Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 15, 8 juillet 2020, n° 19/19878

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 15, 8 juill. 2020, n° 19/19878
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/19878
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 7 janvier 2019
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 15

ORDONNANCE DU 08 JUILLET 2020

STATUANT SUR UNE DEMANDE DE TRANSMISSION

D’UNE QUESTION PRIORITAIRE DE

CONSTITUTIONNALITE

(n°38, 13 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 19/19878 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4DQ

Numéro d’inscription au répertoire général de l’affaire au fond : 19/995 (appel), 996(recours) et 19/1061 (recours)

Décisions déférées : Ordonnance rendue le 08 janvier 2019 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de PARIS

Procès-verbal de visite et saisies en date du 9 janvier 2019

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, R S-T, Conseillère à la cour d’appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l’article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l’article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

assistée de L M, greffier lors des débats et de la mise à disposition ;

MINISTERE PUBLIC : l’affaire a été communiquée au parquet général qui a fait connaître son avis par écrit

Après avoir appelé à l’audience publique du 17 juin 2020 :

La société MAJORELLE INTERNATIONAL S.A.R.L.

domiciliée chez Me Eric PLANCHAT

[…]

[…]

Représentée par Me Eric PLANCHAT de la SCP NATAF ET PLANCHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0406

REQUERANTE A LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

et

LA DIRECTION NATIONALE DES ENQUETES FISCALES

[…]

[…]

Représentée par Me Jean DI FRANCESCO de la SELARL URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137

DEFENDERESSE A LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 17 juin 2020, l’avocat de la requérante, et l’avocat de l’intimée ;

Les débats ayant été clôturés avec l’indication que l’affaire était mise en délibéré au 08 Juillet 2020 pour mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

Avons rendu l’ordonnance ci-après :

Le 8 janvier 2019 le juge des libertés et de la détention (ci-après JLD) du Tribunal de grande instance (ci-après TGI) de PARIS a rendu, en application de l’article L. 16 B du LPF du livre des procédures fiscales (ci-après LPF), une ordonnance à l’encontre de :

— la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL , représentée par ses gérants MM B C N et X, dont le siège est sis […], et qui a une activité de holding et de gestionnaire de droits de propriété intellectuelle.

Le JLD a autorisé des opérations de visite et saisie dans les lieux suivants :

— les locaux et dépendances sis […], susceptibles d’être occupés par la SAS LABORATOIRES MAJORELLE et/ou la SAS LABORATOIRES MAJOR et/ou la SCI TELOUET BERRI et/ou la SCI LE BEAUHAVRE et/ou la SARL AXCEL LOISIRS FRANCE et/ou la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL ;

— les locaux et dépendances sis […] 75008 PARIS, susceptibles d’être occupés par M. X B C et/ou Mme Z A.

L’autorisation de visite et saisie des lieux susmentionnés était délivrée au motif que la société de droit luxembourgeois MAJORELLE INTERNATIONAL SARL exercerait tout ou partie de son activité de holding et de concession de marques ou AMM depuis le territoire national, sans souscrire les déclarations fiscales en matière commerciale et en TVA et ainsi, omettrait de passer les écritures comptables y afférentes.

Et ainsi serait présumée s’être soustraite et/ou se soustraire à l’établissement et au paiement des impôts sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d’affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code général des impôts (ci-après CGI) (articles 99 pour les BNC et 286 pour la TVA).

L’ordonnance était accompagnée de 32 pièces annexées à la requête, avec une origine apparemment

licite et pouvant être utilisées pour la motivation de l’ordonnance.

Il ressortait des éléments du dossier que la société MAJORELLE GROUP SPF constituée le 5 septembre 2012 sous la forme d’une société de gestion de patrimoine familial a pour gérant unique N B C, que le 26 mars 2014 elle devient MAJORELLE GROUPE SARL avec un statut de société à participations financières dont l’objet consiste en des opérations de prise de participations dans toute entreprise ainsi que l’administration, la gestion, le contrôle et le développement de ces participations. Le 29 janvier 2014 X B C devient co -gérant. Courant 2015, la société MAJORELLE GROUP SARL absorbe la société MAJORELLE INTERNATIONAL puis change de dénomination ( MAJORELLE INTERNATIONAL ). En juillet 2015 N B C cède 49 parts sociales au profit de la société CEG INVESTMENT SARL détenue intégralement par X B C.

La société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL est l’associée majoritaire de la SAS LABORATOIRES MAJORELLE ( laboratoire pharmaceutique créé en 2012) sis […] qui a pour principal dirigeant X B C .

