Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 16 juin 2017, n° 16/02354

  • Locataire·
  • Logement·
  • In solidum·
  • Préjudice moral·
  • Bailleur·
  • Tribunal d'instance·
  • Titre·
  • Préjudice de jouissance·
  • Consorts·
  • Matériel

Chronologie de l’affaire

Commentaire1

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Maître Laurent Jourdaa - Cabinet Laudicé · LegaVox · 23 septembre 2019
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Reims, 1re ch. sect. inst, 16 juin 2017, n° 16/02354
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 16/02354
Décision précédente : Tribunal d'instance de Sedan, 30 juin 2016, N° 11-15-000146
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

R.G. : 16/02354

ARRÊT N°

du : 16 juin 2017

Ch. M.

Monsieur C X

Madame D E épouse X

C/

Madame F Z

Monsieur Y A

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

1re CHAMBRE CIVILE – SECTION INSTANCE

ARRÊT DU 16 JUIN 2017

APPELANTS :

d’un jugement rendu le 1er juillet 2016 par le tribunal d’instance de Sedan (RG 11-15-000146)

1) Monsieur C X

XXX

XXX

2) Madame D E épouse X

XXX

XXX

Comparant, concluant par la SCP Ledoux Ferri Riou-Jacques Touchon, avocats au barreau des Ardennes

INTIMÉS :

1) Madame F Z

XXX

XXX

2) Monsieur Y A

XXX

XXX

Comparant, concluant par la SCP Dupuis Lacourt Migne Estieux, avocats au barreau des Ardennes

DÉBATS :

A l’audience publique du 9 mai 2017, le rapport entendu, où l’affaire a été mise en délibéré au 16 juin 2017, sans opposition de la part des conseils des parties et en application de l’article 786 du code de procédure civile, Madame Lafay, présidente de chambre, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, puis ce magistrat en a rendu compte à la cour dans son délibéré

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Lafay, présidente de chambre

Madame Magnard, conseiller

Madame Basterreix, conseiller

GREFFIER D’AUDIENCE :

Monsieur Jolly, greffier lors des débats et du prononcé

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Lafay, présidente chambre, et par Monsieur Jolly, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Suivant acte sous seing privé du 23 juin 2012 Monsieur C X et son épouse Madame D E épouse X (ci-après les époux X) ont donné à bail à Madame G Z et Monsieur Y A (ci-après les consorts A-Z) un appartement sis XXX au loyer mensuel de 540 €.

Par lettre recommandée réceptionnée le 6 décembre 2013, les consorts A-Z ont fait valoir à leurs propriétaires divers désordres, notamment une humidité constante, et les ont mis en demeure de procéder à la mise aux normes du logement et de les indemniser de leur préjudice.

Par lettre recommandée du 30 janvier 2014, ils ont informé les propriétaires de leur intention de procéder à la résiliation du bail.

Le 28 février 2014, il a été procédé à un état des lieux de sortie et ils ont remis les clefs du logement.

Ils ont saisi leur compagnie d’assurance qui a mandaté un expert lequel a remis son rapport le 3 avril 2014.

Par acte d’huissier du 19 mai 2015, les consorts A-Z ont fait assigner les époux X devant le tribunal d’instance de Sedan aux fins d’indemnisation.

Par jugement du 1er juillet 2016, le tribunal d’instance de Sedan a :

— déclaré M. et Mme X responsables du préjudice subi par M. Y A et Mme F Z,

— condamné in solidum M. et Mme X à payer à M. Y A et Mme F Z les sommes de :

. 3 845,30 € au titre du préjudice matériel,

. 1 000 € au titre du préjudice de jouissance,

. 500 € au titre du préjudice moral,

. 600 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire,

— condamné in solidum M. et Mme X aux dépens de l’instance, en ceux compris le coût du constat d’huissier en date des 19 et 20 février 2014,

Les époux X ont régulièrement interjeté appel de cette décision.

Suivant conclusions du 28 février 2017, ils demandent à la cour de l’infirmer et de :

— voir constater que Madame Z et Monsieur A échouent à rapporter la preuve, qui leur incombe, des désordres dans l’immeuble loué, imputables aux propriétaires, et des préjudices allégués,

— les voir débouter de l’ensemble de leurs demandes,

à titre subsidiaire, et si par impossible la cour croyait devoir relever une quelconque part de responsabilité à l’encontre des bailleurs, et procéder à une quelconque condamnation,

— voir condamner Madame Z et Monsieur A à payer aux époux X les loyers dus durant le préavis de trois mois, soit mars et avril 2014, soit 1 080 €, et procéder à la compensation entre les sommes dues le cas échéant par les époux X aux consorts Z A, et les sommes dues par ceux-ci aux époux X,

en tout état de cause,

— voir condamner Madame Z et Monsieur A payer aux époux X une indemnité de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— les voir condamner aux entiers dépens.

