CAA de PARIS, 8ème chambre, 30 avril 2021, 20PA02759, Inédit au recueil Lebon

  • Polices spéciales·
  • Contrôle·
  • Service·
  • Agent de sécurité·
  • Activité·
  • Sanction·
  • Pénalité·
  • Établissement·
  • Manquement·
  • Mission

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 8e ch., 30 avr. 2021, n° 20PA02759
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 20PA02759
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 20 juillet 2020, N° 1912716/6-2 et 1912718/6-2
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043482153

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une demande, enregistrée le 14 juin 2019 sous le numéro 1912716, la société par actions simplifiée (SAS) Protectim Security Services a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler la décision du 9 avril 2019 par laquelle la commission nationale d’agrément et de contrôle (CNAC) du conseil national des activités privées de sécurité lui a infligé un blâme assorti d’une pénalité financière de 15 000 euros.

Par une demande, enregistrée le 14 juin 2019 sous le numéro 1912718, M. A… D…, président de la SAS Protectim Security Services, a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler la décision du 9 avril 2019 par laquelle la CNAC du conseil national des activités privées de sécurité a prononcé à son encontre un blâme assorti d’une pénalité financière de 5 000 euros.

Par un jugement n°s 1912716/6-2 et 1912718/6-2 du 21 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 septembre 2020 et 18 janvier 2021, la SAS Protectim Security Services et M. D…, président de la SAS Protectim Security Services, représentés par Me B…, demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n°s 1912716/6-2 et 1912718/6-2 du 21 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d’annuler la décision du 9 avril 2019 de la CNAC du conseil national des activités privées de sécurité infligeant à la SAS Protectim Security Services un blâme assorti d’une pénalité financière de 15 000 euros ;

3°) d’annuler la décision du 9 avril 2019 de la CNAC du conseil national des activités privées de sécurité prononçant à l’encontre de M. D… un blâme assorti d’une pénalité financière de 5 000 euros ;

4°) de mettre à la charge du conseil national des activités privées de sécurité le versement à la SAS Protectim Security Services et à M. D… d’une somme de 3 000 euros chacun sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

 – le tribunal ne s’est pas prononcé sur la violation du principe du contradictoire par les agents du conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) lors de la phase de contrôle en tant que « principe constitutionnel » découlant de l’article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 – les délibérations contestées ont été prises à l’issue d’une procédure de contrôle irrégulière dès lors que le CNAPS a méconnu le principe du contradictoire constitutionnellement garanti, les droits de la défense prévus notamment à l’article 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l’article L. 634-3 du code de la sécurité intérieure et les dispositions réglementaires de la charte de contrôle du CNAPS ; la procédure de contrôle qui est entachée d’irrégularité ne peut être régularisée par l’audition du dirigeant de la société devant la commission locale d’agrément et de contrôle (CLAC) et la CNAC ;

 – le tribunal a retenu le manquement tiré de la méconnaissance de l’obligation de contrôle des modalités d’exécution des employés par M. D… en sa qualité de dirigeant de la SAS Protectim Security Services sur lequel ne s’était pas fondé le CNAPS ; en tout état de cause, M. D… s’est conformé à cette obligation ;

 – la Cour confirmera le jugement attaqué en ce qu’il a considéré que n’étaient pas constitués les manquements tirés de la réalisation de missions d’inspection visuelle des coffres des véhicules et de leurs fouilles éventuelles, de l’armement des agents et du défaut de remise d’une tenue permettant d’identifier l’employeur ;

 – les sanctions prononcées par la CNAC méconnaissent le principe d’individualisation des peines et le principe de personnalité des peines en vertu desquels ne peut être infligée à M. D… et à la SAS Protectim Security Services une sanction administrative commise par une autre personne même si cette dernière est un salarié de l’entreprise ; or, l’inspection et la fouille des véhicules et le port d’une arme de poing de type pistolet de défense à gaz résultent de la propre initiative des salariés ou de la société donneuse d’ordres ;

 – la SAS Protectim Security Services a procédé à la régularisation des mentions obligatoires sur le panneau publicitaire affiché à l’extérieur des locaux de l’établissement de Nice dès l’issue du contrôle ce qui a été constaté par la CLAC du Sud ; par suite, c’est à tort que le tribunal a jugé que le manquement relatif à l’usage et à la récidive de documents non conformes était constitué ;

 – une tenue conforme aux exigences de l’article R. 613-1 du code de la sécurité intérieure a été remise aux agents de sécurité ;

