Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 31 juillet 2019, n° 16/20683

  • Sociétés·
  • Distributeur·
  • Contrat de distribution·
  • Distribution sélective·
  • Appel·
  • Tribunaux de commerce·
  • Résiliation·
  • Code de commerce·
  • Marque·
  • Réseau

Chronologie de l’affaire

Commentaires6

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Guillé Jérôme · Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

CA Paris, 31 juillet 2019, n°16/20683 La résiliation d'un contrat de distribution sélective ne peut être qualifiée en soi de pratique discriminatoire dès lors que ne pèse sur un fournisseur aucune obligation de contracter avec tout distributeur remplissant les critères de sélection. En 2008, la société Hyundai Motor France et la société Garage Richard D. ont conclu plusieurs contrats (contrat de distribution sélective de véhicules particuliers, contrat de réparateur agréé, et contrat de distribution sélective d'accessoires Hyundai) aux fins de désigner la société Garage Richard D. en …

 

Vogel & Vogel · 5 juillet 2021

Le règlement européen qui détermine notamment les conditions d'exemption des réseaux de distribution au regard du droit des ententes expire en mai 2022. La dernière consultation de la Commission clôturée le 26 mars 2021 a identifié huit questions importantes ou thèmes faisant débat, mais d'autres problèmes se posent aussi. Vous trouverez ci-joint une analyse des questions évoquées dans la consultation de la Commission qui seront déterminantes pour la rédaction du règlement et de ses lignes directrices dont le projet est attendu cet été ou à la rentrée. 1. Le règlement restrictions …

 

Vogel & Vogel · 5 juillet 2021

Le règlement européen qui détermine notamment les conditions d'exemption des réseaux de distribution au regard du droit des ententes expire en mai 2022. La dernière consultation de la Commission clôturée le 26 mars 2021 a identifié huit questions importantes ou thèmes faisant débat, mais d'autres problèmes se posent aussi. Vous trouverez ci-joint une analyse des questions évoquées dans la consultation de la Commission qui seront déterminantes pour la rédaction du règlement et de ses lignes directrices dont le projet est attendu cet été ou à la rentrée. 1. Le règlement restrictions …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 4, 31 juill. 2019, n° 16/20683
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/20683
Décision précédente : Tribunal de commerce de Pontoise, 10 décembre 2015, N° 2015F00579
Dispositif : Annule la décision déférée

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRÊT DU 31 JUILLET 2019

(n° , 13 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/20683 – N° Portalis 35L7-V-B7A-BZZTO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2015 -Tribunal de Commerce de PONTOISE
- RG n° 2015F00579

APPELANTE

SARL E D A

Ayant son siège social : […]

[…]

N° SIRET : 388 465 890 (LYON)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant : Me Anis SABRI-LEBARON, avocat au barreau de PARIS, toque : E0498

INTIMÉE

SAS HYUNDAI MOTOR FRANCE

Ayant son siège social : […]

92250 LA GARENNE-COLOMBES

N° SIRET : 411 394 893 (NANTERRE)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric X de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Ayant pour avocat plaidant : Me Joseph VOGEL de la SELAS VOGEL & VOGEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0151

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Avril 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Monsieur B C, Conseiller faisant fonction de Président, et Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur B C, Conseiller faisant fonction de Président, rédacteur,

Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée,

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère appelée d’une autre chambre afin de compléter la Cour en application de l’article R.312-3 du code de l’organisation judiciaire

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur B C dans les conditions prévues par l’article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame F G

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par B C, conseiller faisant fonction de Président, et par F G, greffier auquel la minute de la présente décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La société Hyundai Motor France (ci-après dénommé « Hyundai »), filiale du groupe Huyndai Motors, a pour activité l’importation de véhicules terrestres à moteurs neufs de marque Hyundai et de pièces de rechange dont elle a en charge le développement du réseau de distribution sélective sur le territoire français.

La société E D A (GRD) est spécialisée dans la distribution de véhicules automobiles. Elle exploite historiquement une concession Citroën à Villeurbanne.

A partir du 20 mars 2008 la société E D A est également devenue distributeur et réparateur agréé du réseau de distribution de véhicules neufs de la marque Hyundai sur une zone de chalandise situé à l’est du bassin lyonnais.

