Tribunal de commerce de Paris, 20 février 2020, n° 2017021571

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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www.nomosparis.com · 21 décembre 2021

Le 24 novembre 2021, la Cour d'appel de Paris a rendu un arrêt enrichissant en matière d'actions en réparation faisant suite à des décisions de sanction de l'ADLC pour pratiques anticoncurrentielles. Le contentieux en l'espèce oppose Cora et Supermarché Match aux entreprises sanctionnées en 2015 par l'ADLC, à savoir Senagral (devenue Eurial), Novandie, L.N.U.F. et Lactalis pour entente sur les prix entre 2006 et 2012 et répartition des volumes dans le secteur des produits laitiers en MDD, à l'exception de Yoplait qui a préféré transiger avec les appelantes. La Cour d'appel de Paris vient …

 
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Sur la décision

Référence :
T. com. Paris, 20 févr. 2020, n° 2017021571
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Numéro(s) : 2017021571

Texte intégral

82

Copie exécutoire : REPUBLIQUE FRANCAISE ASSOCIATION OLTRAMARE

[…]

X, C D, AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS YMR – Maître Yves-B RAVET

Copie aux demandeurs : 4

Copie aux défendeurs : 14 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

3 EME CHAMBRE

JUGEMENT PRONONCE LE 20/02/2020 par sa mise à disposition au Greffe

22 RG 2017021571

ENTRE:

1) SASU PROVERA FRANCE, dont le siège social est Domaine de Croissy-Beaubourg 77183 CROISSY-BEAUBOURG – RCS B 442670949

[…], dont le siège social est […], […], Croissy-Beaubourg CS30175, […]

3) SAS I J, dont le siège social est […] demanderesses assistées de Maîtres Mélanie THILL-TAYARA et Y

PROVOST du Cabinet DECHERT LLP Avocat (J096) et comparantes par V. TREHET GERMAIN-THOMAS & S. VICHATZKY Avocat (J119)

ET:

1) SA GROUPE Z, dont le siège social est […]

2) SNC Z NESTLE ULTRA-FRAIS « LNUF MDD », dont le siège social est 10 à […]

BOURGARRE – RCS B 489823856 3) SNC Z […], dont le siège social est […]

[…]

Parties défenderesses assistées de Maître Lorraine DONNEDIEU DE VABRE

TRANIE du Cabinet AARPI JEANTET ASSOCIES Avocat et comparantes par YMR – Maître Yves-B RAVET Avocat (P209) 4) SNC NOVANDIE, dont le siège social est […]

[…]

[…], dont le siège social est Zone Industrielle 46130 BIARS-SUR-CERE

- RCS B 428682447

Parties défenderesses assistées de Maîtres Hugues CALVET, E F et G H du Cabinet AARPI BREDIN PRAT Avocat (T12) et comparantes par Me C D Avocat (A575)

6) SAS A ULTRA FRAIS anciennement dénommée SENAGRAL, dont le siège social est […]

7) SAS SENAGRAL HOLDING, dont le siège social est […]

JOUY-RCS B 537955254

Parties défenderesses assistée de Maîtres Inaki SAINT-ESTEBEN et Bertrand

HOMASSEL du Cabinet AARPI VIGUIE SCHMIDT & ASSOCIES Avocat (R145) et comparant par ASSOCIATION OLTRAMARE GANTELME MAHL Avocat (R32)

8) SASU GENERAL MILLS HOLDING FRANCE, dont le siège social est […] BOULOGNE-BILLANCOURT – RCS B 433444130

9) SAS YOPLAIT FRANCE, dont le siège social est […]

BOULOGNE-BILLANCOURT – RCS B 440767549

Sd



TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017021571 JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

3 EME CHAMBRE PAGE 2

10) SAS YOPLAIT, dont le siège social est […]

Parties défenderesses assistées de Maîtres Dimitri LECAT et Jérôme D du

Cabinet FRESHFIELDS BRUCKHAUS DERINGER LLP Avocat (J007) et comparantes par Me HERNE X Avocat (B835)

APRES EN AVOIR DELIBERE

Faits:

Les SAS PROVERA France, CORA et I J, « les demanderesses », sont des entreprises de distribution alimentaire de grandes et moyennes surfaces, « GMS »>.

Les SA GROUPE Z, SAS Z NESTLE ULTRA-FRAIS, SNC Z

[…], SNC NOVANDIE, SNC ANDROS, SAS A ULTRA FRAIS,

SAS SENAGRAL HOLDING, GENERAL MILLS HOLDING FRANCE SAS, SAS YOPLAIT

FRANCE et SAS YOPLAIT, seront ci-après nommées « les défenderesses ».

Les SA GROUPE Z, SAS Z NESTLE ULTRA-FRAIS, SNC Z

[…] seront désignées ci-après < Z »>.

Les SAS GENERAL MILLS HOLDING FRANCE, YOPLAIT FRANCE et YOPLAIT seront désignées ci-après « Yoplait ».

Les < Produits » ou les «< Produits Laitiers » sont des produits laitiers frais tels que des yaourts, des fromages frais, des crèmes fraiches et desserts lactés qui sont fabriqués par les défenderesses.

Par une décision 15-D-03 du 11 mars 2015, ci-après la « Décision Produits Laitiers '>, l’Autorité de la concurrence (< ADLC ») a sanctionné l’entente entre les défenderesses. La cour d’appel de Paris, dans son arrêt en date du 23 mai 2017, a distingué deux périodes

d’entente (de décembre 2006 à septembre 2009 et de juin 2010 à décembre 2012) et un épisode dit de « guerre des prix » entre septembre 2009 et juin 2010.

Les demanderesses, qui ont acheté aux défenderesses pendant la période concernée pour 74 millions d’euros de Produits objets du litige, soutiennent que les défenderesses, en agissant comme un cartel de prix et de répartition des marchés de certains Produits Laitiers vendus aux GMS sous marque de distributeur, ci-après « MDD », leur ont causé un préjudice. Elles demandent au tribunal de condamner solidairement les défenderesses à leur verser en réparation la somme de 14,8 millions d’euros.

C’est dans ces conditions qu’est née la présente instance.

Procédure :

Par actes en date des 21, 22, 23, 27 et 29 mars 2017, remis à personnes se déclarant habilitées, les SAS PROVERA FRANCE, CORA et I J, assignent les SA GROUPE Z, SAS Z NESTLE ULTRA-FRAIS, SNC Z

[…], SNC NOVANDIE, SNC ANDROS, SAS A ULTRA FRAIS,

SAS SENAGRAL HOLDING, GENERAL MILLS HOLDING FRANCE SAS, SAS YOPLAIT

FRANCE et SAS YOPLAIT.

d 5.


94

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3 EME CHAMBRE PAGE 3

Par cet acte et aux audiences en date des 8 septembre et 3 novembre 2017, 4 mai 2018 et 25 janvier 2019, les SAS PROVERA FRANCE, CORA et I J demandent, compte tenu de leurs dernières modifications, au tribunal de :

Vu les articles 122, 384, 385 et 394 du CPC;

Donner acte à Provera France, Cora et J de ce qu’elles se désistent, par les présentes conclusions, de leur demande à l’encontre de Andros SNC, Senagral Holding et General

Mills Holding France SAS;

Constater ce désistement et, par voie de conséquence, le dessaisissement du tribunal de céans et ce uniquement en ce qui concerne la demande de Provera France, Cora et J à

l’encontre de Andros SNC, Senagral Holding et General Mills Holding France SAS ;

Prononcer une décision de dessaisissement.

