Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 28 janvier 2016, n° 12/08322

  • Donations·
  • Successions·
  • Notaire·
  • Recel successoral·
  • Quotité disponible·
  • Valeur·
  • Financement·
  • Héritier·
  • Libéralité·
  • Dire

Chronologie de l’affaire

Commentaires3

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Une Information Lexbase · Actualités du Droit · 17 février 2017

www.square-avocats.fr

Civil - Personnes et famille/patrimoine 17/02/2017 La cour d'appel a caractérisé en l'espèce l'existence d'une manoeuvre dolosive commise par l'intéressé dans l'intention de rompre l'égalité du partage au détriment des cohéritiers, laquelle manoeuvre a pu se manifester avant même l'ouverture de la succession. er février 2017 par la première chambre civile de la Cour de cassation. En l'espèce, M. X, qui avait déjà eu deux enfants de deux précédentes unions, Mme A et Mme B, avait épousé, le 15 novembre 1986, Mme Y, sous le régime de la séparation de biens ; de leur union était issu un …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 1re ch. 1re sect., 28 janv. 2016, n° 12/08322
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 12/08322
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 8 novembre 2012, N° 11/00493
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 1 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 28A

1re chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 28 JANVIER 2016

R.G. N° 12/08322

AFFAIRE :

[H], [G], [G] [Y] épouse [A]

C/

[M] [A] épouse [Q]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Novembre 2012 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

pôle famille

N° Section : 3ème section

N° RG : 11/00493

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

— Me Pierre GUTTIN, avocat au barreau de VERSAILLES,

Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES

SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES -

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT HUIT JANVIER DEUX MILLE SEIZE,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [H] [G][G] [Y] épouse [A]

née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 – N° du dossier 12000715

Représentant : Me Antoine GENTY de la SCP BODIN GENTY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0182 -

Monsieur [T] [I] [Z] [A]

né le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 7] (Pakistan)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 – N° du dossier 12000715

Représentant : Me Antoine GENTY de la SCP BODIN GENTY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0182 -

APPELANTS

****************

Madame [M] [A] épouse [Q]

née le [Date naissance 2] 1951 à[Localité 1]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 14183

— Représentant : Me Nicolas DELETRE, Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 402

Madame [U] [J]

née le [Date naissance 4] 1970 à [Localité 5] (Liban)

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1351314 – Représentant : Me Jérôme CAYOL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R109

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 novembre 2015, Madame Anne LELIEVRE, conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Odile BLUM, Président,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

Monsieur Dominique PONSOT, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT

Vu le jugement rendu le 9 novembre 2012 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :

— déclaré opposable la décision à [M] [A] épouse [Q], et à [T] [A],

— dit que [Z] [A] a fait donation du financement de l’acquisition de l’appartement sis, [Adresse 3], appartenant à [H] [Y], dans la proportion de 83,86% du prix payé pour son acquisition,

— ordonné la liquidation du régime matrimonial des époux [D], ainsi que l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [Z] [A], selon les dispositions légales postérieures à la loi du 3 décembre 2001 et antérieures à la loi du 23 juin 2006,

— désigné pour y procéder, dans le cadre des dispositions des articles 1364 et suivants du code de procédure civile, Me [O] [R], notaire, [Adresse 1],

— commis le magistrat coordonnateur du Pôle famille de ce tribunal ou son délégataire pour surveiller les opérations et faire rapport au tribunal en cas de difficultés,

— dit que le notaire :

— pourra se faire communiquer tous renseignements bancaires concernant les parties directement auprès des établissements concernés, des fichiers FICOBA ou AGIRA sans que le secret professionnel lui soit opposé,

— pourra s’adjoindre un expert dans les conditions prévues par l’article 1365 du code précité, aux frais préalablement avancés par les parties par moitié dans le délai d’un mois à compter de la demande qui leur en sera adressé par lui,

— estimera la valeur de l’appartement abstraction faite des améliorations qu'[H] [Y] a pu y apporter, et ce : 1° à la date de l’ouverture de la succession, aux fins de déterminer la quotité disponible et l’atteinte à la réserve, conformément à l’article 922 du code civil ; 2° à la date du présent jugement, aux fins de calculer la somme qui serait à restituer, au sens de l’article 1099-1 du code civil,