Ainsi la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL, contrôlée par MM. X B C et N B C, ferait partie du groupe « MAJORELLE », spécialisé dans la vente de médicaments pharmaceutiques.

Son siège social est sis […], selon la base de données sur internet BEL-FIRST figurent à son adresse de siège social 37 sociétés.

Il serait également établi que la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL serait susceptible d’avoir pour siège social l’adresse d’une étude d’avocats proposant des services de domiciliation et à ce titre, ne pas disposer de moyens d’exploitation au LUXEMBOURG pour la réalisation de son activité.

D’autres investigations menées par l’administration laisseraient apparaître que M. X B C, Président de la SAS LABORATOIRES MAJORELLE, serait rémunéré dans le cadre de ses fonctions depuis 2015 par la SARL MAJORELLE INTERNATIONAL.

Sur son profil LINKEDIN, X B C se présente comme 'co-Founder/CEO LABORATOIRES MAJORELLE dans la région de Paris depuis mars 2011, il apparaît aussi comme le mandataire auprès de l’institut national de la propriété (INPI) concernant l’enregistrement de marques par le LABORATOIRE MAJORELLE.

Par ailleurs, M. X B C aurait fait l’acquisition en indivision avec Mme Z A d’un bien sis […], adresse à laquelle il aurait déclaré résider lors de l’immatriculation d’un véhicule de marque FERRARI auprès de la Préfecture de police de PARIS le 21 avril 2017.

En outre, le 17 mai 2018 M. X B C et Mme Z A auraient constitué avec leurs enfants mineurs une société civile immobilière de droit luxembourgeois NOUFIMMO. Il en ressort que X B C dispose de centres d’intérêts familiaux et professionnels sur le territoire national.

Ainsi, la SARL MAJORELLE INTERNATIONAL serait présumée disposer d’un centre décisionnel en FRANCE, lieu des intérêts professionnels et personnels de son gérant salarié M. X B C.

Selon le site de l’office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) la SAS LABORATOIRES MAJORELLE est titulaire de 16 marques communautaires (OPTIDRIL,

OPTIVOLA notamment).

Selon des contrats signés en 2012, la SAS LABORATOIRES MAJORELLE a cédé pour une somme forfaitaire les droits associés ainsi que la propriété des marques OPTIDRIL et OPTILOVA à la société de droit Luxembourgeois MAJORELLE LUXEMBOURG SOPARFI (devenue la société MAJORELLE INTERNATIONAL) pour des montants de 325000 euros et 105 000 euros, les contrats de cession pouvant être résolus de plein droit si la société MAJORELLE LUXEMBOURG SOPARFI n’obtient pas les autorisations de mise sur le marché (AMM) délivrées par l’agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).

Des contrats de cession, de promotion et distribution sont passés entre la société MAJORELLE LUXEMBOURG SOPARFI et la SAS LABORATOIRES MAJORELLE

La société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL dépose régulièrement ses bilans auprès du registre du commerce des sociétés luxembourgeoises et déclare des produits et bénéfices pour les exercices de 2014 à 2017.

Ainsi, selon les services fiscaux, la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL serait susceptible de réaliser pour partie son chiffre d’affaires par la concession d’exploitation en tant que titulaire d’Autorisations de Mise sur le Marché (AMM) auprès de sa filiale exploitante la SAS LABORATOIRES MAJORELLE, laquelle disposerait tant dans sa dimension pharmacologique que médicale du personnel nécessaire à l’exploitation de produits médicamenteux.

Il ressortirait d’un droit de communication exercé le 11 septembre 2018 auprès de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) concernant la ou les sociétés de droits luxembourgeois MAJORELLE INTERNATIONAL SARL ou MAJORELLE LICENSING que : les documents émanant des sociétés MAJORELLE au LUXEMBOURG sont signés au préalable par M. N B C ou M. X B C ; pour autant, ceux-ci délèguent systématiquement leurs pouvoirs dans le cadre des échanges avec l’ANSM à M. D E, pharmacien responsable de la SAS LABORATOIRES MAJORELLE ; les courriers envoyés avec la double en-tête de la société luxembourgeoise et de la société française à destination de l’ANSM sont rédigés de PARIS, avec pour personne en charge du dossier ou signataire M. D E ou Mme F G, salariés de la SAS LABORATOIRES MAJORELLE ; les coordonnées des sociétés luxembourgeoises MAJORELLE correspondent à ceux de la SAS LABORATOIRES MAJORELLE en FRANCE ; les transferts de titulaire d’AMM n’entraînent aucune modification dans les conditions d’exploitation des produits.