 – l’agence de Nice ne constituait pas un établissement secondaire au sens des dispositions du code du travail ; par suite, les manquements tirés du défaut d’immatriculation de cette agence au registre du commerce et des sociétés et du défaut d’autorisation d’exercice ne peuvent être retenus par le CNAPS ;

 – aucun manquement ne peut être reproché à l’encontre de la SAS Protectim Security Services ;

 – les sanctions infligées présentent un caractère disproportionné ; M. D… n’a jamais fait l’objet de sanction par le passé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2020, le conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me C…, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la SAS Protectim Security Services et de M. D… la somme de 500 euros chacun au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

 – le code de la sécurité intérieure ;

 – le code de procédure pénale ;

 – le code des douanes ;

 – le code de commerce ;

 – le code de justice administrative ;

 – le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme F…,

 – les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

 – et les observations de Me E… substituant Me C…, avocat du conseil national des activités privées de sécurité.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Protectim Security Services, dirigée par M. D…, exerce des activités de sécurité des biens et des personnes, de surveillance et de gardiennage depuis 2004. Lors du contrôle des 6 et 19 septembre 2017 sur un site de prestations situé à Antibes ainsi qu’au sein de l’agence située à Nice, les agents de la direction territoriale Sud du conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) ont constaté plusieurs manquements au code de la sécurité intérieure. Par des délibérations des 7 juin et 10 août 2018, la commission locale d’agrément et de contrôle du Sud a prononcé à l’encontre de M. D… et de la SAS Protectim Security Services un blâme assorti de pénalités financières respectivement de 5 000 euros et de 15 000 euros. M. D… et la SAS Protectim Security Services ont saisi, les 27 juillet et 8 octobre 2018, la commission nationale d’agrément et de contrôle (CNAC) de recours administratifs préalables obligatoires contre ces délibérations. La CNAC a, par des délibérations du 18 avril 2019, prononcé à l’encontre de M. D… un blâme et une pénalité financière de 5 000 euros et à l’encontre de la SAS Protectim Security Services un blâme et une pénalité financière de 15 000 euros. La SAS Protectim Security Services et M. D… relèvent appel du jugement du 21 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l’annulation des délibérations de la CNAC du 18 avril 2019, et non du 9 avril 2019 comme mentionné à la suite d’une erreur de plume dans le jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les requérants soutenaient devant le tribunal que les agents de contrôle du CNAPS avaient méconnu le principe du contradictoire, notamment énoncé au premier paragraphe de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en n’informant pas le représentant légal de la SAS Protectim Security Services, M. D…, des faits reprochés à la société et en ne lui permettant pas de présenter ses observations, en particulier orales, avant la saisine de la CNAC. Il ressort du point 3 du jugement attaqué que les premiers juges ont répondu de manière suffisamment précise au moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire par le CNAPS. La circonstance qu’ils n’ont pas précisé que ce principe est énoncé à l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales n’entache pas d’irrégularité le jugement.


Sur la procédure suivie par le conseil national des activités privées de sécurité :