Les termes et conditions des relations commerciales entre les sociétés E D A et Hyundai étaient définis par un contrat de distribution sélective de véhicules particuliers conclu le 27 juin 2008, un contrat de réparateur agréé, et un contrat de distribution sélective d’accessoires Hyundai également du 27 juin 2008.

Par courrier du 27 juin 2012, la société Hyundai a notifié à l’ensemble de son réseau de distribution, dont la société E D A, la résiliation au 30 juin 2014, des contrats de distributeur pour la vente de véhicules neufs et d’accessoire Hyundai, et de réparateur agréé Hyundai suivant un délai de préavis de deux années.

La résiliation de l’ensemble des contrats du réseau Hyundai faisait suite à l’entrée en vigueur des règlements d’exemption CE n°303/2010 du 20 avril 2010 et CE n°461/2010 du 27 mai 2010, applicables à la distribution automobile.

Postérieurement à la résiliation des contrats intervenue le 30 juin 2014, les parties ont conclu un nouveau contrat de réparateur agréé prenant effet à compter du 1er juillet 2014. La société E D A a pu poursuivre son activité de réparateur agréé de la marque Hyundai et ses activités de vente de pièces de rechanges et d’accessoires.

Le 1er avril 2015 la société E D A a signé avec la société Central Motor Lyon, distributeur agréé de véhicules neufs de marque Hyundai, un contrat d’apporteur d’affaires Huyndai. Ce contrat a été agréé par la société Hyundai.

Par courrier du 16 septembre 2016 la société Hyundai a notifié à la société E D A la résiliation du contrat de réparateur agréé avec effet au 17 septembre 2018.

C’est dans ce contexte que par acte d’huissier du 27 juillet 2015, la société E D A a fait assigner à bref délai la société Hyundai devant le tribunal de commerce de Pontoise afin de la voir condamnée à titre principal, à conclure un nouveau contrat de distributeur et à lui payer la somme de 425 283 euros en réparation de ses agissements fautifs, subsidiairement, à lui payer la somme de 1 113 303 euros en réparation du préjudice né des circonstances abusives de la résiliation du contrat de distributeur, à titre infiniment subsidiaire à lui verser la somme de 1 113 303 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la rupture brutale des relations commerciales établies.

Dans ses conclusions déposées à l’audience du 15 octobre 2015, la société E D A a déclaré renoncer aux demandes formulées sous le visa de l’article L. 442-6,I,5° du code de commerce.

Par jugement du 11 décembre 2015, le tribunal de commerce de Pontoise a :

— débouté la société Hyundai de son exception d’incompétence au profit du tribunal de commerce de Paris,

— dit qu’il était compétent,

— débouté la société E D A de toutes ses demandes,

— condamné la société E D A à payer à la société Hyundai la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société E D A aux dépens,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par acte d’huissier du 22 janvier 2016, la société Hyundai a fait signifié le jugement du tribunal de commerce de Pontoise à la société E D A, l’acte de signification visant la cour d’appel de Versailles. Une nouvelle signification est intervenue le 14 mars 2016, faisant mention de la cour d’appel de Paris.

La société E D A a relevé appel de ce jugement devant la cour d’appel de Versailles.

La société Hyundai a soulevé l’irrecevabilité de l’appel excipant de la compétence exclusive de la cour d’appel de Paris.

Aux termes d’une ordonnance d’incident du 22 septembre 2016, la cour d’appel de Versailles a déclaré irrecevable l’appel formé contre le jugement du tribunal de commerce de Pontoise.

Le 18 octobre 2016, la société E D A a alors relevé appel du jugement devant la cour d’appel de Paris.

Par arrêt du 8 novembre 2017, la cour d’appel de Paris, sur déféré, a jugé cet appel recevable.

