Cour d'appel de Versailles, 26 mars 2019, n° 17/07461

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 26 mars 2019, n° 17/07461
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 17/07461

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac: 79A

DU 26 MARS 2019

N° RG 17/07461

AFFAIRE:

Association

RASSEMBLEMENT

NATIONAL

C/

Y A veuve X

Décision déférée à la cour: Jugement rendu le

07 Septembre 2017 par le Tribunal de Grande

Instance de NANTERRE

POLE CIVIL

N° Chambre : 1

N° RG: 15/10770

Expéditions exécutoires

Expéditions délivrées le :

à :

-Me Claire RICARD

-Me N-O P

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX MARS DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Association RASSEMBLEMENT NATIONAL, anciennement

FRONT NATIONAL prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège […]

[…]

représentée par Me Claire RICARD, avocat postulant barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 – N° du dossier 2017349 Me David DASSA LE DEIST

-

APPELANTE

****************
Madame Y, G A veuve X née le […] à […]

[…]

CANADA

représentée par Me N-O P, avocat postulant – barreau de PARIS, vestiaire : C2501

INTIMÉE

****: ***********

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 janvier 2019 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur I PALAU, président, chargé du rapport, et Madame Anne LELIEVRE, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur I PALAU, président, Madame Anne LELIEVRE, conseiller, Madame Nathalie LAUER, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MARÉVILLE,



Vu le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 7 septembre 2017 qui a statué ainsi :

-condamne l’association Front national à payer à Mme Y A épouse X à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices les sommes

de :

20.000 euros au titre de l’atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur, 20.000 euros au titre de l’atteinte au droit moral de l’auteur,

-condamne l’association Front national à payer à Mme Y A épouse X la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-déboute Mme Y A épouse X du surplus de ses demandes,

-condamne l’association Front national aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

-ordonne l’exécution provisoire.

Vu la déclaration d’appel de l’association Front national en date du 19 octobre

2017.

Aux termes de celle-ci, l’appel tend à «faire réformer ou annuler la décision entreprise sur les points suivants :

-condamne l’association Front national à payer à Mme Y A épouse X à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices les sommes de :

20.000 euros au titre de l’atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur, 20.000 euros au titre de l’atteinte au droit moral de l’auteur,

10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile,»>

Vu les dernières conclusions en date du 8 juin 2018 de l’association Rassemblement national, anciennement Front national, qui demande à la cour de :

-dire et juger le Rassemblement National (anciennement Front National) recevable en son appel,

-infirmer en toutes ses dispositions le jugement,

Statuant à nouveau :

In limine litis :

Vu les dispositions de l’article 9 du code de procédure civile:

-dire et juger que Maître H E, huissier de justice à Paris a procédé de manière déloyale à son constat du 17 février 2016 en ce qu’il vise les contenus litigieux mis en ligne sur le réseau social Facebook par la fédération départementale du Front national du Pas-de-Calais,

-écarter en conséquence des débats la pièce n°24 de Mme Y A constituée du constat (pages 12,13,14 du constat et annexes correspondantes) fait par Maître H E, huissier de justice, le 17 février 2016 en ce qu’il vise les contenus litigieux mis en ligne sur le réseau social Facebook par la fédération départementale du Front national du Pas-de-Calai,

-dire et juger que Maître H E, huissier de justice à Paris a procédé de manière déloyale à son constat des 13 et 16 novembre 2017 en ce qu’il vise des contenus litigieux mis en ligne sur les archives des sites web des fédérations départementales du Front national de la Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze,

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-écarter en conséquence des débats la pièce n°28 de Mme Y A constituée du constat fait par Maître H E, huissier de justice, 13 et 16 novembre 2017 en ce qu’il vise les contenus litigieux mis en ligne sur les archives des sites web des fédérations départementales du Front national de la Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze,

-dire et juger Mme Y A irrecevable ou à tout le moins mal fondée à agir à l’encontre de faits allégués de contrefaçon remontant au 27 mai 2014 et compris dans le protocole transactionnel du 13 novembre 2014 conclu entre Mme Y A et le Front national (à présent dénommé Rassemblement national),

Au fond :

A titre principal :

-dire et juger que les reproduction et représentation figurant en arrière-plan des visuels litigieux constituent des représentations accessoires de l’œuvre alléguée de contrefaçon;

-dire et juger en conséquence que les reproduction et représentations accessoires de l’œuvre alléguée de contrefaçon échappent à tout grief de contrefaçon;

-infirmer en conséquence le jugement en ce qu’il a condamné le Front national (à présent dénommé Rassemblement national) pour contrefaçon de l’œuvre de «C'> dont Mme Y A se présente comme étant l’ayant-droit,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour devait juger les faits de contrefaçon allégués établis :

-dire et juger que Mme Y A, épouse X, ne justifie pas du préjudice qu’elle aurait hypothétiquement subi au titre de la violation de ses droits patrimoniaux et de son droit moral,

-infirmer en conséquence le jugement en ce qu’il a condamné le Front national à verser à Mme Y A la sommes de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts.

-rejeter les nouvelles demandes faites en appel par Mme Y A,

En toute hypothèse :

-condamner Mme Y A, épouse X à verser à l’association Front National la somme de 25 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

-condamner Mme Y A aux entiers dépens de l’instance.

Vu les dernières conclusions en date du 29 octobre 2018 de Mme A veuve

X qui demande à la cour de :

-constater que, dans sa déclaration d’appel du 19 octobre 2017, le Front national a limité son appel aux seuls montants des dommages et intérêts ;

-déclarer le Front national irrecevable à : critiquer les actes de contrefaçon retenus dans le jugement du 7 septembre 2017 alors qu’il a limité son appel aux seuls montants des dommages et intérêts ;

ajouter à hauteur d’appel des prétentions nouvelles tendant à obtenir l’irrecevabilité du procès-verbal de constat du 17 février 2016,

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l’irrecevabilité de Mme A à agir sur des faits remontant au 27 mai 2014 et à juger que les reproductions et représentations litigieuses seraient accessoires sont interdites en application de l’article 564 du Code de procédure civile;

-confirmer le jugement en ce qu’il :

a jugé que Mme A, ayant-droits d’C, était recevable à agir pour la défense des droits d’auteur d’C, auteur de la sculpture objet du présent litige et réalisée en 1968 ;

a jugé qu’en reproduisant et en diffusant sans autorisation la Sculpture sur le site du Front national et des fédérations du Front national de la Réunion et de la page Facebook du Pas de Calais a porté atteinte aux droits patrimoniaux de son ayant-droits, Mme A, ce qui constitue un acte de contrefaçon;

a jugé qu’en reproduisant et en diffusant sans autorisation de la Sculpture sur le site du Front national et des fédérations du Front national de La Réunion et de la page Facebook du Pas de Calais portent atteinte aux droits moraux de Mme A ;

a indemnisé Mme A à hauteur de 20.000 euros pour les atteintes portées à ses droits patrimoniaux et à hauteur de 20.000 euros pour les atteintes portées à ses droits moraux pour les reproductions sans autorisation de la Sculpture sur le site du Front national et des fédérations du Front national de

La Réunion et de la page Facebook du Pas-de-Calais ;

-juger que le Front national a exploité la Sculpture sur les sites du Front national de la fédération de la Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze ;

-condamner le Front national à hauteur de 20.000 euros pour les atteintes portées à ses droits patrimoniaux et à hauteur de 20.000 euros pour les exploitations constatées sur les sites du Front national de la fédération de la Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze ;

-infirmer le jugement en ce que le tribunal a rejeté les demandes de Mme A concernant :

les reproductions réalisées par le Front national sur le site du Front national, sur les sites du Front national des fédérations de l’Allier, de l’Ardèche, de la Sarthe, de la Seine-Saint-Denis, de la Vienne et des pages Facebook du Front national de la Sarthe ;

les reproductions réalisées par le Front national sur les autocollants du Front national commercialisés depuis le site propaganefrontnational.wordpress.com ;

l’atteinte portée aux droits moraux de Mme A pour l’association de l’image de la Sculpture aux idées politiques du Front national qui n’ont jamais été partagées par C ou par elle ;

