Cour de cassation, Chambre civile 3, 29 novembre 2018, 17-23.058, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Seules les stipulations d’une clause d’indexation qui créent la distorsion prohibée par l’article L. 112-1 du code monétaire et financier sont réputées non écrites.

Viole ce texte, une cour d’appel qui répute non écrite en son entier une clause d’indexation qui ne prévoit la prise en compte d’une période de variation indiciaire supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision que pour un premier ajustement et qui constate que les périodes de référence suivantes avaient la même durée

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

CIV.3

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 29 novembre 2018

Cassation partielle

M. ECHAPPÉ,, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 1092 FS-P+B+R+I

Pourvoi n° Q 17-23.058

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société de l’Ouest, société civile, dont le siège est […],

2°/ la société Alta Orgeval, société en nom collectif, dont le siège est […],

contre l’arrêt rendu le 13 juin 2017 par la cour d’appel de Versailles (12e chambre), dans le litige les opposant à la société Go sport France, société par actions simplifiée, dont le siège est […],

défenderesse à la cassation ;

La société Go sport France a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l’appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 9 octobre 2018, où étaient présents : M. ECHAPPÉ,, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Andrich, conseiller rapporteur, M. Parneix, Mme Dagneaux, Mme Provost-Lopin, M. Barbieri, M. Jessel, conseillers, Mme Corbel, Mme Collomp, M. Béghin, M. Jariel, Mme Schmitt, conseillers référendaires, Mme Valdès-Boulouque, premier avocat général, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société de l’Ouest et de la société Alta Orgeval, de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de la société Go sport France, l’avis de Mme Valdès-Boulouque, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à la société de l’Ouest de son désistement le 3 juillet 2018 et à la société Go sports de son acceptation et de sa renonciation aux demandes dirigées contre la société de l’Ouest du 10 juillet 2018 ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 13 juin 2017), que, le 30 novembre 2012, la société Go sports, locataire d’un local, propriété de la société Alta Orgeval, a sollicité le renouvellement du bail commercial à compter du 1er janvier 2013 ; que, le principe du renouvellement acquis, les parties se sont opposées sur le montant du loyer du bail renouvelé ; qu’après avoir mis en demeure la bailleresse, la locataire a saisi le tribunal d’une demande en restitution de l’indu fondée sur la violation, par la clause d’indexation, des dispositions de l’article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que la société Go sports fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande en nullité de la clause d’indexation stipulée au bail du 26 mars 2001 ;

Attendu que, sous le couvert du grief non fondé de défaut de base légale, le moyen, qui ne tend qu’à remettre en discussion devant la Cour de cassation l’appréciation du caractère direct du rapport existant entre la nature de l’indice retenu par les parties à une convention et l’activité de l’une des parties et qui relève du pouvoir souverain des juges du fond, ne peut être accueilli ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu l’article L. 112-1 du code monétaire et financier ;

Attendu qu’en application de ce texte, est réputée non écrite toute clause d’un contrat à exécution successive, tel que le bail commercial, prévoyant la prise en compte, dans l’entier déroulement du contrat, d’une période de variation indiciaire supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision ;

Attendu que, pour dire non écrite, en son entier, la clause d’indexation du loyer, l’arrêt retient qu’elle prévoit une période de variation annuelle de l’indice de juillet 1999 à juillet 2000, supérieure à la durée de sept mois s’étant écoulée entre la prise d’effet du bail au 1er juin 2000 et la première révision du loyer au 1er janvier 2001 ;

