20 décembre 2012.

Suite à cette rupture, Monsieur X a installé son propre cabinet dans un local situé au 30 rue du 22 novembre à Strasbourg, soit dans un rayon de moins de 300 mètres à vol d’oiseau du précédent cabinet.

Le conseil de l’ordre des masseurs kinésithérapeutes a procédé à une tentative de conciliation, qui est demeurée infructueuse.

Saisi par Monsieur A Y, le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg a, par ordonnance du 9 mai 2014, condamné Monsieur A-B X à lui payer une somme de 5.622,83 € au titre de rétrocession d’honoraires, mais compte tenu de contestations sérieuses, a débouté Monsieur Y de sa demande concernant la clause de non-concurrence.

Par acte du 16 septembre 2014, Monsieur A Y assignait Monsieur A-B X devant le tribunal de grande instance de Strasbourg afin de voir condamner celui-ci à lui verser la somme de 89.363 € au titre de la clause pénale pour violation de l’obligation de non-concurrence, et de 2.500 € au titre de l’article 700 du CPC.

Monsieur X répliquait que la clause de non-concurrence était nulle et de nul effet, contestait la violation de la dite clause, subsidiairement dénonçait son caractère excessif ou disproportionné, en sollicitait la réduction à l’euro symbolique, et reconventionnellement sollicitait la condamnation de Monsieur Y à lui rembourser le montant de 5.622,83 € alloué par le juge des référés, 98.416,43 € au titre des ristournes d’honoraires pendant la durée du contrat, et 3.000 € au titre de l’article 700.

Par jugement du 4 novembre 2015, le tribunal de grande instance de Strasbourg a condamné Monsieur X à payer à Monsieur Y la somme de 30.000 € à titre d’indemnité suite à la violation de la clause de non-concurrence. Monsieur X a été condamné aux dépens, et au paiement d’une somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du CPC. L’exécution provisoire a été ordonnée.

En premier lieu le tribunal a jugé que le contrat est un contrat d’assistant collaborateur. Il relève que les reproches formulés par l’ordre ne portent que sur des éléments formels, et non sur le fond du contrat, et qu’à aucun moment le contrat n’a été déclaré dénué d’effets. Le tribunal en a déduit d’une part que la clause de non-concurrence est valable, et d’autre part que Monsieur X ne peut réclamer le remboursement de la rétrocession de 25 % des honoraires versés, de sorte qu’il a débouté Monsieur X de ce chef de demande.

S’agissant de la clause de non-concurrence, le tribunal a jugé que celle-ci doit s’appliquer, quelle que soit la cause de la rupture. Il a conclu que Monsieur X a violé la clause en installant son cabinet à moins de 300 mètres, à vol d’oiseau, du cabinet initial. Il a rejeté l’interprétation de Monsieur X s’agissant du calcul de la distance en fonction du chemin emprunté.

En revanche, il a jugé que la clause de non-concurrence portant sur six établissements importants, tous situés dans la ville de Strasbourg, revient à entraver de manière trop importante les principes de libre exercice d’une profession et de libre choix du praticien par le patient. Il en déduit que les dispositions de la clause concernant les différents établissements sont considérées comme disproportionnées, et donc non valables.

Il poursuit que le caractère éventuellement excessif de l’indemnité conventionnelle ne saurait entraîner la nullité de la clause, mais ouvre droit, en application de l’article 1152 du Code civil, à la réduction de la clause manifestement excessive ou dérisoire. Il relève que Monsieur Y fixe le montant de l’indemnité à 89.863 € sans pour autant justifier son calcul par des documents comptables certifiés.

Par conséquent, le tribunal a fixé le montant en tenant compte des circonstances de l’espèce, soit la durée de 3 années de la collaboration au sein du cabinet, le non-respect du périmètre contractuellement interdit, l’absence de documents comptables certifiés, le fait qu’une partie de la clause ait été déclarée sans effet, et le caractère excessif du montant sollicité au regard des sommes allouées dans des situations similaires. Le tribunal a par conséquent fixé le montant de l’indemnité à la somme de 30.000 €.

Par déclaration du 27 novembre 2015 Monsieur X a interjeté appel à l’encontre de cette décision.