Statuant à nouveau :

-juger que Mme A établit les reproductions réalisées par le FN sur le site du Front national, sur les sites du Front national des fédérations de l’Allier, de

l’Ardèche, de la Sarthe, de la Seine-Saint-Denis, de la Vienne et des pages Facebook du Front national de la Sarthe ;

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-juger que Mme A établit les reproductions réalisées par le FN sur les autocollants du Front national commercialisés depuis le site propaganefrontnational.wordpress.com ;

-juger que le Front national a contribué à associer de plus fort l’image de la Sculpture à ses idées politiques qui n’ont jamais été partagées par C ou son épouse, ce qui constitue une atteinte aux droits moraux ;

En conséquence :

-condamner le Front national à lui payer les sommes de :

* 30.000 euros pour l’atteinte aux droits patrimoniaux causée par la diffusion sans autorisation, sur son site internet, sur les sites du Front national des fédérations de l’Allier, de l’Ardèche, de la Sarthe, de la Seine-Saint-Denis, de la Vienne et des pages Facebook du Front national de la Sarthe, de l’affiche reproduisant la Sculpture, objet du présent litige, réalisée par C;

* 20.000 euros pour l’atteinte au droit moral causée par la diffusion sans autorisation, sur son site internet, sur les sites du Front national des fédérations de l’Allier, de l’Ardèche, de la Sarthe, de la Seine Saint Denis, de la Vienne et des pages Facebook du Front national de la Sarthe, de l’affiche reproduisant la Sculpture, objet du présent litige, réalisée par

C ;

* 50.000 euros pour l’atteinte au droit patrimonial causée par la vente sans autorisation, sous forme d’autocollants et par le biais des sites internet propagandefrontnational.wordpress.com et myannuaire.com, de l’affiche reproduisant la Sculpture, objet du présent litige, réalisée par C ;

* 50.000 euros pour l’atteinte au droit moral causée par la vente sans autorisation, sous forme d’autocollants et par le biais des sites internet propagandefrontnational.wordpress.com et myannuaire.com, de l’affiche reproduisant la Sculpture, objet du présent litige, réalisée par C ;

* 100.000 euros pour l’atteinte aux droits patrimoniaux causée par la reproduction, la modification et la diffusion sans autorisation, sur son site internet www.frontnational.com et sur celui des fédérations de l’Allier et de

l’Ardèche, une reproduction de la Sculpture, objet du présent, litige réalisée par C;

* 100.000 euros pour l’atteinte au droit moral causée par la reproduction, la modification et la diffusion sans autorisation, sur son site internet www.frontnational.com et sur celui des fédérations de l’Allier et de

l’Ardèche, une reproduction de la Sculpture, objet du présent litige, réalisée par C;

-confirmer les dispositions du jugement ayant condamné le Front national à payer à Mme A la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance;

-condamner le Front national à payer à Mme A pour les frais d’appel la somme de 25.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

-condamner le Front national aux entiers dépens dont distraction faite au profit de Maître N-O P, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 15 novembre 2018.

********************

***

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FAITS ET PROCÉDURE
Mme Y A, veuve de M. I X, artiste connu sous le pseudonyme de C notamment pour un buste de B reprenant les traits de Mme Y J (ci-après, la sculpture), est seule héritière, en vertu d’un legs universel institué par testament du 18 février 2008, des droits d’auteur de son époux décédé le 11 février 2014.

L’association Front national (ci-après, le Front national) ayant utilisé sans autorisation courant 2014 la sculpture créée par C sur une affiche, Mme A et ce parti ont conclu un accord transactionnel le 13 novembre 2014. Celui-ci rappelle, en préambule, qu’au «printemps 2014, il est apparu que le Front national avait utilisé cette reproduction du buste de B sur son site et pour sa campagne d’affichage- Front national-Premier parti de France» et que M. C n’avait pas autorisé cette reproduction. Il rappelle également que Mme C a demandé «la suppression de la reproduction de cette oeuvre sur le site du Front national ainsi que sur tous supports'>.

Le protocole stipule :

< 1- le Front national, prenant acte de cette réclamation, a fait connaître, par lettre officielle de son conseil en date du 25 juin 2014 qu’il interrompait la diffusion de

l’affiche litigieuse.

2-En outre, en réparation du préjudice d’ores et déjà causé, Le Front national verse à Mme C… à titre d’indemnité transactionnelle, globale, forfaitaire et définitive ayant la nature de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et financier qu’elle a subi, une somme de 30.000 euros.

3- En contrepartie, Mme C renonce à toute procédure au titre des faits rappelés dans le préambule…».

Par lettre du 30 juin 2015 adressée au Front national, Mme A expose avoir relevé de nouvelles utilisations non autorisées de la reproduction de la sculpture sur les sites internet et sur le sites de plusieurs fédérations départementales et a mis en demeure le Front national de lui indiquer les mesures réparatoires qu’il entendait prendre.

Par acte d’huissier délivré le 22 juillet 2015, Mme A a fait assigner le Front national devant le tribunal de grande instance de Nanterre en violation du protocole d’accord, en contrefaçon des droits d’auteur et en indemnisation. Le 17 février 2016, elle a fait constater par la SCP L E M, huissiers de justice à Paris, la reproduction de la sculpture en cause sur le site internet frontnational.com ainsi que sur différents sites régionaux de ce parti et sur ses pages Facebook.

Elle a en outre fait signifier par huissier de justice une sommation interpellative le 20 juin 2016 au site myannuaire.com, en charge de la livraison des autocollants querellés, lequel lui a recommandé de s’adresser au Front national. Le tribunal a prononcé le jugement déféré. Il a retenu uniquement le constat dressé le 17 février 2016 par huissier de justice, non contesté.

Il a donc pris en compte la seule diffusion de l’affiche comportant la reproduction de la sculpture sur le site internet du Front national et sur le compte Facebook de la fédération du Pas de Calais et la diffusion de la reproduction de la sculpture sur le site de la fédération de La Réunion.

Aux termes de ses écritures précitées, le Rassemblement national expose qu’à la suite des élections européennes des 22 et 25 mai 2014, il a édité et diffusé une affiche reproduisant la sculpture litigieuse avec le slogan «Front National Premier Parti de France», que Mme A l’a mis en demeure de cesser de la diffuser, qu’il s’est engagé, le 25 juin 2014, à cesser cette diffusion et qu’un

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protocole transactionnel a été conclu le 13 octobre 2014.

Il déclare avoir respecté ledit protocole en cessant de diffuser toute reproduction de la sculpture pour une campagne d’affichage Front National Premier Parti de France» selon les termes du protocole.

Il soutient que son appel est recevable. Il estime qu’il est recevable à critiquer le jugement dans sa totalité et à faire état de moyens nouveaux au soutien de sa défense.

Il indique qu’il a reproduit dans sa déclaration d’appel l’intégralité du dispositif du jugement, visant donc l’intégralité de ses chefs.

Il ajoute que l’objet du litige est indivisible et que c’est parce que le tribunal a fait droit à l’action en contrefaçon qu’il a été condamné au paiement des sommes mentionnées.

Il soutient que l’irrégularité alléguée ne constitue pas une cause d’irrecevabilité mais de nullité, ni alléguée ni fondée en l’espèce. Il rappelle les avis émis par la Cour de cassation le 20 décembre 2017. Il soutient qu’il est recevable à faire état de moyens nouveaux.

Il rappelle l’article 564 du code de procédure civile et reproche à l’intimée de confondre demandes nouvelles et moyens nouveaux, ces derniers étant autorisés par l’article 563 du même code.

Il estime qu’en invoquant la déloyauté du constat d’huissier du 17 février 2016 et le caractère accessoire de la représentation de l’affiche, il fait état de moyens nouveaux justifiant sa prétention présentée en première instance tendant à dire et juger que Mme A ne rapporte pas la preuve des faits de contrefaçon allégués.