Vu les dernières conclusions de la société E D A , notifiées le 2 avril 2019, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des articles 1134, 1135, 1142,1147, 1382 anciens du code civil, 114, 528, 680 du code de procédure civile, L. 420-7 et R.420-3 du code de commerce, de :

In limine litis, sur la compétence exclusive de la cour d’appel de Paris,

— dire que l’appel de la société E D A devant cette cour à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Pontoise est recevable,

— se déclarer compétente pour connaître dudit appel,

In limine litis, sur la recevabilité de l’appel ,

— constater que la cour a jugé, aux termes d’un arrêt en date du 8 novembre 2017, qui n’a fait l’objet d’aucun recours, et aujourd’hui passé en force de chose jugée, l’appel interjeté par la société E D A comme étant recevable,

— dire que l’appel de la société E D A devant la cour d’appel de Paris à l’encontre du jugement rendu par le tribunal de commerce de Pontoise, le 11 décembre 2015 recevable,

— débouter la société Hyundai de sa demande d’irrecevabilité de l’appel interjeté devant la courd’appel de Paris à l’encontre du jugement,

Sur le caractère abusif des circonstances du non renouvellement du contrat de distributeur

— constater que le contrat de distribution conclu entre la société Hyundai et E D A était un contrat de distribution sélective,

— constater que la société Hyundai s’est volontairement engagée dans un processus de sélection l’obligeant à examiner avec sérieux les candidatures des candidats au renouvellement de leur contrat de distributeur, ce qui impose de vérifier que les critères ont été notifiées à tous les candidats dans les mêmes conditions,

— constater que le refus de signature d’un nouveau contrat de distributeur par la société Hyundai est intervenue sans motif et n’a pas été fondée sur le défaut de respect des critères objectifs de sélection du réseau de distributeurs Hyundai,

— constater a fortiori que la société Hyundai n’a pas engagé d’audit afin d’apprécier la conformité des installations de la société E D A aux (nouvelles) normes de commercialisation de la marque,

— constater que la société Central Motors Lyon était placée dans une situation identique à celle de la société E D A dans le cadre du processus de sélection des distributeurs du réseau de distributeurs Hyundai,

— constater que la société Hyundai a incité la société E D A a réaliser des

investissements rendus nécessaires par la mise aux normes de commercialisation de la marque, des installations de E D A,

— constater que la société Hyundai s’est faussement engagée vis à vis de la société E D A à renouveler son contrat de distributeur,

— constater que la société Hyundai a sciemment et de manière fallacieuse entretenu la société E D A dans la croyance du renouvellement de son contrat de distributeur,

— constater que la société Hyundai ne l’a a informé que le 29 avril 2014 de sa décision de ne pas renouveler le contrat de distributeur, soit deux mois avant le terme du préavis contractuel,

— dire que les circonstances de la résiliation du contrat de distributeur sont intrinsèquement abusives,

— dire que la société Hyundai a privé la société E D A de tout préavis utile à l’occasion de la résiliation de son contrat de distributeur,

— dire qu’en privant la société E D A de tout préavis utile, la société Hyundai a entravé sa reconversion, ce que devait lui permettre le préavis contractuel,

— condamner en conséquence la société Hyundai au paiement en faveur de la société E D A, d’une somme égale au montant moyen de marge brute du préavis de deux années dont elle aurait dû bénéficier, augmenté du montant non amorti des investissements engagés pour les besoins de son exploitation sous enseigne Hyundai, soit la somme de 1 113 303 euros,

— condamner la société Hyundai à verser à la société E D A une somme de

20 000 euros (vingt mille) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société Hyundai aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de la société Hyundai, notifiées le 5 avril 2019, par lesquelles il est demandé à la cour, au visa des articles L. 420-1, L. 420-7, R. 420-3 du code de commerce, 1134 ancien du code civil, 73, 75, 76, 125, 538 et 564 du code de procédure civile, de :

In limine litis

— dire que la société E D A a modifié le fondement de ses demandes qui ne sont désormais plus fondées sur le droit des ententes et les articles L. 420-1 du code de commerce mais sont exclusivement fondées, depuis ses écritures du 26 mars 2019, sur le droit commun,

— dire que la cour d’appel de Paris ne dispose dès lors plus du pouvoir juridictionnel qui lui est confié parles articles L. 420-7 et R. 420-3 du code de commerce pour statuer sur cet appel,

— dire que la cour d’appel de céans n’est pas compétente pour statuer sur un appel fondé sur le droit commun interjeté l’encontre du tribunal de commerce de Pontoise qui ne dépend pas de son ressort,

— se déclarer incompétente au profit de la cour d’appel de Versailles,

A titre principal, si l’exception d’incompétence n’est pas retenue,

— dire irrecevable l’appel de la société E D A devant la cour d’appel de Paris contre le jugement du tribunal de commerce de Pontoise, en ce qu’il est tardif,

