Cour Administrative d'Appel de Nantes, 4ème chambre, 21 février 2014, 12NT00123, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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1CAA Nantes, 21 février 2014, Commune de Banneville-sur-Ajon, requête numéro 12NT00123, inédit au recueil
www.revuegeneraledudroit.eu

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2012, présentée pour M. F… A… et Mme B… G…, domiciliés Le Bourg à Banneville-sur-Ajon (14260), par Me D… ; M. A… et Mme G… demandent à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 17 novembre 2011 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision implicite du maire de Banneville-sur-Ajon refusant d'interdire la sonnerie des cloches de l'église et à la condamnation de la commune à leur verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article …

 

2« Pour qui sont ces cloches qui tintent sur nos têtes ? » ou la complainte du maire pris entre le battant et la robe !
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Sur la décision

Référence :
CAA Nantes, 4e ch., 21 févr. 2014, n° 12NT00123
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nantes
Numéro : 12NT00123
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Caen, 16 novembre 2011
Identifiant Légifrance : CETATEXT000028721586

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 16 janvier 2012, présentée pour M. F… A… et Mme B… G…, domiciliés Le Bourg à Banneville-sur-Ajon (14260), par Me D… ; M. A… et Mme G… demandent à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 17 novembre 2011 en tant qu’il a rejeté leur demande tendant à l’annulation de la décision implicite du maire de Banneville-sur-Ajon refusant d’interdire la sonnerie des cloches de l’église et à la condamnation de la commune à leur verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d’annuler la décision implicite de refus du maire ;

3°) d’enjoindre au maire d’interdire la sonnerie des cloches ou d’en limiter l’utilisation, sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt à intervenir ;

4°) de mettre les frais d’expertise à la charge de la commune ;

5°) de mettre à la charge de la commune le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais de procès engagés en première instance et la somme de 2 000 euros au titre des frais de procès engagés en appel sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que :

— contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, les nuisances sonores résultant des sonneries

portent atteinte à la tranquillité publique au sens des articles R. 1334-31 et R. 1334-32 du code de la santé publique, compte tenu de leur fréquence, de leur durée et de leur importance ; ils sont les plus proches voisins de l’église ;

— le maire n’a pris aucune mesure pour y remédier ainsi qu’il aurait dû le faire dans le cadre de ses pouvoirs de police ;

— les nuisances sonores ont un retentissement sur leur état de santé et sur celui de leur fils né en octobre 2007 ;

— l’usage local mentionné dans le jugement n’est pas immémorial, compte tenu de sa modification résultant de l’augmentation du nombre des sonneries après l’électrification des cloches en 1984 ; auparavant, il était limité à trois sonneries religieuses par jour ;

— ils ne pouvaient pas prévoir l’importance des nuisances sonores avant d’avoir fait l’acquisition en 2009 d’un immeuble appartenant à la commune qui n’était plus occupé depuis 1983 ;

— la pétition signée par soixante-dix personnes seulement ne caractérise pas l’attachement massif des habitants à l’utilisation des cloches mentionné par le tribunal ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 30 mars 2012 à Me E…, en application des dispositions de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, et l’avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 août 2012, présenté pour la commune de Banneville-sur-Ajon par Me E… ; la commune conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. A… et de Mme G… la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens ;

elle soutient que :

— le requérant, qui s’est rendu à plusieurs reprises dans l’immeuble avant la signature de l’acte authentique pour y faire entreprendre des travaux, a pu se rendre compte de l’importance et de la fréquence des sonneries ;

— les sonneries fonctionnent selon les mêmes modalités depuis un temps immémorial ;

— les sonneries sont diurnes et fonctionnent pendant une durée totale de dix minutes seulement sur une plage de temps de douze heures ;

— les habitants de la commune sont attachés à la sonnerie des cloches ainsi que l’atteste la pétition qui a été signée ;

— les conditions d’engagement de la responsabilité sans faute de la commune ne sont pas remplies ;

— les sonneries ne peuvent pas être à l’origine des troubles auditifs des requérants et des troubles du sommeil de leur enfant ; M. A… fait partie ou a fait partie pendant plusieurs années

d’un groupe de musique moderne ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2012, présenté pour M. A… et Mme G…, qui concluent aux mêmes fins que leur requête et demandent en outre à la cour d’annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 17 novembre 2011 en tant qu’il a rejeté leur demande tendant au versement d’une indemnité de 9 500 euros en réparation du préjudice causé par le fonctionnement des cloches et de condamner la commune à leur verser une indemnité de ce montant en réparation de leur préjudice ;

ils ajoutent que :

— le dommage subi présente un caractère anormal et spécial ;

— le préjudice causé par les bruits de voisinage est indemnisable quelle que soit la date d’acquisition de l’immeuble ;

— le préjudice moral peut être évalué à 1 000 euros par an et par personne et les troubles de jouissance à 2 000 euros par an et par personne adulte ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 janvier 2014, présenté pour la commune de Banneville-sur-Ajon qui maintient ses conclusions en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des églises et de l’Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 31 janvier 2014 :