Subsidiairement, s’il est considéré qu’il s’agit de demandes nouvelles, il les estime recevables en application de l’article 564 du code de procédure civile dans la mesure où elles ont pour objet de faire écarter une prétention adverse. Il affirme également qu’il avait invoqué l’existence du protocole d’accord. Il conteste toute violation du principe de concentration des moyens. Il déclare avoir respecté l’article 910-4 du code de procédure civile issu du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 en ayant fait figurer l’ensemble de ses prétentions au fond dès ses premières conclusions.

Il conteste enfin toute violation du principe interdisant de se contredire au détriment d’autrui.

Il réitère qu’il est possible de faire valoir des moyens nouveaux -voire des demandes nouvelles lorsqu’elles tendent à faire écarter une prétention adverse- en cause d’appel et réfute tout changement de position.

Sur le fond, il affirme que le jugement n’est pas fondé. Il soutient que le procès-verbal de constat d’huissier du 17 février 2016 n’établit pas la matérialité de l’exploitation litigieuse. Il rappelle que le tribunal a rejeté les éléments de preuve invoqués par Mme A dans son assignation. Il cite les motifs du tribunal.

Il fait valoir que ce procès-verbal a été établi de manière déloyale s’agissant des deux photographies figurant sur la page Facebook de la fédération départementale du Front national du Pas de Calais.

Il expose que ces deux photographies apparaissent sur un «fil» d’images et de discussion qui comporte plusieurs centaines de pages. Il reproche à l’huissier de ne pas avoir reproduit ces centaines de pages dans son constat.

Il estime qu’il a ainsi volontairement choisi de ne faire apparaître dans son constat que ces deux photographies.

Il affirme que ce procédé est déloyal car il laisse croire que l’affiche litigieuse apparaît de manière centrale à la première consultation de la page Facebook alors que l’huissier a sélectionné dans l’historique du compte ces deux photographies

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parmi des milliers d’autres, donnant une version tronquée du contenu global de la page. Il rappelle, citant un arrêt, que l’huissier ne doit pas agir de manière déloyale et qu’une preuve rapportée de manière illicite doit être écartée.

En réponse à l’intimée, il considère que, quelles que soient les précautions techniques d’usage prises par l’huissier, le constat a été établi de manière déloyale dans la mesure où il vise, précisément, à donner au juge une fausse impression de la réalité et de la portée des actes allégués de contrefaçon. Il ajoute que l’intimée reconnaît que le procès-verbal est incomplet et donc tronqué en cherchant à faire accroire que l’affiche apparaîtrait, de manière centrale, à la première consultation de la page Facebook considérée. Il relève enfin qu’elle fait état de pièces rejetées en première instance faute de caractère probant. Il affirme qu’il est «singulièrement déloyal» de se rapporter à des pièces écartées à bon droit par le jugement dont il reprend les termes. Il fait valoir que le protocole transactionnel a mis fin au litige né de la campagne d’affichage litigieuse, telle qu’elle apparaît en arrière-plan de la première image fixe de la vidéo du 27 mai 2014 archivée sur le site web du Front national.

Il soutient que le procès-verbal litigieux n’établit nullement que l’affiche aurait été diffusée par le Front national en violation du protocole, selon les termes de l’assignation initiale.

Il déclare que ce procès-verbal établit uniquement que l’affiche figurait en arrière-plan de la première image, fixe, de la vidéo de la conférence de presse de la présidente du Front national du 27 mai 2014. Îl précise que la première image, fixe, de cette vidéo du 27 mai 2014 était affichée sur le site web du Front national.

Il affirme que le procès-verbal de constat d’huissier n’établit nullement que la vidéo pouvait être diffusée dans son intégralité à partir du site web du Front national. Îl considère donc que Mme A ne peut prétendre sérieusement que la présence résiduelle de la première image fixe de cette vidéo sur les archives du site web du Front national équivaudrait à une violation des engagements par le Front national du protocole.

Il déclare qu’à la date de la vidéo, le 27 mai 2014, antérieure au protocole, le Front national ignorait tout des droits et des prétentions de Mme A. Il affirme qu’en concluant ce protocole, il a entendu se mettre à l’abri de toute action de l’intimée liée à la diffusion passée de l’affiche litigieuse, et ce conformément à ses engagements initiaux du 25 juin 2014.

Il en infère que l’usage fait par lui de l’affiche lors de cette conférence de presse du 27 mai 2014 était donc nécessairement couvert par le protocole transactionnel. Il soutient que l’interprétation faite par le tribunal du protocole n’est pas fondée et n’est pas conforme aux dispositions des articles 2044, 2049 et 2052 du code civil et de celles des articles L. 122-2 et L. 122-3 du code de la propriété intellectuelle et 3

§1 de la Directive n°2001/29/CE du 22 mai 2001.

S’agissant des dispositions du code civil, il affirme que la renonciation de Mme A à agir concernait l’ensemble des faits de reproduction et de représentation de l’affiche litigieuse antérieurs à la conclusion du protocole, y compris ceux apparaissant dans la première image fixe de la vidéo de la conférence de presse du 27 mai 2014 sur laquelle apparaît en arrière-plan, cette affiche. Il considère que le protocole n’a pas seulement pour objet de «réparer les actes antérieurs à sa conclusion'>.

Il estime que cette interprétation en dénature les termes et méconnaît l’intention des parties qui était, clairement, de mettre définitivement fin au litige né de la campagne d’affichage litigieuse.

Il prétend qu’il a également pour objet de voir l’intimée «renoncer à toute procédure»> en rapport avec les faits objets de la transaction, à savoir l’utilisation de l’affiche litigieuse par le Front national « pour une campagne d’affichage Front National – premier Parti de France» ayant suivi les élections européennes 2014.

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Il affirme que tel est le sens même du protocole soit mettre fin, conformément aux dispositions de l’article 2044 du code civil, à la «contestation née» de cette campagne d’affichage.

Il soutient que cette renonciation à agir est, précisément la concession réciproque apportée par l’intimée en contrepartie de la cessation de l’utilisation de l’affiche litigieuse par le Front national dans le cadre de cette campagne d’affichage et la condition même de validité du protocole. Il soutient également que, sans une telle concession réciproque, consubstantielle à la conclusion du protocole, il n’aurait jamais accepté de l’indemniser en lui versant la somme de 30 000 euros. Il ajoute que, sans une telle concession réciproque, le protocole aurait de surcroît été nul.

Il fait valoir que la présence résiduelle de l’affiche litigieuse, sur les archives du site web du Front national et en arrière-plan de la première image fixe de la vidéo d’une conférence de presse du 27 mai 2014, ne met nullement en évidence qu’il aurait, postérieurement au protocole et a fortiori le 17 février 2016, continué la campagne d’affichage avec l’affiche.

Il conclut que ce procès-verbal de constat met uniquement en évidence qu’à la date du 27 mai 2014 soit antérieurement à la lettre de son conseil et à la conclusion du protocole, l’affiche était utilisée pour la campagne d’affichage visée au protocole et souligne que l’objet du protocole était de mettre fin à tout litige né de cette campagne.

Il estime donc que le tribunal a violé l’article 2052 du code civil. Il estime que la situation aurait été toute autre s’il avait continué ses campagnes d’affichage avec l’affiche pour de nouvelles échéances électorales, postérieurement au 25 juin 2014 ou au 13 novembre 2014 ce qui n’est pas établi ni même allégué. Critiquant le jugement, il déclare n’avoir jamais plus utilisé l’affiche litigieuse dans le cadre de sa propagande» postérieurement au protocole transactionnel du 13 novembre 2014.

S’agissant des articles L. 122-2 et L. 122-3 du Code de la propriété intellectuelle et 3 §1 de la Directive n°2001/29/CE du 22 mai 2001, il reproche au tribunal d’avoir raisonné comme si la première image (fixe) de la vidéo du 27 mai 2014 avait fait l’objet d’une communication au public allant au-delà de sa diffusion initiale, couverte par le protocole. Il fait valoir, citant des arrêts, qu’au sens de ces dispositions, l’acte de communication au public d’une œuvre, soumis au droit exclusif du titulaire du droit, doit nécessairement, lorsqu’il s’agit d’une œuvre déjà diffusée, s’entendre de la diffusion auprès d’un public nouveau, c’est-à-dire d’un public n’ayant pas été pris en compte par le titulaire du droit d’auteur, lorsqu’il a autorisé la communication initiale au public.