— dire irrecevable l’appel de la société E D A devant la cour d’appel de Paris contre le jugement du tribunal de commerce de Pontoise dans la mesure où l’appel ne se fonde plus sur le droit des ententes et que rien ne justifie désormais que cet appel soit jugé par lacour d’appel de Paris qui ne dispose pas du pouvoir juridictionnel de statuer sur un appel interjeté à l’encontre d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Pontoise qui nerelève pas de son ressort,

A titre subsidiaire, si par impossible l’appel était déclaré recevable

— dire irrecevables les demandes de la société E D A fondées sur le droit commun alors que la compétence de la cour d’appel de céans est strictement conditionnée, en application des articles L. 420-7 et R. 420-3 du code de commerce, à l’existence d’un litige portant sur des pratiques anticoncurrentielles ou des pratiques restrictives de concurrence, fondement écarté par la société E D A depuis ses écritures du 26 mars 2019.

A titre très subsidiaire, si par impossible les demandes étaient déclarées recevables

— confirmer le jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 11 décembre 2015 en ce qu’il a :

* débouté la société E D A de toutes ses demandes,

* condamné la société E D A à payer à la société Hyundai la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

* déclaré la société E D A mal fondée en sa demande en paiement sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société E D A aux dépens,

— déclarer irrecevables les demandes formulées par la société E D A visant àfaire constater que le non renouvellement de contrat de distribution par la société Hyundai serait fautif en ce qu’il ne repose sur aucun critère objectif, ces demandes, fondées sur le droit des ententes, constituant des prétentions nouvelles irrecevables en appel,

— dire qu’en tout état de cause la société Hyundai n’a commis aucune faute à l’égard de la société E D A et notamment n’a commis aucune faute en ne proposant pas un contrat de distributeur Hyundai à l’issue du préavis de deux ans,

— dire que la société Hyundai a accordé un préavis de deux ans à la société E D A, conformément aux stipulations du contrat de distribution,

— dire que la société Hyundai n’a pas entretenu la société E D A dans la croyance que son contrat serait renouvelé et n’a donc commis aucune faute à ce titre,

— dire que la société Hyundai n’a commis aucune faute dans l’exécution du préavis de résiliation du contrat de distributeur Hyundai qui la liait à la société E D A,

— dire également que la société Hyundai n’a pas rompu brutalement les relations commerciales avec la société E D A,

— dire en tout état de cause que la société E D A ne justifie pas du préjudice allégué,

En tout état de cause

— débouter la société E D A de l’ensemble de ses moyens et demandes,

— condamner la société E D A à verser à la société Hyundai la somme de 30 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société E D A en tous les dépens dont distraction au profit de Maître X conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

A l’audience, la cour a sollicité des parties une note en délibéré sur le point de savoir s’il appartenait à la cour ou au conseiller de la mise en état de statuer sur l’irrecevabilité des conclusions de la société D A, soulevée par la société Hyundai devant la cour.

Les parties ont chacune signifié sur le RPVA, une note en délibéré le 10 mai 2019 après que la cour leur a demandé à l’audience de se prononcer sur la compétence de la cour pour statuer sur l’irrecevabilité des conclusions de la société D A.

SUR CE, LA COUR

Sur la compétence de la cour, la recevabilité de l’appel et la recevabilité des conclusions de la société E D A

La société Hyundai expose que jusqu’à ses dernières conclusions, la société E D A fondait ses demandes sur le droit des ententes ce qui justifiait alors que l’appel soit jugé devant la cour d’appel de Paris en application des articles L. 420-7 et R. 420-3 du code de commerce, mais que dans ses dernières écritures du 26 mars2019, elle se fonde désormais sur l’obligation de bonne foi et le droit général des obligations, de sorte que ses demandes relèvent désormais du droit commun (articles 1134, 1135 et 1383 anciens du code civil).

Elle en déduit, in limine litis, que la cour d’appel de Versailles est seule compétente pour connaître du litige dès lors que la cour d’appel de Paris n’est désormais plus investie du pouvoir juridictionnel de le juger.

Elle soulève également l’irrecevabilité de l’appel interjeté devant cette cour au motif, qu’il n’a pas été formé dans le délai d’un mois prescrit pas l’article 538 du code de procédure civile mais également en raison du fait que dès lors qu’il ne se fonde plus sur le droit des ententes rien de justifie plus qu’il soit jugé par la cour de Paris qui ne dispose pas du pouvoir juridictionnel de statuer sur un appel à l’encontre d’un jugement rendu par un tribunal de commerce qui ne relève pas de son ressort.