Ainsi que :

Vu l’article 31 du Code de procédure civile; Vu l’article 46 du Code de procédure civile;

Vu l’article L. 420-7 du Code de commerce ;

Vu l’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

Vu l’article L. 420-1 du Code de commerce ; Vu la Directive européenne n°2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014;

Vu les articles L. 481-1. L. 481-2. L. 481-4. L. 481-7, L. 481-8 et L. 481-9 du Code de commerce;

Vu les articles 1240, 1343-1 et 1343-2 du Code civil;

Vu l’article 515 du Code de procédure civile; Vu l’article 700 du Code de procédure civile;

DECLARER les sociétés Groupe Z, Z Nestlé Ultra Frais MDD, Z Beurres

& Crèmes, Novandie SNC, A Ultra Frais (anciennement Senagral), Yoplait France et

Yoplait SAS solidairement responsables du préjudice subi par les sociétés Provera France, Cora et I J du fait du surprix payé sur ses achats de Produits, tout au long de la période infractionnelle retenue par la Décision Produits Laitiers mais également jusqu’à décembre 2015;

EN CONSEQUENCE de :

CONDAMNER, solidairement, les sociétés Groupe Z, Z Nestlé Ultra Frais MDD, Z Beurres & Crèmes, Novandie SNC, A Ultra Frais (anciennement Senagral),

Yoplait France et Yoplait SAS à leur verser :

A titre principal, la somme minimum de 7,6 millions d’euros, à parfaire, correspondant

au préjudice direct et indirect (préjudice d’ombrelle) subi du fait du cartel;

A titre subsidiaire, la somme minimum de 6,2 millions d’euros, à parfaire, correspondant au préjudice subi, intégrant le pass-on, telle que cela ressort des conclusions du Rapport Récapitulatif RBB, à laquelle vient s’ajouter la somme minimum de 1 million d’euros, à parfaire, liée à la perte de clientèle pour les sociétés

Provera, Cora et I J, soit un total de 7,2 millions d’euros, à parfaire ;

4.A


gs

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017021571 JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

3 EME CHAMBRE PAGE 4

En tout état de cause, le montant des dommages et intérêts qui sera octroyé aux sociétés Provera, Cora et I J devra être actualisé en tenant compte du coût moyen pondéré du capital des sociétés Cora et I J ou, alternativement, du taux de financement marginal des sociétés Cora et

I J, pour toute la période pendant laquelle elle a subi un préjudice et jusqu’à complet paiement des sommes correspondantes par les sociétés Groupe Z, Z Nestlé Ultra Frais MDD, Z Beurres & Crèmes, Novandie SNC,

A Ultra Frais (anciennement Senagral), Yoplait France et Yoplait SAS;

ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir;

CONDAMNER, solidairement, les sociétés Groupe Z, Z Nestlé Ultra Frais MDD, Z Beurres & Crèmes, Novandie SNC, A Ultra Frais (anciennement Senagral), Yoplait France et Yoplait SAS sur le fondement de l’article

700 du Code de procédure civile, à payer aux sociétés Provera France, Cora et I J la somme de 700.000 euros au titre des frais qu’elles ont exposés, outre les dépens.

Aux audiences en date des 8 septembre, 20 octobre et 1er décembre 2017, 21 septembre 2018 et 29 mai 2019, la SA GROUPE Z demande, compte tenu de ses dernières modifications, au tribunal de :

Vu les articles 31, 32, 122, 515 et 700 du Code de procédure civile;

Vu l’article 1240 du Code civil;

[…],

Déclarer irrecevable les demandes formées par la société PROVERA en ce qu’elle n’est pas recevable à agir;

A TITRE PRINCIPAL,

Débouter les sociétés PROVERA FRANCE, CORA et I J de

l’ensemble de leurs demandes à l’encontre de la société GROUPE Z ;

Et par conséquent,

Condamner in solidum les sociétés PROVERA FRANCE, CORA et I

J à verser à la société GROUPE Z la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile;

Condamner in solidum les sociétés PROVERA FRANCE, CORA et I

J aux entiers dépens.

Aux audiences en date des 8 septembre, 20 octobre et 1er décembre 2017, 21 septembre 2018 et 29 mai 2019, les SAS Z NESTLE ULTRA-FRAIS et SNC Z

[…] demandent, compte tenu de leurs dernières modifications, au tribunal de :

Vu les articles 31, 32, 122, 515 et 700 du Code de procédure civile;

Vu l’article 1240 du Code civil;

A 4…


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3 EME CHAMBRE PAGE 5

[…],

Déclarer irrecevables les demandes indemnitaires formées par la société PROVERA en ce qu’elle n’est pas recevable à agir;

A TITRE PRINCIPAL;

Rejeter les demandes indemnitaires formées par les sociétés CORA et I J, qui échouent à apporter la preuve d’un préjudice à indemniser dès lors que : L’estimation du préjudice direct hors intérêts repose sur des choix de période incohérents et des choix de méthode contestables;

Le préjudice d’ombrelle hors intérêts est supposé et non démontré ;

EN TOUTE HYPOTHESE,

Constater que les sociétés CORA et I J ont sous-évalué la répercussion (pass-on) d’un éventuel surprix et surévalué des intérêts de retard;

EN CONSEQUENCE,

Débouter les sociétés PROVERA FRANCE, CORA et I J de

l’ensemble de leurs demandes ;

Condamner in solidum les sociétés PROVERA France, CORA et I J

à verser aux sociétés LNUF MDD et Z BC la somme de 100.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile;

Condamner in solidum les sociétés PROVERA FRANCE, CORA et I

J aux entiers dépens.

Aux audiences en date des 8 septembre, 20 octobre et 1er décembre 2017, 2 novembre

2018 et 29 mai 2019, la SNC NOVANDIE demande, compte tenu de ses dernières modifications, au tribunal de :

Vu les articles 31, 32 et 122 du code de procédure civile; Vu les articles 2 et 1240 (anciennement 1382) du Code civil;

A TITRE LIMINAIRE :

DIRE ET JUGER que Provera est dépourvue de tout droit d’agir, de sorte que son action est irrecevable;

SUR LE RESTE :

DIRE ET JUGER qu’en vertu du principe de non rétroactivité de la loi et du texte de la Directive 2014/104/UE, seul le droit commun de la responsabilité délictuelle de l’article 1240 (anciennement 1382) du code civil est applicable à l’action des Demanderesses et qu’aucune présomption ne s’applique à cet égard;

DIRE ET JUGER que Cora et I J (et le cas échéant, Provera) ne rapportent aucune preuve de l’existence d’un lien de causalité entre la faute de Novandie et le préjudice allégué ;

G.A


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3 EME CHAMBRE PAGE 6

DIRE ET JUGER que Cora et I J (et le cas échéant, Provera) ne démontrent pas l’existence d’un préjudice direct, certain et personnel ;

EN CONSEQUENCE :

REJETER la demande d’indemnisation que Cora et I J (et le cas échéant,

Provera) formulent à l’encontre de Novandie ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER in solidum les Demanderesses aux entiers dépens et à la somme de 80.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’audience du 29 mai 2019, la SNC ANDROS demande au tribunal de :

Vu les articles 394, 395, 399 et 700 du Code de procédure civile;

Donner acte à Andros SNC de ce qu’elle accepte, par les présentes conclusions, le désistement d’instance des Demanderesses à son encontre ;

Déclarer parfait ce désistement d’instance ;

Dire et juger en conséquence éteinte l’instance à l’encontre d’Andros SNC pendante devant la juridiction de céans.