Il considère qu’en concluant le protocole, l’intimée a, rétroactivement, donné son accord à une telle exploitation, passée, de l’affiche en contrepartie du versement d’une indemnité transactionnelle et de la cessation de la campagne électorale avec celle-ci.

Il soutient donc que le fait que la seule première image (fixe) de cette vidéo du 27 mai 2014 ait été maintenue dans les archives en ligne du site web du Front national ne caractérise en rien une communication au public nouvelle, auprès d’un public nouveau.

Il en conclut qu’il s’agit du même acte de communication au public de l’affiche que celui compris dans le protocole transactionnel, ayant donné lieu à indemnisation de l’intimée et à son désistement d’action.

L’appelant fait enfin valoir que la représentation de l’affiche litigieuse en arrière-plan des visuels litigieux est une représentation accessoire échappant au grief de contrefaçon.

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Il fait état du constat aux termes duquel deux fédérations départementales du Front national (fédérations du Pas de Calais et de La Réunion) auraient diffusé deux clichés photographiques de réunion tenues en mars 2015, mis en ligne par la fédération départementale du Front National du Pas-de-Calais sur le réseau social

Facebook, sur lesquels l’affiche litigieuse apparaît «en arrière-plan»>. Il fait état d’actes d’exploitation accessoires et souvent fortuits.

S’agissant des deux photographies concernant la fédération départementale du Pas-de-Calais, il décrit celles-ci et déclare que, sur la première photographic, apparaît en arrière-plan, sur la droite de manière décentrée par rapport au sujet principal l’affiche litigieuse. Il affirme que sa représentation est ainsi purement accessoire, par rapport au sujet principal de la photographie et par rapport à la campagne électorale en question. Il ajoute qu’elle est tellement accessoire que l’on ne distingue même plus les caractéristiques originales de la sculpture. Il affirme qu’il en est de même de la seconde photographie.

S’agissant du visuel litigieux mis en ligne par la fédération départementale du Front national de La Réunion sur son site web, il déclare que l’affiche n’apparaît pas reproduite en tant que telle, apparaissant seulement dans un format d’environ 0,5 cm² insérée au sein d’un visuel agglomérant quatre autres visuels de propagande électorale du Front national.

Il infère de ce constat qu’en toute hypothèse, il n’a initié aucune campagne d’affichage auprès du public comparable, de près ou de loin, à celle qui a fait l’objet du grief initial de Mme A et abouti au protocole transactionnel. Il soutient, concernant les deux photographies mises en ligne par la fédération départementale du Pas-de-Calais, que la présence accessoire, voire fortuite, de l’affiche n’est en réalité que la conséquence du fait que cette fédération a omis de la retirer des murs du local dans lequel se sont tenues ces réunions, dont on ignore si elles ont eu un caractère public. Il estime qu’une telle omission ne caractérise pas un réel usage de l’affiche litigieuse pour une quelconque campagne électorale.

Il fait valoir qu’il n’a, conformément au protocole, jamais plus utilisé cette affiche comme telle, c’est-à-dire à des fins de communication au public par voie d’affichage sur la voie publique. Il fait également valoir que ce caractère accessoire est souligné par la modestie de l’affiche dont on ne distingue même plus les caractéristiques originales de la sculpture. Il fait enfin valoir le contexte dans lequel l’utilisation de ces affiches a été mise en évidence.

Il déclare qu’elles n’apparaissent que sur la page d’un réseau social (Facebook) et sur un site web ouvert par deux simples fédérations départementales (Pas-de-Calais et La Réunion) du Front national.

Il souligne qu’un tel usage n’est en rien comparable à celui fait lors d’une campagne électorale, par voie d’affichage extérieur sur la voie publique. Il soutient, citant des arrêts, que les reproduction et représentation accessoires d’une œuvre échappent au grief de contrefaçon et relève qu’il s’agit non pas d’une exception mais d’une limite externe au droit d’auteur.

Il estime que la seule question est celle de savoir si l’affiche litigieuse a été utilisée, en tant que telle, dans le cadre d’une campagne d’affichage, par le Front national, postérieurement au protocole transactionnel et déclare que tel n’est pas le cas.

Il conclut du caractère accessoire des reproduction et représentation visées par le tribunal par rapport au sujet principal et par rapport au contexte de la communication de l’affiche qu’il n’y a pas d’actes de contrefaçon.

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L’appelant sollicite également le rejet du procès-verbal de constat des 13 et 16 novembre 2017 – concernant les sites des fédérations du Front national de la

Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze-au motif qu’il a été établi dans des conditions de déloyauté similaires à celui critiqué.

Il reproche à l’huissier d’avoir, à la demande de sa cliente, volontairement omis de reproduire les centaines de pages de contenu des sites web incriminés et isolé des pages d’archives des sites web considérés. Il affirme que sa démarche a pour seule finalité de laisser accroire que l’affiche litigieuse apparaîtrait, de manière centrale, sur les sites de ces quelques fédérations départementales, alors qu’il s’agit en réalité de simples archives et de représentations accessoires.

Il décrit le constat.

Il sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a écarté des pièces produites par l’intimée.

Il se prévaut des motifs du tribunal. Il expose que ces pièces sont constituées d’une série de sept copies d’écran qu’il décrit.

Il fait valoir qu’en l’absence de procès-verbal de constat d’huissier, la date à laquelle ces copies d’écrans ont été réalisées est inconnue.

Il estime que seules cinq de ces copies comportent des dates qui permettraient hypothétiquement de les rattacher, fût-ce indirectement, à une quelconque date. Il fait également valoir qu’elles sont dépourvues de toute force probante. Il se prévaut d’arrêts et jugements ayant posé des conditions afin de s’assurer de l’authenticité de telles copies. Il souligne que les huissiers ont élaboré une norme AFNOR récapitulant ces règles. Il considère que les exigences requises au sujet des constats dressés par huissier valent a fortiori pour les captures d’écran réalisées par les parties elles-mêmes (qui n’ont pas la même force probante que les constats dressés par un officier ministériel), sans aucune précaution technique particulière. Il indique qu’aucune de ces diligences n’a été effectuée, aucun procès-verbal de constat d’huissier n’ayant même été dressé avant d’introduire l’action. Il déclare que les conditions de réalisation et d’impression de ces copies d’écran sont ignorées.

En réponse à l’intimée, il souligne qu’il ne remet pas en cause, par principe, la force probante de captures d’écran mais qu’il soutient que la force probante de telles captures d’écran pour établir un fait juridique est soumise à certaines conditions auxquelles ne répondent manifestement pas les captures d’écran produites par elle.

Îl ajoute qu’elle n’apporte aucune explication dans ses conclusions d’appel sur les conditions de réalisation et d’impression des copies d’écran sur lesquelles elle a fondé sa demande.

Il estime que les décisions invoquées par elle ne remettent pas en cause les règles précitées et en sont pas transposables. Il demande également que, pour les mêmes motifs, les attestations produites soient écartées.

Il affirme, à cet égard, que les captures d’écran qui fondent les observations de ces proches de l’Intimée sont dépourvues de toute force probante au motif que les conditions des captures d’écran ne sont pas précisées. Il ajoute que, comme précédemment, il est, techniquement, possible que les reproductions de l’affiche litigieuse n’aient pas été accessibles aux périodes indiquées (23 juin 2015) et qu’il s’agisse en réalité d’un simple montage ou de la copie d’une page «cache» demeurée dans la mémoire de l’ordinateur.

Il déclare qu’il ne lui appartient pas de démontrer que les captures d’écran sont falsifiées mais qu’il incombe à Mme A de prouver que les captures d’écran dont elle se prévaut ont bien été établies dans le respect des règles communément admises et exigées par les tribunaux.

