Cour d'appel de Metz, n° 16/00298

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, n° 16/00298
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 16/00298

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°16/00298

N° RG 15/02996


Société MANPOWER

C/

X, Société FIMACO, Société AXA FRANCE, Société AON FRANCE, CPAM DES VOSGES


Cour d’Appel de NANCY

23 Avril 2014

Tibunal des affaires de sécurité sociale des Vosges

jugement du 18 septembre 2013

Cour de cassation

Arrêt du10 septembre 2015

COUR D’APPEL DE METZ

RENVOI APRÈS CASSATION

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2016

DEMANDERESSE À LA REPRISE D’INSTANCE et INTIMEE

Société MANPOWER prise en la personne de son représentant légal

ayant siège social

XXX

XXX

et une agence

XXX

XXX

représentée par Me Laurence FOURNIER GATIER, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me

DESRIAUX, avocat au barreau de PARIS

DÉFENDERESSE À LA REPRISE D’INSTANCE et APPELANTE

XXX

XXX

XXX

représentée par Me Dorothée BERNARD, avocat au barreau d’EPINAL substitué par Me FRITSCH, avocat au barreau d’EPINAL

DEFENDERESSES A LA REPRISE D’INSTANCE et INTIMEES:

Madame A X

XXX

XXX

représentée par Me Béatrice FOUNES, avocat au barreau D’EPINAL

Société AXA FRANCE

XXX

XXX

non représentée

Société AON FRANCE

XXX

XXX

représentée par Maître Laurence FOURNIER GATIER, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me DESRIAUX, avocat au barreau PARIS

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES VOSGES

XXX

XXX

représentée par Mme THILL, munie d’un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Juin 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre, magistrat chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre

Madame Gisèle METTEN, Conseiller

Monsieur Hervé KORSEC, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MATHIS, Greffier

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Madame Clarisse SCHIRER, Présidente de Chambre, et par Madame Sylvie MATHIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

La SARL Fimaco Vosges est spécialisée dans la fabrication de matériaux de construction. Elle a son siège dans les Vosges.

M. E X, né en 1963, est embauché par la société de travail intérimaire Manpower, en son établissement de Saint Dié, par contrat prenant effet le 18 août 2008, en qualité d’ouvrier polyvalent, et mis à la disposition de la SARL Fimaco.

Le 9 septembre 2008, M. X est victime d’un accident du travail sur le site de la SARL Fimaco Vosges, et décède de ses blessures le jour même.

La caisse primaire d’assurance maladie des Vosges reconnaît d’emblée le caractère professionnel de l’accident.

Par jugement du 8 avril 2010, la chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Saint Dié condamne la SARL Fimaco Vosges à une amende de 4 000 € pour homicide involontaire dans le cadre du travail.

Mme X, agissant pour son compte et en sa qualité de représentante de ses deux enfants mineurs, entreprend de faire reconnaître la faute inexcusable de l’employeur.

Par jugement du 18 septembre 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale des Vosges a :

dit que l’accident mortel du travail survenu le 9 septembre 2008, dont M. E X a été victime, est dû à la faute inexcusable de l’employeur la S.A.S Manpower, entreprise de travail temporaire,

fixé l’indemnisation des préjudices moraux des ayants droit de M. X aux sommes suivantes :

40 000 € pour Mme A B, veuve X,

25 000 € pour sa fille, Mme Y X

25 000 € pour son fils, M. G X,

fixé au maximum la majoration de la rente servie aux ayants droit de M. X,

débouté Mme X de ses demandes relatives au préjudice économique et aux frais funéraires,

dit que la CPAM des Vosges devra faire l’avance des réparations allouées,

dit que l’accident est survenu alors que M. X avait été mis à la disposition de la société Fimaco, auteur de plusieurs manquements à ses obligations en matière de sécurité du salarié,

condamné la société Fimaco à garantir la société Manpower de toutes les conséquences financières résultant de la faute inexcusable, en ce compris le surcroît des cotisations accident du travail,

condamné la S.A.S Manpower à payer à Mme X la somme de 1 100 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

dit que la S.A.S. Manpower devra être garantie de cette condamnation par la société Fimaco,

mis la société AON hors de cause,

rejeté les autres demandes,

ordonné l’exécution provisoire du jugement.

La SARL Fimaco Vosges fait appel de ce jugement.

Par arrêt du 23 avril 2014, la chambre sociale de la cour d’appel de Nancy a :

infirmé le jugement en ce qu’il a fixé le préjudice moral de l’épouse à 40 000 € et celui des deux enfants à 25 000 €,

statuant à nouveau, dit que la faute inexcusable de la société Fimaco auprès de laquelle M. E X a été mis à disposition n’est pas la causalité adéquate du préjudice subi par M. G X et qu’en conséquence il n’y a pas lieu à indemnisation de ce préjudice à ce titre,

fixé le préjudice d’affection de Mme A B épouse X à la somme de 30 000 €,

fixé le préjudice d’affection de Mme Y X à la somme de 15 000 €,

rejeté la demande de Mme A X au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

confirmé le jugement pour le surplus.

Mme A X forme un pourvoi en cassation contre cette décision.

Par arrêt du 10 septembre 2015, la cour de cassation casse et annule, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 23 avril 2014 entre les parties par la cour d’appel de Nancy, remet en conséquence la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Metz.

La cour de cassation retient que la cour d’appel, statuant alors que la caisse de sécurité sociale, présente en première instance, n’avait pas été convoquée à l’audience des débats, a violé les articles L.452-4 et R.142-28 du code de la sécurité sociale.