Aux audiences en date des 8 septembre, 20 octobre et 1er décembre 2017, 21 septembre 2018 et 29 mai 2019, les SAS A ULTRA FRAIS et SENAGRAL demandent, compte tenu de leurs dernières modifications, au tribunal de :

Vu les articles 31 et 122 du Code de procédure civile; Vu l’article 1240 du Code civil;

1. Dire et Juger que Provera France ne justifie pas d’un intérêt à agir ;

En conséquence

Dire et juger irrecevable la demande de Provera France;

2. Constater que l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 23 mai 2017 rendu sur recours contre la Décision de l’Autorité n° 15-D-03 du 11 mars 2015 a retenu que Senagral Holding n’avait pris aucune part aux pratiques sanctionnées par cette Décision;

Dire et juger que les demanderesses ne reprochent aucune faute à Senagral Holding;

En conséquence

Dire et juger que Senagral Holding doit être mise hors de cause ;

3.1. Dire et juger que Provera ne rapporte pas la preuve d’un lien de causalité entre les pratiques reprochées à Senagral et les préjudices allégués ;

CrA


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JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

3 EME CHAMBRE PAGE 7

3.2. Dire et juger que Provera ne démontre pas avoir subi un préjudice actuel, direct et certain ;

En conséquence,

Rejeter la demande indemnitaire de Provera ;

4. Condamner Provera à verser à Senagral la somme de 50.000 € au titre de l’article 700 du

CPC;

Condamner Provera aux entiers dépens.

A l’audience du 26 juin 2019, la SAS SENAGRAL HOLDING demande de surcroît au tribunal

de :

Vu les articles 394 à 399 et 700 du code de procédure civile;

Donner acte à Senagral Holding de ce qu’elle accepte le désistement d’instance de Provera

à son égard ;

En conséquence :

Dire et juger que la présente instance est éteinte à l’égard de Senagral Holding.

Aux audiences en date des 20 octobre et 1er décembre 2017, 21 septembre 2018, 29 mai et

26 juin 2019, les SAS YOPLAIT France et YOPLAIT demandent, compte tenu de leurs dernières modifications, au tribunal de :

1. À titre principal :

Vu les articles 31, 32 et 122 du Code de procédure civile;

Vu la décision de l’Autorité de la Concurrence n° 15-D-03 du 11 mars 2015 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des produits laitiers frais;

CONSTATER que la société Provera France est dépourvue de qualité à agir dans le cadre de la présente instance;

En conséquence:

DECLARER irrecevables les demandes formées par la société Provera France à l’encontre des sociétés Yoplait France et Yoplait SAS ;

2. À titre subsidiaire :

Vu l’article 1240 (ancien article 1382) du Code civil,

Constater la carence probatoire des sociétés Provera France, Cora et I J s’agissant de la démonstration de leur préjudice;

A S.


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3 EME CHAMBRE PAGE 8

Constater caractère infondé des demandes indemnitaires formées par les sociétés Provera France, Cora et I J;

En conséquence :

DEBOUTER les sociétés Provera France, Cora et I J de l’ensemble de leurs demandes ;

3. En tout état de cause :

Vu l’article 515 du Code de procédure civile;

REJETER la demande d’exécution provisoire ;

CONDAMNER in solidum les sociétés Provera France, Cora et I J à payer aux sociétés Yoplait France et Yoplait SAS la somme de 30.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;

Condamner in solidum les sociétés Provera France, Cora et I J aux entiers dépens de l’instance.

Aux audiences en date des 20 octobre et 1er décembre 2017, 21 septembre 2018 et 29 mai

2019, la SAS GENERAL MILLS HOLDING FRANCE demande, compte tenu de ses dernières modifications, au tribunal de :

Vu les articles 334, 394, 395, 399 et 700 du Code de procédure civile; Vu les conclusions de désistement d’instance régularisées par Provera le 25 janvier 2019;

DONNER ACTE à la société General Mills Holding France SAS de ce qu’elle accepte le désistement d’instance des sociétés Provera France SAS, Cora et I J

SAS à son encontre ;

Dire bien fondée la demande de la société General Mills Holding France SAS de mettre à la charge des sociétés Provera France SAS, Cora et I J SAS une partie des frais irrépétibles supportés par ces dernières (sic) ;

En conséquence :

Constater l’extinction de la présente instance à l’égard de General Mills Holding SAS;

Prononcer le dessaisissement du Tribunal à l’égard de General Mills Holding SAS;

Condamner les sociétés Provera France SAS, Cora et I J SAS à payer à la société General Mills Holding France SAS la somme de 20.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;

Condamner les sociétés Provera France SAS, Cora et I J SAS aux entiers dépens de l’instance.

S in.



A00

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3 EME CHAMBRE PAGE 9

L’ensemble de ces demandes a fait l’objet du dépôt de conclusions. Celles-ci ont été échangées en présence d’un greffier qui en a pris acte sur la cote de procédure ou elles ont été régularisées par le juge chargé d’instruire l’affaire en présence des parties.

A l’audience en date du 13 novembre 2019 à laquelle cette ire est appelée pour plaidoiries, le président présente un rapport dans les conditions de l’article 870 du CPC. Après avoir entendu les parties en leurs explications et observations, le tribunal clôt les débats, met l’affaire en délibéré et dit que le jugement sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 20 février 2020 dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du CPC.

Moyens des parties :

A l’appui de leurs demandes, les demanderesses font principalement valoir que : Provera France est la société de référencement alimentaire d’un certain nombre

d’enseignes et négocie les conditions tarifaires comme mandataire des enseignes Cora et J. Provera est donc fondée à agir dans cette instance, même si elle ne réalise aucun achat en propre. Les défenderesses confondent intérêt à agir et existence d’un préjudice ; La part de marché cumulée de Cora et de J sur le marché de la distribution à M

dominante alimentaire en France est de l’ordre de 2,9 % alors que les défenderesses représentent environ 70 % du marché français des produits laitiers vendus sous

MDD;

Les pratiques litigieuses ont été reconnues par Z et Novandie (via une non contestation des griefs devant l’ADLC). Yoplait a été le premier demandeur de G et Senagral le second ;

Les pratiques ont été concertées entre le 6 décembre 2006 et le 9 février 2012;

o Entre le 6 décembre 2006 et le 17 décembre 2008 et entre le 4 janvier 2011 et le 9 février 2012 sur des taux de hausses de prix;

o Entre le 15 juin 2010 et le 9 février 2012 sur des répartitions de volumes; Du 6 décembre 2006 au 9 février 2012, les achats de Provera aux défenderesses sur les Produits objets du litige ont représenté 74 M € (soit 32,7 M € auprès de Novandie,

