Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 4e section, 26 mai 2016, n° 16/03162

  • Pièces et motifs fondant l'ordonnance·
  • Identification du représentant légal·
  • Pièces et motifs fondant la requête·
  • Validité de la saisie-contrefaçon·
  • Identification du requérant·
  • Identification du brevet·
  • Mentions obligatoires·
  • Mesure de séquestre·
  • Saisie-contrefaçon·
  • Mise sous scellés

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 4e sect., 26 mai 2016, n° 16/03162
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 16/03162
Domaine propriété intellectuelle : BREVET
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : EP1260090
Titre du brevet : Système et procédé de surveillance et de facturation en ligne de la consommation d'énergie
Classification internationale des brevets : G01D ; H04Q ; Y02B
Référence INPI : B20160108
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS ORDONNANCE DE REFERE RETRACTATION rendue le 26 mai 2016

3e chambre 4e section № RG : 16/03162

DEMANDERESSE S.A. ELECTRICITE RÉSEAU DISTRIBUTION FRANCE 34 place des Corolles – Tour ERDF 92079 PARIS LA DEFENSE agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège. et représentée par Maître Emmanuel BAUD du PARTNERSHIPS JONES DAY, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #J001

DÉFENDERESSE Société QUADLOGIC CONTROLS CORPORATION 33-00 Northern Blvd. LONG ISLAND CITY, NEW YORK 11101 (ETATS-UNIS) prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège. et représentée par Maître Catherine MATEU de la SEP ARMENGAUD
- GUERLAIN, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #W0007

DÉBATS Laurence L, vice-présidente statuant en la forme des référés, assistée de Sarah BOUCRIS, greffier. À l’audience de plaidoiries du 13 avril 2016, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 26 mai 2016.

ORDONNANCE Rendue publiquement par remise au greffe de la décision Contradictoire En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE La société QUADLOGIC CONTROLS CORPORATION (ci-après, QUADLOGIC) est une société américaine organisée selon les lois de l’État de New York qui indique se positionner au niveau international comme l’un des fournisseurs notoirement connus de produits de gestion de l’énergie.

Elle est titulaire du brevet européen n°1 260 090 (ci-après EP'090) désignant la France déposé le 28 février 2001 et délivré le 09 octobre 2013 par l’Office Européen des Brevets sous une priorité d’une demande de brevet US 60 185 832 du 29 février 2000 intitulé « SYSTEME ET PROCEDE DE SURVEILLANCE ET DE FACTURATION EN LIGNE DE LA CONSOMMATION D’ENERGIE ».

La société Électricité Réseau Distribution France (ci-après, ERDF) est une société anonyme française créée en 2008 par la scission des activités de distribution d’électricité d’EDF et des activités de production, de transport et de commercialisation de l’électricité, dans le cadre de l’ouverture du marché de l’électricité à la concurrence. ERDF est une filiale à 100% d’EDF. ERDF fait fabriquer et installe progressivement sur l’ensemble du territoire national des compteurs et concentrateurs communicants destinés à relever la consommation réelle de ses clients. Ces compteurs, concentrateurs et le système qui s’y trouve associé sont connus sous la dénomination « Linky » et leur conception a fait l’objet de développements techniques depuis de nombreuses années. Le compteur Linky est un compteur d’électricité intelligent de nouvelle génération, dit « communicant », qui permet notamment de relever et recevoir à intervalles réguliers et à distance des informations relatives à la consommation des clients. La société QUADLOGIC, considérant que les compteurs Linky portaient atteinte à son brevet EP'090, a fait délivrer aux sociétés EDF et ERDF par huissier de justice les 14 et 15 janvier 2015, une notification de ce titre et une mise en demeure de cesser toute fabrication, demande de fabrication, d’installation, offre, utilisation et acte pouvant lui porter atteinte aux sociétés EDF et ERDF. Par courriers du 31 mars 2015, les conseils des sociétés EDF et ERDF ont répondu en contestant la validité du brevet EP'090 opposé. La société QUADLOGIC a fait procéder par huissier de justice le 28 janvier 2016 à des opérations de saisie-contrefaçon dans les locaux de «Linky Lab» sis […] (92) se prévalant d’une ordonnance présidentielle rendue le 21 janvier 2016. Lors des opérations, ont été saisis huit concentrateurs (collecteurs de données) Linky Cahors, huit compteurs Linky ITRON triphasés et huit compteurs Linky ITRON monophasés.