Par lettre recommandée postée à une date non indiquée à la procédure, reçue au greffe le 25 septembre 2015, la Société MANPOWER saisit sur renvoi, la cour d’appel de Metz..

Par conclusions reçues au greffe le 15 décembre 2015, soutenues oralement à l’audience, la S.A.S Manpower demande à la cour de :

statuer ce que de droit sur l’indemnisation du préjudice moral subi par Mme A X et ses deux enfants,

condamner la CPAM des Vosges à lui rembourser le montant des sommes trop versées aux consorts X,

confirmer le jugement rendu le 18 septembre 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Vosges pour le surplus.

Par ces mêmes conclusions, la S.A.S. Aon France demande confirmation du jugement en ce qu’il l’a mise hors de cause.

Par conclusions reçues au greffe le 17 juin 2016, soutenues oralement à l’audience, Mme X, agissant en son nom personnel et au nom de ses deux enfants mineurs, demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Vosges et de condamner les défendeurs à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions reçues au greffe le 13 janvier 2016, soutenues oralement à l’audience, la SARL Fimaco Vosges demande à la cour de :

infirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Vosges en ce qu’il a alloué les sommes de 40 000 € et 25 000 €, respectivement à Mme A X et à sa fille, en réparation de leur préjudice moral,

ramener les montants de ces indemnisations à de plus justes proportions,

dire n’y a voir lieu à indemnisation du préjudice moral de M. G X,

confirmer le jugement pour le surplus,

dire n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

dire que les dépens seront partagés entre les parties.

A l’audience, la CPAM des Vosges déclare s’en rapporter concernant le montant des indemnisations et demande que le bénéfice de son action récursoire soit confirmé.

La S.A. AXA, régulièrement convoquée par lettre recommandée reçue le 5 janvier 2016, n’a pas comparu.

Le présent arrêt lui sera déclaré commun.

Il est renvoyé aux conclusions précitées pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties.

Sur quoi, la cour,

L’existence de la faute inexcusable de la SARL Fimaco Vosges n’est plus contestée, non plus que l’action récursoire de la CPAM des Vosges et la garantie due par la SARL Fimaco Vosges à la S.A. Manpower pour l’ensemble des conséquences financières de la faute inexcusable.

Seule reste en litige l’indemnisation des préjudices moraux des ayants droit de M. X.

Sur la mise hors de cause de la S.A.S. AON France.

La S.A.S. AON France est la filiale française de la société britannique Aon Pic, spécialisée dans le courtage d’assurance.

Elle n’est pas l’assureur de la société. Manpower, mais le courtier qui est intervenu dans la passation du contrat d’assurance avec la S.A. Axa.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a mis la S.A.S. AON hors de cause.

Sur l’indemnisation du préjudice des ayants droit de M. X.

Sur le préjudice moral de la veuve de M. X.

Mme X, née en 1971, a épousé M. X en 2003. De leur mariage est née Y X, en 2006.

Lors de l’accident du 9 septembre 2008, Mme X était enceinte du second enfant du couple, lequel est né le XXX.

Ainsi que l’ont relevé les premiers juges, les circonstances brutales dans lesquelles elle a perdu son mari, ainsi que la charge qui en est résultée pour elle, devant élever seule, au moins pour un certain temps, deux enfants, justifient la somme de 40 000 € qu’ils ont allouée.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Le préjudice moral de la fille de M. X.

Mme Y X avait deux ans et demi quand elle a perdu son père. Son préjudice moral n’est pas contesté par l’appelante, qui estime toutefois que le montant des dommages-intérêts est trop élevé.

Cependant, la somme allouée par les premiers juges, soit 25 000 €, répare entièrement et justement le préjudice subi par cette enfant, sans présenter aucun caractère excessif. Il sera confirmé.

Le préjudice moral du fils de M. X.

M. G X n’était pas encore né quand son père est décédé.

La SARL Fimaco Vosges soutient que l’enfant, qui n’était pas né au moment du décès de son père, n’a jamais eu de communauté de vie avec ce dernier, et n’a donc subi aucun préjudice d’affection du fait de la perte de son père. Elle soutient également que M. G X n’a pu souffrir de sa situation d’orphelin qu’à compter de sa naissance, ce qui est une autre cause du préjudice, qui de ce fait n’est pas une conséquence immédiate de l’accident.

Cependant, il n’est pas contesté par l’appelante que M. G X souffre de l’absence définitive de son père, qu’il ne connaîtra jamais qu’au travers des récits des tiers. Cette souffrance constitue un préjudice moral, de même qu’entre dans le préjudice moral de sa mère le fait qu’elle était enceinte au moment de l’accident et qu’elle allait devoir élever seule ses deux enfants et non sa seule fille aînée.

L’élément causal du préjudice moral de M. G X est l’accident du 9 septembre 2008 qui a généré directement l’absence de son père, peu avant sa naissance.

Ce préjudice moral actuel doit être réparé.

Le montant alloué, soit 25 000 €, qui ne présente pas de caractère excessif, sera confirmé.

Les montants alloués par les premiers juges étant confirmés, il n’y a pas lieu à répétition d’un trop-versé.

Sur les frais irrépétibles.

La S.A.S Manpower succombant à hauteur d’appel sera condamnée à payer à Mme X la somme de 1 000 € en application les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a fait application de ces mêmes dispositions au bénéfice de Mme X.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement rendu entre les parties le 18 septembre 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Vosges en toutes ses dispositions.

CONDAMNE la société Manpower à payer à Mme A B, veuve X, la somme de 1 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

DECLARE l’arrêt commun à la société. Axa France.

VU l’article R.144-10 du code de la sécurité sociale, DIT n’y avoir lieu à dépens.

Le Greffier Le Président

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