23,9 M € auprès de Z, 15,8 M € auprès de Senagral et 1,7 M € auprès de Yoplait); Les hausses tarifaires étaient annoncées par des courriers similaires envoyés par les membres du cartel aux clients et ce dans les jours suivant les réunions avérées des membres dudit cartel. Ces hausses étaient motivées, par exemple, par une hausse de 3,5 % du prix du lait, de 20 % du coût des emballages, des transports ou de

l’énergie. Fin 2007, les prix ont augmenté de 10 % en moyenne par rapport à début 2007. En juin 2010, les prix étaient toujours supérieurs à 5 % à ceux de début 2007. La période retenue par l’ADLC court du 6 décembre 2006 au 9 février 2012, soit sur plus de 5 ans. Provera a été victime du cartel pendant toute cette période, y compris entre septembre 2009 et juin 2010 période qualifiée par l’ADLC d'« épisode de guerre des prix » mais également jusqu’à fin 2015 en raison de l’effet d’inertie du cartel;

Z a été condamnée par l’ADLC à une sanction de 43,4 M€, Novandie à 35 M€, Senagral à 20 M€ et Yoplait à 0 € et la condamnation par l’ADLC suffit, à elle seule, à prouver l’existence d’une faute civile à l’encontre des demanderesses. La présomption irréfragable de faute est acquise car la décision de l’ADLC est définitive. La faute résultant de l’entente étant établie, il s’en infère nécessairement un

f S.


sop TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017021571

JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

PAGE 10 3 EME CHAMBRE

préjudice, serait-il simplement moral, qui doit être indemnisé selon la jurisprudence constante de ce tribunal ;

La responsabilité de Groupe Z, en sa qualité de maison-mère détenant la quasi-totalité de sa filiale Z, est engagée même si elle n’a pas pris une part personnelle à l’infraction car elle a exercé une influence déterminante sur le comportement de sa filiale ;

L’étude RBB est particulièrement robuste car elle est basée sur 2.746 références et plus de 130.000 observations. Les comparaisons d’indices de prix ont été faites par RBB en reprenant trois courbes: les MDD affectées par l’entente, les MDD non affectées par l’entente et les marques de fabricants ci-après « MDF » ;

La période de « guerre des prix » n’a pas interrompu l’entente: les échanges

-

d’information entre les défenderesses ont continué, le surprix étant alors de 5 % au lieu de 10 % ;

Sans ambiguïté, le cartel avait pour objectif de coordonner la répercussion aux GMS de la hausse du prix du lait et de tirer parti de cette hausse pour imposer

d’importantes hausses tarifaires aux distributeurs : le prix du lait représente environ 23 % du prix de gros d’un yaourt et lorsque le prix du lait a augmenté de 22 % en 2007, le coût des yaourts n’aurait dû augmenter que de 5 % et non de 10 % comme il a été observé à la suite de l’entente;

Les MDF et MDD non affectées par l’entente ont vu leurs prix augmenter en raison de la hausse du prix du lait mais de façon moindre (2% environ au lieu de 10 %); Le jugement du tribunal de céans du 26 mars 2018 sur les exceptions ne prend pas en compte le principe d’effectivité du droit communautaire qui, sur la question du

< pass-on », présume une non-répercussion sur le marché de la hausse subie par la victime du cartel;

Sur l’évaluation du préjudice :

RBB a utilisé la méthode des « doubles différences » entre l’évolution des prix entre un groupe de produits affectés par le cartel et un groupe de contrôle de produits voisins (d’une part des MDD non affectées et des MDF d’autre part). Cette méthode est la plus pertinente et la plus robuste. Les produits sous MDD non affectées sont peu nombreux car le cartel a touché 90 % du marché. Les produits sous MDF représentent un groupe de contrôle pertinent comme l’ont relevé l’ADLC et la Cour

d’appel; Les hausses de prix ne commencent qu’à partir de septembre 2007. Cora a constaté

-

des surprix de 7,3 % (période de cartel) et de 5,3 % (guerre des prix). J a constaté des surprix de 8,3 % (cartel) et de 7,2 % (guerre des prix). L’effet d’inertie a duré 4 ans (jusqu’en décembre 2015) et engendré des surprix de 4,8 % pour Cora et 4,3 % pour J. Le préjudice total direct est de 5,3 M€ pour Cora et de 1,5 M€ pour

J;

RBB estime, de surcroît, un effet d’ombrele de 0,6 M€ pour Cora et de 0,2 M€ pour J en conséquence des achats faits par Provera pour un total de 23,1 M€ pendant la période à des fournisseurs non membres du cartel; Le taux de « pass-on » calculé par Cora est de 32,7 % et de 35,4 % pour J. Le

-

taux de « pass-on » de près de 100 % tel que mentionné par les défenderesses fait référence au taux de répercussion du prix du lait dans les prix de détail des desserts lactés et n’est pas applicable aux produits concernés par l’entente. Cora et J ont cherché à maintenir un écart de prix constant entre les MDD et les MDF et ceci explique des taux de « pass-on » de 32,7 % et 35,4 % ; La perte de volumes (de l’ordre de 1 à 2 % suivant les périodes) a engendré un préjudice supplémentaire de 1 M€ pour Cora et de 0,2 M€ pour J;

ů.A


sor

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Le manque à gagner (généré par des clients changeant d’enseigne) est évalué à 1

M€ ; Le préjudice de Cora et J doit être actualisé sur la base de leur coût moyen pondéré du capital « WACC » ou à défaut sur la base du taux marginal de financement soit 1,6 M€ pour Cora et 0,4 M€ pour J;

La responsabilité solidaire des défenderesses est engagée ;

Sur le désistement d’instance à l’égard d’Andros, Senagral Holding et General

Mills Holding France : Compte tenu des dernières écritures de ces défenderesses et compte tenu de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 23 mai 2017, Provera considère qu’il n’y a pas lieu de les poursuivre et demande qu’il lui soit donné acte de son désistement à leur encontre.

En réplique, la SA Groupe Z fait principalement valoir que :

Z Beurres et Crèmes a été condamnée par l’ADLC et cette condamnation a été confirmée par la Cour d’appel de Paris ; La société Groupe Z a été condamnée en sa qualité de maison mère de sa filiale Z BC ayant exercé une influence déterminante sur le comportement de sa filiale pendant la commission des pratiques. Les demanderesses font un amalgame entre Groupe Z (qui ne fabrique pas de produits laitiers et n’a jamais participé aux pratiques sanctionnées) et sa filiale ; Provera n’est qu’une centrale de référencement et n’a pu, par définition, subir le moindre préjudice du fait des pratiques sanctionnées. Provera ne peut évoquer la moindre prétention et n’a pas d’intérêt à agir et sera donc déclarée irrecevable;

L’ordonnance du 9 mars 2017 (et les articles L 481-1 et L 481-2 qui en découlent) ne sont pas applicables à la présente instance, le fait générateur s’étant achevé le 9 février 2012: la responsabilité de Groupe Z ne peut être engagée sur le fondement des articles 1240 et 1241 du Code civil car Groupe Z n’a pas commis de faute.