3. L’article L. 634-1 du code de la sécurité intérieure : « Les membres et les agents du Conseil national des activités privées de sécurité ainsi que les membres des commissions d’agrément et de contrôle assurent le contrôle des personnes exerçant les activités mentionnées aux titres Ier, II et II bis. Ils peuvent, pour l’exercice de leurs missions, accéder aux locaux à usage professionnel de l’employeur, du donneur d’ordres ou du prestataire de formation, à l’exclusion des locaux affectés au domicile privé, ainsi qu’à tout site d’intervention des agents exerçant les activités mentionnées aux mêmes titres Ier et II, en présence de l’occupant des lieux ou de son représentant. Le procureur de la République territorialement compétent en est préalablement informé. ». Aux termes de l’article L. 634-2 du même code : « En cas d’opposition du responsable des lieux ou de son représentant, la visite ne peut se dérouler qu’avec l’autorisation du juge des libertés et de la détention statuant au siège du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter. (…) Le responsable des lieux ou son représentant est informé de la faculté de refuser cette visite et du fait qu’en ce cas elle ne peut intervenir qu’avec l’autorisation du juge des libertés et de la détention. ». Aux termes de l’article L. 634-3 du même code : " Les membres et les agents de la commission nationale ou des commissions d’agrément et de contrôle peuvent demander communication de tout document nécessaire à l’accomplissement de leur mission, quel qu’en soit le support, et en prendre copie ; ils peuvent recueillir, sur place ou sur convocation, tout renseignement et toute justification utiles. Ils peuvent consulter le registre unique du personnel prévu à l’article L. 1221-13 du code du travail. Ils peuvent, à la demande du président de la Commission nationale ou de la commission d’agrément et de contrôle territorialement compétente, être assistés par des experts désignés par l’autorité dont ceux-ci dépendent. Il est dressé contradictoirement un compte rendu de visite en application du présent article dont une copie est remise immédiatement au responsable de l’entreprise. ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu’à la suite du contrôle sur un site de prestations de la SAS Protectim Security Services à Antibes le 9 septembre 2017, les agents du CNAPS se sont rendus le 19 septembre 2017 dans les locaux de la société situés à Nice où ils ont été reçus par Mme G… qui s’est présentée comme la « responsable de l’agence » et qui, du fait de cette qualité, a répondu aux questions des agents de contrôle et s’est vue remettre le compte-rendu de visite de l’entreprise. Si les requérants soutiennent que Mme G… n’avait pas qualité pour représenter la SAS Protectim Security Services, il résulte de l’instruction, comme il est dit ci-après au point 12 du présent arrêt, que « l’agence » de Nice devait être regardée comme un établissement secondaire de la SAS Protectim Security Services. Dans ces conditions, Mme G… a été considérée à juste titre par les agents de contrôle du CNAPS comme la responsable de cet établissement. Ni les dispositions de l’article L. 634-3 du code de la sécurité intérieure, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n’imposaient aux agents du CNAPS d’auditionner également le dirigeant de la SAS Protectim Security Services lors de leur contrôle et de lui adresser directement le compte-rendu de visite et le compte-rendu final de contrôle de l’entreprise. Les requérants ne peuvent utilement soutenir que les agents de contrôle du CNAPS auraient méconnu les dispositions de la « charte de contrôle » prévue par l’article R. 632-16-1 du code de la sécurité intérieure qui sont dépourvues de valeur réglementaire. Par suite, le CNAPS n’a pas méconnu le principe du contradictoire, ni en tout état de cause les droits de la défense. Au surplus, il ressort des mentions du compte-rendu final de contrôle de l’entreprise qu’à la suite de la visite de l’établissement de Nice, les agents du CNAPS ont demandé à M. D… de leur transmettre un descriptif détaillé des activités réalisées par cette « agence » et l’ont informé que celle-ci devait être regardée comme un établissement secondaire de la SAS Protectim Security Services en vertu de l’article R. 123-40 du code du commerce. Un échange de courriels entre les agents de contrôle, M. D… et son conseil, qui ont présenté des observations sur ce point, s’en est suivi. En outre, comme l’a relevé le tribunal, M. D… et la SAS Protectim Security Services ont pu présenter leurs observations devant la CLAC, puis lors de leurs recours administratifs et enfin devant la CNAC. Il s’ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la procédure suivie par le CNAPS serait irrégulière.

Sur les sanctions prononcées à l’encontre de la SAS Protectim Security Services :

5. En premier lieu, aux termes de l’article R. 631-4 du code de la sécurité intérieure : « Dans le cadre de leurs fonctions, les acteurs de la sécurité privée respectent strictement la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, la Constitution et les principes constitutionnels, l’ensemble des lois et règlements en vigueur, notamment le code de la route et la législation professionnelle et sociale qui leur est applicable. ». Il résulte des articles 78-2-2 et 78-2-4 du code de procédure pénale et de l’article 60 du code des douanes que seuls, d’une part, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints, sur réquisitions écrites du procureur de la République et, d’autre part, les agents des douanes, peuvent procéder à la visite des véhicules ainsi qu’à l’inspection visuelle des bagages ou à leur fouille.

6. Aux termes de l’article R. 631-11 du code de la sécurité intérieure : « A l’exception de ceux dont la loi dispose qu’ils peuvent être armés, les acteurs de la sécurité privée ne peuvent acquérir, détenir, transporter ni porter une arme dans l’exercice de leur mission et s’interdisent, dans leur communication vis-à-vis de tout client potentiel, de laisser supposer qu’ils seraient dotés d’armes, de quelque catégorie qu’elles soient, lors de l’exécution des prestations. ». Aux termes de l’article R. 631-16 du même code : « Les dirigeants s’interdisent de donner à leurs salariés, directement ou par l’intermédiaire de leurs cadres, des ordres qui les conduiraient à ne pas respecter le présent code de déontologie. Ils veillent à la formulation d’ordres et de consignes clairs et précis afin d’assurer la bonne exécution des missions (…) Les dirigeants s’assurent de la bonne exécution des missions, notamment au moyen de contrôles réguliers sur place. Dans ce cadre, les dirigeants mettent en place et tiennent à jour un registre des contrôles internes. ».