Ainsi, il pourrait être présumé que la gestion des AMM, des marques des sociétés luxembourgeoises MAJORELLE serait effectuée en réalité depuis le territoire national par la SAS LABORATOIRE MAJORELLE.

Au jour de la requête, la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL n’est pas répertoriée auprès de la Direction de impôts des non résidents de Noisy le Grand, elle n’est pas connue pour l’exercice d’une activité professionnelle et n’a déposé aucune déclaration tant en matière d’impôt sur les sociétés qu’en matière de taxe sur la valeur ajoutée depuis sa création auprès de Direction Régionale des Finances Publiques d’Ile de France.

Il découle de ce qui précède que la société de droit luxembourgeois MAJORELLE INTERNATIONAL SARL serait susceptible de réaliser tout ou partie de son activité de holding et de concession de marques ou d’AMM depuis le territoire national en utilisant les moyens humains et matériels de la SAS LABORATOIRES MAJORELLE en France, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes. Compte tenu des relations juridiques existant entre la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL et la SAS LABORATOIRES MAJORELLE , cette dernière est susceptible de détenir dans les locaux qu’elle occupe sis […]

documents et/ ou supports d’information relatifs à la fraude présumée.

En raison de sa qualité de co-gérant et associé de la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL, B C X et sa compagne Z A domiciliée à cette adresse, sont susceptibles de détenir dans les locaux qu’ils occupent sis […] , des documents et / ou supports d’informations relatifs à la fraude présumée.

Plusieurs sociétés , la SAS LABORATOIRES MAJOR, la SCI TELOUET BERRI, la SCI LE BEAUHAVRE, la SARL AXCEL LOISIRS FRANCE, ont pour dirigeant principal B C X et/ ou B C O et ont leur siège social au […] à Paris 8e, ainsi ces sociétés sont susceptibles de détenir dans les locaux qu’elles occupent sis […] documents et / ou supports d’information relatifs à la fraude présumée.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, le JLD de Paris a autorisé la visite domiciliaire :

-dans les locaux et dépendances sis […], susceptibles d’être occupés par la SAS LABORATOIRES MAJORELLE et/ou la SAS LABORATOIRES MAJOR et/ou la SCI TELOUET BERRI et/ou la SCI LE BEAUHAVRE et/ou la SARL AXCEL LOISIRS FRANCE et/ou la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL ;

— dans les locaux et dépendances sis […] 75008 PARIS( en réalité75002), susceptibles d’être occupés par M. X B C et/ou Mme Z A.

Les opérations de visite et saisie se sont déroulées le 9 janvier 2019 :

-dans les locaux et dépendances sis […], susceptibles d’être occupés par la SAS LABORATOIRES MAJORELLE et/ou la SAS LABORATOIRES MAJOR et/ou la SCI TELOUET BERRI et/ou la SCI LE BEAUHAVRE et/ou la SARL AXCEL LOISIRS FRANCE et/ou la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL, de 10H à 13H15, en présence de M. X B C , occupant des lieux.

-dans les locaux et dépendances sis […], au 4e étage, susceptibles d’être occupés par la SAS LABORATOIRES MAJORELLE et/ou la SAS LABORATOIRES MAJOR et/ou la SCI TELOUET BERRI et/ou la SCI LE BEAUHAVRE et/ou la SARL AXCEL LOISIRS FRANCE et/ou la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL, de 8H15 à 14H35, en présence de madame P-Q L, chef de projet, occupante des lieux.

-dans les locaux et dépendances sis […] située à Paris 2e , susceptibles d’être occupés par M. X B C et/ou Mme Z A, de Y à 9H 30,en présence de M. X B C et madame Z A, occupants des lieux.

* * *

Le 17 janvier 2019, la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL, agissant par son gérant X B C a interjeté appel de l’ordonnance du JLD de PARIS ( RG 19/00995).

Le 17 janvier 2019, Monsieur X B C ont formé un recours contre le déroulement des opérations de visite dans les locaux et dépendances sis […] à Paris 2e ( RG 19/00998) .

Le 17 janvier 2019, la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL agissant par son gérant X B C , a formé un recours contre le déroulement des opérations de visite dans les locaux et dépendances sis […], au 4e étage (RG 19/00996).

Le 18 janvier 2019, la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL agissant par son gérant X B C , a formé un recours contre le déroulement des opérations de visite dans les locaux et dépendances sis […] ( RG 19/01061).

