Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 27 janvier 2015, n° 2013/15460

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5, 27 janv. 2015, n° 13/15460
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 2013/15460
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 26 juin 2013, N° 12/11959
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 27 juin 2013, 2012/11959
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 001095327-0001 ; 001095327-0002 ; 001095327-0003 ; 001605940-0001 ; 001605940-0002 ; 001605940-0003
Classification internationale des dessins et modèles : CL06-01 ; CL06-05
Référence INPI : D20150022
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRÊT DU 27 JANVIER 2015

Pôle 5 – Chambre 1

(n° 025/ 2015, 10 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 13/15460 Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance de Paris – RG n° 12/11959

APPELANTE Société KETER HOLDINGS LTD Société de droit israélien, Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège GF Zvika Zac, […] Area 46852 Herzelia, ISRAEL Représentée et assisté de Me Michel A de la SELARL LOYER & ABELLO, avocat au barreau de PARIS, toque : J049

INTIMÉE SPA SHAF prise en la personne de son Président en charge de la Direction Générale, dûment habilité, Monsieur Alain H, domicilié en cette qualité audit ayant son siège social Via Antonio M, 1 28066 GALLIATE (NO) Italie Représentée et assisté de Me Gérard-Gabriel L, avocat au barreau de PARIS, toque : C0645

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 03 Décembre 2014, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président de chambre Madame Anne-Marie GABER, Conseillère Mme Nathalie AUROY, Conseillère qui en ont délibéré. Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Karine ABELKALON ARRÊT : contradictoire • par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. • signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président et par Madame Karine ABELKALON, greffier présent lors du prononcé.

Vu le jugement rendu contradictoirement le 27 juin 2013 par le tribunal de grande instance de Paris.

Vu l’appel interjeté le 25 juillet 2013 par la société de droit israélien Keter Holdings Ltd.

Vu les dernières conclusions de la société Keter Holdings Ltd., transmises le 17 juillet 2014.

Vu les dernières conclusions de la société de droit italien SHAF S.p.A., transmises le 10 juin 2014.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 16 septembre 2014. MOTIFS DE L’ARRÊT Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;

Considérant qu’il suffit de rappeler que la société de droit israélienne Keter plastic (aux droits de laquelle intervient désormais la société Keter Holdings Ltd.) exerce une activité de fabrication et de vente de produits en matière plastique tels que des fauteuils de jardin, vendus en France par l’intermédiaire de la société Plicosa ;

Qu’elle est titulaire des modèles communautaires suivants : • n° 001095327-0001, 0002 et 0003 enregistrés le 16 février 2009 protégeant un fauteuil, un canapé et une table imitant le tressage en rotin, • n° 001605940-0001, 0002 et 0003 enregistrés le 31 août 2009 protégeant un fauteuil, un canapé et une table imitant le tressage en rotin,

Que ces modèles sont vendus sous les marques Riviera et Modus ;

Que constatant que la société de droit italien SHAF S.p.A. commercialisait des meubles de jardin sous la marque Diva, semblable selon elle aux siens, la société Keter plastic a fait procéder à des procès-verbaux de constat sur Internet avant de la faire assigner le 06 août 2012 devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon ;

Considérant que le jugement entrepris a, en substance : • rejeté la demande de nullité des modèles n° 001096327-0001, 0002, 0003 et n° 001605940-0001, 0002, 0003 de la société Keter Holdings Ltd.,

• rejeté les demandes de la société Keter Holdings Ltd. en contrefaçon de ses modèles par le mobilier de jardin Diva de la société SHAF S.p.A., • rejeté les demandes de la société Keter Holdings Ltd. fondées sur le droit d’auteur, • rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive de la société SHAF S.p.A., • condamné la société Keter Holdings Ltd. à payer à la société SHAF S.p.A. la somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

I : SIIR LA VALIDITÉ DES MODÈLES COMMUNAUTAIRES N° 001096327-0001, 0002, 0003 ET N° 001605940-0001, 0002, 0003 DE LA SOCIÉTÉ KETER HOLDINGS LTD :