Le même jour le conseil de la société ERDF a envoyé un courrier officiel au conseil de la société QUADLOGIC et à l’huissier instrumentale leur indiquant le caractère confidentiel des objets saisis et leur demandant de les mettre sous scellés fermés et de ne pas les communiquer à la société QUADLOGIC. Il faisait part de son intention de saisir un magistrat de cette difficulté.

Le 5 février 2016, l’huissier instrumentaire remettait un procès-verbal complémentaire de la saisie-contrefaçon comprenant les photographies prises lors de la saisie à la société ERDF.

Le 15 février 2016, la société ERDF présentait un projet d’assignation et sollicitait une date pour assigner la société QUADRILOGIC en référé rétractation. Par acte de transmission d’huissier en date du 22 février 2016, ERDF a assigné la société QUADLOGIC pour le 13 avril 2016 aux fins, à titre principal, de voir rétracter l’ordonnance ayant autorisé la saisie- contrefaçon.

L’assignation au fond devant le tribunal de grande instance de Paris était quant à elle délivrée par la société QUADLOGIC à la société ERDF le 24 février 2016. L’affaire a été distribuée à la 3e chambre, 1re section sous le numéro RG 16/03165. Par ses dernières conclusions en référé rétractation, la société ERDF sollicite du juge statuant en la forme des référés de : A titre principal :

- SE DECLARER INCOMPETENT sur la demande de communication de documents sous astreinte formulée par QUADLOGIC et DIRE que le Juge de la mise en état de la 3e chambre, 1 ère section, désigné suivant bulletin du 29 mars 2016 dans l’affaire RG 16/03165, serait à présent seul compétent pour connaître d’une telle demande, A défaut de s’être déclaré incompétent
- DECLARER illégal l’article 57, première phrase, du décret n°2004-199 du 25 février 2004, et à défaut poser la question préjudicielle suivante au juge administratif : o « l’article 57, première phrase, du décret n°2004-199 du 25 février 2004 en ce qu’il permettrait la communication de documents, avant le début effectif du procès, appartenant à des tiers ou protégés par des droits de propriété intellectuelle de tiers, affectant ainsi un droit de propriété et les droits de la défense, n’est-il pas illégal en ce que le pouvoir réglementaire n’avait pas qualité et compétence pour adopter ce texte, lequel aurait dû être adopté par le législateur conformément à l’article 34 de la Constitution »,
- SURSEOIR À STATUER de ce seul chef de demande dans l’attente d’une réponse du juge administratif sur la question précitée, ou subsidiairement DECLARER mal fondée la demande adverse de communication de documents,
- REJETER la demande d’irrecevabilité adverse,
- DIRE l’ordonnance nulle et de nul effet à défaut de désignation du requérant et du Brevet, ou RETRACTER en sa totalité l’ordonnance sur requête rendue le 21 janvier 2016 sous le n°1 6/00228. Subsidiairement de :

- MODIFIER l’ordonnance en supprimant les points 1, 2 et 3 bis qu’elle contient. Et dans les cas 1 et 2 :

- ORDONNER à QUADLOGIC ou tout tiers détenteur la remise à ERDF des biens et éléments saisis entre les mains d’ERDF sous

astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente ordonnance,
- INTERDIRE à QUADLOGIC et toute personne non autorisée par ERDF à accéder, démonter ou se faire remettre les biens saisis sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,
- DIRE que l’ordonnance à intervenir sera exécutoire de droit sur minute. Subsidiairement, sur l’interprétation
- DIRE que les termes « scellés » dans l’ordonnance doivent être interprétés en ce qu’il s’agit de scellés fermés,
- DONNER ACTE à QUADLOGIC de sa demande de désignation de l’huissier instrumentaire, Maître L, comme gardien des scellés.