Par conclusions du 4 mai 2016 il demande à la cour de :

'Débouter Monsieur Y de ses fins et conclusions d’appel incident ;

Adjuger à Monsieur X le bénéfice de ses conclusions justificatives d’appel qu’il a signifiées le 3 février 2016 ;

Condamner Monsieur Y à rembourser à Monsieur X les sommes de:

—  5.622,86 € plus intérêts à compter du jour du paiement,

—  98.416,43 € au titre des ristournes d’honoraires versées pendant la durée du contrat, en principal plus intérêts au taux légal,

Condamner Monsieur Y à payer à Monsieur X une indemnité de 10.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les frais et dépens de première instance et d’appel.'

En premier lieu Monsieur X conteste le statut d’assistant que lui a appliqué le tribunal, et revendique celui de collaborateur. Il explique que le collaborateur a vocation à constituer une clientèle personnelle de sorte que, contrairement à l’assistant, une clause de non-concurrence ne peut s’appliquer à lui. Il en déduit que la décision entreprise doit être infirmée et Monsieur Y débouté de toutes ses demandes.

À titre subsidiaire il conteste l’interprétation de la clause de non-concurrence. Il estime en premier lieu que la clause ne peut s’appliquer qu’en cas de cessation d’activité de sa part, mais non lorsque l’initiative émane, tel le cas en l’espèce, du cocontractant. Il conteste par ailleurs le calcul de la trajectoire entre les 2 cabinets, et relève que selon l’itinéraire fléché par Google la distance est supérieure à 300 m. Il dénonce enfin le fait que cette clause lui interdirait de suivre ses propres patients hospitalisés dans un des établissements énumérés au contrat, ce qui est contraire au libre exercice de la profession, et au libre choix du praticien.

À titre infiniment subsidiaire, l’appelant conteste le montant mis en compte par Monsieur Y et explique que la baisse du chiffre d’affaires de 2012 à 2013 correspond à la perte de sa clientèle personnelle qui fait défaut aux chiffres présentés par Monsieur Y qui encaissait les honoraires payés par celle-ci. Il rappelle que la sanction de la clause de non-concurrence doit être proportionnée aux intérêts du créancier, et que Monsieur Y ne justifie d’aucun préjudice imputable au non-respect de la clause. Il demande dès lors la réduction à l’euro symbolique.

Enfin, il fait valoir que la clause de rétrocession d’honoraires est contraire au code de déontologie, et par conséquent interdite, sauf conditions particulières, qui en l’espèce ne sont pas réunies.

Par conclusions de réplique et d’appel incident du 31 mars 2016, Monsieur A Y demande à la cour de rejeter l’appel et de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a déclaré que la clause de non-concurrence n’était constituée qu’au regard de l’installation dans le rayon de 300 mètres du nouveau cabinet, et limité la condamnation à la somme de 30.000 €. Il forme un appel incident et demande à la cour de condamner Monsieur X à lui payer la somme de 89.863 € au titre de la clause pénale pour violation de l’obligation de non-concurrence, et 5.000 € au titre de l’article 700 du CPC. Il conclut au débouté de toutes les demandes de Monsieur X, et à sa condamnation aux entiers dépens.

Monsieur Y conclut que le contrat est un contrat d’assistant et qu’il ne comporte pas les dispositions impératives d’un contrat de collaboration s’agissant du développement de la clientèle personnelle et de l’obligation de renégocier les modalités de la collaboration après un délai de 4 ans. Il souligne que le conseil de l’ordre n’a pas relevé ces éléments lorsque le contrat lui a été soumis. Il soutient que Monsieur X effectue les soins sur les patients de Monsieur Y, qu’il n’est pas en droit de développer sa propre patientèle, et qu’il peut valablement être soumis à une clause de non-concurrence.

Il poursuit que Monsieur X n’a pas respecté cette clause qui s’applique dans tous les cas de rupture quelle qu’en soit la partie qui en a pris l’initiative, et que la référence à un rayon renvoie nécessairement à une zone géographique circulaire conformément à une jurisprudence constante en la matière.