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Il sollicite également la confirmation du jugement en ce qu’il a écarté les autocollants diffusés par certains sites. Il fait valoir que Mme A ne rapporte pas la preuve que cet autocollant aurait été diffusé par le Front National et, si tel était le cas, après la signature du protocole. Il estime non probant le «constat d’achat» invoqué en l’absence de tout constat d’huissier et de preuve de ses diligences. Il ajoute qu’il n’est pas établi que les sites concernés sont apparentés au Front national et que celui-ci est responsable de la diffusion de autocollants. Enfin, l’appelant soutient que Mme A ne rapporte pas la preuve du préjudice invoqué.

Il rappelle l’article L 331-13 du CPI, déclare que Mme A se fonde sur l’une des premières branches (1°, 2° ou 3°) de l’alternative et lui fait grief de ne pas rapporter la preuve distinctement – c’est-à-dire de manière non cumulée – des chefs de préjudice allégués. Il souligne, citant des arrêts, que le préjudice «doit être évalué en prenant distinctement en considération les conséquences négatives de l’atteinte aux droits, le préjudice moral causé à la partie lésée et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits'>.

Il fait grief au tribunal de ne pas avoir pris en compte distinctement – et de manière non cumulative – les chefs du préjudice allégués. Il affirme enfin qu’il n’a pas distingué ce qui relèverait de l’atteinte aux droits d’exploitation et ce qui relèverait de l’atteinte au droit moral. Il estime qu’aucun des actes allégués de contrefaçon ne caractérise un réel manque à gagner ou une quelconque perte prétendument subie par Mme A.

Il affirme que ni elle ni l’auteur n’ont apparemment fait commerce de la reproduction de l’image de la sculpture litigieuse. Il ajoute que l’exploitation litigieuse ne peut être mise sur le même plan que le prix de vente de la sculpture prise comme œuvre matérielle. Il estime enfin que la somme versée dans le cadre du protocole ne peut constituer un critère d’évaluation du préjudice allégué, ni au titre du gain manqué, ni au titre de la perte subie étant souligné que l’exploitation sans droit de l’affiche est sans rapport en volume ou en termes qualitatifs, avec les actes allégués de contrefaçon. Il conclut que ce préjudice devrait être évalué au regard du seul constat de l’exploitation litigieuse qui serait retenue. Il réfute toute atteinte au droit moral.

Il estime que l’absence de mention du nom de l’auteur doit être sanctionnée d’autant plus légèrement que l’intimée a soutenu que ni son défunt mari ni elle-même ne partageaient les idées du Front national et que l’association de la sculpture au Front national lui causait préjudice en tant que tel.

Aux termes de ses écritures précitées, Mme A rappelle l’importance du travail d’C qui a réalisé, en 1968, le buste de B en s’inspirant du buste de Mme Y J et l’apologie de celui-ci. Elle rappelle le protocole d’accord conclu le 13 novembre 2014 et reproche au Front national d’avoir, en 2015, poursuivi son exploitation illicite sur son site et sur le site des fédérations départementales de l’Allier, de l’Ardèche, de La réunion, de la Sarthe, de la Seine Saint-Denis et de la Vienne et sur les pages Facebook du front national de la Sarthe et du Pas de Calais et d’avoir prolongé celle-ci en 2016 et 2017 sur les sites des fédérations de la Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze et sur deux autres sites.

Elle soutient que le Front national est irrecevable à critiquer d’autres chefs du jugement que ceux reproduits dans sa déclaration d’appel et à former des demandes nouvelles.

S’agissant de l’irrecevabilité de l’appelant à critiquer d’autres chefs du jugement que ceux mentionnés dans sa déclaration d’appel, elle rappelle l’article 901 du code de procédure civile et souligne que l’appel ne défère à la cour que la

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connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément.

Elle fait valoir que la déclaration d’appel sert à délimiter le champ de l’appel et opère seule dévolution et que l’appelant principal est lié de manière définitive et irréversible par la limitation contenue dans sa déclaration d’appel et ne peut plus élargir l’effet dévolutif par voie de conclusions. Elle souligne qu’elle ne prétend pas que la déclaration d’appel serait nulle car le Front national n’aurait pas mentionné les chefs de jugement expressément critiqués mais qu’il a limité dans sa déclaration d’appel les chefs de jugement qu’il entendait critiquer et qu’il est irrecevable à en critiquer d’autres non visés dans cette déclaration.

Elle expose que son appel a été limité au montant des dommages et intérêts auxquels il a été condamné.

Elle en conclut qu’il est irrecevable à critiquer les actes de contrefaçon, sa déclaration ne critiquant pas le jugement en ce qu’il a accueilli l’action en contrefaçon.

Elle soutient, en conséquence, qu’il ne peut demander que le procès-verbal du 17 février 2016 soit écarté des débats, qu’elle soit déclarée irrecevable à agir à l’encontre de faits remontant au 27 mai 2014 et que les reproductions et représentations accessoires de l’œuvre alléguée de contrefaçon échappent à tout grief de contrefaçon.

S’agissant de l’irrecevabilité à formuler des prétentions nouvelles, elle rappelle l’article 564 du code de procédure civile. Elle excipe d’un arrêt de la cour d’appel de Paris ayant jugé qu’un appelant est irrecevable à demander qu’une pièce soit écartée des débats à hauteur d’appel s’il ne l’avait pas demandé en première instance alors que la pièce était déjà communiquée.

Elle souligne que l’objectif de cet article est de permettre que chaque partie puisse se défendre face aux prétentions adverses tant devant le premier juge que devant la cour.

Elle reproche à l’appelant d’émettre trois prétentions nouvelles pour lesquelles il est irrecevable soit celles tendant à écarter le procès-verbal du 17 février 2016, à soutenir qu’elle est irrecevable à agir à l’encontre de faits remontant au 27 mai 2014 et à juger que les reproductions et représentation figurant en arrière-plan des visuels litigieux constitueraient des représentations accessoires de l’œuvre alléguée de contrefaçon.

Elle soutient qu’il s’agit non de moyens nouveaux mais de prétentions nouvelles aux motifs qu’elles n’ont jamais été évoquées devant le tribunal, qu’elles reposent sur des fondements juridiques nouveaux et qu’elles ne surviennent pas à la suite d’éléments nouveaux.

A titre subsidiaire, elle affirme que ces prétentions nouvelles sont contraires au principe de concentration des moyens et au principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d’autrui,

Elle estime qu’il appartenait au Front national de présenter devant le tribunal l’ensemble des prétentions qu’il estimait de nature à faire rejeter ses demandes. Elle estime également qu’en formulant ses prétentions nouvelles, il se contredit à son détriment, n’ayant jamais demandé en première instance que le procès-verbal de constat du 17 février 2016 soit écarté des débats ou que les actes de reproduction ou de représentation ne soient jugées accessoires.

L’intimée sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il l’a déclarée recevable en sa qualité d’ayant- droit de l’auteur de la sculpture, elle-même déclaréc originale, en l’absence de contestation du Front national et expose ses moyens à cet égard.

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Elle sollicite également sa confirmation en ce qu’il a jugé que le Front national avait commis des actes de contrefaçon sur les sites du Front national et de la Fédération de La Réunion et sur la page Facebook du Front national du Pas de Calais.

Elle rappelle les articles L 122-1, L 122-4, L 123-1, L 131-3 et L 335-2 du code de la propriété intellectuelle.

Elle affirme démontrer les actes de contrefaçon retenus par le tribunal.

Elle excipe du procès-verbal de constat, établi le 17 février 2016, qui démontre qu’à cette date, l’affiche reproduisant la sculpture était toujours publiée sur le site du Front national accessible à l’adresse www.frontnational.com et sur le site du Front national à La Réunion et sur la page Facebook du Front national du Pas-de-Calais.

Elle souligne qu’elle n’a jamais autorisé le Front national à reproduire la sculpture, s’y opposant même dès 2014.