- Subsidiairement également, sur la confidentialité des éléments saisis :

- ORDONNER la mise sous séquestre de l’ensemble des biens saisis lors des opérations de saisie-contrefaçon,
- DIRE que ces mesures de séquestre pourront se faire à l’étude de l’huissier instrumentaire entre ses mains et ainsi DONNER ACTE à QUADLOGIC de sa demande de désignation de l’huissier instrumentaire, Maître L, comme gardien des scellés,
- ORDONNER à QUADLOGIC la remise entre les mains de l’huissier instrumentaire des biens dont elle aurait d’ores et déjà pris possession, et ce en tant que de besoin sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,
- ETENDRE la présente injonction à tout dépositaire ou détenteur de tout ou partie de ces biens saisis,
- INTERDIRE à QUADLOGIC de rendre public, diffuser, divulguer, démonter ou transmettre à quiconque les biens saisis en exécution de l’ordonnance sous astreinte de 10.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,
- ORDONNER la désignation d’un expert tiers et impartial qui aura pour mission de : o Prendre connaissance du Brevet, o Contacter le conseil en propriété industrielle désigné par chacune des parties et astreint à une obligation de confidentialité, o Solliciter de QUADLOGIC, son conseil ou conseil en propriété industrielle la liste précise des éléments qu’ils souhaitent voire décrire, y compris en cas de démontage, o Dire si ces éléments se rapportent ou non au Brevet, o Procéder en tout lieu qu’il plaira à l’expert, mais sur le territoire national, à la description des boîtiers sur la base de la liste qu’aura communiquée QUADLOGIC, son conseil ou conseil en propriété industrielle, hors la présence des parties, et en présence du conseil en propriété industrielle de chaque partie astreint à une obligation de confidentialité, o Dire que de ces opérations de description un rapport devra être réalisé et que ce rapport, sur observations d’ERDF ou de tout mandataire désigné par ses soins, ne devra pas comprendre

d’éléments confidentiels, sans rapport avec le Brevet ou susceptibles de porter atteinte au savoir-faire et au secret des affaires d’ERDF ou de ses fournisseurs ou d’un tiers, o Dire qu’une fois épuré de ces éléments confidentiels, sans rapport avec le Brevet ou susceptibles de porter atteinte au savoir-faire et au secret des affaires d’ERDF, de ses fournisseurs ou de tiers, le rapport pourra être transmis à chaque partie.

- Dire que l’expert rendra son rapport dans les quatre mois suivant sa désignation, sauf prorogation du juge chargé du suivi des mesures d’expertise,
- Dire que la rémunération de l’expert sera à titre provisoire entièrement supportée par QUADLOGIC et Fixer la provision à valoir sur la rémunération de l’expert à hauteur de 5.000 euros,
- Dire que QUADLOGIC devra consigner cette somme à la régie du tribunal de grande instance de Paris dans un délai d’un mois suivant le prononcé de l’ordonnance à intervenir,
- Dire qu’à défaut de consignation, la mesure d’expertise sera caduque et qu’en cas de défaillance de QUADLOGIC à cette fin, elle ne pourra se prévaloir des pièces, déclarations et biens obtenus lors de la saisie,
- Dire qu’en cas de difficulté d’exécution de la mesure, il en sera référé au juge chargé du suivi des mesures d’expertise. En tout état de cause, sur les garanties accordées à la société ERDF :

- ORDONNER à QUADLOGIC de consigner la somme de 500.000 euros sur un compte séquestre CARPA dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir et dire que cette somme sera affectée en remboursement du préjudice subi et des frais d’ERDF en cas d’absence de contrefaçon du Brevet. Enfin,
- CONDAMNER la défenderesse à verser à ERDF la somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- DIRE que le Président du tribunal de grande instance de Paris se réserve la liquidation des astreintes,
- CONDAMNER la défenderesse aux entiers dépens. Par ses dernières conclusions en référé rétractation la société QUADLOGIC sollicite du juge statuant en la forme des référés de :

- Déclarer ERDF irrecevable pour et mal fondée en ses demandes et l’en débouter,
- Dire que Me L, huissier de justice ayant procédé aux opérations de saisie contrefaçon soit désignée gardienne de l’ensemble des produits saisis lors des opérations de saisie contrefaçon.