S’agissant des établissements visés dans la clause, Monsieur Y explique qu’il a acheté la présentation de patientèle, de sorte qu’il pouvait légitimement vouloir interdire à Monsieur X, pour une durée de 2 ans, d’exercer sa profession dans ces établissements. Il estime que le libre choix d’un praticien selon l’article R 4127-6 du code de la santé publique ne concerne que les médecins, mais ne s’applique pas aux masseurs kinésithérapeutes. Il dénonce le fait que Monsieur X travaille très régulièrement dans ces établissements, et lui reproche à cet égard un détournement, ou une tentative de détournement de clientèle. Il estime que c’est donc tort que le tribunal n’a pas retenu cette partie de la clause de non-concurrence.

Enfin, s’agissant du préjudice, Monsieur Y explique que le montant réclamé est inférieur à la perte du chiffre d’affaires suite au départ de Monsieur X, puisque la différence des honoraires du cabinet entre 2012 et 2013 est de 127.362,69 €. Il déclare que le nouveau collaborateur Monsieur Z, qui n’avait pas de patientèle propre, a généré la première année 25.434 € d’honoraires contre 126.701 l’année précédente par Monsieur X. Il conclut que cette clause n’est ni excessive, ni disproportionnée.

En dernier lieu, Monsieur Y explique que les contrats d’assistant collaborateur font parties des cas prévus dans les contrats validés par le conseil de l’ordre comme permettant un partage d’honoraires. Il précise que le pourcentage reversé correspond à l’évaluation des frais de fonctionnement du cabinet et est librement négocié entre les parties. Il souligne que le conseil

de l’ordre n’a pas invalidé cette clause, de sorte que c’est à juste titre que le juge des référés a condamné Monsieur X à lui payer la somme de 5.622,83 €.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 1er juillet 2016, et l’affaire renvoyée à l’audience de plaidoirie du 27 mars 2017.

MOTIFS :

'Sur le statut de Monsieur X :

Attendu que c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a jugé que les parties étaient liées par un contrat d’assistanat, et non de collaboration ;

Attendu qu’il suffira de rajouter que le contrat de collaborateur libéral est un contrat encadré par les textes qui doit, sous peine de nullité, comporter certaines clauses, dont celle déterminante relative aux conditions d’exercice dans lesquelles le collaborateur peut satisfaire les besoins de sa clientèle propre, notamment s’agissant le nombre de journées ou demi-journées de présence ;

Que le contrat du 3 août 2009 liant les parties ne comporte aucune clause concernant l’exploitation d’une patientèle propre par Monsieur X et mentionne simplement en article 1 que l’assistant effectuera les soins sur les patients que Monsieur Y lui présentera ou qui auront directement rendez-vous avec lui-même ;

Que ceci confirme que Monsieur X n’a pas été recruté en qualité de collaborateur libéral développant sa propre clientèle, mais bien en qualité d’assistant ;

Attendu que dans la fiche technique numéro 2 éditée le 11 août 2010 par le conseil de l’ordre des masseurs kinésithérapeutes expliquant les différences entre les 2 statuts il est régulièrement fait référence au statut de l’assistant ou l’assistant collaborateur par opposition au statut du collaborateur libéral, de sorte que l’intitulé du contrat de 'contrat d’assistant collaborateur’ confirme lui aussi qu’il s’agit bien d’un contrat d’assistanat et non de collaboration libérale ;

Attendu enfin que le conseil de l’ordre suite à sa tentative de conciliation a, dans son avis du 11 décembre 2012, relevé un certain nombre d’irrégularités formelles, telle l’absence de numéro ordinal, l’absence de l’adresse de l’assistant, et a invité Monsieur Y à faire apparaître dans le contrat un certain nombre d’articles afin d’être en conformité avec le code de déontologie ;

Mais qu’à aucun moment l’ordre n’a remis en cause la validité du contrat, ou encore de la clause de non-concurrence figurant à l’article 3 ;

Que certes cet avis ne lie pas les juridictions judiciaires, mais que néanmoins il est émis par l’ordre des masseurs kinésithérapeutes auxquel appartiennent les deux parties, composé de professionnels exerçant la même profession et rompus aux différents statuts permettant son exercice, de sorte que cet avis objectif et éclairé est un élément du dossier qui lui aussi converge vers la qualification du statut d’assistant ;

Attendu que les autres clauses contractuelles, et notamment la clause de non-concurrence, sont compatibles avec le statut d’assistant ;

'Sur la validité de la clause de non-concurrence :