— dit [H] [Y] receleuse, au sens des dispositions susmentionnées et de l’article 792 du code civil, dans sa rédaction en vigueur au [Date décès 1] 2004, au titre de la donation mentionnée supra,

— condamné [H] [Y] à payer, à [U] [J], 5.000€ par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté [U] [J] de ses demandes dirigées à l’encontre de la SCP [F] [C] [K],

— condamné [U] [J] à payer 2.000€, à la SCP [F] [C] [K], notaires, par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné [U] [J] aux dépens exposés par la SCP [F] [C] [K], dit que Me Thomas Ronzeau pourra les recouvrer directement, par application de l’article 699 du code de procédure civile,

— condamné [H] [Y] aux autres dépens de la présente procédure, dit que la SCP CRTD & Associés, pourra faire application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu l’appel de cette décision relevé le 5 décembre 2012 par [H] [Y] épouse [A] et [T] [A] qui, dans leurs dernières conclusions du 28 octobre 2015, demandent à la cour de :

— infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 9 novembre 2012,

Recevant [T] [A] et Mme [D] en leur appel et statuant à nouveau,

— déclarer irrecevable à défaut d’objet et d’intérêt la demande formée par Mme [J] et Mme [Q] à l’encontre de M. [T] [A]

— subsidiairement, la déclarer mal fondée,

— condamner Mme [J] et Mme [Q] à payer chacune à M. [A] la somme de 3.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— déclarer Mme [J] et Mme [Q] mal fondées en tous les chefs de leurs demandes et les en débouter,

— les condamner chacune à payer à Mme [D]:

— la somme de 5.000€ à titre de dommages et intérêts

— la somme de 5.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Subsidiairement,

— dire qu’en cas de donation sujette à rapport et à réduction, Mme [P] bénéficie de droits sur l’appartement de Rueil à concurrence de 1/4 de 83,86%,

— dire et juger qu’en tout état de cause, elle est propriétaire indivis dudit appartement à concurrence de 16,24% de sa valeur,

— les condamner en tous les dépens de première instance et d’appel dont le recouvrement pourra directement être poursuivi par Me Guttin, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, pour ce qui concerne les dépens d’appel et par Me Caroline De Lylle pour ceux de première instance.

Vu les dernières conclusions du 14 octobre 2015 de [M] [A] épouse [Q] qui demande à la cour de :

— déclarer irrecevable, en tout cas mal fondés M et Mme [A] en leur appel ainsi qu’en l’ensemble de leurs demandes,

— confirmer en toutes ces dispositions le jugement du 9 novembre 2012,

— ordonner l’ouverture des opérations de compte et liquidation partage du régime matrimonial des époux [A]/[Y], et de la succession de [Z] [A],

— confirmer la désignation d’un notaire pour procéder auxdites opérations,

Sur la donation consentie par [Z] [A] à Mme [Y]:

— constater l’existence d’une donation déguisée à hauteur de 83,86% de la valeur d’achat de l’appartement, et que celle-ci doit être évaluée au vu de la valeur actuelle,

— dire qu’il s’agit d’une donation volontairement dissimulée par Mme [Y] aux dépens des droits des cohéritiers réservataires, le tout avec une intention frauduleuse constituant le recel successoral,

— dire que Mme [Y] sera privée de toute part dans les effets recelés de la succession, et qu’elle est débitrice envers la succession pour 83,86% de la valeur actuelle du bien, somme à inscrire à l’actif de la succession de [Z] [A].

A titre subsidiaire,

— dire nulle une telle donation et qu’ainsi, Mme [Y] est débitrice envers la succession à hauteur de la même valeur.

A titre plus subsidiaire, vu la renonciation à la succession,

— dire que Mme [Y] et [T] [A] n’ont aucune part successorale.