Elle en infère, citant le jugement, que ces actes non autorisés constituent des contrefaçons.

Elle réfute toute déloyauté de l’huissier. Elle rappelle l’article 648 du code de procédure civile qui dresse la liste des mentions obligatoires d’un acte d’huissier de justice et se prévaut d’un arrêt de la cour d’appel de Paris du 27 février 2013 et estime qu’il s’agit des seules obligations imposées par les juridictions.

Elle affirme, citant le procès-verbal, que l’huissier a mentionné toutes les exigences de l’article 648 du code de procédure civile et décrit précisément ses démarches.

Elle relève que l’appelant ne conteste pas la mise en ligne de la publication sur sa page Facebook et soutient qu’aucune disposition n’imposait à l’huissier d’imprimer l’intégralité du contenu de la page Facebook.

Elle dément avoir reconnu le caractère incomplet du constat.

Elle affirme que le Front national a violé ses droits patrimoniaux.

Elle conteste que le protocole du 13 novembre 2014 couvre l’exploitation de la sculpture dans la vidéo mise en ligne sur le site www.frontnational.com.

Elle rappelle qu’elle n’a jamais autorisé la reproduction et la diffusion de la sculpture sur les affiches électorales du Front national et que, dans son courrier du 25 juin 2014, le conseil de celui-ci s’était engagé à interrompre la diffusion de l’affiche litigieuse.

Elle indique avoir constaté, le 17 février 2016, par le procès-verbal précité, que, malgré l’assignation délivrée, l’affiche continuait d’être diffusée sur le site du FN et de ses fédérations régionales.

Elle affirme qu’une telle diffusion caractérise de nouveaux actes de contrefaçon. En réponse à l’appelant, elle fait valoir que les fédérations dépendent du Front national, qu’elles ont nécessairement obtenu les affiches litigieuses auprès du Front national et que ce dernier devait, au regard du protocole conclu, mettre en œuvre les moyens nécessaires afin que ces fédérations cessent également la diffusion.

Elle affirme qu’il ne justifie pas avoir donné de telles instructions ou avoir mis en oeuvre des mesures pour cesser et faire cesser cette diffusion et ajoute que lui-même en a poursuivi l’exploitation.

S’agissant du protocole, elle déclare que la transaction est d’interprétation stricte et qu’elle ne peut être opposée par l’une des parties que si celle-ci en a respecté les conditions.

Elle rappelle les termes du protocole et soutient que sa renonciation à agir ne concernait pas les reproductions accessibles postérieurement à la conclusion du protocole dans la mesure où le Front national s’était engagé à interrompre la diffusion de l’affiche.

Elle infère du constat du 17 février 2016 que celui-ci a manqué à son engagement d’interrompre la diffusion de l’affiche litigieuse puisqu’elle est reproduite le 17 février 2016 sur le site www.frontnational.com à la fois dans une vidéo mais également sous la vidéo.

Elle affirme que le Front national ne démontre pas que cette publication constitue une archive et fait valoir qu’il n’explique pas pour quel motif’il n’a pas procédé au retrait de la vidéo et de l’affiche sur son site.

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Elle estime inopérantes ses allégations sur la date de la mise en ligne dans la mesure où il a maintenu en ligne la sculpture après la conclusion du protocole.

Elle conclut que, postérieurement au protocole, il a continué d’utiliser l’affiche reproduisant la sculpture ce qui constitue une violation de ses droits patrimoniaux.

Elle conteste que les articles L 122-2 et L 122-3 du CPI et la Directive du 22 mai 2001 autorisent l’appelant à reproduire la sculpture.

Elle rappelle que celle-ci a été reproduite à deux reprises sur le site du Front national en arrière-plan de Marine K dans la vidéo relative à l’analyse des résultats des élections européennes et sous la vidéo pour illustrer l’analyse des résultats des élections européennes.

Elle rappelle qu’elle a été également reprise sur le site de la fédération du Front national de la Réunion et sur la page Facebook de sa fédération du Pas-de-Calais. Elle estime que le Front national allègue sans le démontrer que ces reproductions seraient accessoires sans préciser l’objet auquel elles seraient accessoires. Elle fait valoir que les exceptions au monopole de l’auteur sont définies à l’article L.122-5 du code de la propriété intellectuelle et ne visent pas le cas des œuvres qui seraient des accessoires.

Elle fait également valoir, citant des arrêts, que la jurisprudence a autorisé, dans certains cas très limités, la reproduction dans une oeuvre d’une autre œuvre située dans un lieu public et représentée en arrière-plan et de manière accessoire par rapport au sujet traité et qu’en dehors d’un lieu public, les juridictions ont imposé que la reproduction ou représentation d’une œuvre soit justifiée par le sujet traité et que l’apparition répétée et délibérée excluait que l’œuvre puisse être considérée comme simplement accessoire.

Elle considère que l’affiche litigieuse a été placée volontairement par le Front national, Mme K apparaissant entre les deux mêmes affiches reproduisant la sculpture, et qu’il s’agit donc d’une mise en scène excluant tout caractère accessoire. Elle ajoute qu’elle est également reproduite sous la vidéo, dont elle ne peut pas être un accessoire dans la mesure où il n’y a pas d’autre objet que l’affiche. Elle indique enfin qu’aux termes du constat précité, elle a été exploitée lors de la réunion à Auchel et lors de la galette des rois à Boulogne-sur-Mer le 25 janvier 2015 et que les affiches sont délibérément placées derrière les candidats du Front national et participent à la mise en scène du Front national.

Elle observe que l’appelant ne démontre pas que ces événements seraient privés et soutient que, dans la mesure où les photographies établissent que plusieurs personnes étaient présentes et qu’elles sont accessibles au public, il apparaît que ces événements étaient publics.

S’agissant du site de la fédération de La Réunion, elle indique que si l’affiche n’est pas intégralement reproduite, la sculpture est, quant à elle, intégralement reproduite. Elle conteste que la taille de la sculpture soit de 0,50 centimètres car l’impression écran a réduit les proportions de l’image afin de pouvoir imprimer la page entière. Elle relève que l’appelant reconnaît avoir omis de retirer l’affiche comportant la Sculpture des murs de son local et fait état d’un aveu judiciaire. Elle fait valoir que le protocole ne prévoit pas que le Front national s’engage à ne plus exploiter l’affiche litigieuse à des fins de communication au public par voie d’affichage sur la voie publique mais prévoit l’engagement d’interrompre la diffusion de cette affiche.

Elle fait également valoir qu’il ne concerne pas seulement une campagne par voie d’affiche mais également la reproduction de l’affiche litigieuse sur l’internet. Elle estime que les caractéristiques originales de la sculpture sont parfaitement distinguables sur les photographies litigieuses. Elle affirme enfin que le Front national ne détermine pas le sujet dont l’affiche litigieuse serait l’accessoire.

Elle conclut donc à la confirmation du jugement qui a retenu que ces reproductions sur le site du Front national et de sa fédération de la Réunion et de la page Facebook de celle du Pas de Calais portaient atteinte à ses droits patrimoniaux et constituaient des actes de contrefaçon.

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Mme A invoque la violation de ses droits moraux, le Front national ayant continué à omettre le nom d’C et la sculpture se retrouvant associée aux idées politiques du Front national voire devenant un symbole de ce parti, alors que ces idées n’ont jamais été partagées par C ou son épouse. Elle sollicite enfin la confirmation du jugement en ce qui concerne l’évaluation de ses préjudices.

Elle rappelle l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle. Elle se prévaut d’une indemnisation forfaitaire et fait valoir qu’C bénéficie d’une renommée internationale que la diffusion de sa sculpture sans autorisation et sans mention de son nom contribue à ternir.

Elle ajoute qu’il s’agit d’une sculpture iconique.

Elle considère également que la dévalorisation de la sculpture par le Front national nuit à l’exploitation de l’œuvre d’C puisqu’elle risque de détourner les acheteurs potentiels de cette œuvre.