- Ordonner à ERDF de communiquer les caractéristiques techniques de la mémoire non volatile du compteur et de la mémoire du concentrateur Linky, notamment les documents : ERDF-CPT-Linky-SPEC-CON Spécifications détaillées des concentrateurs Linky ERDF-CPT-Linky-SPEC-FONC-CPT Spécifications fonctionnelles des compteurs communicants Linky,

sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, Dire que le terme « scellés » signifie scellés ouverts, Condamner ERDF au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, Condamner ERDF aux entiers dépens de l’instance qui seront recouvrés par Maître Catherine MATEU, Avocate, SEP ARMENGAUD-GUERLAIN, suivant les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. MOTIFS DE LA DÉCISION Sur la recevabilité des demandes présentées par la société ERDF Il convient de noter que la saisine par la société ERDF en référé du Président du tribunal de grande instance de Paris en sa qualité de signataire de l’ordonnance rendue sur requête le 21 janvier 2016 est fondée à titre principal sur l’article 496 alinéa 2 du code de procédure civile s’agissant de la demande de rétractation et à titre subsidiaire sur l’article R615-4 du code de la propriété intellectuelle s’agissant des mesures de nature à préserver la confidentialité des éléments saisis. L’article 496 alinéa 2 du code de procédure civile relatif aux ordonnances non contradictoires rendues sur requêtes dispose que « .y 7/ est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l’ordonnance ». L’article 497 du même code précise que « le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l’affaire ».

L’article R615-4 du code de la propriété intellectuelle dispose : « Le président du tribunal peut ordonner, au vu du procès-verbal de saisie, toute mesure de nature à compléter la preuve des actes de contrefaçon allégués. À la demande de la partie saisie agissant sans délai et justifiant d’un intérêt légitime, il peut également prendre toute mesure pour préserver la confidentialité de certains éléments. » La société QUADLOGIC soutient que la saisine par la société ERDF serait tardive et ne pourrait être reçue en ce qu’un délai de plus de deux semaines se serait écoulé avant qu’elle ne sollicite une date pour assigner en référé. Cependant, aucun délai n’est exigé pour solliciter la rétractation dans les termes de l’article 496 du code de procédure civile. De plus, le délai de 10 jours entre la dernière notification de l’huissier instrumentaire en date du 5 février 2016 et le 15 février 2016 pour solliciter une date d’assignation n’apparaît pas excessive au sens de l’article R615-4 du code de la propriété intellectuelle, d’autant que la société ERDF avait averti, dès le jour des opérations de saisie-

contrefaçon, de ce qu’elle considérait les éléments saisis comme confidentiels. Les demandes formées par la société ERDF seront dès lors déclarées recevables. Sur la demande de rétractation de l’ordonnance du 21 janvier 2016 formée par la société ERDF La société ERDF soutient différents moyens visant à la nullité et à la rétractation de l’ordonnance :

- L’absence de désignation du requérant et du Brevet dans l’ordonnance et de justification de l’identité et de la désignation des représentants légaux de QUADLOGIC dans la requête

La société ERDF soutient que l’ordonnance du 21 janvier 2016 doit être rétractée du fait de l’absence en son sein de désignation du requérant dans l’ordonnance et de mention du brevet fondant la demande. Cependant, s’il est exact que ces mentions ne sont pas reprises expressément dans l’ordonnance, cette ordonnance fait corps avec la requête qui avait été présentée. Dès lors la requérante, à savoir la société QUADLOGIC, était identifiée et le brevet invoqué, à savoir le brevet européen n°1 260 090 et plus particulièrement sa revendication n°1 intégralement citée, était connu. La requête a d’ailleurs bien été signifiée avec l’ordonnance avant l’initiation des opérations de saisie, la société ERDF était donc parfaitement en mesure d’identifier les parties. Par ailleurs, la société ERDF soutient que la requête ne mentionnerait ni la forme sociale de «QUADLOGIC », ni l’organe la représentant ou son / ses représentants et ce, en violation de l’article 58 du code de procédure civile. Cependant, si ces indications sont prescrites à peine de nullité, elles ne le sont que si elles causent grief, ce qui n’est pas le cas en l’espèce dès lors que la requête précisait bien que la société était régie par les lois de l’État de New-York et qu’elle était représentée par ses représentants légaux. De plus était produite en pièce jointe numérotée 1 la copie certifiée de l’inscription au registre des sociétés des États-Unis. Au surplus, il n’appartient au juge de la rétractation de prononcer une éventuelle nullité de l’ordonnance.