Encore plus subsidiairement,

— dire que les donations ne sauraient excéder la quotité disponible amenant la cour à faire droit à la demande de réduction des donations consenties à Mme [Y], telle que formulée par les héritiers réservataires,

— ordonner la réduction de la libéralité consentie à Mme [Y],

— dire que Mme [Y] est débitrice envers la succession pour 86,86% de la valeur actuelle de l’appartement de [Localité 10],

En tout état de cause,

— débouter tous contestants aux présentes de l’ensemble de leurs demandes,

— condamner Mme [H] [Y] à payer à Mme [M] [Q] une somme de 4.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme [H] [Y] aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Christophe Debray, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions du 24 avril 2013 de [U] [J] qui demande à la cour de :

— la dire bien fondée et recevable en ses demandes,

— dire que la décision à intervenir sera opposable à Mme [M] [A], épouse [Q], et à M. [T] [A],

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement prononcé le 9 novembre 2012,

— ordonner l’ouverture des opérations de compte et liquidation partage du régime matrimonial des époux [D], et de la succession de M. [A],

— confirmer la désignation de l’étude de Me [O] [R], notaire [Adresse 1], avec la mission définie par le jugement, pour procéder aux opérations de compte liquidation et partage,

— désigner M. Le Président de la chambre interdépartementale des notaires des Hauts de Seine, qu’il convient de commettre avec faculté de délégation,

— commettre un de Messieurs les juges du siège pour surveiller les opérations de partage et faire un rapport sur l’homologation de la liquidation s’il y a lieu,

— dire qu’en cas d’empêchement du notaire commis, il sera remplacé par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie de la diligente.

Sur la donation consentie par M. [A] à son épouse :

— constater que la donation consentie par M. [A] à Mme [Y] représente 83,86% de la valeur d’achat de l’appartement,

— constater que la donation est une donation de deniers devant être évaluée suivant la valeur qu’aurait actuellement l’appartement acheté sans les améliorations que Mme [Y] y a éventuellement apportées,

Sur le recel successoral :

— constater que cette donation a été dissimulée,

En conséquence,

— déclarer le délit civil de recel successoral constitué à l’encontre de Mme [Y],

— dire que Mme [Y] est héritière pure et simple et sera privée de toute part dans les effets recelés de la succession,

— dire que Mme [Y] est débitrice envers la succession pour le montant de 83,86% de la valeur actuelle de l’appartement de [Localité 10] sans les améliorations qu’elle aurait pu y apporter,

— dire que cette somme sera inscrite à l’actif de la succession de M. [A],

À titre subsidiaire, sur la nullité de la donation déguisée,

— déclarer la simulation de ladite donation sous la forme de l’achat d’un appartement au nom de Mme [Y],

— prononcer la nullité de cette donation,

— dire que Mme [Y] est débitrice envers la succession pour le montant de 83,86% de la valeur actuelle de l’appartement de [Localité 10],

— dire et juger que cette somme sera inscrite à l’actif de la succession de M. [A].

À titre très subsidiaire, sur la réduction de la libéralité,

— constater que les donations consenties en pleine propriété à Mme [Y] ne peuvent excéder la quotité disponible du quart des biens dès lors qu’un héritier réservataire en demande la réduction,

— constater que Mme [U] [J] demande la réduction des libéralités consenties à Mme [M] [Y],

— ordonner la réduction de la libéralité consentie à Mme [M] [Y] pour le montant excédant le quart de la quotité disponible,

— dire que Mme [Y] est débitrice envers la succession pour la part de 83,86% de la valeur actuelle qu’aurait l’appartement de [Localité 10] sans les améliorations que Mme [Y] y a éventuellement apportées qui excède le quart de la quotité disponible,

— dire et juger que cette somme sera inscrite à l’actif de la succession d'[Z] [A],

En tout état de cause,

— condamner Mme [M] [Y] en plus de la condamnation prononcée en première instance à payer 10.000€ à Mme [U] [J] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme [Y] et en tous les dépens de la présente procédure, dont distraction au profit de la SCP Lissarrague Dupuis Boccon-Gibod Lexavoué Paris-Versailles, avocat au Barreau de Versailles, conformément à l’article 699 du code de procédure civile ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'[Z] [A] et [H] [Y] se sont mariés le [Date mariage 1] 1986 faisant précéder leur union d’un contrat de mariage reçu le 10 novembre 1986 aux termes duquel était adopté le régime de la séparation de biens ;