Elle soutient enfin à titre subsidiaire, si l’appel était déclaré recevable, que les demandes de la société E D A sont de toute façon irrecevables puisque la compétence de la cour d’appel de Paris est conditionnée, par application de l’article L 420-7 et R 420-3 du code de commerce, à l’existence d’un litige portant sur l’existence de pratiques anticoncurrentielles ou des pratiques restrictives de concurrence, qui ne sont plus invoquées depuis les dernières écritures de l’appelante.

La présente cour est compétente pour statuer sur la question de l’étendue de ses pouvoirs juridictionnels tels qu’ils découlent de L 420-7 et R 420-3 s’agissant de dispositions d’ordre public.

La société Hyundai soutient sans être démentie par l’appelante, qu’il appartient en conséquence à la cour de trancher la question de sa compétence et de la recevabilité des conclusions de la société E D A dès lors que cette exception de procédure et cette fin de non recevoir sont fondées sur l’application des textes précités.

Le tribunal de commerce de Pontoise a considéré qu’il était compétent pour statuer sur les demandes de la société GRD dès lors que cette dernière a renoncé dans ses dernières écritures devant lui, à ses demandes sur le fondement de l’article L 442-6, I, 5° du code de commerce pour lesquelles l’article D 442-3 du code de commerce prévoit la compétence du tribunal de Paris au vu du lieu du siège social du défendeur, et que lesdites écritures ne visaient nullement le terme 'entente' et/ou l’article L 420-1 du code de commerce.

Le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Versailles a, par ordonnance du 22 septembre 2016, considéré qu’au vu des fondements juridiques invoqués par la société GRD faisant référence au droit de la concurrence et des pratiques restrictives, et au vu des textes précités, l’appel de la société E D A n’est pas recevable devant la dite cour.

Il convient toutefois d’observer que le tribunal de commerce de Pontoise, nonobstant les motifs figurant dans sa décision pour justifier de sa compétence, a, pour débouter au fond la société GRD de ses demandes, pour partie fait référence au règlement n°330/2010 du 20 avril 2010 en ses dispositions relatives à la part de marché du fournisseur de sorte que, par application de l’article L 420-7 du code de commerce qui vise les articles 81 et 81 du traité instituant la communauté européenne, devenus les articles 101 et 102 du TFUE sur la base desquels a été adopté le règlement ayant pour partie servi de fondement à sa décision, seules les juridictions visés à l’article R 420-3 du code de commerce, dont il ne fait pas partie, sont compétentes pour en connaître.

C’est donc à bon droit que la société GRD a, postérieurement à l’ordonnance du conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Versailles du 22 septembre 2016, selon déclaration du 18 octobre 2016, finalement saisi la cour d’appel de Paris de l’appel dirigé à l’encontre du jugement du tribunal de commerce de Pontoise.

En outre, dans ses écritures signifiées le 18 janvier 2017, l’appelante, pour contester la décision de Hyundai de ne pas renouveler son contrat de distribution sélective, fustige l’absence de critères objectifs pour fonder cette décision, et considère comme discriminatoire l’attribution la zone de chalandise dont elle avait la responsabilité à une autre société, faisant ainsi référence, sans le mentionner expressément aux critères de licéité des réseaux de distribution sélective au regard des normes du droit européen de la concurrence.

Il importe peu que les conclusions récapitulatives postérieures de cette dernière, signifiées le 2 avril 2019, ne fassent pas, tout comme les précédentes, référence dans leurs motifs aux textes français ou européens relatifs au droit des pratiques anticoncurrentielles ou aux textes relatifs au droit des pratiques restrictives , et que selon l’intimée, le moyen tiré de l’absence de critères objectifs qui figurait dans ses précédentes écritures ne soit abordé que sous l’angle du droit des contrats, alors que le litige dont la cour est saisi a été déterminé, au regard de sa compétence et de l’étendue de son pouvoir juridictionnel, au moment de sa saisine, peu important que les fondements juridiques des demandes évoluent au cours de l’évolution du litige.