Elle demande en outre la prise en compte des atteintes portées tant à la paternité qu’à l’intégrité de l’œuvre découpée et représentée immergée sans mention du nom d’C et de la mauvaise foi de l’appelante qui connaissait la paternité d’C et qui n’a pas respecté le protocole conclu.

Elle excipe des motifs du jugement. Mme A forme des demandes nouvelles à la suite de la survenance de faits postérieurs au jugement.

Elle se prévaut d’un procès-verbal de constat des 13 et 16 novembre 2017 établissant que la sculpture était mise en ligne sur les sites du Front national des fédérations de la Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze. Elle s’oppose, pour les motifs ci-dessus, à la demande tendant à écarter ce constat.

Mme A sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté ses demandes au titre d’autres contrefaçons.

S’agissant des reproductions réalisées par le Front national sur le site du Front national, sur les sites du Front national des fédérations de l’Allier, de

l’Ardèche, de la Sarthe, de la Seine Saint Denis, de la Vienne et les pages Facebook du Front national de la Sarthe, elle soutient que ses pièces permettent d’établir ces contrefaçons.

Elle rappelle, citant des arrêts, la valeur probante des captures d’écran, s’agissant de la preuve d’un fait juridique.

Elle fait valoir que l’appelant n’apporte aucun élément relatif aux conditions techniques requises alors qu’elle-même a apporté des éléments sur les conditions de réalisation des captures d’écran, y compris sur leur date.

Elle décrit les captures d’écran qu’elle a réalisées et se prévaut d’attestations et, pour certaines, d’éléments permettant de leur conférer une date.

Elle soutient que ces dates sont toutes postérieures à la date de conclusion du protocole du 13 novembre 2014 et que le contenu des captures d’écran n’est pas contestable puisqu’il provient du Front national.

Elle ajoute qu’il appartient à celui qui conteste la valeur probante de captures d’écrans de démontrer qu’elles ont été falsifiées.

Elle indique que ces captures démontrent que, malgré le protocole, le Front national a poursuivi la diffusion de l’affiche litigieuse ce qui caractérise de nouveaux actes de contrefaçon.

Elle réitère ses moyens tirés de la dépendance des fédérations à l’égard du Front national.

S’agissant des reproductions réalisées par le Front national sur les autocollants du Front national commercialisés depuis le site propaganefrontnational.wordpress.com, elle se prévaut d’une capture d’écran et d’une commande par M. D, agent d’C, d’autocollants, ceux-ci ayant été reçus. Elle excipe également de la réponse du dirigeant du site à une sommation interpellative. Elle déclare que le Front national ne conteste pas qu’il a édité et commercialisé les autocollants litigieux.

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Elle relève que les marques du Front national sont reproduites sur les autocollants et en infère qu’il en est l’éditeur.

Elle ajoute qu’il ne démontre pas avoir engagé des poursuites pour une exploitation non autorisée de sa marque et qu’il poursuit, sur ces sites, la commercialisation d’autocollants.

Elle sollicite également une indemnisation du préjudice résultant de l’association de l’image de la sculpture avec les idées du Front national auxquelles C et elle-même n’adhèrent pas.

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Sur la procédure Sur la déclaration d’appel

Considérant que la déclaration d’appel reproduit dans son intégralité le dispositif du jugement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 455 du code de procédure civile, le jugement «énonce la décision sous forme de dispositif» ;

Considérant qu’en déférant à la cour la totalité des dispositions du jugement, soit «la décision» elle-même, le Rassemblement national n’a nullement limité son appel au seul montant des dommages et intérêts alloués; qu’il n’a nullement renoncé à contester les actes de contrefaçons dont l’existence n’a pas été mentionnée dans le dispositif du jugement ;

Considérant que la cour est donc saisie également de la contestation même de ces actes;

Sur l’existence de prétentions nouvelles

Considérant que l’appelant n’avait pas demandé en première instance que soit écarté des débats le procès-verbal de constat dressé le 17 février 2016 par Maître E ;

Considérant que sa demande tendant à ce qu’il soit écarté des débats constitue donc une prétention nouvelle en cause d’appel ; qu’elle est, à ce titre, irrecevable;

Mais considérant que l’irrecevabilité de cette demande n’interdit nullement à l’appelant de critiquer, fût-ce en invoquant des moyens nouveaux sous réserve des développements ci-dessous, la force probante du constat ;

Considérant qu’il est donc irrecevable à demander qu’il soit écarté des débats mais recevable à en contester la valeur probante et, donc, à exciper de ses conditions de réalisation;

Considérant que l’invocation du protocole transactionnel au regard de la date des faits et du caractère accessoire des reproductions et représentations s’analyse en réalité non en une prétention mais en un moyen;

Considérant que ces développements constituent donc des moyens qui, en application de l’article 563 du code de procédure civile, peuvent être invoqués pour la première fois en cause d’appel ;

Considérant que le principe de la concentration des moyens n’interdit nullement à une partie d’invoquer des moyens nouveaux en cause d’appel, s’agissant d’une même instance;

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Considérant que l’appelant n’a pas violé le principe de l’estoppel en invoquant des moyens nouveaux alors qu’il contestait, au fond, devant le tribunal, le mérite des demandes formées par l’intimé ;

Considérant, par conséquent, que les moyens développés par le Rassemblement national sont recevables ;

Sur le fond

Considérant que la titularité des droits de Mine A sur l’œuvre dont la reproduction est critiquée et l’originalité de celle-ci ne sont pas contestées ;

Sur les faits constatés par Maître E le 17 février 2016

Considérant que Maître E a constaté la reproduction de l’affiche litigieuse sur le site du Front national en arrière-plan d’une vidéo d’une conférence de presse de Mme K tenue le 27 mai 2014;

Considérant qu’il a également constaté que cette reproduction apparaissait sur le site du Front national de La Réunion ;

Considérant, enfin, qu’il a relevé son existence sur la page Facebook de la fédération du Pas de Calais du Front national illustrant une réunion tenue le 4 mars

2015 et une «galette des rois» en date du 26 janvier 2015;

Considérant que les deux photographies sur la page Facebook sont extraites d’un «fil»> d’images et de discussions qui comporterait plusieurs centaines de pages Mais considérant qu’aucune disposition ou aucune considération tirée de la nécessité d’une administration loyale de la preuve n’imposent à l’huissier de reproduire l’intégralité des pages de ce «fil» ;

Considérant que Maître E n’était nullement tenu de faire état dans son constat de ces pages; que sa présentation ne laisse pas accroire que l’affiche apparaît de manière centrale à la première consultation du site ;

Considérant, d’une part, que Maître E a décrit précisément ses démarches lui ayant permis d’établir son constat ;

Considérant, d’autre part, que ses constatations elles-mêmes ne sont pas contestées ; que la réalité de la mise en ligne de la reproduction, y compris sur le site Facebook de la fédération du Pas de Calais, n’est pas déniée ;

Considérant que ce constat démontre donc que l’affiche litigieuse a été reproduite sur les sites mentionnés ; que Mme A rapporte ainsi la preuve de cette reproduction;

Sur le protocole

Considérant que Maître E a constaté que l’affiche litigieuse figurait en arrière-plan de la première image fixe de la vidéo de la conférence de presse tenue par la présidente du Front national le 27 mai 2014;

Considérant que cette conférence de presse est antérieure au protocole d’accord;

Mais considérant que le constat effectué par Maître E démontre qu’à la date du constat, la reproduction était toujours visible sur le site du Front national;

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Considérant qu’il résulte des termes du protocole qu’il n’interdit pas seulement au Front national d’utiliser cette affiche pour de nouvelles échéances électorales mais qu’il vise toute «diffusion» de l’affiche litigieuse ; qu’il ne subordonne pas cette interdiction à une nouvelle mise en ligne ;

Considérant qu’il résulte également des propres énonciations du protocole d’accord que la somme de 30.000 euros répare le «préjudice d’ores et déjà causé» ;