En réplique et pour leur part, la SAS Z NESTLE ULTRA FRAIS et la SNC Z […] font principalement valoir que :

Provera France n’est pas recevable à agir;

-

La décision de l’ADLC a indiqué qu’un surprix pouvait être identifié pour la première A

phase de l’entente mais ne retient aucun surprix après cette date;

La Cour d’appel distingue dans son arrêt du 23 mai 2017:

O Une première période d’entente (de 12/06 à 09/09);

O Un épisode de guerre des prix (de 09/09 à 06/10);

O Une seconde période de l’entente (de 06/10 à 12/12); et dit que la période contrefactuelle ne peut être antérieure à décembre 2006, que la période de guerre des prix pouvait être prise comme contrefactuelle et qu’un effet d’inertie de 10 mois pouvait être retenu; Le fait générateur s’étant achevé le 9 février 2012, soit avant le 11 mars 2017,

l’ordonnance transférant la Directive européenne sur les actions indemnitaires n’est pas applicable comme le confirme le jugement du 26 mars 2018 du tribunal de céans ;

La méthode des doubles différences n’a pas été appliquée au présent litige de manière incontestable, car le groupe de comparaison est mal adapté, la période contrefactuelle est très courte (19 mois) contre une période affectée très longue (99 mois), les données de prix sur les produits sous MDF sont indisponibles au début de

A G.



A03

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la période et les MDD non affectés constituent un groupe très étroit et peu représentatif; Provera retient un début des pratiques en octobre 2007 alors que l’ADLC et la Cour

-

d’appel retiennent décembre 2006 ce qui modifie la période contrefactuelle et fausse les calculs. Provera ne retient pas la période de guerre des prix comme période contrefactuelle ce qui conduit à majorer le préjudice, prend un effet d’inertie de 4 ans contre 10 mois pour l’ADLC ce qui conduit à une majoration du préjudice et omet de prendre en compte la fluctuation des cours du lait ; RBB retient des référentiels de MDD affectés sur des périodes très courtes où les prix sont bas ce qui conduit à surestimer fortement le surprix, ne prend les MDF qu’à partir de 2009, au motif que « les prix n’ont pu être retrouvés » et les compare sur une base 100 en janvier 2007 pour les MDD et en janvier 2009 pour les MDF ce qui est une hérésie : le cabinet Lexecon, conseil de Z, après avoir ajusté les dates de référence des deux indices, démontre qu’il n’y a plus aucun effet des pratiques ;

Les produits MDD non affectées constituent un groupe trop étroit pour être P

représentatif; En prenant le prix du lait comme variable de contrôle, le surprix se trouve dans une fourchette de 1 % à 2 %;

Le préjudice d’ombrelle n’est pas établi; Un faisceau d’índices suggère que le « pass-on » est largement supérieur à 35 %;

O Des travaux académiques conduisent pour les MDF à un taux de 83 % et de

100 % pour les MDD ;

Les consommateurs de MDD ne peuvent opposer un contre-pouvoir significatif aux distributeurs ce qui permet aux distributeurs de répercuter les hausses;

La Cour d’appel de Paris confirme la faible sensibilité des consommateurs au O prix de ces produits permettant aux distributeurs de répercuter la totalité de la hausse subie; Les pratiques ont visé l’ensemble de la grande distribution de sorte qu’un O distributeur qui transmet le surprix n’est pas pénalisé par rapport aux autres distributeurs ; La perte de volume associée au « pass-on » n’est pas documentée au motif du

< secret des affaires » ;

Provera ne démontre pas pourquoi il convient d’utiliser le « WACC » pour actualiser le préjudice allégué;

Deux ans de procédure et quatre rapports RBB mettent en évidence l’incapacité des demanderesses à apporter la preuve du quantum du préjudice allégué ; La demande au titre de l’article 700 est exorbitante.

En réplique, la SNC Andros fait principalement valoir que : Andros, société sœur de Novandie, n’a jamais été visée par l’ADLC et aucune faute ne peut être reconnue contre eile;

Andros accepte le désistement des demanderesses à son encontre.

En réplique, Novandie fait principalement valoir que : Novandie est prise en étau entre une forte exposition à la volatilité du prix du lait en France (+7,4 % en 2007, + 16,1 % en 2008, +8,7 % en 2010 et + 8 % en 2011) et le fort pouvoir de négociation de la grande distribution qui empêche de répercuter les hausses (92 % des ventes passent par les GMS dont 50 % dans les MDD); Les dispositions de la Directive Dommages ne sont pas applicables à l’espèce et la preuve de l’absence de répercussion de la hausse incombe à Provera ;

s 5.


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Provera échoue à apporter la preuve d’un quelconque lien de causalité direct, personnel et certain entre les pratiques sanctionnées par l’ADLC et le préjudice allégué ;

La raison principale de la hausse des prix des produits sous MDD est la hausse du

-

prix du lait et non les pratiques condamnées par l’ADLC ; Les lettres de demandes de hausse des prix, à la suite de la hausse des prix du lait, F

ne caractérisent pas la hausse effective auprès des distributeurs en raison du pouvoir de négociation ultérieur des distributeurs ;

Pendant l’épisode dit de « guerre des prix », Novandie a baíssé ses prix de 10 %.

-

L’ADLC et la Cour d’appel reconnaissent l’absence de tout surprix entre cette période de guerre des prix et la fin de pratiques en février 2012 ; Provera a sans cesse et tellement modifié ses formules mathématiques et ses M

données de prix d’achat au cours de cette instance que la valorisation du préjudice est incertaine ; La méthodologie est entachée d’erreurs manifestes qui ôtent toute crédibilité à la

-

valorisation comme :

O Retenir une date de début des pratiques différente de celle de l’ADLC et de la Cour d’appel de Paris rendant le préjudice allégué beaucoup plus élevé ; Considérer la période de guerre des prix comme une période affectée par les O pratiques avec un effet identique de gonflement du préjudice ; Soutenir que les effets des pratiques ont duré pendant 45 mois après leur O arrêt, contre 10 mois retenus au maximum par l’ADLC et la Cour d’appel; Choisir un groupe de contrôle non pertinent pour déterminer le scénario O contrefactuel ;

Choisir de faire débuter les données du groupe de contrôle MDF en janvier O

2009 au lieu de janvier 2007 et ceci entache l’analyse d’une incohérence manifeste ;

Dire que les prix des MDD non affectés sont à la fois épargnés par les pratiques et affectées d’un effet d’ombrelle; L’effet d’ombrelle est non démontré ;

Le taux de « pass-on » tel que calculé par Provera a été minoré : l’étude N de 2015 aboutit à un taux de 83 % pour tous les produits laitiers et un taux de 100 % pour les MDD;

Provera ne démontre rien sur un effet volume ou un gain manqué en se retranchant derrière le secret d’affaires : ce refus de communication suffit à rejeter ce moyen;

Provera n’a pas perdu de volumes pendant la période concernée ; La demande de capitalisation au taux du « WACC » n’est pas justifiée ; La condamnation solidaire n’est pas justifiée car Novandie a été à l’origine de la

-

guerre des prix et la demande d’exécution provisoire n’est pas compatible avec la nature de l’affaire.

En réplique, A Ultra Frais et Senagral Holding font principalement valoir que : Senagral connait de grandes difficultés depuis 2011 en raison de la forte fluctuation du prix du lait comme reflété dans les paragraphes 22 et 307 de la décision de l’ADLC. Son résultat d’exploitation a été constamment négatif entre 2010 et 2015 et pour cette raison, la Cour d’appel a réduit de 57 % le montant de la sanction infligée ; Le rapport Canivet de 2004 souligne le pouvoir de négociation de la grande 4

distribution qui représente 92 % du débouché des producteurs de produits laitiers ;

Provera France n’ayant eu à subir aucun surprix sera déclarée irrecevable;

-

Le lien de causalité entre faute et préjudice doit être direct et certain ; Les seuls documents visés par la décision de l’ADLC relatifs à Senagral concernent

Carrefour et non Provera et ce pour 2011 seulement ;

S.