Qu’en statuant ainsi, alors que seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée est réputée non écrite et que la clause prévoyait un premier ajustement, illicite mais ponctuel, tenant à la prise d’effet du bail en cours d’année civile, tandis que les périodes de référence suivantes avaient la même durée, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal critiquant la disposition condamnant la société de l’Ouest à verser une certaine somme en remboursement d’un trop-perçu de loyer à la société Go sports, qui, par suite du désistement de la société de l’Ouest, est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en ses seules dispositions réputant non écrite, en son entier, la clause d’indexation du loyer stipulée en page 13 du contrat de bail signé le 26 mars 2001 entre la société civile immobilière de l’Ouest, aux droits de laquelle se trouve aujourd’hui la société en nom collectif Alta Orgeval et la société par actions simplifiée Go sport France et condamnant la société en nom collectif Alta Orgeval à payer à la société par actions simplifiée Go sport France la somme de 191 784,66 euros TTC, avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 19 avril 2016, en remboursement du trop perçu de loyer, l’arrêt rendu le 13 juin 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société Go sports aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Go sports, la condamne à payer à la société Alta Orgeval la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf novembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société de l’Ouest et la société Alta Orgeval.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR infirmé le jugement et, statuant à nouveau, d’AVOIR « réputé non écrite la clause d’indexation du loyer » stipulée au bail conclu le 26 mars 2001 entre la Société de l’Ouest et la société Go sport France, d’AVOIR condamné la Société de l’Ouest à payer à la société Go sport France la somme de 2 625 945,52 € TTC, avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 19 mars 2013, en remboursement d’un prétendu trop-perçu de loyer, et d’AVOIR condamné la société Alta Orgeval à payer à la société Go sport France la somme de 191 784,66 € TTC, avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 19 avril 2016, en remboursement d’un prétendu trop-perçu de loyer ;

AUX MOTIFS QUE le bail signé le 26 mars 2001 comporte, en page 13, une clause « Indexation – Révision du loyer », ainsi rédigée : « Le loyer afférent à l’immeuble ci-dessus désigné variera proportionnellement à l’indice national du bâtiment BT01 (tous corps d’état) publié mensuellement au journal officiel. Le réajustement du loyer se fera en vertu de la présente clause chaque année le premier janvier. L’indice de référence, chaque année, sera celui du mois de juillet de l’année précédente. Pour la première révision, l’indice de base sera celui du mois de juillet 1999. La révision du loyer au 1er janvier de l’année N sera calculée sur la variation de l’indice BT01 de juillet de l’année N-1 sur celui de l’année N-2. Dans le cas où la variation de l’indice serait négative, le loyer de l’année précédente serait maintenu pour l’année à courir. L’indexation jouera de plein droit sans qu’il soit besoin d’une notification préalable avec référence à l’indice correspondant de l’année précédente, la révision jouant sur une année entière. Si, au cours du bail ou de l’occupation des lieux, la publication de cet indice devait cesser, il serait fait application de l’indice de substitution ou à défaut, de celui le plus voisin parmi ceux existant alors. Il est précisé que la présente clause constitue une indexation conventionnelle et ne se réfère pas à la révision triennale prévue par les articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953. La présente clause d’indexation constitue une clause essentielle et déterminante, sans laquelle le bailleur n’aurait pas contracté. En conséquence, sa non-application partielle ou totale pourra autoriser le bailleur et lui seul à demander la résiliation du bail sans indemnité » (…) ; que, sur l’inadéquation des indices de calcul, la société Go sport France sollicite l’illicéité de la clause d’indexation stipulée au bail à raison de l’inadéquation des indices de calcul, l’indice de base pris en compte étant, selon elle, trop reculé, en violation de l’alinéa 2 de l’article L.112-1 du code monétaire et financier ; qu’elle fait valoir que la prise d’effet du bail signé le 26 mars 2001 est au 1er juin 2000, alors que la révision annuelle du loyer est prévue au 1er janvier, la première révision intervenant le 1er janvier 2001, soit seulement 7 mois après la prise d’effet du bail, l’indice de base retenu étant celui du mois de juillet 1999, ce qui crée une distorsion se perpétuant tout au long du bail ; que la SCI de l’Ouest plaide l’erreur matérielle des parties lors de la première indexation, ajoutant que toutes les indexations ultérieures intervenues à compter du 1er janvier 2002 ont bien été réalisées selon une période de 12 mois en appliquant des indices séparés par une année ; que cependant, la SCI de l’Ouest ne saurait raisonnablement plaider une erreur matérielle, dont elle ne soumet d’ailleurs pas à la cour le correctif qu’il conviendrait de lui apporter, alors que la clause d’indexation du loyer stipulée au bail a prévu, en violation des dispositions d’ordre public de direction du deuxième alinéa de l’article L.112-1 du code monétaire et financier, une période de variation de l’indice annuelle (de juillet 1999 à juillet 2000) supérieure à la durée de sept mois s’étant écoulée entre la prise d’effet du bail au 1er juin 2000 et la première révision du loyer au 1er janvier 2001, de sorte que la cour, réformant en cela le jugement entrepris, dira la clause d’indexation réputée non écrite en son entier ;