La cour fait observer qu’en tout état de cause, la société Hyundai Motor France vise pour sa part explicitement, dans le dispositif de ses conclusions, l’article L 420-1 du code de commerce et qu’elle étaye, dans le corps de ses écritures, ses moyens aux fins de rejet des prétentions de la société GRD, pour partie au regard des règles du droit de la concurrence.

Il convient par conséquent de dire que la présente cour est compétente pour connaître du présent litige, de débouter la société Hyundai Moto France de son exception d’incompétence ainsi que de sa demande tendant à l’irrecevabilité de l’appel et des demandes de la société GRD au motif que cette cour ne dispose pas du pouvoir juridictionnel de statuer sur un appel relevé à l’encontre d’un jugement du tribunal de commerce de Pontoise.

C’est enfin vainement que la société Hyundai Moto France conclut à l’irrecevabilité de l’appel de la société GRD au motif qu’il est tardif alors que, selon arrêt sur déféré du 8 novembre 2017 revêtu de l’autorité de la chose jugée, cette cour a, rejetant ce moyen, dit que l’appel formé par la société GRD le 18 octobre 2016 est recevable.

Il convient dès los de dire que cette cour est compétente et que l’appel et les demandes de la société GRD sont recevables.

En statuant sur une demande d’indemnisation formée au titre d’une rupture brutale d’une relation commerciale établie, le tribunal de commerce de Pontoise qui ne figure pas sur la liste des tribunaux spécialement désignés à l’annexe 4-2-1 de l’article D. 442-3 du code de commerce auquel renvoie le dernier alinéa de l’article L. 446-2, III, pour en connaître, a manifestement excédé ses pouvoirs de sorte que le jugement entrepris sera annulé en toutes ses dispositions.

Aux termes de l’article 562 du code de procédure civile, la dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs ou lorsqu’il tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Il ressort clairement de ces dispositions que lorsque la cour annule le jugement, par l’effet dévolutif de l’appel, elle est investie du devoir de statuer à nouveau en fait et en droit sur la chose jugée par la décision rendue en première instance, sans pouvoir renvoyer l’examen de l’affaire aux premiers juges.

En conséquence, les parties ayant conclu au fond, il y a lieu d’examiner l’entier litige.

Sur le bien fondé des demandes

La société GRD fait valoir que la décision de ne pas la re-désigner comme distributeur agréé du réseau Hyundai, est abusive en ce qu’elle n’a pas été fondée sur des nouveaux critères objectifs définis ce qui caractérise une discrimination à son détriment, et en ce que Hyundai avait pris l’engagement à son égard de conclure un nouveau contrat de distribution.

Sur la discrimination

Contrairement à ce que soutient la société Hyundai, le caractère discriminatoire du refus d’agrément soulevé devant la cour, ne constitue pas une demande nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile dès lors qu’il s’agit d’une prétention qui tend aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges de sorte qu’elle est recevable.

Il résulte du principe de la prohibition des engagements perpétuels et de la liberté du commerce et de l’industrie qu’un distributeur ne dispose d’aucun droit acquis à la poursuite indéfinie d’un contrat de distribution et que tout opérateur économique peut choisir en toute indépendance ses partenaires commerciaux.

Dès lors, la résiliation d’un contrat de distribution sélective ne peut être qualifiée en soi de pratique discriminatoire dès lors que ne pèse sur un fournisseur aucune obligation de contracter avec tout distributeur remplissant les critères de sélection, conformément au principe de liberté contractuelle, et ce dernier ne bénéficie d’aucun droit à la poursuite des relations contractuelles avec son fournisseur à l’issue des préavis de résiliation d’un précédent contrat de distribution auquel il a été régulièrement mis fin.

C’est donc de manière inopérante que l’appelante fait valoir qu’il convient de vérifier que les nouveaux critères de choix des distributeurs ont été arrêtés et communiqués à ceux qui souhaitaient, comme elle, poursuivre la relation commerciale avec Hyundai.

C’est également vainement qu’elle soutient que Hyundai n’a pu motiver sa décision de ne pas conclure de nouveau contrat de distribution avec elle pour lui préférer la société CML sur la base de critères objectifs pour en conclure que ce choix apparaît intrinsèquement discriminatoire, aucune des pièces versées aux débats ne permettant d’étayer cette affirmation et d’établir un quelconque

manquement du constructeur à son obligation de bonne foi ou de loyauté à son égard.