Mos

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Les propositions adressées par Senagral à Provera en 2011 sont motivées

-

exclusivement par la hausse du prix du lait et Provera ne démontre pas qu’elle les a acceptées ;

D’après l’ADLC et la Cour d’appel, la période de guerre des prix peut servir de période contrefactuelle et la période postérieure a été marquée par une absence de surprix; Provera échoue à démontrer que Senagral lui a causé un préjudice à partir de

-

septembre 2009 et n’apporte aucune preuve d’un lien de causalité avec les pratiques ;

La méthode retenue par RBB repose sur 3 postulats erronés :

o RBB retient le début des pratiques en octobre 2007 contre décembre 2006 pour l’ADLC ce qui gonfle le préjudice de 4 M€ ; RBB fait durer les effets des pratiques jusqu’en janvier 2016 (soit 4 ans au lieu O de 10 mois pour l’ADLC) ce qui gonfle le préjudice de 6 M€ ;

RBB considère la période de guerre des prix comme une période d’entente ce O

qui gonfle le préjudice de 5 M€ ; Les données relatives aux produits MDF n’existent pas avant 2009 et les données

-

relatives aux MDD non affectées ne sont pas représentatives. L’étude alternative de

Deloitte, commandée par Senagral, conduit à l’absence d’un surprix; Les taux de « pass-on » calculés par les demanderesses, à titre subsidiaire, varient entre 32% et 38% et ne sont pas fiables :

o L’étude Deloitte sur les produits laitiers MDD conduit à un « pass-on » élevé ;

O D’autres études montrent un « pass-on » proche de 100 %;

Provera soutient que le « pass-on » partiel reconnu a entrainé une baisse de ses volumes mais en s’appuyant sur une étude théorique qui ne fait pas le distinguo entre MDD et MDF, et Provera ne produit aucune étude spécifique à l’espèce ;

Provera postule, sans le démontrer, que 0,01 % de ses clients auraient changé

d’enseigne de ce fait et aucun effet d’ombrelle n’est démontré ; Provera ne justifie en rien que l’application du « WACC » soit justifié dans cette espèce;

Senagral Holding accepte le désistement d’instance de Provera à son encontre.

En réplique, les SAS Yoplait et Yoplait France font principalement valoir que : Provera France n’est qu’une centrale de référencement et n’achetant jamais de produits n’a pu subir de préjudice et sera donc déclarée irrecevable en ses demandes ;

Provera n’établit aucun lien de causalité entre les pratiques sanctionnées et les préjudices allégués ;

O Les courriers cités sont des demandes de hausse de prix et ne sont pas représentatifs des prix qui ont été effectivement pratiqués après négociation;

Provera ne prend pas en compte la hausse du prix du lait qui est O indépendante des pratiques sanctionnées (370 € pour 1000 litres en 2008 contre 250 € en 2006);

O Le lait représente environ 23 % du prix du yaourt; Les rapports RBB successifs ne démontrent pas l’existence du préjudice allégué ; La méthode employée par RBB (« doubles différences ») n’est pas utilisée de manière pertinente en raison de données défaillantes :

O Le premier groupe de contrôle utilisé par RBB (MDF) n’est pas approprié car aucune donnée n’est disponible entre 2007 et 2009;

Le second groupe de contrôle utilisé par RBB (MDD hors infraction) O représente des volumes très faibles dans les achats de Provera et n’est donc pas représentatif ;

A


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o Provera fait démarrer la période d’infraction à octobre 2007 alors que l’ADLC dit que les pratiques ont débuté le 6 décembre 2006 ce qui exclut la très forte hausse du prix du lait entre décembre 2006 et octobre 2007;

o La période de guerre des prix n’est pas incluse dans la période de référence;

La date de fin de la période affectée n’est pas justifiée ; O

Le préjudice d’ombrelle n’est pas démontré ;

Le taux de < pass-on » retenu par les demanderesses est sujet à caution; Le préjudice consécutif à la baisse des volumes n’est pas justifié ; Le cabinet NERA, mandaté par Yoplait, conclut à l’absence de préjudice ;

-

La démonstration de l’utilisation du « WACC » n’est pas faite;

La condamnation in solidum n’est pas pertinente car, en cas de condamnation, il est

-

possible de la répartir à due proportion des ventes faites par chaque codéfendeur.

En réplique, la SAS GENERAL MILLS HOLDING FRANCE fait principalement valoir que : Elle ne fait pas partie des entités sanctionnées par l’ADLC et n’est mentionnée que comme ayant accompagné la demande de G ; Aucune vente n’a été réalisée entre les demanderesses et GMHF ;

Provera s’est désistée à son encontre le 25 janvier 2019.

Sur ce, le tribunal

Sur la recevabilité de Provera France à agir

Attendu que Z, Novandie, A et Yoplait soulèvent in limine litis l’irrecevabilité de

Provera France;

Attendu que les débats ont montré que la SAS Provera France n’avait acheté aucun des

Produits objets de cette instance pour elle-même mais les avait négociés en sa qualité de mandataire des SAS CORA et I J;

Attendu que Provera France ne démontre pas avoir subi un quelconque préjudice du fait des pratiques alléguées ni même un préjudice indirect dans l’exécution de son mandat et ne démontre donc pas avoir un intérêt à agir ;

Le tribunal en prendra acte et déclarera Provera France irrecevable et en conséquence déboutera Provera France de l’ensemble de ses demandes.

Sur le désistement d’instance des demanderesses à l’égard d’Andros, Senagral

Holding et General Mills Holding France

Attendu que compte tenu des dernières écritures de ces défenderesses et compte tenu de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 23 mai 2017, les demanderesses considèrent qu’il n’y a pas lieu de les poursuivre ;

Attendu que les sociétés Andros, Senagral Holding et General Mills Holding France acceptent ce désistement d’instance à leur encontre ;

Le tribunal donnera acte à la SAS CORA et à la SAS I J de leur désistement et prononcera le dessaisissement du tribunal à l’encontre de la SNC ANDROS, de la SAS SENAGRAL HOLDING et de la SAS GENERAL MILLS HOLDING France.

I S


sot

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Sur le fond

Attendu que la Directive 2014/104/UE du 26 novembre 2014 relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des Etats membres et de l’Union européenne a été adoptée en vue d’encourager les victimes de pratiques anticoncurrentielles à solliciter la réparation de leurs préjudices mais que les textes de transposition de cette directive adoptés le 9 mars 2017 ne sont pas applicables à la présente instance car les faits incriminés sont antérieurs à leur entrée en vigueur ;

Attendu qu’il incombe en conséquence aux demanderesses de démontrer qu’elles n’ont pas répercuté le surcoût résultant de l’entente sanctionnée par l’ADLC le 11 mars 2015;

Attendu que les faits qui sont soumis à l’appréciation de ce tribunal sont identiques à ceux sanctionnés par l’ADLC;

Attendu que la violation de l’article L. 420-1 du Code de commerce, sanctionné par l’ADLC, constitue une faute au titre de l’article 1240 du Code civil et qu’il appartient à ce tribunal de se prononcer sur le lien de causalité entre la faute et le préjudice allégué ainsi que sur l’existence et la quantification du préjudice économique à l’encontre de CORA et de I J ;

Sur l’évaluation du dommage direct allégué par les demanderesses et le lien de causalité avec l’entente

Sur la pertinence du choix du modèle économique produit par les demanderesses et son application au cas d’espèce

?