Aux termes de leurs écritures du 6 janvier 2017, les consorts A-Z demandent à la cour de :

à titre principal,

— confirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Sedan le 1er juillet 2016 en ce qu’il a déclaré M. et Mme X responsables du préjudice subi par M. Y A et Mme F Z,

— confirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Sedan le 1er juillet 2016 en ce qu’il a condamné in solidum M. et Mme X à payer à M. Y A et Mme F Z la somme de 3 845,30 € au titre du préjudice matériel,

— infirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Sedan le 1er juillet 2016 en ce qu’il a condamné in solidum M. et Mme X à payer à M. Y A et Mme F Z la somme de 1 000 € au titre du préjudice de jouissance et celle de 500 € au titre du préjudice moral,

statuant à nouveau,

— condamner in solidum M. et Mme X à payer à M. Y A et Mme F Z la somme de 3 078 € en réparation du préjudice de jouissance subi,

— condamner in solidum M. et Mme X C à payer à M. Y A et Mme F Z la somme de 1 500 € en réparation du préjudice moral subi,

— confirmer le jugement rendu par le tribunal d’instance de Sedan le 1er juillet 2016 en toutes ses autres dispositions,

— débouter M. C X et Mme D X de l’ensemble de leurs prétentions plus amples ou contraires,

y ajoutant,

— condamner in solidum M. C X et Mme D X à payer à M. Y A et Mme F Z la somme de 2 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2017.

Sur ce, la cour :

I – Sur la responsabilité des bailleurs

L’article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dispose que :

« Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation. (') le bailleur est obligé (…) :

b) d’assurer au locataire une jouissance paisible du logement (…)

c) d’entretenir les locaux en état de servir à l’usage prévu par le contrat et d’y faire toutes les réparations autres que locatives nécessaires au maintien en état et à l’entretien normal des locaux loués. »

L’état des lieux d’entrée en date du 4 août 2012 ne fait pas mention de problèmes d’humidité.

Au vu des échanges de courriers ou mails produits aux débats, c’est fin 2013 que les locataires ont alerté leurs propriétaires au sujet des problèmes d’humidité rencontrés dans les chambres.

Les bailleurs ont alors fait appel à une entreprise pour y remédier.

Selon facture du 16 décembre 2013, ils ont fait poser une 'barrière anti-remontées capillaires par injection d’une résine hydrofuge' pour un coût de 2.342,81 € (pièce n° 3). Il n’est pas précisément explicité si ces travaux ont concerné les murs des chambres.

Les bailleurs soulignent aussi qu’en 2011 (soit avant l’entrée dans les lieux de consorts Z-A), ils avaient installé un extracteur d’humidité dans la salle de bain (pièce n° 6), ce qui témoigne de problèmes d’humidité anciens.

Le constat d’huissier établi les 19 et 20 février 2014 mentionne dans la chambre d’enfant sur le mur borgne notamment dans le coin des moisissures, traces noirâtres avec odeurs nauséabondes, présence désagréable à la vue et à l’odorat. Les mêmes constatations sont faites dans la chambre parentale. L’huissier joint diverses photos de ses constatations et notamment de divers objets (valise, chaussures) largement détériorés par des moisissures.

L’état des lieux de sortie dressé le 28 février 2014 mentionne des 'traces d’humidité 2 pans de mur dans les 2 chambres'.

Le rapport d’expertise d’assurance Polyexpert, réalisé en présence de toutes les parties (Madame Z étant assistée de son propre assureur) mentionne un logement ancien mais correctement entretenu, dépourvu d’isolant thermique en façades et de VMC.

Il est conclu que 'le logement souffre d’un manque de ventilation et d’isolant thermique, entraînant fatalement un phénomène de condensation sur les parois froides. Ces défauts ne sont pas la conséquence d’un défaut d’usage par le locataire mais sont liés à l’architecture du logement et à ses équipements techniques inadaptés'.

Les époux X ne formulent aucune critique technique sur ces constats qui contredisent leurs allégations tendant à imputer aux locataires un manque d’aération du logement ou le fait que l’humidité serait due à des lessives trop nombreuses et au linge séchant dans les pièces.

Les quelques attestations qu’ils versent aux débats ne viennent pas utilement contredire la réalité d’une humidité manifestement liée à des équipements inadaptés pour une bonne isolation.

Les travaux effectués ne sont pas contestables mais n’ont pas suffi à améliorer la situation.

