Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2 septembre 2016, n° 13/24924

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 2 sept. 2016, n° 13/24924
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 13/24924
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Martigues, 2 décembre 2013, N° 12/910

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 02 SEPTEMBRE 2016

N°2016/

Rôle N° 13/24924

XXX

C/

B C

Grosse délivrée le :

à :

Me Patrice PASCAL, avocat au barreau de TARASCON

Me Thierry laurent GIRAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARTIGUES – section C – en date du 03 Décembre 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/910.

APPELANTE

XXX, enseigne 'BOULANGERIE X BLACHERE', poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant XXX

représentée par Me Patrice PASCAL, avocat au barreau de TARASCON

INTIME

Monsieur B C, demeurant XXX

représenté par Me Thierry laurent GIRAUD, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 01 Juin 2016, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Madame Sylvie ARMANDET, Conseiller

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Z A.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Septembre 2016

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Septembre 2016

Signé par Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, et Monsieur Z A, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. B C a été embauché le 1er septembre 2006 suivant contrat de travail à durée indéterminée « nouvelles embauches » en qualité de pâtissier, niveau 2, échelon 1, par la SARL KARMAL qui exploitait un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie à l’enseigne AU CHANT DU PAIN au sein du centre commercial ED à Gignac-la-Nerthe.

Les rapports contractuels étaient régis par la convention collective de la boulangerie pâtisserie industrielle.

Le 30 mars 2012, la SARL KARMAL a cédé son fonds de commerce à la SAS BBG, qui exerce sous l’enseigne BOULANGERIE X BLACHERE, et le contrat de travail a été transféré. Toutefois le salarié a refusé de signer l’avenant proposé par le nouvel employeur au motif qu’il avait pour effet de réduire son poste de travail de pâtissier en de simples fonctions de préparateur.

Le 11 juillet 2012, après avoir effectué des travaux, la société BBG a procédé à la réouverture de l’établissement qu’elle avait acquis de la société KARMAL. Pour le motif précité le salarié ne reprendra pas le travail chez son nouvel employeur lequel devait le convoquer à un entretien préalable le 24 août 2012 puis le licencier pour faute grave suivant lettre recommandée du 10 septembre 2012 ainsi rédigée : « Vous avez été initialement embauché par la société KARMAL à compter du 1er septembre 2006. Par lettre du 8 juin 2012, nous vous avons invité à signer l’avenant à votre contrat de travail emportant transfert de ce dernier à notre société avec affectation aux fonctions de préparateur emploi classé dans la catégorie OE2 pour une rémunération mensuelle brute de 1 401,13 € pour 35 heures. Vous avez refusé de signer cet avenant invoquant le fait que vous aviez occupé antérieurement à la cession un poste de pâtissier. Dans le cadre de nos échanges de correspondances, nous avons insisté auprès de vous sur le fait que le poste d’ouvrier pâtissier n’existait pas dans la Convention Collective régissant vos rapports avec la société KARMAL dont notre Société dépend également. Vous n’avez pas accepté de rejoindre votre poste. Malgré ces précisions lors de notre entretien préalable le 6 septembre 2012, vous avez simplement reconnu une absence non justifiée. Le refus d’occuper votre poste est totalement injustifié. Par conséquent et devant en tirer les conséquences qui découlent de ce refus, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave. La mesure prend effet le jour de la présente notification. Dès retour de l’AR postal accompagnant la présente, nous vous transmettrons votre reçu pour solde de tout compte, certificat de travail et attestation destinée à POLE EMPLOI. Vous disposez à la date de rupture du contrat de travail d’un crédit de 120 heures de formation au titre du droit individuel de formation que vous pourrez utiliser pendant votre période d’indemnisation de chômage, ou dans les 2 ans suivants votre embauche chez un nouvel employeur. Conformément aux conditions prévues par l’ANI du 11 janvier 2008, vous bénéficiez d’un maintien de votre couverture prévoyance pendant une durée de 9 mois, sauf dans l’hypothèse vous renonceriez à vos droits dans les 10 jours suivant la date de cessation du contrat de travail."

Contestant son licenciement, M. B C a saisi le 12 octobre 2012 le conseil de prud’hommes de MARTIGUES, section commerce, lequel, par jugement rendu le 3 décembre 2013, a :

dit qu’après le transfert du contrat de travail le nouvel employeur a procédé à une modification d’un élément essentiel de ce dernier ;

dit que le licenciement pour faute grave est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

condamné l’employeur à payer au salarié les sommes suivantes :

'3 607 € à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juillet 2012 au 19 septembre 2012 ;

' 306 € à titre d’indemnité de congés payés sur le rappel précité ;

'2 866 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

' 288 € à titre d’indemnité de congés payés sur préavis ;

'1 731 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ;

dit que l’exécution provisoire de plein droit est ordonnée en application des dispositions combinées des articles R. 1454-14 et R. 1454-28 du code du travail, fixé la moyenne à la somme de 1 445 € ;

condamné l’employeur à payer au salarié les sommes suivantes :

'9 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

'1 300 € au titre des frais irrépétibles ;

dit que l’exécution provisoire est accordée en application de l’article 515 du code de procédure civile sur l’intégralité de la décision ;

dit que les intérêts légaux se comptabiliseront à compter du 12 octobre 2012 et ce en application de l’article 1153-1 du code civil ;

mis les entiers dépens à la charge de l’employeur y compris les 35 € de timbre fiscal.