1°) ALORS QUE seule est réputée non écrite, aux termes de l’article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier, la clause d’indexation d’un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant « entre chaque révision » ; qu’en retenant que la clause d’indexation litigieuse aurait été réputée non écrite en son entier, dès lors que la période de variation de l’indice, du mois de juillet 1999 au mois de juillet 2000, avait été supérieure à la durée de sept mois écoulée entre « la prise d’effet du bail », le 1er juin 2000, et « la première révision » du loyer, le 1er janvier 2001, quand il résultait de ses propres constations que cette période, de sept moins, ne s’était pas donc écoulée entre deux révisions, la cour d’appel a violé l’article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier ;

2°) ALORS QU’en toute hypothèse, la clause d’indexation d’un contrat à exécution successive n’est réputée non écrite, en application de l’article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier, que dans la mesure où elle prévoit la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision ; qu’il résulte des propres constatations de l’arrêt que, si l’application par les parties, dès le 1er janvier 2001, des stipulations du bail régissant la première révision, avait certes conduit alors, mais alors seulement, à la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée écoulée depuis la prise d’effet du contrat, le 1er juin 2000, les clauses prévoyant que le loyer serait révisé chaque année en fonction de la variation de l’indice national du bâtiment au cours d’une même période d’une année, du mois de juillet de « l’année N-2 » au mois de juillet de « l’année N-1 », quant à elles, ne prévoyaient donc pas, pour l’ensemble des révisions ultérieures, la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision ; qu’en retenant, néanmoins, que « la clause d’indexation » aurait été réputée non écrite « en son entier », et non, seulement, en ses stipulations régissant l’indexation lors de la première révision, la cour d’appel a violé l’article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier ;

3°) ALORS QU’en tout état de cause, le seul fait qu’une clause soit réputée non écrite n’affecte pas les autres clauses d’une convention légalement formée, si elle ne présente un caractère essentiel ; qu’en se bornant à dire, purement et simplement, « la clause d’indexation réputée non écrite en son entier », sans rechercher si les stipulations du contrat régissant la première révision, en ce qu’elles prévoyaient qu’elle interviendrait le 1er janvier et que l’indice de base serait alors celui du mois de juillet 1999, présentaient un caractère essentiel qui, seul, aurait pu justifier que les autres clauses, régissant l’ensemble des révisions ultérieures en conformité avec les dispositions de l’article L. 112-1, alinéa 2, du code monétaire et financier, aient pu, en conséquence, être aussi déclarées non écrites, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte et de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné la société de l’Ouest à payer à la société Go sport France la somme de 2 625 945,52 € TTC, avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter du 19 mars 2013, en remboursement d’un prétendu trop-perçu de loyer ;

AUX MOTIFS QUE, sur la restitution des sommes réglées en application de la clause d’indexation, en sanction du caractère non écrit de la clause d’indexation, la société Go sport France demande le remboursement des sommes payées au-delà du montant du loyer fixé au bail, avec capitalisation des intérêts, selon le tableau de calcul inséré dans ses conclusions et les pièces produites, soit 2 625 945,52 € TTC pour la SCI de l’Ouest, jusqu’au 31 mars 2016, et 191 784,66 € TTC, à parfaire des prochaines indexations payées, pour la SNC Alta Orgeval, depuis le 1er avril 2016 ; que les intimées, qui lui opposent vainement la licéité de la clause d’indexation, entendent voir débouter la société Go sport France de sa demande en remboursement du fait de l’acquiescement à l’application de la clause litigieuse que son paiement aurait constitué, puisqu’elle n’a contesté cette clause qu’à partir du 19 mars 2013, avec mauvaise foi, 12 ans après la signature du bail ; que cependant, l’illicéité intrinsèque de la clause d’indexation, contraire à l’ordre public de direction, institué par le code monétaire et financier, ne saurait être couverte par l’application que les parties en ont faites ; qu’elles soulèvent, à titre infiniment subsidiaire, la prescription quinquennale applicable en matière de restitution de l’indu ; que, néanmoins, la société Go sport France leur objecte justement que l’action en répétition de l’indu qui se prescrivait par trente ans sous l’empire des dispositions de l’ancien article 2262, dans sa rédaction en vigueur jusqu’au 19 juin 2008, se voit appliquer les dispositions transitoires prévues à l’article 26 II de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, selon lesquelles : Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; qu’en introduisant une procédure par acte du 2 mai 2013, alors que le nouveau délai quinquennal de prescription qui a commencé à courir le 19 juin 2008 pour s’achever le 18 juin 2013 n’était pas écoulé, son action ne saurait être prescrite ; qu’il y a donc lieu de faire droit à l’intégralité des demandes de la société Go sport France ;