Qu'[Z] [A] est décédé le [Date décès 1] 2004 laissant pour lui succéder : son fils [T] [A] né de son union avec [H] [Y] et deux autres enfants, nés d’unions précédentes : [M] [A], épouse [Q] et [U] [A], épouse [J] ainsi que son conjoint survivant [H] [Y] ;

Que le 30 mai 1991, Mme [H] [Y] a acheté en son nom, un appartement et un parking situé au [Adresse 3] au prix de 1.350.000 francs, financé d’une part, au moyen d’un prêt de 590.000 francs souscrit par Mme [H] [Y] et pour le surplus, soit 760.000 francs, par un paiement comptant provenant de fonds propres, selon l’acte ;

Que par lettre du 2 février 2005, Maître [K], membre de la SCP de notaires [Q] [C] [K] , interrogé par Mme [U] [J], a informé celle-ci de l’absence de nécessité d’établir une déclaration de succession compte tenu de la modicité de l’actif bancaire laissé au décès, et de la renonciation à la succession par Mme [H] [Y] formalisée le 30 septembre 2004 devant le tribunal de grande instance de Nanterre ;

Qu’au cours de l’année 2010, Mme [U] [J] a pris connaissance d’un jugement du 26 septembre 1995 portant révision de la prestation compensatoire due par [Z] [A] à sa mère, dont les motifs révélaient la déclaration faite par [Z] [A] aux termes de laquelle il avait financé l’achat de l’appartement de son épouse, Mme [H] [Y], tant par un apport initial de capital que par les remboursements des échéances d’un emprunt ;

Que par acte du 17 septembre 2010, Mme [U] [J] a fait assigner la SCP [Q] [C] [K] ainsi que Mme [H] [Y], M.[T] [A] et Mme [M] [A] épouse [Q] aux fins de voir notamment, ordonner l’ouverture des opérations de compte et liquidation partage de la succession de [Z] [A], désigner un notaire, constater l’existence d’une donation dissimulée consentie par le défunt à Mme [H] [Y] et le recel successoral commis par cette dernière et constater la responsabilité du notaire pour défaut d’information et de conseil et afin de voir ordonner une expertise de l’appartement de Rueil-Malmaison ;

Sur la recevabilité de l’appel de M. [T] [A] et sur sa demande de mise hors de cause

Considérant que Mme [M] [A] soutient que les appelants ont renoncé à la succession et n’ont aucun intérêt à agir dans le cadre du règlement de la succession, que seule Mme [H] [Y] est concernée par la donation déguisée et le recel successoral et que, dès lors, l’appel de M [T] [A] est irrecevable ;

Que Mme [U] [J] demande que la décision à intervenir soit déclarée opposable à M. [T] [A]. ainsi qu’à Mme [M] [A] ;

Que Mme [H] [Y] et M. [T] [A] répliquent à juste titre que M. [T] [A] est partie à l’instance, que n’ayant pas renoncé à la succession de son père, il a la qualité d’héritier et qu’il a été débouté de sa demande de mise hors de cause ; qu’il ne peut qu’être déclaré recevable en son appel, de sorte que le moyen d’irrecevabilité sera rejeté ;

Que M. [T] [A] maintient devant la cour sa demande de mise hors de cause ; qu’il fait valoir que l’actif revendiqué par les intimés ne peut résulter que du succès de l’action mettant sa mère en cause pour avoir bénéficié d’une donation déguisée et s’être rendue coupable de recel successoral, action à laquelle il n’entend pas participer, alors que ses droits seront pris en charge dans le cadre du règlement de la succession ;

Mais considérant qu’il est de l’intérêt de ses co-héritiers de l’attraire à une cause qui le concerne en sa qualité d’héritier, afin que les décisions rendues lui soient opposables ;

Que M. [T] [A] sera débouté de sa demande de mise hors de cause ;

Sur la donation consentie par [Z] [A] à Mme [H] [Y].