7. Il résulte de l’instruction que les agents de contrôle du CNAPS ont constaté qu’un agent de sécurité de la SAS Protectim Security Services qui exerçait ses fonctions sur le site d’Antibes était équipé d’un pistolet de défense à gaz et procédait, en outre, à l’inspection visuelle du coffre d’un véhicule souhaitant accéder à la villa du client de la société. Les requérants soutiennent que les contrats de travail conclus avec leurs employés prévoient expressément que ces derniers doivent respecter les dispositions du code de la sécurité intérieure, qu’ils ont refusé d’accéder à la demande de leur client tendant à ce que les agents de sécurité soient armés pendant leur service, que l’arme en cause ne leur appartient pas et que l’agent de sécurité a agi de sa propre initiative. Toutefois, ces éléments ne sont pas de nature à remettre en cause les constatations des contrôleurs du CNAPS, ni à exonérer la SAS Protectim Security Services de sa responsabilité dès lors qu’il lui appartenait, en sa qualité d’employeur, de s’assurer de la bonne exécution des missions de ses employés en vertu de l’article R. 631-16 du code de la sécurité intérieure. Si elle se prévaut du recrutement d’un responsable de secteur le 1er septembre 2017 dont la mission était de contrôler les conditions de réalisation des prestations sur le site d’Antibes, cette circonstance, à la supposer établie, est insuffisante pour remettre en cause la matérialité des manquements constatés par les agents de contrôle du CNAPS. Il s’ensuit que ces manquements pouvaient fonder la sanction infligée à la SAS Protectim Security Services.

8. En deuxième lieu, aux termes de l’article R. 613-1 du code de la sécurité intérieure : « Les employés des entreprises de surveillance, gardiennage et transport de fonds ainsi que ceux des services internes de sécurité mentionnés à l’article L. 612-25 sont, dans l’exercice de leurs fonctions, revêtus d’une tenue qui ne doit pas prêter à confusion avec les uniformes définis par les textes réglementaires. Cette tenue comporte au moins un insigne reproduisant la dénomination ou le sigle de l’entreprise ou, le cas échéant, du service interne de sécurité et placés de telle sorte qu’il reste apparent et lisible en toutes circonstances. ».

9. Il résulte de l’instruction que lors du contrôle sur le site de prestations situé à Antibes le 6 septembre 2017, les agents du CNAPS ont relevé que la tenue des trois agents de sécurité travaillant pour la SAS Protectim Security Services ne portait pas un insigne reproduisant la dénomination ou le sigle de l’entreprise en méconnaissance des dispositions de l’article R. 613-1 du code de la sécurité intérieure. Il ressort du compte-rendu de visite de l’établissement de Nice du 19 septembre 2017 que la responsable de cet établissement a reconnu devant les agents de contrôle que les agents de sécurité exerçant leurs fonctions sur les sites de villas revêtaient une tenue ne mentionnant pas le nom de l’entreprise et comportant la seule mention « sécurité ». Les pièces versées au dossier, notamment une liste manuscrite datée de juillet 2017 attestant de la remise de polos aux agents de sécurité et l’attestation de la responsable de l’établissement de Nice du 30 avril 2018 mentionnant que des tenues complémentaires ont été fournies aux agents en juillet et septembre 2017, ne permettent pas, en l’absence de toute mention sur ce point, de considérer que les tenues remises aux agents comportaient un insigne reproduisant la dénomination ou le sigle de l’entreprise et placés de telle sorte qu’il restait apparent et lisible en toutes circonstances. La circonstance que les agents de sécurité contrôlés étaient porteurs de leur carte professionnelle n’exonère pas ces agents de l’obligation de revêtir une tenue conforme aux exigences prévues par les dispositions de l’article R. 613-1 du code de la sécurité intérieure. Si les requérants entendent soutenir que les agents ont délibérément omis de porter leur tenue avec un tel insigne, cette circonstance, à la supposer établie, ne peut, comme il a déjà été dit, exonérer la SAS Protectim Security Services de sa responsabilité dès lors qu’il lui appartenait de s’assurer de la bonne exécution des missions de ses employés. Par suite, ce manquement est établi.