L’affaire avait été audiencée pour être plaidée le 13 novembre 2019.

Le 26 avril 2019 la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL, représentée par son conseil, a déposé au greffe de la Cour d’appel de PARIS un mémoire afin de la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité (ci-après QPC) suivante : « les dispositions prévues par l’article L. 16 B II du Livre des procédures fiscales, en ce qu’elles valident selon une jurisprudence de la Cour de cassation, la pré-rédaction par l’administration fiscale des ordonnances de visites domiciliaires portent-elles atteinte au principe constitutionnel d’impartialité et d’indépendance du juge découlant de l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ' ».

Par ordonnance en date du 3 juillet 2019, le Premier président de la Cour d’appel de PARIS a refusé de transmettre à la Cour de cassation la QPC et a renvoyé l’affaire pour examen au fond à l’audience du 13 novembre 2019.

Le 6 novembre 2019 la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL représentée par son conseil, a déposé au greffe de la Cour d’appel de PARIS un mémoire destiné à formuler une nouvelle question prioritaire de constitutionnalité.

A l’audience du 13 novembre 2019, il a été établi un calendrier d’échange des écritures aux fins d’audience de plaidoirie pour la QPC fixée le 18 mars 2020, en accord avec les parties.

La question prioritaire de constitutionnalité est la suivante : « les dispositions prévues par l’article L. 16 B II du Livre des procédures fiscales portent-elles atteinte à la liberté individuelle dont l’article 66 confie la garde à l’autorité judiciaire dès lors que les visites et saisies ne sont pas limitées à la recherche de la preuve des cas les plus graves de fraude fiscale ' ».

L’audience du 18 mars 2020 n’a pu se tenir du fait de l’état d’urgence sanitaire ( Loi N° 2020-290 du 23 mars 2020). L’affaire a été renvoyée à l’audience du 17 juin 2020 et mise en délibéré pour être rendue le 8 juillet 2020.

Dans ses écritures en date du 6 novembre 2019, soutenues à l’audience du 17 juin 2020 la SARL MAJORELLE INTERNATIONAL fait valoir :

A ' La disposition contestée est applicable au litige

Par ordonnance en date du 8 janvier 2019, le JLD du TGI de PARIS a autorisé une visite des locaux professionnels sis 12, […] et d’un domicile privé sis […] sur le fondement des dispositions prévues par l’article L. 16 B du LPF.

Il est argué que l’article contesté est donc bien en lien avec le litige.

B ' La jurisprudence du Conseil constitutionnel

Un changement des circonstances

Il est soutenu que l’article 23-2 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel prévoit qu’une QPC peut être soulevée à l’encontre d’une disposition législative déjà déclarée conforme à la Constitution dans l’hypothèse d’un « changement des circonstances » et que la Cour de cassation et le Conseil d’État reconnaissent que l’intervention d’une nouvelle jurisprudence du Conseil constitutionnel peuvent constituer un changement des

circonstances de droit.

La procédure prévue à l’article L. 16 B du LPF a pour objet de rechercher la preuve d’une fraude fiscale

La Haute juridiction a rappelé à plusieurs reprises que les visites domiciliaires ont pour but la recherche de la preuve d’une fraude fiscale.

Les poursuites pour fraude fiscale doivent être réservées en cas de fraudes les plus graves

Selon la Cour de cassation, en ce qui concerne l’application combinée de l’article 1729 et de l’article 1741 du code général des impôts, ce dernier article ne peut s’appliquer qu’aux « cas les plus graves » de fraude fiscale, la gravité s’appréciant au regard du montant des droits fraudés, de la nature des agissements de la personne suivie ou des circonstances de leur intervention.

En l’espèce

Il est fait valoir que le Conseil constitutionnel a considéré que le respect du principe de la liberté individuelle impose au législateur de déterminer de façon satisfaisante le domaine ouvert aux visites et saisies réalisées par l’administration fiscale par une définition précise des infractions.

Selon le Conseil constitutionnel, ledit principe a été respecté lors de la réforme du droit des visites et saisies des agents de l’administration fiscale et douanière suite à la décision de la CEDH du 21 février 2008 RAVON.

Cependant les décisions n° 2016-545 QPC du 24 juin 2016, M. H W. et autres et n° 2018-745 QPC du 23 novembre 2018, M. J T. et autres ont modifié l’article 1741 du code général des impôts.

Il est soutenu que ces décisions constituent un changement des circonstances de droit qui autorise le Conseil constitutionnel à examiner à nouveau la compatibilité de l’article L. 16 B du LPF avec le principe de la liberté individuelle.