ALORS QUE selon le dernier alinéa de l’article 2277 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n°2005-32 du 18 janvier 2005, les actions en répétition des loyers et des charges locatives se prescrivent par cinq ans ; qu’il ressort des propres constatations de l’arrêt que, par acte du 2 mai 2013, la société Go sport France avait assigné la Société de l’Ouest en répétition de loyers payés depuis la première révision, le 1er janvier 2001 ; qu’il en résultait, comme le soutenait la Société de l’Ouest, que l’action en répétition, en ce qu’elle portait sur les loyers versés avant le 2 mai 2008, était prescrite ; qu’en retenant, pour condamner la Société de l’Ouest à payer à la société Go sport France la totalité des sommes dont elle demandait la répétition, au titre des loyers, que l’action en répétition de l’indu se prescrivait par trente ans sous l’empire de l’ancien article 2262 du code civil, dans sa rédaction en vigueur jusqu’au 19 juin 2008, et que le nouveau délai quinquennal, qui n’aurait commencé à courir qu’à cette date, n’aurait donc pas été écoulé lorsque la société Go sport France avait introduit son action, la cour d’appel a violé l’article 2277 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, et l’article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Go sport France.

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté la demande principale de la société Go Sport en nullité de la clause d’indexation stipulée page 13 du bail du 26 mars 2001,

AUX MOTIFS QUE

« Le bail signé le 26 mars 2001 entre la SCI de l’Ouest comporte, en page 13, une clause Indexation – Révision du loyer, ainsi rédigée :

« Le loyer afférent à l’immeuble ci-dessus désigné variera proportionnellement à l’indice national du bâtiment BT01 (tous corps d’état) publié mensuellement au journal officiel.

Le réajustement du loyer se fera en vertu de la présente clause chaque année le premier janvier.

L’indice de référence, chaque année, sera celui du mois de juillet de l’année précédente. Pour la première révision, l’indice de base sera celui du mois de juillet 1999.

La révision du loyer au 1er janvier de l’année N sera calculée sur la variation de l’indice BT 01 de juillet de l’année N-1 sur celui de l’année N-2.

Dans le cas où la variation de l’indice serait négative, le loyer de l’année précédente serait maintenu pour l’année à courir.

L’indexation jouera de plein droit sans qu’il soit besoin d’une notification préalable avec référence à l’indice correspondant de l’année précédente, la révision jouant sur une année entière.

Si, au cours du bail ou de l’occupation des lieux, la publication de cet indice devait cesser, il serait fait application de l’indice de substitution ou à défaut, de celui le plus voisin parmi ceux existant alors.

Il est précisé que la présente clause constitue une indexation conventionnelle et ne se réfère pas à la révision triennale prévue par les articles 26 et 27 du décret du 30 septembre 1953.

La présente clause d’indexation constitue une clause essentielle et déterminante, sans laquelle le BAILLEUR n’aurait pas contracté. En conséquence, sa non application partielle ou totale pourra autoriser le BAILLEUR et lui seul à demander la résiliation du bail sans indemnité".

