Cour d'appel de Lyon, 6ème chambre, 4 mars 2021, n° 19/06031

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 19/06031 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MR4C

Décision du

Tribunal d’Instance de SAINT ETIENNE

du 16 avril 2019

RG : 1117001379

X

K

C/

J

J

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6e Chambre

ARRET DU 04 Mars 2021

APPELANTS :

M. F X

né le […]

[…]

[…]

Représenté par Me Jacques DUFOUR de la SELARL DUFOUR & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 74

Mme Y K épouse X

née le […] à

[…]

[…]

Représentée par Me Jacques DUFOUR de la SELARL DUFOUR & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 74

INTIMES :

M. E J

[…]

[…]

Représenté par Me Elodie JUBAN, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

M. M J

[…]

[…]

Représenté par Me Elodie JUBAN, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 17 Novembre 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 09 Février 2021

Date de mise à disposition : 04 Mars 2021

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— G H, président

— Evelyne ALLAIS, conseiller

— Magali DELABY, conseiller

assistés pendant les débats de Sylvie GIREL, greffier

A l’audience, G H a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par G H, président, et par Sylvie GIREL, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Les époux F X et Y K (les époux X) sont propriétaires d’une maison située […]) qu’ils ont donné à bail à I B.

Le toit de cette maison est surplombé par le pignon sud de la maison voisine du […],

propriété des époux E O J et M J (les époux J) qui occupent la maison du n°12.

Le 30 septembre 2016, les époux X ont fait constater par Me P-Q A, huissier de justice à Saint Chamond, la présence d’une antenne TV de type 'râteau’ au-dessus de leur toiture, ainsi que de fils électriques sortant de l’installation au niveau du faîtage de la maison voisine.

Le 9 décembre 2016, les époux X ont fait délivrer par Me A aux époux J une sommation d’enlever l’antenne litigieuse, laquelle a été effectivement retirée par les époux J.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 22 mars 2017, Me A a demandé aux époux J de remettre les choses à l’identiques, ses clients lui ayant indiqué que l’ouverture [créée par la dépose de l’antenne] n’avait pas été rebouchée et que les fils électtiques étaient toujours présents.

Par lettre reçue par l’huissier de justice le 7 avril 2017, les époux J ont répondu qu’ils ont remis les choses à l’identique, à savoir qu’ils ont enlevé la mousse polyuréthane qui dépassait, les deux fils d’antenne restant incrusté dans leur mur sans que rien ne surplombe le toit des époux X.

Par acte d’huissier de justice du 17 octobre 2017, les époux X ont fait assigner les époux J à comparaître devant le tribunal d’instance de St Etienne.

A l’audience des débats, ils ont demandé, en principal :

— qu’il soit ordonné aux époux J de reboucher l’ouverture créée par le passage des fils électriques sur la façade, dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé l’expiration de ce délai,

— qu’il soit interdit aux époux de J de monter sur leur toit pour quelque cause que ce soit,

— qu’ils soient condamnés à leur payer 2.500 euros pour résistance abusive.

Les époux J ont excipé de la nullité de l’assignation pour défaut de base légale et, à titre subsidiaire, ont soutenu en principal le rejet des demandes adverses.

Par jugement en date du 16 avril 2019, le tribunal d’instance de St Etienne a :

— rejeté l’exception de nullité de l’assignation,

— débouté les époux X de leurs demandes au titre des troubles anormaux de voisinage, de la résistance abusive et de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné les époux X solidairement à payer aux époux J la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— et condamné les époux X solidairement aux dépens.

Les époux X ont relevé appel de cette décision par déclaration reçue au greffe de la Cour le 20 août 2019.

En ses dernières conclusions du 30 juillet 2020, les époux X demandent à la Cour ce qui suit, au visa des articles 544 et 1240 du code civil et 700 du code de procédure civile :

— faire interdiction aux époux J de circuler ou intervenir sans autorisation sur la toiture de la propriété X, ceci et pour quelque raison que ce soit,

— juger que les époux J, en circulant et en intervenant sur la toiture des époux X, ont violé l’article 544 du code civil,

— condamner les époux J à verser aux époux X une somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice que leur comportement fautif leur a causé,

— les condamner à verser aux concluants une somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner les époux J aux dépens de première instance et d’appel, dans lesquels seront compris les frais accessoires, les frais de procédure et les frais d’huissiers.

Par dernières conclusions du 14 mai 2020, les époux J demandent à la Cour de statuer comme suit, visant les articles 544 et suivants et 1240 du code civil et 700 du code de procédure civile :

— confirmer purement et simplement le jugement du tribunal d’instance de St Etienne du 16 avril 2019,

— en conséquence, débouter purement et simplement les époux X de l’ensemble de leurs demandes,

— condamner les époux X solidairement à régler aux époux J la somme de 4.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens de l’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 novembre 2020.

Il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé exhaustif de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre préliminaire, la Cour constate qu’elle n’est pas saisie d’une contestation quant à la nullité de l’assignation dépourvue de fondement juridique.

Le tribunal, prenant en compte l’évocation de problèmes de voisinage dans cet acte, a considéré que l’action était fondée sur la théorie jurisprudentielle des troubles anormaux de voisinage.