Attendu que les demanderesses ont choisi d’utiliser le modèle dit des « doubles différences » au soutien de la quantification de leur préjudice direct;

Attendu que le prix du lait représente non seulement un constituant important des coûts des

Produits en cause mais également un élément dont la variation a été très importante au cours de la période objet de la présente instance ;

Attendu que le modèle des « doubles différences » permet de s’affranchir de la variation du prix du lait pendant la période;

Le tribunal conside que le modèle des « doubles différences » est recevable en l’espèce;

Attendu que le rapport RBB récapitulatif du 23 janvier 2019 (RBB n°4) propose d’effectuer des comparaisons, sous forme d’indices, entre les Produits incriminés (Produits sous MDD directement affectées par l’entente) et deux groupes de Produits de contrôle (Produits sous MDF et Produits sous MDD non directement affectées) qui ne faisaient pas partie de

l’entente;

Sur le bon usage du modèle des « doubles-différences '>

Attendu cependant que, pour que le modèle retenu permette d’estimer le bien-fondé des préjudices allégués par les victimes de l’entente, il est nécessaire que les deux groupes de contrôle soient pertinents et représentatifs avec :

4.A


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D’une part, un échantillon suffisamment large pour être représentatif; D’autre part, des références temporelles identiques pour que la comparaison des indices ait un sens ;

Sur le choix des groupes de contrôle

Attendu que RBB, expert des demanderesses, a choisi (cf. figure 4 du point 78) un premier groupe de contrôle constitué d’une liste de Produits sous MDD non directement affectées mais que ces Produits ne représentent que des volumes faibles (8% des références en 2007, 12% en 2008, 18 % en 2009, 22% en 2010 et 2011) et ne sont, de ce fait, pas valablement comparables ;

Attendu par ailleurs que les défenderesses ne contestent pas la pertinence du second groupe de contrôle constitué des Produits sous MDF, pertinence sur laquelle le tribunal ne se prononcera donc pas ;

Le tribunal écartera le groupe de contrôle des Produits sous MDD non directement affectées car constitué d’un échantillon non suffisamment significatif en nombre pour pouvoir être valablement comparé aux Produits objets de l’entente et ne retiendra pour la suite de l’analyse que la comparaison des Produits sous MDD affectées avec le second groupe de contrôle constitué des Produits sous MDF.

Sur le choix des périodes de comparaison

Attendu que RBB (cf. figure 4 du point 78 des demanderesses) :

A retenu une date de début des pratiques (octobre 2007) pour les Produits sous MDD (affectées ou non) différente de celle retenue par l’ADLC (décembre 2006) et considère que cette date permet de définir une première « base 100 » de son indice de prix pour les Produits sous MDD ; A retenu une date de début des informations relatives aux Produits sous MDF très

-

différente (décembre 2008) de celle retenue par l’ADLC et la définit comme une seconde « base 100 » de son indice des prix;

Attendu qu’il n’est pas pertinent de comparer deux indices ayant des « bases 100 » à des dates différentes ;

Attendu que RBB, en réponse aux questions posées par le tribunal à l’audience du 13 novembre 2019 sur le choix des dates de référence, n’a pas été en mesure d’expliquer pourquoi elle avait été amenée à le faire et ainsi d’assurer que la quantification du préjudice allégué soit pertinente;

Attendu que le cabinet LEXECON, conseil de Z, a procédé au recalage temporel entre les deux indices et a conclu à l’absence de décalage significatif entre les deux courbes et que le tribunal retient le bien-fondé de cette démonstration et notamment que les deux courbes doivent commencer à la même date ; que le tribunal constate que la variation des prix entre les Produits sous MDD affectées et les Produits sous MDF n’est pas significative;

Le tribunal dit que les défenderesses ne démontrent pas l’existence d’une différence significative entre les indices de prix des Produits sous MDD affectées et ceux des Produits sous MDF entre décembre 2008 et décembre 2014;

A S.


лод TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017021571 JUGEMENT OU JEUDI 20/02/2020

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En conséquence, le tribunal dit que CORA et J ne démontrent pas de lien de causalité entre les pratiques de l’entente entre les défenderesses et les variations des prix des Produits sous MDD affectées par l’entente et n’établissent de ce fait ni le principe ni le quantum de leur demande.

Sur l’effet d’ombrelle

Attendu au surplus que les demanderesses soutiennent que, du fait de l’entente des défenderesses sur les Produits sous MDD affectées,

D’une part, les prix des producteurs non membres de l’entente ont été augmentés ;

D’autre part les prix des Produits sous MDD non affectées par l’entente ont P

également été augmentés par les producteurs ;

Attendu que les demanderesses soutiennent qu’elles ont acheté pour 25 M€ de Produits aux producteurs non membres de l’entente dans le même temps qu’elles achetaient pour 74 M€ de Produits aux producteurs membres de l’entente et que le préjudice complémentaire d’ombrelle qui en résulte se monte à 800 K€ (600 K€ pour CORA et 200 K€ pour J);

Attendu que les demanderesses n’apportent pas la preuve d’un lien de causalité entre les pratiques d’entente entre les défenderesses que ce soit pour les Produits sous MDD affectées livrées aux demanderesses par des producteurs autres que les défenderesses ou pour les Produits sous MDD non affectées ;

Le tribunal déboutera CORA et J de leurs demandes au titre de l’effet d’ombrelle.

Sur l’effet du « pass-on » invoqué à titre subsidiaire

Attendu que les faits d’entente ont été commis avant le 11 mars 2017 et qu’en conséquence, la preuve de l’absence de répercussion de la hausse alléguée des prix d’achat, du fait de

l’entente, sur le prix pratiqué aux consommateurs, également appelé effet « pass-on », incombe aux demanderesses en réparation ;

Attendu que les demanderesses soutiennent, à titre subsidiaire, que CORA a seulement répercuté à 32,7 % les hausses de prix de vente des produits par ses fournisseurs et J à hauteur de 35,4 %, indiquant par là-même avoir répercuté une partie desdites hausses ;

Attendu que NOVANDIE fournit aux débats une étude académique conduite en mars 2015 pour le compte de la Commission Européenne par trois chercheurs de la Toulouse School of Economics < Price transmission in Food Chains: The Case of the Dairy Industry » qui analyse l’impact d’une variation du prix de gros du lait sur les prix pratiqués aux consommateurs et qui conclut à des taux de « pass-on » de :

97 % à 133 % sur le prix du lait entier, demi-écrémé ou écrémé ; 83 % en moyenne pour les yaourts avec une ampleur de 55 à 99 % suivant les marques ;

Attendu que les produits concernés par l’étude académique de M N, O P et Q R sont très similaires à ceux qui font l’objet de cette instance;

Attendu que tribunal considère que cette étude académique, effectuée indépendamment de cette instance et produite par Novandie, est pertinente pour la présente instance ;

G



Mo

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N°RG : 2017021571 JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