Considérant que Mme [H] [Y] fait grief au tribunal d’avoir retenu que l’appartement acquis en son nom aurait été financé à hauteur de 83,86% par [Z] [A] , que ce fait s’analysait en une donation de deniers correspondant à la situation prévue par l’article 1099-1 du code civil devait être prise en compte et rapportée à l’actif de la succession du de cujus, conformément aux prévisions de ce texte et d’avoir en outre considéré qu’elle avait commis un recel successoral relatif au produit de cette donation ;

Qu’elle soutient que la preuve de la donation ne saurait résulter d’un prétendu aveu de la part d'[Z] [A] dans le cadre d’une précédente procédure à laquelle elle n’était pas partie et que le tribunal a eu tort de conférer à cet aveu la force d’une présomption de vérité alors qu’il s’agit ici d’apporter la preuve de la réalité de la donation invoquée, laquelle incombe aux intimées ; que Mme [H] [Y] reproche encore au tribunal d’avoir inversé la charge de la preuve en lui faisant grief de n’avoir pas versé aux débats de pièces bancaires pour justifier de l’emploi du produit de la vente par [Z] [A] des biens de Plaisir et de Grasse, d’environ 120.000 € au total, de n’avoir pas justifié de ses revenus, de son patrimoine et de l’indemnité d’éviction qu’elle aurait perçue et de ne pas avoir soutenu que la déclaration de son mari aurait été mensongèrement soutenue devant le juge aux affaires familiales en 1995, dans le but d’obtenir gain de cause, dans le cadre de la demande de révision de la prestation compensatoire versée à la mère de Mme [U] [J] ;

Que Mme [H] [Y] relève qu’à l’inverse, l’absence de production de document bancaire n’a pas été reprochée à Mme [U] [J] ; que Mme [H] [Y] fait observer qu’elle produit devant la cour diverses pièces relatives à ses revenus, ainsi que la convention de résiliation du bail dont elle était titulaire aux termes de laquelle elle a perçu une indemnité d’éviction de 250.000 francs, un relevé de la caisse de retraite des pédicures-podologues démontrant qu’elle a exercé cette profession depuis 1975 , ainsi qu’un acte de donation à titre de partage anticipé portant sur une propriété et des terres situées en Normandie ;

Que Mme [H] [Y] fait valoir qu’elle établit que le remboursement de l’emprunt souscrit lors de l’acquisition du bien immobilier a été entièrement effectué au moyen de prélèvements mensuels à partir de son compte bancaire personnel ;

Considérant que les intimées concluent à la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu que l’appartement acquis par Mme [H] [Y] avait été financé à hauteur de 83,86% par [Z] [A] et que ledit financement constituait une libéralité au profit de son épouse ;

Que la preuve du mode de financement du bien acquis par Mme [H] [Y] peut être établie par tous moyens, y compris à l’aide de présomptions ;

Considérant qu’il est rappelé que le bien a été acquis le 4 avril 1991 au prix de 1.350.000 francs, financé d’une part au moyen d’un prêt de 590.000 francs souscrit par Mme [H] [Y] seule et pour le surplus, soit 760.000 francs, par un paiement comptant provenant de fonds propres selon ce qui a été déclaré à l’acte par l’acquéreur ;

Que le prêt consenti sur 15 ans générait des échéances mensuelles de remboursement de 6.687,41 francs ;

Considérant que c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a retenu que l’apport comptant a été financé par les deniers de [Z] [A] ; qu’en effet son montant a correspondu, à peu de chose près, au produit de la vente de deux biens appartenant à [Z] [A] , l’un à [Localité 6] et l’autre à [Localité 9], de 800.000 francs, ventes réalisées respectivement les 22 août 1990 et 8 mars 1990 ; que le tribunal a justement pris en considération le fait que [Z] [A] s’était prévalu devant le juge aux affaires familiales, d’avoir employé ces sommes à l’achat du logement familial ; que cette allégation d'[Z] [A] constitue une présomption qui se trouve corroborée par les ventes non contestées, leur caractère concomittant à l’acquisition de l’épouse et par le fait que , contrairement à ce qu’elle prétend, Mme [H] [Y] ne démontre pas qu’elle disposait de la totalité des fonds propres à hauteur du prix payé comptant ;