La société Go Sport France soutient trois causes d’Illicéité de la clause d’indexation : l’inadéquation de l’indice national du bâtiment BT 01, la dénaturation de la clause d’indexation ne jouant qu’à la hausse et l’inadéquation des indices de calcul créant une distorsion tenant à un indice de base trop reculé.

2.1 – Sur l’inadéquation de l’indice national du bâtiment BT 01:

[

]

Selon l’article L. 112-2 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2001 au 1er janvier 2002, période au cours de laquelle le bail a été signé, le 26 mars 2001 : Dans les dispositions statutaires ou conventionnelles, est interdite toute clause prévoyant des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance, sur le niveau général des prix ou des salaires ou sur les prix des biens, produits ou services n’ayant pas de relation directe avec l’objet du statut ou de la convention ou avec l’activité de l’une des parties. Est réputée en relation directe avec l’objet d’une convention relative à un immeuble bâti toute clause prévoyant une indexation sur la variation de l’indice national du coût de la construction publié par l’Institut national des statistiques et des études économiques (…)

S’agissant de la relation directe de l’indice BT 01 avec le contrat de bail, la société Go Sport France soutient justement que cet indice concerne des opérations de construction, qui s’inscrivent dans un temps donné, et non la location de locaux à usage commercial, que le statut des baux commerciaux inscrit dans une longue période pour des immeubles, en principe, déjà construits. Cet indice n’est donc pas en relation avec l’objet de la convention.

L’article L. 112-2 précité du code monétaire et financier fait néanmoins une énumération alternative de la relation directe que l’indexation doit avoir avec les biens, produits ou services et cite expressément l’activité d’une des parties. Or, indépendamment de toute autre considération, notamment celle relative au code statistique des entreprises, duquel il ne saurait être tiré aucune conséquence juridique quant à leur activité réelle, les statuts de la SCI de l’Ouest mis aux débats stipulent que son objet est : l’acquisition, la propriété, la gestion, l’administration, l’exploitation par bail, location ou autrement, des immeubles ou ensemble d’immeubles que la société se propose d’acquérir ou de constituer par voie de construction sur terrain à acquérir ou de constituer par voie de construction sur terrain à acquérir.

Contrairement à ce qu’affirme la société Go Sport France, les termes constituer par voie de construction donnent à la SCI de l’Ouest un statut de constructeur, cet objet n’impliquant pas qu’elle a nécessairement recours à des tiers pour procéder à ces constructions.

Confirmant le jugement sur ce point, la cour dira donc que l’indice du bâtiment BT 01 est en relation directe avec l’activité de la SCI de l’Ouest et a donc été licitement choisi pour l’indexation du loyer » (arrêt p.9 à 12)

ALORS QUE pour apprécier la validité de la clause d’indexation au regard de l’existence d’une relation directe entre l’indice de référence et l’objet du statut ou de la convention ou avec l’activité de l’une des parties, il convient de procéder à un examen de l’activité réellement exercée par celle-ci ; que dans ses écritures d’appel, la société Go Sport soutenait, à l’appui de sa démonstration dénonçant l’absence de relation directe entre l’indice BT 01 et l’activité réellement exercée par le bailleur, qu’en aucun cas celui-ci ne pouvait être regardé comme un constructeur, dès lors que bien au contraire, la SCI de l’Ouest était susceptible d’agir en tant que maître de l’ouvrage lié par contrat avec des constructeurs et qu’elle se présentait auprès des administrations comme exerçant une activité de gestion immobilière, ce qui ressortait de son choix de classification au regard de la Nomenclature des Activités Françaises ainsi que de l’extrait K Bis versé aux débats (conclusions d’appel de la société Go Sport signifiées le 8 mars 2017, p. 12 à 14) ; qu’en se bornant, pour admettre l’existence d’une relation directe entre l’activité de la SCI de l’Ouest et l’indice BT 01, à se référer à la seule mention des statuts de cette SCI, décrivant son objet social comme « l’acquisition, la propriété, la gestion, l’administration, l’exploitation par bail, location ou autrement, des immeubles ou ensemble d’immeubles que la société se propose d’acquérir ou de constituer par voie de construction sur terrain à acquérir », sans procéder à aucun examen de l’activité effectivement exercée par le bailleur, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 112-2 du code monétaire et financier.

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