Sur la violation fautive de l’engagement pris par Hyundai de conclure un nouveau contrat de distributeur

La société GRD soutient qu’il résulte des différents échanges intervenus entre elle et Hyundai, que cette dernière lui a laissé croire qu’un nouveau contrat de distribution serait conclu après la résiliation du précédent et qu’elle n’a pas donné suite à son engagement.

L’examen des différentes pièces du débat fait apparaître :

— que par plusieurs lettres recommandées avec accusé de réception du 27 juin 2012, Hyundai Motor France a mis fin, avec un préavis de deux ans, aux contrats, de distributeur pour la vente de véhicules neufs Hyundai, de réparateur agréé, et de distributeur pour la vente d’accessoires,

— que par un autre courrier recommandé du 4 juillet 2013, Hyundai a rappelé à la société E D A, les termes de ses courriers du 27 juin 2012,

— qu’il est établi et non contesté qu’aucune de ces lettres ne contenait le paragraphe figurant dans des courriers adressés par Hyundai à certains distributeurs à l’occasion de la résiliation de leur contrat, selon lequel 'la société Hyundai souhaite continuer, à l’issue du préavis susvisé, à travailler avec vous dans le cadre de nos futurs contrats, sous réserve que les conditions quant à la poursuite de nos relations soient remplies et de la parfaite exécution du préavis', de sorte qu’il est ainsi démontré qu’au moment de la résiliation de ses contrats, Hyundai n’a nullement laissé entendre à la société GRD qu’elle entendait poursuivre la relation contractuelle qui les liait, postérieurement à la résiliation du contrat de distribution sélective,

— que le 15 juillet 2013 la société GRD a adressé un courrier recommandé à la société Hyundai pour :

* s’étonner de l’absence du paragraphe relatif à la poursuite des relations commerciales postérieurement à la résiliation, dont elle n’ignorait pas l’existence dans les courriers reçus par certains autres distributeurs, lui faisant observer, que dans leurs précédents échanges, Hyundai lui avait fait part de sa volonté de poursuivre les relations commerciales,

* et lui faire observer qu’elle a investi de fortes sommes d’argent pour la nouvelle image de la marque (nouvelles enseignes, embellissement du showroom),

— que suite à ces échanges une rencontre est intervenue entre les parties, le 16 mai 2013, à l’issue de laquelle le responsable du développement réseau de Hyundai a écrit à M D A, le 20 mai 2013, en sa qualité de dirigeant de la société GRD ainsi rédigé :

'Je fais suite à notre rendez-vous de ce jeudi en vos locaux de Villeurbanne. J’ai pu découvrir votre site en pleine rénovation extérieure (bardages) de vos bâtiments commerciaux et ateliers, ce qui améliorera clairement la perception client.

Vous avez récemment renforcé votre organisation humaine (…)() afin de mieux structure l’action de la marque.

Ces deux éléments conjugués illustrent bien votre motivation pour notre Marque et je vous en remercie vivement.

Au regard de votre structure financière vous imaginez de vous concentrer sur d’autres sites; vous avez cependant évoqué un possible projet à Décines près du futur grand stade, ce que nous vous avons déconseillé.

Par conséquent nous vous rejoignons sur votre analyse et nous vous confirmons l’avoir ainsi intégré dans notre développement du réseau lyonnais actuellement en phase de restructuration. J’aurai plaisir à répondre à votre invitation et à revenir vous voir après la fin de vos travaux (…).'

— que postérieurement, suite à une autre réunion entre les parties, intervenue le 17 septembre 2017, le responsable Développement Réseau de Hyundai a écrit le 19 septembre 2017 à M D A ce courrier :

' A votre demande nous vous avons reçus ainsi que votre directeur (…) Ce mardi 17 septembre en nos locaux pour faire un point sur votre activité.

Vous nous avez exposé vos perspectives sur Lyon et son agglomération et nous vous avons présenté notre vision, notamment dans le cadre de l’arrivée d’un nouveau distributeur lyonnais.

