Cour d'appel de Bordeaux, 13 février 2014, n° 12/06841

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 13 févr. 2014, n° 12/06841
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 12/06841
Décision précédente : Tribunal d'instance de Bordeaux, 30 octobre 2012, N° 10/04788

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION B


ARRÊT DU 13 FEVRIER 2014

(Rédacteur : Madame Catherine FOURNIEL, Président)

N° de rôle : 12/06841

Madame X G A

c/

Monsieur D, J Z

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 31 octobre 2012 (R.G. 10/04788) par le Tribunal d’Instance de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 11 décembre 2012,

APPELANTE :

Madame X G A, née le XXX à XXX, de nationalité italienne, cadre commercial, demeurant XXX

Représentée par Maître Caroline SALVIAT, Avocat au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉ :

Monsieur D, J Z, né le XXX à XXX, de nationalité française, XXX

Représenté par la S.C.P. Annie TAILLARD et Valérie JANOUEIX, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître Christine CHAMBOUX-EVAIN, substituant la S.C.P. AD LITEM, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 4 décembre 2013 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Catherine FOURNIEL, Président, chargée du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président,

Madame Catherine FOURNIEL, Président,

Madame Catherine COUDY, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Selon acte authentique en date du 17 novembre 2009, M. D Z a vendu à Mme X A un immeuble situé XXX à XXX, moyennant le prix de 169.000 euros.

Mme A, exposant qu’elle avait entrepris des travaux d’agrandissement et avait découvert à cette occasion la présence d’une cuve à fuel d’une capacité de 6000 litres et de plus de trois mètres de longueur, enterrée à la sortie immédiate de l’immeuble, du côté où elle avait projeté d’agrandir la cuisine, et que la présence de cette cuve constituait un vice caché, a fait assigner son vendeur, sur le fondement des articles 1641 et 1644 du code civil en paiement de la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice, et de celle de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Suivant jugement en date du 31 octobre 2012, le tribunal d’instance de Bordeaux, considérant que les conditions de mise en oeuvre de la garantie des vices cachés n’étaient pas réunies, a débouté Mme A de l’intégralité de ses demandes, y compris celle fondée sur l’article 700 du code de procédure civile, a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire, rejeté la demande de M. Z sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et condamné Mme A aux dépens.

Mme X A a interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 11 décembre 2012 dont la régularité et la recevabilité n’ont pas été discutées.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 19 novembre 2013, elle demande à la cour de :

— dire et juger que la clause de l’acte sous seing privé par laquelle elle s’interdit de réaliser des travaux nécessitant un permis de construire ou une autorisation de travaux, sera écartée comme étant contraire à la volonté des parties, en faisant valoir que ses projets d’agrandissement étaient connus du vendeur, qu’en souhaitant agrandir sa maison elle ne lui a pas donné de destination particulière, et que la clause litigieuse est une clause de style mentionnée par le notaire uniquement parce qu’elle ne souhaitait pas ajouter une condition suspensive relative à l’obtention d’un permis de construire ;

— dire et juger qu’elle est fondée à obtenir la condamnation de M. Z à lui payer la somme de 10.000 euros en application de la garantie des vices cachés, en faisant observer que M. Z lui a toujours indiqué que l’immeuble était chauffé au gaz, ce que le diagnostiqueur technique a bien précisé, que la cuve à fuel était bien abandonnée, et contenait encore du fuel, qu’elle a du faire procéder à la vidange, au dégazage et au retrait de cette cuve afin de sécuriser ses travaux, que la présence de cette cuve dont il n’existait aucun signe apparent a rendu le terrain inconstructible, que le vendeur en connaissait l’existence de sorte que la clause de non garantie des vices cachés n’a pas vocation à s’appliquer, et qu’outre les frais de remise en état qu’elle a dû assumer, elle a subi un préjudice de jouissance lié au retard de plus de deux mois dans la livraison de son bien ;

— condamner M. Z aux entiers dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à une indemnité de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et le débouter de toutes ses demandes plus amples.