La SAS BBG a interjeté appel de cette décision suivant déclaration du 26 décembre 2013.

Vu les écritures déposées à l’audience et soutenues par son conseil aux termes desquelles la SAS BBG demande à la cour de :

infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse ;

dire qu’il n’y a pas eu modification d’un élément essentiel du contrat de travail ;

dire que le licenciement est intervenu pour faute grave ;

débouter le salarié de ses demandes ;

condamner le salarié à lui rembourser la somme de 17 486,35 € payée au titre de l’exécution provisoire du jugement entrepris ;

subsidiairement,

confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et exécution fautive du contrat de travail ;

confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 9 000 € correspondant à 6 mois de salaire ;

en tout état de cause,

condamner le salarié à lui payer la somme de 4 500 € au titre des frais irrépétibles ;

le condamner aux entiers dépens distraits au profit de Maître PASCAL.

Vu les écritures déposées à l’audience et reprises par son conseil selon lesquelles M. B C demande à la cour de :

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

requalifier le contrat nouvel embauche en contrat à durée indéterminée ;

infirmer le jugement entrepris sur le quantum des sommes allouées à titre de dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

condamner l’employeur à lui payer les sommes suivantes :

'34 632 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ;

' 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire ;

' 5 000 € au titre de l’exécution fautive du contrat de travail ;

' 3 000 € au titre des frais irrépétibles ;

condamner l’employeur aux entiers dépens d’appel.

SUR CE

1/ Sur la demande de requalification du contrat nouvel embauche en un contrat à durée indéterminée

L’article 9 de la loi du 25 juin 2008 dispose que les contrats « nouvelle embauche » en cours à sa date de publication sont requalifiés en contrats à durée indéterminée de droit commun dont la période d’essai est fixée par voie conventionnelle ou, à défaut, à l’article L. 1221-19 du code du travail.

En application de ce texte, la cour constate la requalification légale étant relevé qu’aucune demande pécuniaire n’est formée de ce chef.

2/ Sur la faute grave

Le salarié fait valoir qu’il était bien fondé à refuser de signer l’avenant qui lui était proposé et de reprendre son poste au motif qu’il emportait une modification d’un élément essentiel du contrat de travail le privant de ses fonctions de pâtissier pour le réduire au rôle de préparateur.

Il fait valoir qu’il a obtenu le CAP de pâtissier en juillet 2003 et qu’il dispose d’une mention complémentaire obtenu au sein de la maison RIEDERER. Il soutient qu’il exerce un métier exigeant habileté, imagination et créativité, ce qui ne serait plus cas dans le cadre d’une boulangerie X Y.

Mais le salarié travaillait déjà dans un établissement de nature industrielle et son premier employeur atteste qu’il fabriquait et réalisait l’ensemble des pâtisseries ainsi que les produits salés de l’établissement (pizzas, quiches, frites, hot-dog, croque-monsieur, etc.).

Dès lors, la nécessité de respecter les fiches recettes et le règlement intérieur des boulangeries X Y, ainsi que l’obligation d’utiliser des préparations industrielles ne constitue pas, pour un salarié travaillant déjà dans un établissement de nature industrielle et non artisanale, et qui réalisait notamment des pizzas, des quiches, des frites, des hot-dog et des croque-monsieur une modification d’un élément essentiel de son contrat de travail.

En effet, le salarié n’accomplissait nullement pour le compte de la société KARMAL des tâches de pâtissier artisanal comme il le prétend au bénéfice de la mention figurant sur son contrat de travail et de l’appréciation élogieuse de clients, mais il occupait déjà des fonctions de préparateur de produits salés et sucrés dans une boulangerie-pâtisserie industrielle.

Il sera encore relevé que la fonction de préparateur nécessite, selon la fiche de poste produite, un CAP, un BEP, un BP, un BREVET DE MAITRISE ou une formation équivalente, et consiste à conduire les fabrications en contrôlant la consistance des produits, leur aspect visuel, leur couleur et leur saveur. Cette fonction de préparateur ne constitue donc nullement un appauvrissement des fonctions précédemment exercées par le salarié, lequel n’établit nullement que ces dernières étaient en rapport avec les qualités d’imagination et de créativité qu’il a pu développer lors de son apprentissage au sein de la maison RIEDERER.

Dès lors, le refus réitéré par le salarié de rejoindre son poste malgré l’absence de modification d’un élément essentiel de son contrat de travail constitue une faute grave, motif du licenciement, lequel sera en conséquence validé.

Le jugement entrepris sera ainsi infirmé et le salarié remboursera les sommes perçues au titre de son exécution, point qu’il n’appartient pas à la cour de connaître.

3/ Sur les autres demandes

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de l’employeur les frais par lui exposés et non compris dans les dépens. En conséquence, il sera débouté de sa demande formée en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le salarié supportera les dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Constate la requalification légale du contrat « nouvelle embauche » en un contrat à durée indéterminée de droit commun.

Dit que le licenciement est bien fondé sur une faute grave.

Déboute M. B C de toutes ses demandes.

Déboute la SAS BBG de sa demande relative aux frais irrépétibles.

Condamne M. B C aux dépens de première instance et d’appel.

Le Greffier Pour le Président empêché

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller,

En ayant délibéré

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