- L’ordonnance porterait sur la saisie de biens insaisissables

La société ERDF affirme que l’ordonnance de saisie-contrefaçon porterait sur des biens insaisissables car ils seraient la propriété de personnes publiques. L’article L2311-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose : « Les biens des personnes publiques mentionnées à l’article L1 sont insaisissables. » Cependant, rien n’indique que les compteurs qui ont été saisis au Linky Lab dans les locaux d’ERDF, sont la propriété de collectivités territoriales et en tout état de cause, les opérations de saisies- contrefaçon ne constituent pas des procédures d’exécution mais ne sont que des mesures à des fins probatoires et ce même si elles prévoient la saisie réelle d’exemplaires argués de contrefaçon. Dès lors, l’article L2311-1 du code général de la propriété des personnes publiques n’a pas vocation à être ici appliqué.

- L’absence de motif permettant de recourir à une saisie- contrefaçon au regard de l’article 7.1 de la directive 2004/48, de déroger au principe du contradictoire et l’insuffisance de motivation de la requête La société ERDF argue de ce que la requête et l’ordonnance sont dépourvues d’indications de nature à permettre d’appréhender la nature, l’étendue de la prétendue contrefaçon recherchée, et notamment les revendications du Brevet en cause.

L’article L 615-5 du code de la propriété intellectuelle qui prévoit la possibilité d’obtenir sur requête une ordonnance de saisie-contrefaçon doit s’interpréter au regard de l’article 7.1 de la directive 2004/48 qui prévoit que le requérant doit avoir « présenté des éléments de preuve raisonnablement accessibles pour étayer ses allégations selon lesquelles il a été porté atteinte à son droit de propriété intellectuelle ou qu’une telle atteinte est imminente ». Ainsi de simples affirmations corroborées par aucune pièce ne peuvent suffire. Cependant, la société QUADLOGIC a pris soin lors de la présentation d’énoncer la revendication n°1 de son brevet supposée contrefaite et de fournir à l’appui de ses allégations de contrefaçon par la commercialisation du compteur LINKY les éléments suivants :

- une pièce 5A constituée d’une capture du site internet de ERDF ;

- une pièce n°5 B constituée d’un dossier de presse de présentation du compteur LINKY avec sa présentation technique ;

- une pièce 7A correspondant à un avis de l’ADEME sur les intérêts du compteur Linky.

De plus, était produit un échange de correspondance pré-contentieux entre les parties et notamment les lettres officielles des conseils d’EDF et de ERDF datées du 31 mars 2015 qui s’attachaient à mettre en cause la validité du brevet supposé contrefait. Si les éléments apportés lors de la requête ne permettaient pas de s’assurer de l’existence d’une contrefaçon, ils constituaient des éléments de preuve raisonnablement accessibles pour étayer leurs allégations de contrefaçon et étaient suffisants pour justifier qu’il soit fait droit à leur demande de saisie probatoire. La société ERDF sera dès lors déboutée de sa demande de rétractation de l’ordonnance ayant autorisé la saisie-contrefaçon. Sur les demandes subsidiaires de rétractation partielle de l’ordonnance, d’interprétation de l’ordonnance et la nécessité de mesures pour préserver la confidentialité La société ERDF fait valoir à titre subsidiaire la disproportion qualitative et quantitative des mesures ordonnées et demande la rétractation partielle de l’ordonnance rendue sur requête, ou une interprétation de celle-ci ou encore des mesures additionnelles propres à conserver la nécessaire confidentialité. Toutes ces demandes ont pour fondement le caractère confidentiel des compteurs et concentrateurs saisis. Durant les opérations de saisies les représentants de la société ERDF ont souligné ce caractère confidentiel qui a ensuite été confirmé par écrit par le conseil de la société. Il convient également de constater que la société qui avait sollicité la saisie-contrefaçon sur le fondement de la seule revendication n°1 intégralement citée de son brevet et sans les énoncer des revendications dépendantes de cette revendication n°1 semble aujourd’hui étendre ses reproches à de nombreuses autres revendications non dépendantes et espère justifier de l’existence de ces contrefaçons par le démontage des produits saisis. Dès lors, il y a lieu de décider en l’état que les compteurs et les concentrateurs saisis dans le cadre des opérations de saisie- contrefaçon devront être conservés entre les mains de Maître Frédérine L huissier de justice instrumentaire qui en sera déclarée gardienne et devra conserver les scellés jusqu’à décision contraire de la juridiction saisie au fond ou du juge de la mise en état. Il sera ordonné à la société QUADLOGIC de remettre entre les mains de Maître Frédérine L tous biens saisis lors de la saisie-contrefaçon litigieuse dont elle aurait déjà pris possession, et de lui interdire de rendre public, diffuser, divulguer, démonter ou transmettre à quiconque les biens saisis.