D’ailleurs le mail du 27 novembre 2013 par lequel Madame Z répond à l’alerte de ses locataires indique 'la boîte qui fait les travaux pour l’humidité intervient en milieu de semaine prochaine jour exact à confirmer. croyez bien que je suis la première désolée de ces problèmes car je pensai avoir acheté un logement sain et sans problème et je suis très déçue de ce qui arrive. Je comprends aussi votre colère et votre ras le bol. Je vais faire passer un couvreur pour vérifier si il n’y aurait pas un problème lié à la toiture, on ne sait jamais'.'

Il résulte de ces divers éléments que c’est à juste titre que le premier juge a considéré que les bailleurs avaient failli à leur obligation de garantir aux locataires une jouissance paisible des lieux et qu’ils doivent les indemniser de leurs préjudices.

II – Sur les préjudices

A- Sur le préjudice matériel

Le préjudice matériel des locataires a été évalué par le premier juge au seul vu d’un inventaire dressé par Mme Z comportant une liste d’objets avec prix afférents.

Une facture d’achat relative à des paires de chaussures acquises en mars 2011 est produite, la cour relevant toutefois qu’après trois années d’usage et indépendamment du problème d’humidité de l’appartement, des chaussures sont nécessairement usagées.

Aucun autre élément ne vient corroborer la réalité des dommages matériels allégués s’agissant de la longue liste produite.

Si les photographies du constat d’huissier confortent la dégradation de paires de chaussures ou d’une valise, aucun autre élément ne vient corroborer des dégradations matérielles pour un coût de 3.845,30 €.

Le préjudice matériel doit être modéré à la somme de 1.000 €.

B – Sur le préjudice moral

Les pièces médicales produites par Mme Z à l’appui de sa demande au titre du préjudice moral sont :

— un certificat médical mentionnant une hospitalisation en service de gynécologie courant février 2014 qui ne fait strictement aucune mention d’un lien avec l’occupation du logement litigieux,

— un certificat médical du docteur B du 24 février 2014 mentionnant une dégradation de l’état psychique de Madame Z 'suite aux conditions matérielles de logement dans l’appartement loué à Floing jusqu’au 22 février 2014 et au placement de son fils chez sa grand-mère maternelle du fait de ces conditions de logement insalubres'.

La cour observe que ce document a été établi à l’occasion de la sortie des lieux des locataires. Ceux-ci ne versent aucun élément probant justifiant du placement de leur enfant qui plus est en relation directe avec l’état de leur logement.

Le préjudice moral tiré de problèmes de santé de Mme Z n’est pas démontré.

Le jugement est infirmé pour rejeter ce chef de demande

Le préjudice moral que les locataires invoquent s’analyse en réalité en préjudice de jouissance qui sera examiné ci-dessous.

C – Sur le préjudice de jouissance

Au vu des constats sus-énoncés il est manifeste que les locataires ont subi un trouble de jouissance certain au vu des désagréments tirés d’une humidité excessive, au point qu’ils ont quitté les lieux. Toutefois au vu des échanges de courrier ou mail produits il ne saurait être déduit que les troubles se seraient manifestés dès l’entrée dans les lieux.

Ce n’est que fin 2013 que les locataires se sont plaints pour la première fois et ils ont ensuite quitté le logement très rapidement fin février 2014.

L’indemnité devant leur revenir au titre d’un trouble de jouissance a été justement appréciée par le premier juge à hauteur de 1.000 €.

III – Sur la demande au titre du préavis

Les appelants réclament, à titre subsidiaire, la condamnation des locataires à leur régler les loyers de mars et avril 2014, soit une somme de 1.080 €, mois qui correspondent au préavis par application de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989.

Il est toutefois constant qu’ils ont expressément donné leur accord pour abréger ce préavis à un mois.

Ils ne peuvent revenir sur cet accord.

La demande est rejetée.

IV – Sur les frais irrépétibles et les dépens

Chaque partie succombant partiellement en ses prétentions, il n’y a pas lieu à frais irrépétibles et chacun conservera la charge de ses dépens.

Par ces motifs :

Infirme partiellement le jugement rendu le 1er juillet 2016 par le tribunal d’instance de Sedan,

Statuant à nouveau,

Déboute Mme F Z et M. Y A de leur demande au titre du préjudice moral,

Condamne in solidum M. C X et Mme D X à payer à Mme F Z et M. Y A la somme de 1.000 € au titre du préjudice matériel,

Confirme le jugement pour le surplus,

Rejette la demande formée par M. C X et Mme D X au titre du préavis,

Rejette les demandes formées au titre des frais irrépétibles,

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Reims, 1ère chambre section inst, 16 juin 2017, n° 16/02354