10. En troisième lieu, aux termes de l’article L. 612-15 du code de la sécurité intérieure : « Tout document qu’il soit de nature informative, contractuelle ou publicitaire, y compris toute annonce ou correspondance, émanant d’une entreprise visée à l’article L. 612-1, doit reproduire l’identification de l’autorisation administrative prévue à l’article L. 612-9 ainsi que les dispositions de l’article L. 612-14. (…) ». Il résulte de l’instruction que le panneau publicitaire affiché à l’extérieur des locaux de l’établissement de Nice ne comportait ni les mentions obligatoires prévues par les dispositions précitées du code de la sécurité intérieure, ni le numéro d’autorisation administrative prévue par l’article L. 612-9 du même code. Si les requérants soutiennent qu’ils ont procédé à la régularisation des mentions de ce panneau publicitaire avant la délibération de la CLAC, ils ne justifient pas, ni devant le tribunal ni devant la Cour, de la date à laquelle cette régularisation a été effectuée. Dans ces conditions, ce manquement doit être regardé comme établi.

11. En quatrième lieu, l’article L. 612-1 du code de la sécurité intérieure dispose que : " Seules peuvent être autorisées à exercer à titre professionnel, pour elles-mêmes ou pour autrui, les activités énumérées aux 1° à 3° de l’article L. 611-1, et à titre professionnel, pour autrui exclusivement, l’activité mentionnée au 4° du même article L. 611-1 : 1° Les personnes physiques ou morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés ; (…) « . Aux termes de l’article L. 612-9 du même code : » L’exercice d’une activité mentionnée à l’article L. 611-1 est subordonné à une autorisation distincte pour l’établissement principal et pour chaque établissement secondaire. (…) « . Aux termes de l’article R. 123-40 du code de commerce : » Est un établissement secondaire au sens de la présente section tout établissement permanent, distinct du siège social ou de l’établissement principal et dirigé par la personne tenue à l’immatriculation, un préposé ou une personne ayant le pouvoir de lier des rapports juridiques avec les tiers. ".

12. Il résulte de l’instruction que l’établissement principal de la SAS Protectim Security Services situé à Paris a en charge le recrutement des agents employés dans le secteur de Nice, la majeure partie de la gestion du personnel et de la gestion commerciale ainsi que la logistique de l’agence de Nice. Toutefois, la gestion quotidienne du personnel du secteur de Nice et l’élaboration des plannings relèvent de la compétence de la responsable de l’agence de Nice qui a également pour missions de procéder au contrôle des agents de sécurité sur les sites des prestations situés dans le secteur de Nice et d’assurer la relation avec les clients. Par ailleurs, la SAS Protectim Security Services a conclu un contrat de bail pour l’occupation du local situé à Nice pendant une durée de neuf ans pendant laquelle la société ne peut exercer que des activités de surveillance et de gardiennage. Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’agence de Nice constituait un établissement secondaire de la SAS Protectim Security Services au sens des dispositions de l’article R. 123-40 du code de commerce. Elle aurait dû ainsi faire l’objet d’une immatriculation au registre du commerce et des sociétés et disposer de l’autorisation prévue par l’article L. 612-9 du code de la sécurité intérieure. Il est constant que lors du contrôle du 19 septembre 2017, ces conditions n’étaient pas remplies. Toutefois, la SAS Protectim Security Services a procédé le 26 avril 2018 à l’immatriculation de l’établissement de Nice qui a obtenu une autorisation de fonctionnement le 28 juin 2018. Ainsi, à la date à laquelle la délibération a été prise, le manquement reproché n’était plus constitué et il n’y a pas lieu de le retenir.

13. Toutefois, eu égard à la gravité des autres manquements aux dispositions du code de la sécurité intérieure tels qu’ils sont énoncés aux points 5 à 10 de l’arrêt, la sanction d’un blâme assorti d’une pénalité financière de 15 000 euros prononcée à l’encontre de la SAS Protectim Security Services n’est pas disproportionnée. Par ailleurs, la SAS Protectim Security Services, qui devait notamment s’assurer de la bonne exécution des missions de ses employés en vertu de l’article R. 631-16 du code de la sécurité intérieure comme il a déjà été dit, n’est pas fondée à soutenir que le CNAPS a méconnu les principes de responsabilité personnelle en matière pénale et d’individualisation des peines en lui infligeant cette sanction assortie d’une pénalité financière.