Considérant que la société SHAF S.p.A. reprend devant la cour sa demande de nullité des modèles communautaires n° 001096327-0001, 0002, 0003 et n° 001605940-0001, 0002, 0003 de la société Keter Holdings Ltd en faisant valoir que la forme générale des modèles, notamment les fauteuils et le canapé, est connue depuis les années 60 et fait partie du patrimoine commun du design immobilier et que par ailleurs, l’idée de présenter des meubles de jardin de forme cubique, en une gamme composée d’un canapé, de fauteuils, d’une table et/ou d’un pouf, tous en résine imitant le rotin, est de même apparue au milieu des années 2000 ;

Qu’elle soutient que l’impression visuelle d’ensemble des modèles déposés par la société Keter Holdings Ltd en 2009 ne diffère pas fondamentalement pour l’observateur averti de celle produite par les modèles opposés, et notamment les modèles CASTORAMA 2006 dénommés 'Oltera Miami', 'Casto’ Floride’ et du modèle HAANS 2008 dénommé 'Tunis’ et que l’absence de validité des modèles communautaires de la société Keter Holdings Ltd est encourue pour défaut de caractère visuel ;

Considérant que la société Keter Holdings Ltd conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a jugé valables ses modèles communautaires en faisant valoir que la caractéristique de l’effet 'colonne’ ou 'Empire’ constitue une véritable signature des créations de sa gamme de meubles en imitation rotin et ne se retrouve sur aucune des pièces versées par la partie adverse ;

Qu’elle soutient en effet que seule une antériorité de toutes pièces peut entraîner la nullité d’un modèle déposé, qu’il est nécessaire d’effectuer une comparaison avec les modèles antérieurs opposés pris individuellement et qu’aucune antériorité ne reprend l’effet colonne à

la façon 'Empire’ qui constitue la signature caractéristique de ses modèles ;

Qu’elle ajoute qu’en ce qui concerne le caractère individuel de ses modèles, elle soutient que la force probante des antériorités présentées par la société SHAF S.p.A. fait défaut car celle-ci n’apporte pas la preuve d’une divulgation des catalogues qu’elle communique sur le marché européen et d’une mise en contact des modèles avec le public ; qu’enfin toutes ces antériorités se distinguent de ses modèles par trois à sept caractéristiques sur neuf ;

Considérant ceci exposé, que l’article 81 du règlement (CE) n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires donne compétence exclusive aux tribunaux des dessins ou modèles communautaires pour connaître des actions en contrefaçon et des demandes reconventionnelles en nullité d’un dessin ou modèle communautaire présentées dans le cadre d’une action en contrefaçon ;

Que l’article 85 du règlement précise que dans les procédures en contrefaçon d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, celui- ci est présumé valide ;

Considérant que la société SHAF S.p.A. fonde sa demande de nullité des modèles communautaires de la société Keter Holdings Ltd sur l’absence de caractère individuel de ces modèles au sens de l’article 6 du règlement qui dispose qu’un dessin ou modèle communautaire enregistré est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité ;

Que pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou du modèle ;

Considérant que selon le quatorzième considérant du règlement, l’appréciation du caractère individuel du dessin ou du modèle doit donc consister à déterminer s’il existe une différence claire entre l’impression globale produite par le dessin ou modèle sur l’utilisateur averti qui le regarde et celle produite sur lui par le patrimoine des dessins et modèles, compte tenu de la nature du produit auquel le dessin ou le modèle s’applique et, notamment, du secteur industriel dont il relève et du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou du modèle ;

Considérant que l’utilisateur averti est identifié en fonction de la classe de produits dans laquelle la demande d’enregistrement est produite, soit en l’espèce pour les modèles en cause : 'ensembles de mobiliers,

ameublement, sièges, divans, canapés, meubles de rangement ; qu’il peut être tant le consommateur moyen que le professionnel qui achète et revend le produit incorporant le modèle, dès lors qu’il utilise le produit conformément à sa finalité, étant rappelé que la société Keter Holdings Ltd vend en France ses meubles de jardin non pas directement au grand public mais par l’intermédiaire de la société Plicosa ; que dès lors l’utilisateur averti est celui qui utilise des meubles de jardin en connaissant les différents dessins ou modèles dans ce domaine ;

Considérant par ailleurs que l’utilisateur averti, connaissant les produits en cause et, donc, le degré de liberté de leurs créateurs, fonde son impression visuelle d’ensemble sur les éléments pour lesquels il sait qu’existe une certaine marge de liberté et que plus la liberté du créateur dans la conception et l’élaboration de son modèle est grande, moins des différences mineures entre les modèles comparés suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti ;