Qu’il suffit d’ajouter qu’il ne peut être demandé aux intimées de produire des documents bancaires dont elles n’avaient aucune raison d’être destinataires et que c’est sans inverser la charge de la preuve que le tribunal a fait le constat que Mme [H] [Y], qui avait elle -même toutes facultés de justifier de l’emploi de fonds propres en prouvant leur origine par des documents bancaires , s’abstenait de verser de telles pièces ; que ce faisant, celle-ci ne combattait pas utilement le faisceau d’indices se dégageant des éléments ci-dessus énoncés ; qu’en outre la preuve de l’emploi à des fins autres que le financement contesté, des sommes provenant de la vente des biens de [Z] [A] n’est pas rapportée et que ces sommes ne peuvent, compte tenu de leur montant avoir été diluées dans les charges de la vie quotidienne ou les loisirs, alors que les revenus de [Z] [A] permettaient à eux seuls de couvrir les frais courants ;

Qu’il doit cependant être considéré, que Mme [H] [Y] produit la preuve de ce qu’elle a été destinataire le 13 décembre 1990, d’une indemnité d’éviction de 250.000 francs qui a contribué, comme elle l’affirme, au financement de l’ acquisition litigieuse ; que les intimés font cependant légitimement observer que l’apport de Mme [H] [Y] n’a été que de la moitié de cette somme, dans la mesure où les époux occupant ensemble le bien objet de l’indemnité, celle-ci devait revenir par moitié à chacun, en application des dispositions de l’article 1751 du code civil selon lesquelles le droit au bail du local servant effectivement à l’habitation de deux époux est, quel que soit leur régime matrimonial et même si le bail a été conclu avant le mariage, réputé appartenir à l’un et l’autre des époux ;

Qu’il convient d’en tirer la conséquence que l’apport initial comptant a été financé à hauteur de 635.000 € (760.000 € – 125.000 €) par [Z] [A], ce qui représente 47% du prix d’acquisition ;

Considérant que le tribunal a exactement retenu que l’emprunt dont les échéances de remboursement s’élevaient mensuellement à 6.687,41 francs n’a pu être remboursé que conjointement par les époux, comme [Z] [A] l’avait déclaré devant le juge aux affaires familiales, sa déclaration se trouvant corroborée par la comparaison des ressources mensuelles de chacun des membres du couple, [Z] [A] déclarant des revenus de 25.937 francs et Mme [H] [Y] de 36.000 francs en 1993 ; que les avis d’imposition postérieurs ne font pas apparaître de modification significative dans les revenus respectifs des époux et démontrent que Mme [H] [Y] ne pouvait assumer seule le remboursement de cet emprunt ; que cette dernière produit des documents bancaires parcellaires se limitant à justifier du prélèvement régulier du prêt sur son compte personnel ouvert au Crédit Agricole ; que cependant les relevés de comptes versés aux débats, ne se rapportent jamais à un mois entier, et sont insuffisants à établir que ce compte était alimenté exclusivement par des revenus de Mme [H] [Y], lesquels tels que déclarés, ne lui permettaient pas d’ assumer plus de la moitié du paiement desdites échéances ; qu’il résulte des relevés bancaires produits que le compte était essentiellement alimenté par le versement d’une pension alimentaire de 3.000 francs versée par M.[W], l’ex conjoint de Mme [H] [Y] ;

Qu’au surplus quand bien même Mme [H] [Y] justifie des frais d’hébergement et d’aide à domicile que l’état de santé de [Z] [A] a rendu nécessaires à compter du mois de mars 1994, lesdits frais représentaient environ 10.000 francs par mois, et laissait un disponible largement suffisant à [Z] [A] pour qu’il contribue à l’emprunt à concurrence de la moitié ;

Qu’il doit toutefois être tenu compte de la date du décès de [Z] [A] survenu le [Date décès 1] 2004, à compter de laquelle Mme [H] [Y] n’a pu qu’assumer seule la fin du remboursement de l’emprunt, ayant couru jusqu’au 8 avril 2006 ; qu’il en résulte que [Z] [A] a participé au paiement de la moitié de 157 échéances sur 180 ; que la proportion de 157 échéances représente 87,22 % du prêt , de sorte que le financement du chef du prêt a été de la moitié de 87,22%, soit de 43,61% ; que rapportée à la proportion que le prêt représente dans le financement du bien ( 43,70%), la part supportée par [Z] [A] au titre du prêt, est de 19,05% ;