Sur les sanctions prononcées à l’encontre de M. D… :

14. En premier lieu, les requérants soutiennent que les premiers juges n’ont retenu qu’un seul manquement à l’encontre de M. D… tiré de la méconnaissance de son obligation de contrôle des modalités d’exécution de leurs missions par les employés de la SAS Protectim Security Services, jugeant ainsi nécessairement infondés les autres manquements, mais que ce manquement ne saurait fonder la sanction infligée à M. D… par le CNAPS qui ne l’avait pas relevé dans le cadre de son contrôle et de la procédure disciplinaire. Toutefois, pour infliger à M. D… la sanction d’un blâme assorti d’une pénalité financière d’un montant de 5 000 euros, la CNAC s’est fondée, dans sa délibération du 18 avril 2019, sur l’inspection visuelle du coffre d’un véhicule par un agent de sécurité de la SAS Protectim Security Services qui, en outre, était équipé d’un pistolet de défense à gaz en méconnaissance des articles R. 631-4 et R. 631-11 du code de la sécurité intérieure et sur le port par trois agents de sécurité sur le site d’Antibes d’une tenue ne permettant pas d’identifier l’employeur en méconnaissance de l’article R. 613-1 du code de la sécurité intérieure. Il ressort des termes de sa demande devant le tribunal que M. D… n’a pas contesté la matérialité des faits qui lui étaient reprochés par la CNAC mais a soutenu que ces derniers ne pouvaient pas être retenus à son encontre sans méconnaître les principes de responsabilité personnelle en matière pénale et d’individualisation des peines. En jugeant que l’article R. 631-16 du code de sécurité intérieure impose aux dirigeants de sociétés de sécurité privée une obligation de contrôle des modalités d’exécution par leurs salariés des missions qu’ils leur sont confiées, que les dirigeants de sociétés de sécurité privée sont ainsi responsables du comportement de leurs salariés et, le cas échéant, des manquements commis par ces derniers au code de déontologie applicable aux personnes exerçant des activités privées de sécurité et que le CNAPS n’a donc pas méconnu le principe constitutionnel de responsabilité personnelle en matière pénale ni le principe d’individualisation des peines qui est applicable aux sanctions administratives et disciplinaires, le tribunal a répondu au moyen soulevé devant lui et a implicitement mais nécessairement considéré que la matérialité des faits retenus pas la CNAC à l’encontre de M. D…, qui n’était pas contestée, était établie. Dans ces conditions, le moyen soulevé par les requérants ne peut qu’être écarté.

15. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 5 à 9 du présent arrêt, la matérialité des faits reprochés à M. D… est établie. Or, comme l’a jugé le tribunal, il appartenait à M. D…, en sa qualité de dirigeant de la SAS Protectim Security Services de s’assurer de la bonne exécution des missions, notamment au moyen de contrôles réguliers sur place, par les employés de la société en vertu de l’article R. 631-16 du code de sécurité intérieure. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des principes de responsabilité personnelle en matière pénale et d’individualisation des peines doit être écarté.

16. En troisième lieu, à supposer même que M. D… n’a jamais été sanctionné avant les décisions en litige, la sanction de blâme et la pénalité financière de 5 000 euros qui lui ont été infligées par la CNAC n’ont pas été prises en méconnaissance du principe selon lequel les sanctions doivent être proportionnées à la gravité des faits reprochés au regard du nombre et de la nature des infractions commises.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Protectim Security Services et M. D… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par la SAS Protectim Security Services et M. D… au titre des frais liés à l’instance soit mise à la charge du conseil national des activités privées de sécurité, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, par application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SAS Protectim Security Services et de M. D… une somme de 500 euros chacun à verser au conseil national des activités privées de sécurité.


DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Protectim Security Services et de M. D… est rejetée.


Article 2 : La SAS Protectim Security Services et M. D… verseront chacun au conseil national des activités privées de sécurité une somme de 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Protectim Security Services, à M. A… D… et au conseil national des activités privées de sécurité.

Délibéré après l’audience du 12 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, premier conseiller,

- Mme F…, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2021.

Le président de la formation de jugement,


I. LUBEN

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

2

N° 20PA02759

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de PARIS, 8ème chambre, 30 avril 2021, 20PA02759, Inédit au recueil Lebon