C ' Le caractère sérieux de la question

Il est argué que l’article L. 16 B du LPF porte atteinte à la liberté individuelle dont l’article 66 confie la garde à l’autorité judiciaire dans la mesure où les visites et saisies ne sont pas limitées à la recherche de la preuve des cas les plus graves de fraude fiscale.

Pour l’ensemble de ces raisons, il est demandé la transmission à la Cour de cassation de la question prioritaire de constitutionnalité susmentionnée.

En conclusion il est demandé à la Cour de faire examiner par la Cour de Cassation en vue d’un renvoi au Conseil Constitutionnel la question suivante :

« les dispositions prévues par l’article L. 16 B II du Livre des procédures fiscales portent-elles atteinte à la liberté individuelle dont l’article 66 confie la garde à l’autorité judiciaire dès lors que les visites et saisie ne sont pas limitées à la recherche de la preuve des cas les plus graves de fraude fiscale ' ».

Par mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour d’appel de PARIS en date du 27 janvier 2020, soutenu à l’audience du 17 juin 2020, l’administration fiscale fait valoir :

1 ' La disposition contestée est applicable au présent litige

Ce point n’est pas contesté par l’administration.

2 ' La QPC ne peut pas être considérée comme nouvelle

A ' La QPC ne peut pas être considérée comme nouvelle en raison des décisions déjà rendues par le Conseil constitutionnel

Il est soutenu que la question ne peut pas être considérée comme nouvelle dès lors que le Conseil constitutionnel a déjà déclaré les dispositions de l’article L.16 B du LPF conformes à la Constitution et que dans ces conditions, il importe peu que d’autres moyens d’inconstitutionnalité soient par la suite soulevés à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité.

Il est cité des décisions du Conseil constitutionnel, du Conseil d’État et de la Cour de cassation à l’appui de cette argumentation.

B ' Aucun changement de circonstances n’est intervenu

Il est rappelé que par « changement de circonstances », il faut entendre soit la survenance d’un événement entièrement nouveau soit, à tout le moins, l’évolution d’une situation postérieurement à la décision du Conseil constitutionnel déclarant conforme la disposition contestée.

En l’espèce, la jurisprudence du Conseil constitutionnel citée par la requérante ne peut aucunement constituer un changement de circonstances intervenu depuis la décision n° 2010-19/27 QPC rendue le 30 juillet 2010 par le Conseil constitutionnel puisqu’elle est totalement inopérante pour l’appréciation de la constitutionnalité de l’article L. 16 B du LPF.

En effet, cette jurisprudence a trait exclusivement à la problématique du cumul des sanctions pénales prévues à l’article 1741 du code général des impôts et des sanctions fiscales prévues aux articles 1728 ou 1729 du même code, et n’impose aucunement que les dispositions de l’article 1741 du code général des impôts soient réservées aux cas les plus graves de fraude fiscale.

Il ressort expressément du paragraphe 23 de la décision QPC 2016-545 citée que la réserve du Conseil constitutionnel limitant l’application des sanctions prévues à l’article 1741 du code général des impôts aux cas les plus graves de fraude fiscale, ne concerne que la seule hypothèse de l’application combinée des articles 1728/1729 du CGI et 1741 du CGI. La Cour de cassation a confirmé ce champ d’application restreint.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments qu’aux termes de la jurisprudence visée par la requérante : le Conseil constitutionnel a confirmé la constitutionnalité de l’article 1741 du CGI pris isolément ; il a assorti la seule application combinée de sanctions fiscales et pénales de la réserve que dans ce cas les sanctions prévues à l’article 1741 du CGI doivent être réservées aux cas les plus graves de fraude fiscales ; le caractère de gravité des faits est apprécié exclusivement par le juge pénal saisi de poursuites correctionnelles, cette gravité n’étant pas une condition de recevabilité de l’exercice de l’action publique.

Or, cette jurisprudence qui vise une hypothèse de cumul des sanctions pénales et fiscales en cas de répression d’infraction de fraude fiscale constituée n’a aucune incidence sur les dispositions de l’article L. 16 B du LPF, dont l’objet est la recherche de la preuve des agissements de soustraction à l’établissement ou au paiement de l’impôt lorsqu’il existe des présomptions de tels agissements.