3 EME CHAMBRE PAGE 19

Attendu qu’à l’audience du 13 novembre 2019, CORA et J ont déclaré que c’est en raison de leur politique commerciale qu’elles avaient décidé de ne transférer que 34 % environ de la hausse qu’elles subissaient du fait de l’entente, voulant maintenir un écart de prix constant dans le temps entre les Produits sous MDD et les Produits sous MDF ce qui relève de leur seul choix ;

Attendu que les Produits sous MDD sont des Produits d’entrée de gamme pour lesquels le consommateur a peu de possibilités de trouver un Produit alternatif quel que soit son prix de vente;

Attendu que l’entente sur les Produits sous MDD a été le fait de la majorité des producteurs et que dans un tel cas, il est logique que le « pass-on » se rapproche de 100 % car toutes les principales GMS ont été victimes de l’entente;

Attendu que si tel n’avait pas été le cas, il aurait été observé des déplacements de parts de marché mais qu’à l’audience du 13 novembre 2019, CORA et J ont déclaré que les parts de marché des différentes GMS étaient restées stables pendant la période concernée ;

Le tribunal dit que CORA et J n’apportent pas de démonstration pertinente sur le taux de « pass-on » et, en conséquence, n’établissent pas le quantum du préjudice qui résulterait de l’écart entre les hausses des prix pratiquées par leurs fournisseurs et les hausses de prix plus réduites qu’elles auraient décidé unilatéralement de répercuter sur les consommateurs finaux.

Sur les pertes de volumes alléguées par les demanderesses

Attendu en outre que les demanderesses soutiennent également, sans en apporter la preuve, qu’elles ont perdu des volumes en raison de la hausse des prix de vente des MDD affectées et que ceci leur a causé un préjudice distinct soit 1 M€ pour CORA et 200 K€ pour

J ;

Attendu que les demanderesses exposent que l’élasticité de la demande au prix est de 0,87

% sans la rattacher de manière spécifique aux Produits concernés ou à leur propre expérience;

Attendu de surcroît que les demanderesses ont, comme indiqué ci-dessus, souhaité maintenir un écart de prix constant dans le temps entre les MDD et les MDF, ce qui relève de leur seule politique commerciale;

Attendu, comme également indiqué ci-dessus, qu’elles soutiennent ne pas avoir perdu de parts de marché par rapport à leurs concurrents principaux ;

Attendu enfin qu’il n’est pas rapporté non plus que la consommation totale en France des Produits sous MDD affectées ait baissé pendant la période de l’entente;

Le tribunal déboutera CORA et J de leurs demandes de ce chef.

G.



MM TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017021571

JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

3 EME CHAMBRE PAGE 20

Sur le manque à gagner de marge allégué par les demanderesses

Attendu que les demanderesses sollicitent de ce tribunal la condamnation des défenderesses à la somme forfaitaire complémentaire de 1.000.000 € au motif que, pendant la période de l’entente, leurs clients auraient, sans documenter davantage, changé d’enseigne en raison de la hausse des prix de vente du fait de l’entente;

Attendu que cette demande fait en partie double emploi avec la demande précédente et que cette demande n’est en rien documentée, les demanderesses se contentant d’affirmer qu’elles auraient perdu un client sur 10.000 qui aurait changé d’enseigne en décidant de faire, à cause des effets de l’entente, la totalité de ses courses en dehors de leurs enseignes ;

Attendu que les demanderesses soutiennent (dans leur note 224) « que les éléments et analyses sous-jacentes constituent des secrets d’affaires » qu’elles ne souhaitent pas produire aux débats, analyses qui auraient permis aux parties d’évaluer la pertinence d’un tel argument;

Attendu en revanche que CORA et J ont soutenu qu’il n’y avait pas eu de variation de parts de marché entre les différentes grandes enseignes de la distribution;

Le tribunal déboutera CORA et J de leur demande de ce chef.

Attendu qu’il résulte de tout ce qui précède que les SAS CORA et I

J n’apportent pas la preuve que les préjudices économiques qu’elles allèguent soient la conséquence directe ou indirecte de l’entente entre les défenderesses sanctionnée le 11 mars 2015 par l’ADLC;

En conséquence, le tribunal déboutera les SAS CORA et I J de l’ensemble de leurs demandes.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Attendu que, pour faire reconnaître leurs droits, les défenderesses ont dû exposer des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser à leur charge;

Le tribunal condamnera in solidum les SAS CORA et I J à verser, au titre de l’article 700 du CPC, les sommes de :

10.000 € à la SA GROUPE Z ;

15.000 € à la SAS Z NESTLE ULTRA-FRAIS ;

15.000 € à la SNC Z […];

40.000 € à la SNC NOVANDIE ;

40.000 € à la SAS A ULTRA FRAIS anciennement dénommée SENAGRAL;

15.000 € à la SAS YOPLAIT ;

15.000 € à la SAS YOPLAIT FRANCE;

-

10.000 € à la SAS GENERAL MILLS HOLDING FRANCE ;

-

et déboutera les défenderesses du surplus de leurs demandes de ce chef;

G.



As2

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017021571 JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

3 EME CHAMBRE PAGE 21

Sur les dépens :

Attendu que les demanderesses succombent, les dépens seront mis à leur charge in solidum ;

Par ces motifs :

Le tribunal statuant par jugement contradictoire en premier ressort par mise à disposition:

Déclare la SAS PROVERA FRANCE irrecevable en ses demandes ;

Déboute la SAS PROVERA FRANCE de l’ensemble de ses demandes ;

Donne acte aux SAS CORA et I J de leur désistement à

l’encontre de la SNC ANDROS et des SAS SENAGRAL HOLDING et GENERAL

MILLS HOLDING France, qui l’acceptent ;

Prononce le dessaisissement du tribunal à l’encontre de la SNC ANDROS et des

SAS SENAGRAL HOLDING et GENERAL MILLS HOLDING FRANCE;

Déboute les SAS CORA et I J de l’ensemble de leurs demandes;

Condamne in solidum les SAS CORA et I J à verser, au titre de l’article 700 du CPC, les sommes de :

10.000 € à la SA GROUPE Z ; W

15.000 € à la SAS Z NESTLE ULTRA-FRAIS;

15.000 € à la SNC Z […] ;

40.000 € à la SNC NOVANDIE ; 40.000 € à la SAS A ULTRA FRAIS anciennement dénommée

SENAGRAL;

15.000 € à la SAS YOPLAIT ;

15.000 € à la SAS YOPLAIT FRANCE ;

10.000 € à la SAS GENERAL MILLS HOLDING FRANCE; A

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

Condamne in solidum les SAS PROVERA FRANCE, CORA et I

J aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 390,93 € dont 64,73 € de TVA

En application des dispositions de l’article 871 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 novembre 2019, en audience publique, devant MM. S T, U V et W AA;

Un rapport oral a été présenté lors de cette audience. Délibéré le 31 janvier 2020 par M. S T, Mme AB AC, Mme B

AD AE, M. U V et M. W AA ;

A ni


143

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2017021571 JUGEMENT DU JEUDI 20/02/2020

3 EME CHAMBRE PAGE 22

Dit que le présent jugement est prononcé par sa mise à disposition au greffe de ce tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La minute du jugement est signée par M. S T, président du délibéré et par Mme

Catherine Soyez, greffier.

En l’absence de Monsieur le Président empêché, upriy le présent jugement a été signé par M. RaiSSEAU. Le greffier Le président

$8 S

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Tribunal de commerce de Paris, 20 février 2020, n° 2017021571