Que cette part s’ajoute à celle de 47%, retenue au titre du financement de l’apport, de sorte que la participation totale de [Z] [A] au financement du bien acquis par Mme [H] [Y] s’élève à 66,05% (47% +19,05%) ;

Que ce financement , dissimulé par Mme [H] [Y] consacre l’enrichissement de son patrimoine au détriment de celui de [Z] [A] , sans contrepartie pour ce dernier ; qu’il constitue une libéralité au profit de la première ;

Considérant que selon l’article 1099-1 du code civil , quand un époux acquiert un bien avec des deniers qui lui ont été donnés par l’autre à cette fin, la donation n’est que des deniers et non du bien auquel ils sont employés ; que le jugement sera en conséquence confirmé sur le principe de l’existence d’une donation , mais non sur le montant de celle-ci, lequel devra être calculé sur une proportion de 66,05% de la valeur de l’appartement ;

Sur l’ouverture des opérations de compte liquidation et partage

Considérant qu’ il y a lieu de faire droit à la demande d’ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de [Z] [A] dont la masse active sera a minima constituée du rapport de la donation retenue précédemment ; qu’il convient également d’ordonner la liquidation du régime matrimonial des époux [D], laquelle n’a jamais eu lieu ;

Qu’il n’est pas contesté qu’il doit être procédé auxdites opérations, compte tenu de la date du décès, sous l’empire des disposition légales postérieures à la loi du 3 décembre 2001 et antérieures à la loi du 23 juin 2006 , sous réserve des dispositions de l’article 47-II de cette loi;

Que le jugement sera confirmé sur ces points ainsi qu’en ce qu’il a désigné un notaire lequel aura la faculté de s’adjoindre un expert , commis un magistrat pour surveiller les opérations de compte liquidation et partage et faire rapport au tribunal en cas de difficultés ;

Sur le recel successoral et sur le rapport de la donation à la succession

Considérant que Mme [H] [Y] et M. [T] [A] soutiennent qu’en l’absence de donation établie il ne peut pas y avoir de recel successoral imputable à [H] [Y] ; que le recel ne peut être constitué à raison de faits survenus alors qu’il n’y avait pas de succession ouverte et que Mme [H] [Y] n’avait pas la qualité d’héritier ; que subsidiairement, Mme [H] [Y] fait valoir que s’il y a eu donation, celle-ci doit être réduite à la quotité disponible de sorte qu’elle bénéficie d’un quart de celle-ci et qu’en tout état de cause elle ' est propriétaire indivis de l’appartement’ à concurrence de 16,14% ;

Considérant qu’il résulte de l’article 792 du code civil dans sa rédaction en vigueur au [Date décès 1] 2004, ' que les héritiers qui auraient diverti ou recelé des effets d’une succession, sont déchus de la faculté de renoncer : ils demeurent héritiers purs et simples, nonobstant leur renonciation, sans prétendre prendre aucune part dans les objets recelés ;'

Qu’en l’espèce, le tribunal a exactement retenu que les faits de recel étaient caractérisés par la dissimulation de la donation aux héritiers ; que l’organisation de la dissimulation existait en germe dès l’acte d’acquisition puisque Mme [H] [Y] y a fait la déclaration, qui s’est révèlée mensongère, de ce que les fonds versés au titre de l’apport initial provenaient de ses fonds propres; que cette donation a été dissimulée aux héritiers puisqu’ elle n’a fait l’objet d’aucune déclaration au notaire chargé de la succession de [Z] [A] qui a clôturé celle-ci en raison de 'la modicité de l’actif bancaire laissé au décès ' selon le courrier envoyé à Mme [U] [J] le 2 février 2005 ; que la preuve de l’intention du recel réside dans la renonciation rapide à succession de Mme [H] [Y] afin de favoriser la clôture de la succession , et dans la persévérance qu’elle a montrée à occulter la donation , qui résulte des termes de sa réponse adressée à Mme [U] [J] le 25 juin 2010 après l’interpellation de cette dernière, faisant expressément référence au financement de l’appartement de [Localité 10] en grande partie par son père et lui demandant clairement de voir la donation rentrer dans la succession ; que Mme [H] [Y] a en effet invité Mme [U] [J] à se rapprocher du notaire, lequel ne pouvait que réitérer que la succession était clôturée , de sorte qu’il ne peut pas même être reconnu à Mme [H] [Y] le bénéfice du repentir ;