Qu’à l’inverse, plus sa liberté est limitée en raison notamment de contraintes techniques ou commerciales, plus les différences mineures entre les modèles comparés suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti ;

Qu’en l’espèce les parties s’accordent pour affirmer que la liberté du créateur dans le domaine des meubles de jardin est grande (page 24 des conclusions de la société Keter Holdings Ltd et page 16 des conclusions de la société SHAF S.p.A.) ;

Considérant enfin que l’article 7 du règlement dispose qu’aux fins d’application de l’article 6, un dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s’il a été publié à la suite de l’enregistrement ou autrement, ou exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute autre manière, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle litigieux ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité ; Qu’ainsi une divulgation antérieure peut résulter de la publication d’un catalogue professionnel, pour autant que celui-ci révèle clairement l’apparence du modèle et que la date de sa publication soit avérée, sans qu’il soit nécessaire de justifier en outre d’une mise sur le marché du produit incorporant le modèle ;

Considérant que les pièces 1 à 10 produites par la société SHAF S.p.A., écartées par les premiers juges au motif que les conditions de leur divulgation au public ne peuvent être connues, sont des extraits de catalogues de la collection Zebra datant de 2007 (pièce n° 2) et 2008 (pièce n° 1), de la collection Cane-line datant de 2008-2009 (pièce n° 3), de la collection Outdoor Collection Green datant de 2008 (pièce n° 4), de la collection Seasons Outdoor Garden Furniture datant de 2008 (pièce n° 5), de la collection Sun Furniture datant de 2008

(pièce n° 6), de la collection Tellon datant de 2007 (pièce n° 7), de la collection Gardenart datant de 2006 (pièce n° 8), de la collection Hartman Center of Excellence datant de 2006 (pièce n° 9) et de la collection Bellagio datant de 2008-2009 (pièce n° 10) ;

Considérant toutefois que pour pouvoir être retenus comme éléments de divulgation au public, ces catalogues ne doivent pas être seulement des documents internes aux entreprises qui les ont fait imprimer mais bien des documents effectivement remis aux acheteurs potentiels en mentionnant notamment pour chacun des produits qui y figurent leur référence et leur prix de vente ;

Qu’en l’espèce seule la pièce n° 5 (collection Seasons Outdoor Garden Furniture) comporte de telles caractéristiques alors que les pièces n° 1 à 4 et 6 à 10 ne comportent aucune référence précise ni prix de vente et ne peuvent donc être retenues comme éléments de divulgation au public ;

Considérant que les pièces n° 11 à 17 constituent par ailleurs de tels éléments de divulgation, s’agissant des catalogues Castorama datés de 2006 (pièce n° 11), 2008 (pièce n° 15) et 2009 (pièce n° 14), Unopiu daté de 2006 (pièce n° 12), Habitat daté de 2005 (pièce n° 13), Leroy Merlin daté d’avril/mai 2007 (pièce n° 16), 1000 Chairs Taschen daté de 2005 (pièce n° 17) ;

Considérant en conséquence que la comparaison entre l’impression globale produite par les modèles communautaires n° 001096327-0001, 0002, 0003 et n° 001605940-0001, 0002, 0003 et celle produite sur l’utilisateur averti par le patrimoine des dessins et modèles divulgués antérieurement à leur enregistrement (soit respectivement le 16 février 2009 pour les modèles n° 001096327-0001, 0002, 0003 et le 31 août 2009 pour les modèles n° 001605940-0001, 0002, 0003) s’effectuera par rapport aux pièces n° 5 et 11 à 17 versées aux débats par la société SHAF S.p.A. ;

Considérant que le modèle communautaire n° 001096327-0001 est un fauteuil se caractérisant, selon la société Keter Holdings Ltd, par les éléments suivants : • toute la surface du fauteuil est en plastique avec l’aspect du rotin tressé, • le fauteuil a une forme cubique, • les deux côtés du fauteuil sont constitués par deux panneaux latéraux carrés verticaux formant également les accoudoirs ayant une épaisseur analogue à celle de la main, •ces panneaux sont munis à leur base de pieds rectangulaires, les panneaux de côté se prolongeant des accoudoirs jusqu’aux pieds, ces derniers ayant alors la même largeur que les accoudoirs formant ainsi, vu de face, des colonnes à la façon 'Empire',