Il en découle que la jurisprudence citée du Conseil constitutionnel ne constitue donc aucunement un changement de circonstances permettant de soulever une QPC à l’encontre de l’article L. 16 B du LPF depuis qu’il a été déclaré conforme à la Constitution par la décision n° 2010-19/27 QPC rendue le 30 juillet 2010 par le Conseil constitutionnel.

3 ' Sur l’absence de caractère sérieux

Il est argué que la question ne présente pas de caractère sérieux dès lors que la requérante procède à un amalgame infondé entre l’article L. 16 B du LPF et les textes sanctionnant pénalement l’infraction de fraude fiscale.

En effet, les dispositions de l’article 1741 du CGI relèvent du droit pénal et organisent la répression de l’infraction constituée de fraude fiscale.

Au contraire, il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (21 février 2008, Ravon c/ FRANCE, req. n° 18497/03, point 24) que la contestation portant sur la régularité d’une analyse opérée sur le fondement de l’article L. 16 B du LPF s’analyse en une contestation sur un droit de nature civile au sens de l’article 6 § 1 de la Convention.

Par ailleurs, il est dépourvu de sens de soutenir que le texte devrait prévoir que les visites et saisies devraient être limitées à la recherche de la preuve des cas les plus graves de fraude fiscale alors même que l’administration, lorsqu’elle sollicite la mise en 'uvre d’une visite domiciliaire, n’a pas, par définition, les éléments pour établir les agissements de fraude et donc établir leur gravité.

Enfin, il est rappelé que les dispositions de l’article L. 16 B du LPF n’ont fait l’objet d’aucune critique de la part de la CEDH ni de la Cour de cassation.

En conclusion, il est demandé de refuser de transmettre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité.

Par avis écrit en date du 5 mars 2020, le Ministère public soutient que la demande de transmission de la QPCpar la requérante est recevable mais ne doit pas être transmise à la Cour de cassation :

1 ' L’applicabilité de la QPC au litige en cours est vérifiée

Celui-ci est constitué par le recours formé le 17 janvier 2019 par la requérante contre le déroulement des opérations de visite et de saisie dans les locaux de la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL et des sociétés qui lui sont liées, ainsi qu’au domicile de ses dirigeants, suite à l’ordonnance rendue par le JLD de Paris le 8 janvier 2019.

2 ' L’absence de nouveauté de la question et du caractère sérieux de la question

A ' Le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation ont admis la conformité de l’article L. 16 B du LPF à la Constitution

Il est rappelé que le Conseil constitutionnel a, par décision n° 2010-19/27 QPC du 30 juillet 2010, déclaré les dispositions de l’article L. 16 B du LPF, issues de l’article 94 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984, conformes à la Constitution et a, de manière générale, par décision du 2 juillet 2010 n° 2010-9-QPC, posé la règle de ce qu’il n’y a pas lieu d’examiner la question prioritaire de constitutionnalité qui lui est soumise, lorsque l’article du code dont la constitutionnalité est critiquée, a déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de l’une de ses décisions et ce, même si la question posée ne lui avait pas été soumise lors de sa saisine.

La Cour de cassation a tiré les conséquences de cette jurisprudence, par arrêt n° 15-40018 du 9 juillet 2015, en refusant de renvoyer au Conseil constitutionnel une QPC concernant l’article L. 16 B du LPF aux motifs « d’une part, que la question (') n’est pas nouvelle ; d’autre part, que l’article L. 16 B du LPF a déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de la décision n° 2010-19/27 QPC rendue le 30 juillet 2010 par le Conseil constitutionnel (') ; qu’aucun changement de circonstances de droit ou de fait n’est depuis intervenu, qui, affectant la portée de la disposition législative critiquée, en justifierait le réexamen ».

B ' L’absence de changement de circonstances établi depuis lors

Le Ministère public fait valoir qu’aucune modification des textes applicables ni de leur mise en 'uvre n’est intervenue depuis la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010, validant les termes de l’article L. 16 B du LPF.

Il est fait observer que les décisions du Conseil constitutionnel citées par la requérante n’ont trait qu’à la question du cumul des sanctions fiscales et pénales concernant les omissions relatives à la déclaration de la base d’imposition ou des éléments servant à la liquidation de l’impôt.

Il est rappelé que le Conseil constitutionnel empêche qu’ «un contribuable qui a été déchargé de l’impôt par une décision juridictionnelle devenue définitive pour un motif de fond puisse être condamné pour fraude fiscale » et valide sous cette réserve les dispositions de l’article 1741 du code général des impôts prises isolément (QPC 2018-745).