Considérant que cette somme ne répare donc pas le préjudice causé par l’utilisation ultérieure de cette reproduction soit par la persistance de sa diffusion sur le site du Front national après la conclusion du protocole ; qu’il sera rappelé, au surplus, que le protocole rappelle que le Front national s’est engagé à interrompre sa diffusion;

Considérant ainsi, d’une part, que la diffusion ultérieure de l’affiche – quelle que soit sa date de mise en ligne-caractérise de nouveaux actes de contrefaçon et, d’autre part, que la réparation du préjudice causé par cette diffusion postérieurement à la conclusion du protocole peut être sollicitée ;

Considérant que l’action diligentée par Mme A ne se heurte donc pas aux dispositions du code civil invoquées ;

Considérant que la vidéo du 27 mai 2014, comprenant l’image fixe sur laquelle est reproduite l’affiche, est à la disposition du public ; que toute personne pouvait en prendre connaissance lors du constat de Maître E ; qu’elle est ainsi diffusée auprès d’un public nouveau non pris en compte lors du protocole ;

Considérant qu’elle ne constitue donc pas le même acte de publication que celui réparé dans le cadre du protocole transactionnel ;

Considérant que l’action diligentée par Mme A ne se heurte dès lors pas aux dispositions du code de la propriété intellectuelle et de la directive invoquées ;

Sur la nature accessoire de la représentation de l’affiche

Considérant que sur les diffusions relevées par Maître E sur le site Facebook, l’affiche apparaît en arrière-plan de manifestations et, sur celle constatée sur le site de la fédération de La Réunion, parmi d’autres visuels ;

Considérant, s’agissant du site Facebook, que cette affiche a été utilisée lors d’une réunion derrière les candidats du parti et lors d’une «galette des rois» ; que plusieurs personnes étaient présentes et ces événements accessibles au public ainsi qu’il résulte des mentions portées sur les clichés ; que ces événements étaient publics ;

Considérant qu’il ressort de l’emplacement de ces affiches sur les photographies prises par Maître E qu’elles n’ont nullement un caractère accessoire; qu’elles ont, au contraire, été délibérément placées derrière les candidats ou l’organisateur de la «galette des rois» pour la présentation des candidats ;

Considérant qu’elles ne sont nullement accessoires ;

Considérant, s’agissant du site de la fédération de La Réunion, que l’affiche figure certes parmi d’autres visuels mais de manière délibérée et nettement distincte ; qu’elle n’est pas accessoire étant précisé que l’impression écran a réduit ses dimensions ;

Considérant, enfin, que la reproduction n’est pas davantage un accessoire sur le site du Front national;

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Sur les conséquences

Considérant que ce constat dressé par Maître E démontre donc l’existence d’actes de contrefaçon commis par l’appelante au préjudice de l’intimée ;

Sur les actes constatés par Maître E les 13 et 16 novembre 2017

Considérant qu’il ressort du constat dressé par Maître E les 13 et 16 novembre 2017 que la reproduction apparaît également sur les sites des fédérations départementales du Front national des départements de la Loire, de la Vienne, des Landes et de la Corrèze ;

Considérant que l’huissier n’était pas tenu, conformément aux développements ci-dessus, afin de respecter son devoir de loyauté, de reproduire le contenu de toutes les pages Web d’où sont tirées ces photographies ;

Considérant qu’il a eu accès, comme tout particulier, à des pages d’archives; que son constat démontre que toute personne peut accéder à ces pages ;

Considérant qu’il ne sera donc pas retiré des débats ;

Considérant que, par ce constat, Mme A rapporte la preuve de l’exploitation, sur ces sites, de l’affiche litigieuse et, donc, d’actes de contrefaçon commis par l’appelant ;

Sur les actes de contrefaçon commis sur d’autres sites de fédérations départementales

Considérant que Mme A n’a pas fait constater ces reproductions alléguées par acte d’huissier de justice ;

Considérant que la preuve d’actes de contrefaçon peut être apportée par tous moyens ; que Mme A peut donc exciper de captures d’écran et d’attestations; Mais considérant qu’il appartient à la juridiction d’apprécier la force probante des éléments de preuve fournis par les parties;

Considérant qu’en l’espèce, les circonstances des captures d’écran, dont certaines ne comportent pas de dates, sont inconnues; que les précautions prises pour s’assurer de leur date et de leur contenu ne sont pas indiquées ; que les attestations versées aux débats par Mme A, mêmes complétées en cause d’appel, sont trop imprécises pour établir l’intégrité des pages internet ayant fait l’objet des captures d’écran ;

Considérant que, comme l’a jugé le tribunal, ces pièces sont insuffisantes à démontrer l’existence des actes de contrefaçon;

Sur les actes de contrefaçon commis par des autocollants

Considérant que Mme A invoque des autocollants au nom du Front national commercialisés sur le site «propagande frontnational.world press.com>» ;

Considérant que M. D, agent d’C, a, ainsi, commandé auprès de cet éditeur des autocollants dont l’un d’eux comporte la reproduction de la sculpture litigieuse ;

Considérant que l’éditeur du site a indiqué qu’il ignorait que le Front national ne disposait pas de l’autorisation requise ;

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Considérant, toutefois, qu’il ne précise pas, et encore moins ne justifie, que le Front national lui a adressé ce matériel de propagande ;

Considérant que ces pièces sont insuffisantes à démontrer que le site précité est lié au Front national et que celui-ci est à l’origine de la diffusion de l’autocollant et de sa mise en vente ;

Considérant que le jugement sera confirmé de ce chef;

Sur le préjudice subi

Considérant que, selon l’article L. 331-1-3 du code de la propriété Intellectuelle "Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée :

2° Le préjudice moral causé à celte dernière

3° et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits, Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative le sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé I 'autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte, Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée»> ;

Considérant que Mme A est donc en droit de solliciter une indemnisation forfaitaire ;

Considérant que, comme l’a jugé le tribunal, il convient de prendre en compte la forte notoriété de l’auteur dont l’œuvre est banalisée par son utilisation sans son autorisation à des fins de propagande politique ;

Considérant qu’ont été retenus les actes de contrefaçon constatés par les deux procès-verbaux de Maître E soit, également, des faits postérieurs au jugement;

Considérant qu’au regard de l’ensemble de ces éléments, l’atteinte aux droits patrimoniaux sera indemnisée par le versement d’une somme totale de 30.000 euros;

Considérant qu’il convient également de prendre en compte l’atteinte aux droits moraux résultant de l’absence de mention du nom de l’auteur et de la diffusion de l’oeuvre par un parti politique ne correspondant pas à ses idées ; que cette atteinte sera indemnisée par l’allocation d’une somme de 35.000 euros ;

Sur les autres demandes

Considérant que le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Considérant que le Rassemblement national devra payer une somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel ; que, compte tenu du sens de cet arrêt, sa demande aux mêmes fins sera rejetée ;

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PAR CES MOTIFS

La Cour statuant CONTRADICTOIREMENT, par mise à disposition et en dernier ressort,

DÉCLARE irrecevable la demande tendant à écarter des débats le constat de Maître E en date du 17 février 2016,

REJETTE les autres fins de non recevoir,

INFIRME le jugement en ce qu’il a condamné l’association Front national à payer à Mme Y A épouse X à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices les sommes de :

20.000 euros au titre de l’atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur, 20.000 euros au titre de l’atteinte au droit moral de l’auteur,

Statuant de nouveau de ces chefs :

CONDAMNE l’association Rassemblement national, aux droits de

l’association Front national, à payer à Mme Y A épouse X à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices les sommes de :

30.000 euros au titre de l’atteinte aux droits patrimoniaux d’auteur, 35.000 euros au titre de l’atteinte au droit moral de l’auteur,

Y ajoutant :

CONDAMNE l’association Rassemblement national à payer à Mme Y A épouse X la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE les demande plus amples ou contraires,

CONDAMNE l’association Rassemblement national aux dépens,

AUTORISE Maître P à recouvrer directement à son encontre ceux des dépens qu’il a exposés sans avoir reçu provision;

- prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

- signé par Monsieur I PALAU, président, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Versailles, 26 mars 2019, n° 17/07461