En appel, les époux X déclarent agir à la fois sur le fondement de l’article 544 du code civil protégeant la propriété et de l’article 1240 du même code relatif à la responsabilité délictuelle. Leur demande en appel, au titre des fautes reprochées à leurs voisins, ne correspond pas à leur demande indemnitaire initiale fondée sur la résistance abusive.

Il résulte des dispositions de l’article 9 de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, que l’instance ayant été introduite avant le 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de cette ordonnance, l’action se poursuit et doit être jugée conformément à la loi ancienne, y compris en appel. Les faits dénoncés remontant au premier trimestre 2016, les appelants se réfèrent donc inutilement aux dispositions nouvelles du code civil et l’action doit être examinée au regard de l’article 1382 ancien de ce code qui dispose que 'Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer'.

A l’examen des pièces versées aux débats et des écritures des parties, il apparaît que les époux X entretiennent une confusion entre deux évènements :

1/ Le sinistre de janvier 2016, occasionné par un coup de vent qui a provoqué la chute d’éléments de bois de restauration de la toiture de la maison J qui ont cassé des tuiles de la maison X.

Les appelants semblent curieusement reprocher à M. J d’être alors venu sur leur toit, à la demande du locataire M. B, pour le protéger par une bâche et arrêter ainsi des infiltrations d’eaux pluviales dans la maison.

Quant au préjudice, les époux X ont versé aux débats un devis de l’entreprise Defarge à hauteur de 715 euros validé par l’expert de la MAAF.

Les époux X ne précisent pas s’ils ont perçu cette indemnité ; les travaux ne semblent pas avoir été effectués par cette entreprise puisque M. X a remplacé lui-même des tuiles cassés avec des tuiles anciennes restées en sa possession, s’agissant d’un modèle qui n’était plus commercialisé.

Dans ces conditions, il n’est démontré aucun préjudice financier à défaut d’acquisition de tuiles de remplacement et/ou d’exposition d’un coût de main d’oeuvre.

2/ En février et mars 2016, dans le cadre des travaux de restauration de la maison De Mourra, les époux X justifient par des clichés que l’ouvrier mandaté par leur voisin pour apposer l’enduit sur le pignon était positionné avec son échelle sur leur toiture.

Ils affirment également que M. J est venu à cette occasion sur leur toit, ce qu’il conteste.

M. J a commis une faute en ne demandant pas l’autorisation des époux C pour ce fait, quand bien même ceux-ci n’auraient pas été fondés à la refuser, étant tenus à la servitude dite 'de tour d’échelle’ pour permettre la réalisation des travaux d’enduit du pignon qui nécessitaient de prendre appui sur leur toiture.

Les époux X affirment qu’à cette occasion des tuiles ont été cassées mais les attestations qu’ils versent aux débats (MM. D et Sambento) ne sont pas probantes puisqu’elles ne font que reprendre les dires de M. X. Elles ne permettent pas d’exclure que les tuiles remplacées par M. X en mars soient simplement celles cassées en janvier.

Au demeurant, le rapport de l’expert de la MAAF transmis le 21 avril 2016 relate les dires des époux X reprochant à M. J d’être venu sur leur propriété remettre en place des tuiles cassées sans faire état d’une casse de tuiles provoquée au cours des travaux de crépissage de février et mars.

Enfin, les clichés pris par Mme X montrent que l’ouvrier en train de crépir le pignon était positionné dans une zone bien localisée, les tuiles étant protégées des projections d’enduit par une bâche, sans faire ressortir de tuiles cassées.

De surcroît, l’observation précédemment faite, quant à l’absence de préjudice financier à raison du remplacement des tuiles cassées par des tuiles de réserve, vaut aussi pour ce point de litige.

En conséquence, les époux X ne démontrent pas que la venue de l’ouvrier et, éventuellement, celle de M. J pendant les travaux de février-mars 2016, ont provoqué une dégradation de leur toiture par le bris de tuiles. A supposer même que des tuiles aient été cassées à cette occasion, il n’est justifié d’aucun préjudice, les appelants restant taisants sur la suite donnée à l’intervention de leur assureur MAAF.

Par ailleurs, l’allégation des appelants d’une 'perte de jouissance de leur bien’ consécutive aux 'intrusions fautives des époux J’ sur leur toiture est sans fondement.

Les époux X ne peuvent qu’être déboutés de leur demande indemnitaire à défaut de démontration d’un préjudice effectif.

En définitive, il n’est démontré aucun abus de M. J quant au passage sur le toit de la maison X dès lors que la pose de la bâche était une mesure conservatoire dans le propre intérêt des époux X et que les travaux d’enduit du pignon nécessitaient le positionnement de l’ouvrier et de son échelle

sur leur toit. La demande visant à ce qu’il soit fait interdiction aux époux J de circuler ou intervenir sans autorisation sur la toiture de leur propriété est rejetée comme sans objet.

Le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.

Les appelants, parties perdantes, supportent les dépens d’appel, conservent la charge des frais irrépétibles qu’ils ont exposés et doivent indemniser les intimés de leurs propres frais à hauteur de 2.000 euros, en sus de l’indemnité allouée par le premier juge.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement prononcé le 16 avril 2019 par le tribunal d’instance de St Etienne,

Y ajoutant,

Condamne solidairement les époux F X et Y K aux dépens,

Condamne solidairement les époux F X et Y K à payer aux époux E et M J la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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