Par ailleurs, la Cour de cassation a précisé le régime du cumul des sanctions fiscales et pénales dans plusieurs décisions (Cass. crim. 22 février 2017, n° 16-82047, 11-09-2019, n° 18-84144).

Il est indiqué que l’article 1741 du code général des impôts est un texte de répression pénale et qu’aucune question intéressant le cumul des sanctions fiscales et pénales ne peut être posée au stade procédural de la mise en 'uvre par le JLD des dispositions de l’article L. 16 B du LPF, qui, en amont de toute éventuelle poursuite, permet que soient autorisées des opérations de visites et saisies en présence de suspicions d’infractions.

En effet, l’article 1741 du code général des impôts intéresse la répression pénale des infractions fiscales, alors que l’article L. 16 B du LPF concerne la seule recherche des preuves, en présence d’une suspicion d’infraction.

Ainsi, la jurisprudence du Conseil constitutionnel citée par la requérante ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce et ne peut pas constituer donc un changement de circonstances intervenu depuis la validation des dispositions de l’article L. 16 B du LPF.

En conclusion, le Ministère invite à déclarer recevable la QPC et refuser de la transmettre à la Cour de cassation au visa de l’article 61-1 de la Constitution et de l’article 23-2 de la Loi organique N° 2009 – 1523 du 10 décembre 2009.

SUR CE

Sur la recevabilité de la QPC :

I -Sur la nature législative de la disposition attaquée et sur son applicabilité au présent litige.

Considérant que l’article 23-2 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 précise les conditions qui subordonnent la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité par la juridiction saisie à la Cour de cassation ou au Conseil d’Etat :

'La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’Etat ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies :

1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des

poursuites ;

2° Elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil Constitutionnel, sauf changement des circonstances ;

3° La question n’est pas dépourvue de caractère sérieux.

En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu’elle est saisie de moyens contestant la conformité d’une disposition législative, d’une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d’autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d’Etat ou à la Cour de cassation.

La décision de transmettre la question est adressée au Conseil d’Etat ou à la Cour de cassation dans les huit jours de son prononcé avec les mémoires ou les conclusions des parties. Elle n’est susceptible d’aucun recours. Le refus de transmettre la question ne peut

être contesté qu’à l’occasion d’un recours contre la décision réglant tout ou partie du litige’ ;

Considérant que le 6 novembre 2019, la SARL MAJORELLE INTERNATIONAL, prise en la personne de son représentant légal, a déposé au greffe des conclusions aux fins de transmission d’une question prioritaire de constitutionnalité, dans un écrit distinct et motivé, conformément à l’article 126-2 du code de procédure civile.

Considérant que cette demande de QPC intervient à l’occasion d’un recours que la SARL MAJORELLE INTERNATIONAL a formé le 17 janvier 2019 contre l’ordonnance du JLD de Paris du 8 janvier 2019 autorisant des visites domiciliaires et saisies notamment dans les locaux et dépendances des :

—  […], susceptibles d’être occupés par la SAS LABORATOIRES MAJORELLE et/ou la SAS LABORATOIRES MAJOR et/ou la SCI TELOUET BERRI et/ou la SCI LE BEAUHAVRE et/ou la SARL AXCEL LOISIRS FRANCE et/ou la société MAJORELLE INTERNATIONAL SARL ;

—  […] 75002 PARIS, susceptibles d’être occupés par M. X B C et/ou Mme Z A, sur le fondement de l’article L16B du livre des procédures fiscales.

Dès lors s’agissant d’un contentieux de contestation de visite domiciliaire dans le cadre de l’article L16B du livre des procédures fiscales, la QPC est applicable au litige et doit être déclarée recevable.

II- sur le caractère nouveau de la question posée.

Considérant que la QPC critique le fait 'que les visites et saisies ne sont pas limitées à la recherche de la preuve des cas les plus graves de fraude fiscale', que cette critique est inadaptée tant au regard de la décision du Conseil constitutionnel et de la cour de cassation de valider les dispositions de l’article L16 B du LPF qu’au constat de l’absence de changement de circonstances de nature à remettre en cause cette validation.

Considérant que la question ne peut pas être considérée comme nouvelle dès lors que le Conseil constitutionnel a déjà déclaré les dispositions de l’article L. 16 B du LPF conformes à la Constitution et que dans ces conditions, il importe peu que d’autres moyens d’inconstitutionnalité soient par la suite soulevés à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité.