Attendu que l’article 3 du contrat intitulé 'CLAUSE DE NON CONCURRENCE’ dispose :

'Lorsque M (B) cessera son activité avec M (A) il s’interdira d’exercer sa profession pour son propre compte ou pour le compte d’autrui pendant une durée de 2 années après la fin du contrat dans un rayon de 300 mètres autour du cabinet et dans les établissements suivants : résidence les jardins d’Arcadie, E F G, E le Bartischgut, la résidence Matis, E Saint Arbogast, E Emmaüs centre-ville, et dans le cadre du cabinet sur la patientelle présentée par M (B). La présente interdiction pourra être également invoquée et opposée dans les mêmes conditions par les héritiers et les ayants droits de M (A). En cas de manquement à cette clause, M(B) devra payer à titre d’indemnité à M (A) l’équivalent de 3 mois de chiffre d’affaires du cabinet, l’année civile écoulée faisant référence.' ;

Attendu que la clause prévoit son application lorsque Monsieur X 'cessera son activité avec’ Monsieur Y, sans faire aucune référence au motif de la cessation d’activité, ou à l’auteur de la rupture, de sorte qu’elle a vocation à s’appliquer à tous les cas de rupture, quelle que soit la partie qui en a pris l’initiative ;

Que c’est par conséquent à juste titre que le tribunal n’a pas retenu l’interprétation proposée par Monsieur X selon laquelle la clause ne pourrait s’appliquer qu’en cas de rupture du contrat par l’assistant ;

Qu’en effet, le fait que Monsieur Y soit seul à l’origine de la rupture n’exonère pas Monsieur X de son obligation de respecter la dite clause ;

Attendu, par ailleurs, que la clause vise un « rayon » de 300 mètres à vol d’oiseau, et que le rayon est une ligne droite d’un point à un autre, et non pas comme le soutient à tort l’appelant un itinéraire à travers les rues ;

Attendu, enfin, que c’est par des motifs pertinents que le tribunal a considéré que la clause interdisant à Monsieur X d’exercer sa profession durant deux ans dans six établissements revient à entraver de manière trop importante les principes de libre exercice d’une profession, et de libre choix du praticien par le patient, et qu’il a de ce fait jugé la clause, s’agissant des différents établissements, disproportionnée, et par conséquent l’a déclarée non valable sur ce point ;

Attendu qu’en effet l’interdiction posée doit être proportionnée aux intérêts légitimes de Monsieur Y de préserver la patientèle de son propre cabinet ;

Que si tel est le cas s’agissant de l’interdiction dans un secteur de centre-ville d’implanter un nouveau cabinet à moins de 300 mètres du cabinet d’origine, en revanche l’interdiction durant deux années de toute intervention dans un nombre important d’établissements tous situés près du centre-ville apparaît disproportionnée au but recherché, et aboutit de facto à interdire à Monsieur X durant une longue période de soigner ses propres patients hospitalisés ou admis dans l’un de ces établissements, et ce alors même que le patient se voit garantir la liberté du choix de son praticien, y compris de son kinésithérapeute ;

Qu’en effet, si l’interdiction de pratiquer dans un établissement est usuelle, en revanche l’interdiction portée sur un ensemble de six établissements tous situés à proximité du centre-ville apparaît particulièrement disproportionnée au but recherché ;

'Sur la sanction du non-respect de la clause de non-concurrence :

Attendu qu’il n’est pas contesté que Monsieur X a installé son nouveau cabinet au 30 rue du 22 novembre à Strasbourg, soit à 250 mètres à vol d’oiseau du cabinet de Monsieur Y au XXX à Strasbourg de sorte qu’il est constant qu’il n’a pas respecté la clause de non-concurrence ;

Qu’en revanche, l’interdiction de pratiquer dans les six établissements mentionnés ne pouvant lui être imposée, il n’y a pas de ce fait de violation de la clause de non-concurrence ;

Attendu que la clause de non-concurrence comporte une clause pénale fixant l’indemnité due à l’équivalent de 3 mois de chiffre d’affaires du cabinet durant l’année civile écoulée ;

Attendu que l’économie générale de la clause correspondant à 3 mois de chiffre d’affaires vise à sanctionner le non-respect par l’assistant d’une distance de 300 mètres à vol d’oiseau, l’exercice de son activité dans 6 établissements, l’ensemble pendant une durée de 2 années ;