•le fauteuil comporte un panneau frontal, rectangulaire, vertical qui s’étend entre les deux panneaux latéraux, • le dossier est constitué par un panneau rectangulaire s’étendant entre les panneaux latéraux et de même hauteur que ces derniers, • les différents panneaux étant assemblés de façon à donner l’impression d’une surpiqûre au niveau de la délimitation des panneaux latéraux, au niveau du dossier et des accoudoirs, ce qui procure une impression 'couture', • le coussin pour le siège est aux dimensions exactes de l’assise du fauteuil, • le coussin pour le dossier est de même largeur que le dossier du fauteuil et le dépasse en hauteur de quelques centimètres ;

Que les modèles n° 001096327-0002, 0003 sont des déclinaisons de ce modèle sous forme de canapé et de table/pouf et que les modèles n° 001605940-0001, 0002, 0003 en sont également des déclinaisons sous forme de chaise, de fauteuil en coin et de table/pouf ;

Considérant que si les meubles de jardin figurant à la pièce 5 sont de forme cubique en matière plastique imitant le rotin, leurs panneaux latéraux ne se prolongent pas des accoudoirs jusqu’aux pieds et leur dossier n’est pas de la même hauteur que ces panneaux, qu’enfin l’assemblage des panneaux ne leur donne pas une impression de surpiqûre au niveau de leur délimitation ;

Que l’impression de colonne façon 'Empire’ des panneaux latéraux et l’impression 'couture’ résultant de l’assemblage des différents panneaux ne se retrouvent pas non plus dans les meubles de jardins figurant aux pièces 11 à 16 ; qu’enfin les sièges reproduits à la pièce 17 n’ont aucune ressemblance même lointaine avec les modèles communautaires en cause, s’agissant de fauteuils constitués de blocs de mousse blanche ou de couleurs vives montés sur des pieds avec des roues pivotantes ;

Considérant en conséquence que la caractéristique des panneaux latéraux se prolongeant jusqu’aux pieds, conférant cette impression de colonne façon 'Empire', associée à l’impression 'couture’ résultant de l’assemblage des différents panneaux avec un aspect de surpiqûre au niveau de leur délimitation, confère aux modèles communautaires en cause une physionomie particulière les distinguant des autres mobiliers de jardin imitation rotin tressé de forme cubique figurant sur les pièces versées aux débats par la société SHAF S.p.A. pouvant être retenues comme éléments de divulgation ;

Qu’il en résulte qu’aux yeux de l’utilisateur averti qui les regarde, il existe une différence claire entre l’impression globale produite par les modèles communautaires en cause et celle produite sur lui par le patrimoine des dessins et modèles divulgués antérieurement aux dates de dépôt de la demande d’enregistrement des dits modèles communautaires ;

Qu’en conséquence les modèles n° 001096327-0002, 0003 et n° 001605940-0001, 0002, 0003 présentent bien un caractère individuel et que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de nullité des dits modèles ;

II : SUR L’ACTTON EN CONTREFAÇON DES MODÈLES COMMUNAUTAIRES N° 001096327-0001. 0002, 0003 ET N° 001605940-0001. 0002, 0003 DE LA SOCTÉTÉ KETER HOLDINGS LTD :

Considérant que la société Keter Holdings Ltd reproche au jugement entrepris de ne pas avoir comparé ses modèles avec le fauteuil de la société SHAF S.p.A. mais d’avoir comparé les deux fauteuils entre eux en retenant à tort des différences de tressage ou le caractère plus ou moins marqué des surpiqûres et d’avoir relevé des différences de détails sans se livrer à une comparaison visuelle d’ensemble ;

Qu’elle fait valoir que le fauteuil de la société SHAF S.p.A. ne reproduit pas seulement sept des neuf caractéristiques de ses modèles de fauteuil (dont l’effet de 'colonne') comme l’ont reconnu les premiers juges, mais également les deux caractéristiques revendiquées restantes, à savoir 'l’effetrotin tressé et 'l’impression de surpiqûre ; qu’en effet selon elle les très légères différences ne sont que de détail et n’attireront pas l’attention de l’utilisateur averti ;

Qu’elle en conclut que le fauteuil de la société SHAF S.p.A. constitue la contrefaçon de ses modèles ;