Il n’y a, dès lors, pas lieu en l’état de se prononcer sur la demande d’expertise liée à la confidentialité. Sur la constitution de garanties La demande de constitution de garanties présentée par la société ERDF n’est pas justifiée au vu notamment de la décision de séquestre prise ci-dessus. Il n’y sera pas fait droit. Sur la demande reconventionnclle présentée par la société OUADILOGIC La société QUADLOGIC, dans son assignation au fond, a sollicité la communication des caractéristiques techniques relatives à la mémoire non volatile des compteurs et concentrateurs Linky. Elle sollicite à nouveau devant la présente juridiction la communication des mêmes éléments à savoir en ces termes : « ordonner à ERDF de communiquer les caractéristiques techniques de la mémoire non volatile du compteur et de la mémoire du concentrateur Linky, notamment les documents : ERDF-CPT-Linky- SPEC-CON Spécifications détaillées des concentrateurs Linky ERDF- CPT-Linky-SPEC-FONC-CPT Spécifications fonctionnelles des compteurs communicants Linky sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir. » La société QUADLOGIC argue de la compétence du juge de la rétractation car il s’agirait d’une difficulté d’exécution de la saisie- contrefaçon dont le magistrat ayant rendu l’ordonnance se serait réservé la compétence. Cependant, ces demandes de communications de pièces sollicitées devant la juridiction saisie au fond ne constitue pas une difficulté d’exécution de la saisie-contrefaçon mais une demande qui ressort de la compétence soit du tribunal, soit du juge de la mise en état chargé du suivi de la procédure. Dès lors, il n’y a pas lieu à référer sur ce point, ni de se prononcer sur la question préjudicielle soulevée à titre subsidiaire. Sur les dépens et les frais irrepetibles Chacune des parties succombant pour partie, elles conserveront à leurs charges les frais irrepetibles et les dépens qu’elles ont engagé dans le cadre de la présente procédure. PAR CES MOTIFS Nous, vice-présidente statuant en la forme des référés par mise à disposition de la décision au greffe, contradictoirement et en premier ressort,

Disons recevable mais mal fondée la demande de rétractation de l’ordonnance du 21 janvier 2016 présentée par la société ERDF, Disons qu’il y a lieu de préserver la confidentialité des éléments saisis lors des opérations de saisie contrefaçons opérées le 28 janvier 2016, Ordonnons la mise sous séquestre des compteurs et concentrateurs (collecteurs de données) saisis et désignons Maître Frédérine L, huissier instrumentaire, comme gardienne jusqu’à décision différente de la juridiction saisie au fond du litige ou du juge de la mise en état (procédure distribuée à la 3e chambre, 1re section sous le numéro RG 16/03165), Ordonnons à la société QUADLOGIC de remettre entre les mains de Maître Frédérine L tous biens dont elle aurait d’ores et déjà pris possession, et lui interdisons de rendre public, diffiiser, divulguer, démonter ou transmettre à quiconque les biens saisis, Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnelle de la société QUADLOGIC,

Déboutons lcs parties du surplus de leurs demandes.

Disons que chacune des parties conservera à sa charge le montant des dépens et des frais irrepetibles qu’elle a exposé dans le cadre de la présente instance de référé rétractation. Rappelons que la présente ordonnance est exécutoire de droit à titre provisoire.

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