Qu’en revanche, dès lors qu’une part importante de cette clause (s’agissant des six établissements) est réputée non écrite, la sanction envisagée à l’origine apparaît être manifestement excessive au sens de l’article 1152 du Code civil ;

Attendu que Monsieur Y réclamait le paiement d’une somme de 89.863 € en application de la clause, montant ramené à 30.000 € par le premier juge au regard des circonstances de l’espèce ;

Que ce dernier montant apparaît proportionné et adapté à une clause visant à interdire l’installation d’un cabinet concurrent dans un rayon de 300 mètres à vol d’oiseau d’un cabinet de kinésithérapeute de la taille de celui de Monsieur Y ;

Attendu qu’il est établi que Monsieur Y a, suite à la rupture de sa collaboration avec Monsieur X, subi une perte de son chiffre d’affaires, mais qu’en revanche le montant qu’il énonce, soit une perte de plus de 127.000 € entre 2012 et 2013, ne tient aucun compte des honoraires propres perçus par Monsieur X et apparaît par conséquent exagéré ;

Attendu que c’est à juste titre que le tribunal a retenu un montant de 30.000 € eu égard à la durée de la collaboration qui a permis à la patientèle d’apprécier les compétences de Monsieur X, et éventuellement d’être tentée de le suivre, étant par ailleurs rappelé que la distance, pourtant relativement courte, de réinstallation d’un cabinet, n’a pas été respectée ;

Que par conséquent le jugement déféré est confirmé en ce qu’il condamne Monsieur X à payer à Monsieur Y une somme de 30 000 € au titre de la clause pénale, et par là-même les appels principal et incident doivent être rejetés ;

'Sur les rétrocessions d’honoraires :

Attendu que le tribunal a rejeté les demandes de Monsieur X tendant à obtenir le remboursement des sommes dues au titre de la rétrocession contractuelle de 25 % des honoraires;

Qu’à hauteur d’appel Monsieur X réclame la condamnation de son adversaire à lui rembourser les sommes de 5.622,83 € et 98.416,43 € au titre des ristournes d’honoraires au motif que la rétrocession de 25 % des honoraires prévue au contrat viole le code de déontologie qui interdit le partage d’honoraires ;

Attendu que le contrat librement conclu entre les parties comporte en son article 2.4 une clause disposant que Monsieur X reversera mensuellement à Monsieur Y 'une quotité fixée à 25 % sur les honoraires qu’il aura personnellement perçus sur les actes effectués en cabinet et 0 % sur les indemnités de déplacement ou d’éventuels dépassements’ ;

Attendu que l’article R 4321-70 du code de la santé publique dispose que le partage d’honoraires entre masseurs kinésithérapeutes, ou entre un masseur kinésithérapeute et un autre professionnel de santé est interdit sous quelque forme que ce soit, hormis les cas prévus dans les contrats validés par le conseil départemental de l’ordre ;

Or attendu que précisément le contrat d’assistant collaborateur, tel le contrat litigieux, est un cas prévu, et une catégorie de contrat validée par le conseil de l’ordre, qui a au demeurant donné lieu à l’élaboration, par l’ordre, d’un contrat type comportant une telle clause ;

Que d’ailleurs le principe même du contrat d’assistant collaborateur est que ce dernier reverse au titulaire un pourcentage des honoraires qu’il perçoit, afin de participer aux frais de fonctionnement du cabinet ;

Qu’enfin le conseil de l’ordre n’a émis aucune remarque s’agissant de cette clause lors de sa consultation du 11 décembre 2012 ;

Que par conséquent le jugement déféré est également confirmé en ce qu’il déboute Monsieur X de ses demandes de remboursement des rétrocessions d’honoraires ;

* * * *

Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions, y compris s’agissant des frais et dépens, et des frais irrépétibles ;

'Sur le surplus :

Attendu que l’appelant principal, qui succombe sur les mérites de son appel, est condamné aux entiers frais et dépens de la procédure ;

Que l’équité ne commande pas de faire application au profit de l’une ou de l’autre des parties des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur A-B X aux entiers frais et dépens de la procédure d’appel,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l’une ou de l’autre des parties.

La Greffière : La Présidente :

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