Considérant que la société SHAF S.p.A. réplique que ses meubles se différencient suffisamment des modèles de la société Keter Holdings Ltd, pour que la contrefaçon alléguée ne soit pas réalisée ; qu’en effet nombre d’éléments de forme ne peuvent pris en compte en raison de leur banalité ou de leur appartenance au domaine public et que les surpiqûres ne se retrouvent pas au sein des meubles de sa gamme DIVA ;

Qu’elle conclut à la confirmation du jugement entrepris qui a débouté la société Keter Holdings Ltd de ses demandes en contrefaçon de ses modèles communautaires ;

Considérant ceci exposé, que l’article 10 du règlement dispose que la protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression visuelle globale différente ; qu’il est en particulier tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou du modèle ;

Qu’il sera rappelé que l’utilisateur averti est doté d’une vigilance particulière et dispose d’une certaine connaissance du patrimoine des dessins et modèles relatifs au produit en cause ;

Considérant par ailleurs que si la contrefaçon s’apprécie par les ressemblances et non les différences, les ressemblances peuvent s’expliquer par des emprunts communs au domaine public, par le caractère fonctionnel de certains éléments, par les règles de l’art ou par le genre; qu’il convient donc de dégager les éléments caractérisant l’individualité des modèles revendiqués sans tenir compte des éléments qui relèvent par leur nature du domaine public, de leur caractère fonctionnel ou de la reprise d’un genre ;

Considérant qu’en l’espèce l’individualité du modèle communautaire n° 001096327-0001 (dont les autres modèles ne sont que des déclinaisons sous forme de canapé, table/pouf, chaise, fauteuil en coin) réside dans ses panneaux latéraux se prolongeant jusqu’aux pieds, conférant une impression de colonne façon 'Empire', associée à l’impression 'couture’ résultant de l’assemblage des différents panneaux avec un aspect de surpiqûre au niveau de leur délimitation ; qu’en effet les autres caractéristiques telles que la forme globalement cubique des meubles, l’effet rotin tressé, les panneaux latéraux carrés verticaux formant accoudoirs d’une épaisseur analogue à celle d’une main, le panneau frontal rectangulaire s’étendant entre les deux panneaux latéraux, le dossier constitué par un panneau rectangulaire de même hauteur que les panneaux latéraux et les coussins pour le siège et le dossier relèvent tant du patrimoine des dessins et modèles des meubles de jardin que de leur caractère fonctionnel (présence d’accoudoirs, d’un dossier, de coussins notamment) ;

Considérant qu’il convient de rappeler que l’impression visuelle globale produite par les modèles communautaires en cause sur l’utilisateur averti, les différenciant clairement du patrimoine des dessins et modèles des meubles de jardin, résulte d’une part de l’impression 'colonne’ des accoudoirs se prolongeant jusqu’aux pieds du meuble et de l’impression 'couture’ avec un aspect de surpiqûre au niveau de la délimitation des différents panneaux constituant le modèle et qu’en conséquence l’utilisateur averti (tel que défini plus haut) accordera à ces aspects une attention particulièrement soutenue dans l’appréciation de l’impression globale des meubles de la société SHAF S.p.A. par rapport aux modèles communautaires de la société Keter Holdings Ltd ;

Considérant que dans le cadre de la comparaison à laquelle s’est livrée la cour entre d’une part la représentation graphique des modèles communautaires tels que déposés, en particulier des modèles de fauteuils et de pouf n° 001096327-0001 et 001605940-0001, 0002, 0003 (comme l’ont fait au demeurant les premiers juges), et d’autre part les fauteuils commercialisés par la société SHAF S.p.A. sous la référence Diva que les modèles communautaires présentent un

panneau central rectangulaire situé en dessous de l’assise dont il est séparé par une ligne de délimitation créant un effet de surpiqûre ou de 'couture’ alors que le panneau central du fauteuil Diva est constitué d’un seul panneau arrivant jusqu’à l’assise conférant ainsi sur le devant, une apparence distincte tenant au caractère uni du panneau central ;

Considérant par ailleurs que d’une façon générale dans les fauteuils Diva les panneaux sont simplement juxtaposés sans chercher à créer l’impression de 'couture’ ou de surpiqûre particulièrement visible sur les représentations graphiques des modèles communautaires de la société Keter Holdings Ltd ;