Que le jugement sera ainsi confirmé en ce qu’il a retenu l’existence du recel et en a tiré toutes conséquences de droit en disant que Mme [H] [Y] doit restituer l’objet de la donation recelée , sans pouvoir prétendre à aucune part dans celle-ci ;

Considérant que la donation devant être rapportée à la succession sera de 66,05% de la valeur actuelle de l’appartement, abstraction faite des améliorations que Mme [H] [Y] a pu apporter  ;

Que lorsque le donataire, comme c’est le cas en l’espèce, s’est rendu coupable d’un recel, et se trouve privé de sa part dans les deniers divertis, il est sans intérêt de rechercher si la donation a excédé la quotité disponible ; qu’ainsi il n’y a pas lieu de demander au notaire d’estimer la valeur de l’appartement ' à la date de l’ouverture de la succession aux fins de déterminer la quotité disponible et l’atteinte à la réserve ' comme l’a prévu le tribunal ; que le notaire devra seulement comme indiqué ci-dessus, estimer la valeur actuelle de l’appartement, abstraction faite des améliorations que Mme [H] [Y] a pu apporter, au besoin en s’adjoignant un expert dans les conditions prévues par l’article 1365 du code de procédure civile ;

Sur les dommages et intérêts.

Considérant que Mme [H] [Y], qui succombe en toutes ses prétentions, n’est pas fondée à solliciter des dommages et intérêts à l’encontre des intimées pour procédure abusive et vexatoire ; qu’elle sera déboutée de sa demande de ce chef ;

Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

Considérant que le tribunal a exactement statué sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile ; qu’en conséquence, le jugement sera confirmé du chef de ses dispositions ;

Considérant que Mme [H] [Y] et M. [T] [A], qui succombent en leur recours, seront condamnés aux dépens d’appel ;

Que l’équité commande d’allouer à Mme [U] [J] et Mme [M] [A] la somme de 2.500 € chacune, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare recevable l’appel relevé par M. [T] [A] ,

Rejette sa demande de mise hors de cause,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a :

— fixé à 83,86% la proportion du prix d’acquisition de l’appartement sis [Adresse 3] appartenant à Mme [H] [Y] financée par [Z] [A] ,

— dit que le notaire estimera la valeur de l’appartement abstraction faite des améliorations qu'[H] [Y] a pu y apporter, à la date de l’ouverture de la succession, aux fins de déterminer la quotité disponible et l’atteinte à la réserve, conformément à l’article 922 du code civil ,

Statuant à nouveau sur ces points,

Dit que [Z] [A] a fait donation du financement de l’acquisition de l’appartement sis, [Adresse 3], appartenant à [H] [Y], dans la proportion de 66,05% de son prix ,

Dit que le notaire désigné estimera seulement la valeur actuelle de l’appartement ci-dessus désigné, abstraction faite des améliorations qu'[H] [Y] a pu y apporter, aux fins de calculer la somme qui sera à restituer à la succession, au sens de l’article 1099-1 du code civil,

Et ajoutant au jugement entrepris,

Dit que Mme [H] [Y] est débitrice envers la succession de [Z] [A] de la somme qui sera calculée par le notaire représentant 66,05% de la valeur actuelle du bien, abstraction faite des améliorations apportées,

Dit que cette somme sera inscrite à l’actif de la succession de [Z] [A] ,

Dit que Mme [H] [Y] ne pourra prétendre à aucune part sur les deniers recelés,

Condamne Mme [H] [Y] à payer à Mme [U] [J] et Mme [M] [A] la somme de 2.500 € à chacune en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne Mme [H] [Y] et M. [T] [A] aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile .

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Odile BLUM, Président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,Le président,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 28 janvier 2016, n° 12/08322