Vous nous avez précisé vos souhaits et nous avons convenu de nous revoir d’ici la fin de l’année (…)',

- que le 7 octobre 2013, la société GRD a adressé à la société Hyundai, suite à la réunion du 17 septembre et au courrier reçu, la lettre suivante :

'j’ai pris bonne note de la nouvelle vision de la représentation de votre marque sur Lyon sur laquelle vous m’avez indiqué avoir engagé une réflexion. Je tiens néanmoins à vous rappeler les dispositions dont nous sommes convenus au cours des 15 derniers mois en fonction d’une stratégie commerciale, dans le cadre de laquelle vous m’avez demandé de m’inscrire, portant sur le développement à venir de la vente et du service des véhicules de votre marque à la clientèle de Villeurbanne et du centre ville de Lyon.

Pour mémoire:

-Mise aux normes de mes locaux (…) achevés avec votre participation en décembre 2012,

-Renonciation aux cantons de Caluire et Y, afin d’organiser la cohabitation entre mon entreprise et celle de M Z que vous avez décidé d’agréer sur le Nord-Est de l’agglomération,

-Recrutement d’un Directeur de l’activité Hyundai, entré en fonction au 1er janvier 2013,

-Renonciation à mon projet sur Décines, près du futur stade, afin de concentrer mes moyens sur le centre veille pour Hyundai.

Vous m’avez confirmé par votre courrier du 20 Mai 2013, avoir intégré le développement de mon activité de distributeur et de réparateur agréé Hyundai sur Villeurbanne et en centre Ville de Lyon dans le schéma de développement de votre réseau.

Je compte absolument sur le respect de nos accords',

-que le 16 octobre 2013 le directeur général de Hyundai a répondu a M D A en sa qualité de dirigeant de la société GRD:

'Monsieur,

Nous avons bien reçu votre courrier recommandé du 7 octobre dernier faisant référence à nous échanges de mi septembre.

Nous avons bien conscience des progrès que vous avez réalisés dans votre représentation comme dans votre organisation et nous vous en remercions à nouveau.

Nous vous avons déjà assuré de prendre en compte votre représentation dans les schémas lyonnais et nous le confirmons formellement'.

Il n’est pas contesté que lors d’une réunion du 29 avril 2014, dans les locaux de Hyundai Motor France, il a été indiqué à M A que sa société ne bénéficierait effectivement plus du contrat de distribution sélective antérieurement conclu.

Ce dernier a de nouveau écrit à Hyndai le 2 mai 2014 pour déplorer cette décision, rappelant les travaux d’investissements qu’il avait accomplis pour la marque, ce qui lui a permis une constante progression des ventes des véhicules neufs et du service après vente.

La société Hyundai France lui a répondu le 5 mai 2014 en rappelant l’absence d’ambiguïté des lettres de résiliation qu’elle lui a adressées dès 2012 et a rappelé sa volonté de voir organisé pour l’avenir un cadre juridique de coopération avec la société Central Moto Lyon.

Il résulte de l’ensemble de ces échanges, que, contrairement à ce que soutient l’appelante, il n’est nullement établi que la société Hyundai lui a manifesté sa volonté de signer un nouveau contrat de distributeur de véhicules neufs et que cette dernière n’est pas davantage revenue sur une prétendue promesse qui lui aurait été faite en ce sens.

C’est justement que la société Hyundai fait observer qu’elle a, au cours de ces différents échanges indiqué à l’intimée qu’elle prendrait en considération son souhait de continuer à travailler pour la marque et que cette indication s’est concrétisée, par la signature d’un nouveau contrat de réparateur agréé le 1er juillet 2014 et par l’approbation par l’appelante du contrat d’apporteur d’affaires conclu avec la société Central Motor Lyon.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments qu’aucune faute ne peut être reprochée à la société Hyundai de sorte que la société E D A doit être déboutée de l’ensemble de ses demandes indemnitaires.

La société E D A sera condamnée à payer à la société Hyundai Motor France la somme de 7000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.

Elle sera en outre condamnée aux dépens de première instance et d’appel qui pourront être recouvrés directement par Maître X conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

ANNULE le jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 11 décembre 2015,

DIT que cette cour est compétente pour connaître du présent litige,

DIT que l’appel et les demandes de la société E D A sont recevables,

DÉBOUTE la société D A de l’ensemble de ses demandes,

LA CONDAMNE à payer à la société Hyundai Motor France, la somme de 7000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

LA CONDAMNE aux dépens de première instance et d’appel et dit qu’ils pourront être recouvrés directement par Maître X conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

F G B C



Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 31 juillet 2019, n° 16/20683