Considérant en effet que le Conseil constitutionnel a, par décision n° 2010-19/27 QPC du 30 juillet

2010, déclaré les dispositions de l’article L. 16 B du LPF, issues de l’article 94 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984, conformes à la Constitution et a, de manière générale, par décision du 2 juillet 2010 n° 2010-9-QPC, posé la règle de ce qu’il n’y a pas lieu d’examiner la question prioritaire de constitutionnalité qui lui est soumise, lorsque l’article du code dont la constitutionnalité est critiquée, a déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de l’une de ses décisions et ce, même si la question posée ne lui avait pas été soumise lors de sa saisine.

Considérant que la Cour de cassation a tiré les conséquences de cette jurisprudence, par arrêt n° 15-40018 du 9 juillet 2015, en refusant de renvoyer au Conseil constitutionnel une QPC concernant l’article L. 16 B du LPF aux motifs « d’une part, que la question (') n’est pas nouvelle ; d’autre part, que l’article L. 16 B du LPF a déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de la décision n° 2010-19/27 QPC rendue le 30 juillet 2010 par le Conseil constitutionnel (') ; qu’aucun changement de circonstances de droit ou de fait n’est depuis intervenu, qui, affectant la portée de la disposition législative critiquée, en justifierait le réexamen ».

Considérant que le changement de circonstances invoqué par la requérante n’est pas établi, qu’en effet aucune modification des textes applicables ni de leur mise en oeuvre n’est intervenue depuis la décision n° 2010-19/27 QPC du 30 juillet 2010 rendue par la Conseil constitutionnel, validant l’article L 16 B du LPF.

Considérant que la jurisprudence invoquée par la requérante a trait exclusivement à la problématique du cumul des sanctions pénales prévues à l’article 1741 du code général des impôts et des sanctions fiscales prévues aux articles 1728 ou 1729 du même code, et n’impose aucunement que les dispositions de l’article 1741 du code général des impôts soient réservées aux cas les plus graves de fraude fiscale, qu’il ressort expressément du paragraphe 23 de la décision QPC 2016-545 citée que la réserve du Conseil constitutionnel limitant l’application des sanctions prévues à l’article 1741 du code général des impôts aux cas les plus graves de fraude fiscale, ne concerne que la seule hypothèse de l’application combinée des articles 1728/1729 du CGI et 1741 du CGI, que la Cour de cassation a confirmé ce champ d’application restreint.

Dès lors, la présente QPC ne revêt pas un caractère nouveau justifiant sa transmission.

III- sur le caractère sérieux de la question posée.

Considérant que la requérante commet une confusion entre l’article L. 16 B du LPF et les textes sanctionnant pénalement l’infraction de fraude fiscale, qu’en effet les dispositions de l’article 1741 du CGI relèvent du droit pénal et organisent la répression de l’infraction constituée de fraude fiscale, qu’au contraire il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (21 février 2008, Ravon c/ FRANCE, req. n° 18497/03, point 24) que la contestation portant sur la régularité d’une analyse opérée sur le fondement de l’article L. 16 B du LPF s’analyse en une contestation sur un droit de nature civile au sens de l’article 6 § 1 de la Convention, que de plus l’argument selon lequel le texte devrait prévoir que les visites et saisies devraient être limitées à la recherche de la preuve des cas les plus graves de fraude fiscale alors même que l’administration, lorsqu’elle sollicite la mise en 'uvre d’une visite domiciliaire, n’a pas, par définition, les éléments pour établir les agissements de fraude et donc établir leur gravité, n 'est pas pertinent.

Dès lors, la présente QPC ne revêt aucun caractère sérieux justifiant sa transmission.

Par conséquent il convient de :

- dire que la question prioritaire de constitutionnalité soumise par la SARL MAJORELLE INTERNATIONAL est recevable

—  constater que la question ainsi soulevée est applicable au litige dont nous sommes saisis

—  constater que la question ainsi soulevée n’est pas nouvelle

—  constater que la question ainsi soulevée est dépourvue d’un caractère sérieux

Et en conséquence :

—  rejeter la demande de transmission à la Cour de Cassation de la question prioritaire de constitutionnalité suivante :

« les dispositions prévues par l’article L. 16 B II du Livre des procédures fiscales portent-elles atteinte à la liberté individuelle dont l’article 66 confie la garde à l’autorité judiciaire dès lors que les visites et saisie ne sont pas limitées à la recherche de la preuve des cas les plus graves de fraude fiscale ' ».

PAR CES MOTIFS

Disons n’y avoir lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de Cassation .

LE GREFFIER

L M

LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

R S-T

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 15, 8 juillet 2020, n° 19/19878