Dans ses dernières écritures remises le 12 juillet 2013, M. Z conclut :

— à titre principal à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, en soutenant que la présence d’un cuve à fuel enterrée dans le jardin, servant à l’alimentation d’une chaudière à fuel installée dans le garage et qui fonctionne parfaitement, ne constitue pas un vice rendant l’immeuble impropre à sa destination, mais permet au contraire de chauffer l’ensemble de l’immeuble à moindre coût, et de remplacer le chauffage au gaz installé à la demande de l’ancienne locataire, que la cuve n’empêche pas d’utiliser le jardin,

que Mme A ne lui a jamais spécifié avant la vente son intention de faire réaliser des travaux d’agrandissement de la maison sur le jardin, que la clause contenue dans l’acte sous seing privé de vente n’est pas contraire à la loi, que Mme A n’a effectué aucune déclaration de travaux à la mairie, que l’action de dépollution n’était pas obligatoire en l’espèce, que la présence de la cuve était parfaitement apparente et décelable par l’acquéreur, et que la clause de non garantie des vices cachés doit recevoir application ;

— à titre subsidiaire, la limitation de sa condamnation à la somme de 2.948,73 euros, correspondant au montant des travaux de dégazage et de d’enlèvement de la cuve.

— en tout état de cause, de condamner Mme A à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP Taillard-Janoueix.

* * *

MOTIFS DE LA DECISION

L’article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.

L’article 1642 du même code précise que le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même.

L’acte authentique de vente signé par les parties le 17 novembre 2009 porte sur une maison à usage d’habitation élevée sur terre-plein d’un simple rez de chaussée de 4 pièces principales avec jardin, dépendance à usage de garage, d’une surface de 05 a 31 ca.

Il n’y est pas mentionné que l’acquéreur entend faire des travaux d’agrandissement de la cuisine sur une partie du jardin, et dans l’acte sous seing privé de vente du 25 juin 2009 l’acquéreur déclare qu’il n’envisage pas de changer la destination de l’immeuble ni de réaliser des travaux nécessitant un permis de construire ou une autorisation de travaux.

M. Z ne conteste pas avoir été informé de ce que Mme A entendait réaliser des travaux de rénovation de l’immeuble, mais affirme que le projet d’agrandissement de la maison sur le jardin n’avait pas été porté à sa connaissance.

Dans les courriers adressés par le vendeur à son notaire le 19 février et le 26 mars 2010, il est fait état de l’intention de Mme A d’effectuer 'd’importants travaux dans le pavillon'.

Les photographies versées aux débats, mises sur le site de l’agence Orpi, font apparaître la présence dans le garage d’une chaudière à fuel, et d’autres photographies montrent la présence dans le jardin d’une plaque en fonte d’assez grande dimension.

L’agence Orpi atteste avoir remis les clés de la maison de M. Z à Mme A et à son mari M. Y afin qu’ils puissent effectuer les devis de travaux en toute liberté avant la signature de l’acte authentique de vente, et les dates mentionnées dans cette attestation montrent que l’acquéreur a disposé de ces clés pendant plusieurs semaines.

L’appelante prétend que la chaudière à fuel n’était plus dans le garage à la date de l’acquisition.

En toute hypothèse la présence d’une chaudière à fuel dans le garage, attestée par les photographies prises par l’agence immobilière, et celle d’une plaque en fonte dans le jardin n’étaient pas pour un acquéreur profane des éléments suffisamment révélateurs de l’existence d’une cuve destinée à alimenter la chaudière, observation faite qu’il ne ressort pas des pièces produites que cette chaudière était de façon apparente raccordée à la cuve enterrée, et que la maison était équipée d’ un système de chauffage au gaz.

M. Z ne démontre pas que la cuve de fuel était utilisée et alimentait une chaudière elle même en état de fonctionnement.

Il convient donc de considérer que Mme A ne pouvait pas se convaincre par elle même de la présence de cette cuve.

Selon l’article 28 de l’arrêté du 1er juillet 2004 fixant les règles techniques et de sécurité applicables au stockage de produits pétroliers dans les lieux non visés par la législation des installations classées ni la réglementation des établissements recevant du public, tout abandon (définitif ou provisoire) d’un réservoir doit faire l’objet de dispositions conduisant à éviter tout risque de formation de vapeurs :

— vidange, dégazage et nettoyage ;

— comblement d’un réservoir ou retrait de celui-ci.