— le rapport de Mme Aubert, président-assesseur ;

— et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A… et Mme G…, qui ont acquis en 2009 une maison d’habitation aménagée dans les locaux de l’ancienne école communale de Banneville-sur-Ajon située à proximité immédiate de l’église, demandent l’annulation du jugement du 17 novembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande tendant, d’une part, à l’annulation de la décision implicite du maire de la commune refusant de faire cesser le fonctionnement des cloches de l’église et, d’autre part, à la condamnation de la commune à leur verser une indemnité de 9 500 euros en réparation des préjudices causés par le bruit de ces sonneries ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : « Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l’Etat dans le département, de la police municipale, de la police rurale, et de l’exécution des actes de l’Etat qui y sont relatifs » ; qu’aux termes de l’article L. 2212-2 du même code : « La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment (…) / 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique, (…) les bruits, y compris les bruits de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants, et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique (…) » ;

3. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 27 de la loi du 9 décembre 1905 : « (…) Les sonneries des cloches seront réglées par arrêté municipal (…) / Le décret en Conseil d’Etat prévu par l’article 43 de la présente loi déterminera les conditions et les cas dans lesquels les sonneries civiles pourront avoir lieu (…) » ; qu’aux termes de l’article 51 du décret du 16 mars 1906 : « Les cloches des édifices servant à l’exercice public du culte peuvent être employées aux sonneries civiles (…) Si elles sont placées dans un édifice appartenant à l’Etat (…) ou à la commune en vertu des articles 4, 8 et 9 de la loi du 9 décembre 1905, elles peuvent, en outre, être utilisées dans les circonstances où cet emploi est (…) autorisé par les usages locaux » ; que l’usage local s’entend de la pratique suivie à l’entrée en vigueur de la loi du 9 décembre 1905 au lieu d’implantation du clocher dans lequel s’exercent les sonneries civiles ;

4. Considérant que s’il appartient au maire, en vertu des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, de prendre les mesures appropriées pour empêcher ou faire cesser, sur le territoire de sa commune, les bruits excessifs de nature à troubler le repos des habitants, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du rapport d’expertise, que les cloches de l’église de Banneville-sur-Ajon, qui sonnent les heures et les demi-heures de sept heures à dix-neuf heures ainsi que l’angélus et la sonnerie de midi, ce qui représente des sonneries d’une durée totale de dix minutes par jour, portent atteinte, par leur fréquence et leur intensité, à la tranquillité publique des habitants du village, alors même que l’émergence sonore en résultant excède les limites définies par les dispositions aujourd’hui codifiées à l’article R. 1334-33 du code de la santé publique ; qu’ainsi, en refusant d’user de ses pouvoirs de police pour en faire cesser le fonctionnement, et alors que l’existence d’un usage local antérieur à l’entrée en vigueur de la loi du 9 décembre 1905 n’est pas établie et que la pétition en faveur du maintien des sonneries signée par soixante-dix habitants de la commune environ est sans influence sur la légalité de sa décision, le maire de Banneville-sur-Ajon n’a pas méconnu les dispositions précitées ;

Sur les conclusions à fin d’indemnisation :

5. Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu’en refusant de faire cesser le fonctionnement des sonneries de l’église, le maire n’a pas commis de faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

6. Considérant que les sonneries du clocher fonctionnaient selon les modalités décrites au point 4 depuis 1984, lorsque les requérants ont fait l’acquisition en 2009 de l’immeuble situé à proximité immédiate de l’église ; que, par suite, la gêne provenant du fonctionnement de cet ouvrage public n’est pas de nature à leur ouvrir un droit à réparation sur le terrain de la responsabilité sans faute ;

7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur

la recevabilité des conclusions à fin d’indemnisation présentées en appel, que M. A… et Mme G… ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d’annulation des requérants, n’implique aucune mesure d’exécution ; que leurs conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint au maire de la commune de faire cesser les sonneries des cloches doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les dépens :

9. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de laisser à la charge de M. A… et de Mme G… les frais d’expertise d’un montant de 2 457,99 euros ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

10. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Banneville-sur-Ajon, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. A… et Mme G… demandent sur ce fondement ; que, pour le même motif, elles font également obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune, le versement de la somme demandée par les requérants, en première instance, sur le même fondement ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de ces derniers la somme que la commune de Banneville-sur-Ajon demande, au même titre, dans la présente instance ;

DÉCIDE :


Article 1er : La requête de M. A… et de Mme G… est rejetée.

Article 2 : Les frais d’expertise d’un montant de 2 457,99 euros sont laissés à la charge de M. A… et de Mme G….

Article 3 : Les conclusions de la commune de Banneville-sur-Ajon tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F… A…, à Mme B… G… et à la commune de Banneville-sur-Ajon.


Délibéré après l’audience du 31 janvier 2014, à laquelle siégeaient :

— M. Lainé, président de chambre,

 – Mme Aubert, président-assesseur,

 – M. H…, faisant fonction de premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 février 2014.


Le rapporteur,

S. AUBERTLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,
M. C…


La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 12NT00123

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