L’entreprise qui intervient dans ce cadre fournit un certificat à l’utilisateur garantissant la bonne exécution des opérations d’inertage citées ci-dessus.

Si l’abandon est consécutif à la modification de l’installation de chauffage, il appartient à l’entreprise intervenante de respecter ces dispositions.

En l’espèce il apparaît que la cuve à fuel litigieuse était à tout le moins provisoirement abandonnée, puisque la maison vendue disposait d’un chauffage au gaz, sur lequel a porté le diagnostic technique, et que la preuve du fonctionnement d’un chauffage au fuel au moment de la vente n’est pas rapportée.

L’existence d’une cuve enterrée d’une capacité de 5000 litres contenant encore du fuel, avec les risques de pollution qu’elle induit, justifiant les dispositions prises par l’arrêté susvisé, et gênant la libre utilisation de la partie du jardin située au -dessus, constitue un défaut diminuant tellement l’usage du bien que l’acquéreur ne l’aurait pas acquis aux mêmes conditions s’il l’avait connu.

Mme A réclame la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice.

Il résulte des écritures de M. Z qu’il connaissait la présence de cette cuve dans le sous-sol de son jardin, de sorte qu’il ne peut se prévaloir de la clause de non garantie des vices cachés insérée dans l’acte authentique de vente.

Dès lors qu’il connaissait le vice de l’immeuble, il est tenu en application de l’article 1645 du code civil de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

Mme A produit des factures non contestées des travaux de dégazage pour neutralisation de la cuve, de vidange, de dégagement de la cuve, de remblais , découpe de la cuve et d’enlèvement et mise en décharge d’un montant total de 2.948,73 euros TTC.

Elle verse également aux débats un devis estimatif des végétaux détruits du fait de l’enlèvement de la cuve, pour un montant de 1.030 euros, et une estimation de la main d’oeuvre, du nivellement par mini-pelle et de la plantation des végétaux à la somme de 1.320 euros.

Elle ne justifie cependant par aucun constat objectif de la présence des végétaux énumérés dans ce devis, et en tout état de cause la végétation existante aurait été au moins en partie détruite dans le cadre des travaux d’extension de la maison qui devaient être réalisés à cet endroit.

Les frais de remblaiement sont inclus dans la facture relative au dégagement de la cuve.

Aucune indemnisation ne sera donc accordée au titre de la remise en état du terrain.

La société Claire Travaux atteste que les travaux d’agrandissement de la maison démarrés le 4 janvier 2010 ont été stoppés durant un mois et demi à la suite de la découverte de la cuve à mazout.

La présence de cette cuve, la nécessité de faire procéder à son enlèvement, et le retard consécutif apporté à la réalisation du projet d’extension de la maison, ont été source de désagréments pour Mme A, qui ne démontre pas cependant que la maison existante était totalement inhabitable, et qu’elle a été dans l’obligation d’assumer de ce fait des frais de relogement.

Le préjudice résultant de l’ensemble des perturbations subies par l’appelante sera indemnisé par l’allocation de la somme de 2.000 euros.

Mme A ne justifie pas d’un autre poste de préjudice indemnisable.

Les dommages et intérêts dûs à Mme A par M. Z seront donc fixés à la somme totale de 4.948,73 euros.

Il apparaît équitable d’allouer à Mme A la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

M. Z qui succombe supportera les dépens de première instance et d’appel.

* * *

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau ;

Condamne M. D Z à payer à Mme X A la somme de 4.948,73 euros en indemnisation du préjudice résultant du vice caché qui affectait l’immeuble objet de la vente du 17 novembre 2009 ;

Le condamne également à payer à Mme A la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne M. D Z aux dépens de première instance et d’appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Signé par Louis-Marie Cheminade, président, et par Marceline Loison, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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Cour d'appel de Bordeaux, 13 février 2014, n° 12/06841