Considérant encore que l’impression 'colonne’ des accoudoirs résulte en particulier de ce que, sur la représentation graphique des modèles, ceux-ci font saillie par rapport tant aux deux panneaux latéraux qu’au panneau central, ce qui n’est pas repris dans les fauteuils Diva dont les panneaux sont au droit des accoudoirs ;

Considérant enfin que l’impression d’ensemble différente des fauteuils Diva par rapport aux modèles communautaires revendiqués est encore accrue par le fait qu’à la différence des modèles communautaires, l’effet de rotin tressé est constitué de larges bandes (effet 'ruban’ au lieu d’un effet 'bambou') et que le dossier est vertical et non pas incliné vers l’arrière ;

Considérant en conséquence que c’est à juste titre que les premiers juges n’ont pas retenu l’existence d’actes de contrefaçon de modèles, ces circonstances suffisant à écarter une impression visuelle d’ensemble identique aux yeux de l’utilisateur averti ;

Que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de la société Keter Holdings Ltd en contrefaçon de ses modèles communautaires par le mobilier de jardin Diva de la société SHAF S.p.A. ;

III : SUR L’ACTTON EN CONTREFAÇON DES DROITS D’AUTEUR DE LA SOCTÉTÉ KETER HOLDINGS LTD :

Considérant que la société Keter Holdings Ltd rappelle que la France et Israël sont membres de la Convention de Berne du 09 septembre 1886 pour la protection des œuvres littéraires et artistiques et qu’en vertu des articles 2.7 et 5.1 de cette convention, elle peut revendiquer la protection en France des droits d’auteur sur ses meubles de jardin dans la mesure où il ressort de la combinaison des articles 1er et 4 de la loi israélienne sur le droit d’auteur (Copyright Act de 2007) que les œuvres d’art appliqué sont protégeables par le droit d’auteur en Israël ;

Qu’elle soutient pouvoir se fonder sur la présomption de titularité des droits d’auteur sur les meubles de jardin à compter du 16 février 2009 ; que ses meubles de jardin sont originaux de par l’effet 'couture’ et le style 'Empire’ qui révèlent une originalité certaine dans le domaine des mobiliers de jardin en rotin ;

Qu’elle indique que la gamme de meubles de jardin Diva de la société SHAF S.p.A. reprend l’effet surpiqûre et le style 'Empire’ caractéristiques de ses meubles de jardin ;

Considérant que la société SHAF S.p.A. réplique que si l’impression de surpiqûre peut être nouvelle, elle ne peut être qualifiée d’originale, s’agissant d’une simple technique et que de même revendiquer un style 'Empire’ pour une forme générale de meuble revient à se prévaloir d’un genre dont l’utilisation ne peut être appropriée ;

Considérant en effet qu’au titre du droit d’auteur, la société Keter Holdings Ltd ne peut revendiquer un genre tel que le style 'Empire’ qui est de libre parcours ; qu’en ce qui concerne l’effet 'couture’ si celui-ci confère aux mobiliers de jardin de cette société un caractère individuel, il résulte du simple assemblage entre eux des différents panneaux composant ces meubles sans être le résultat d’un effort créatif révélateur de la personne de son auteur ;

Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de la société Keter Holdings Ltd fondées sur le droit d’auteur ;

IV : SUR LES AUTRES DEMANDES :

Considérant que la société SHAF S.p.A. ne reprend pas devant la cour sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive dont elle a été déboutée par les premiers juges ; que la société Keter Holdings Ltd conclut pour sa part à la confirmation de ce chef du jugement entrepris ;

Considérant dès lors qu’en l’absence de toute critique de ce chef du jugement entrepris, celui-ci sera confirmé par adoption de ses motifs pertinents et exacts tant en fait qu’en droit en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive de la société SHAF S.p.A. ;

Considérant que la société SHAF S.p.A. demande néanmoins au dispositif de ses conclusions la publication judiciaire du présent arrêt dans trois revues à son choix et aux frais de la société Keter Holdings Ltd sans motiver spécifiquement cette demande ; qu’une telle mesure constitue un mode de réparation d’un dommage résultant d’une faute imputable à la partie adverse alors que devant la cour il n’est plus présenté de demande sur le fondement de la procédure abusive ; que

dès lors cette société ne pourra qu’être déboutée de sa demande de publication judiciaire ;

Considérant de même que la société Keter Holdings Ltd étant déboutée de toutes ses demandes, elle ne peut qu’être déboutée, pour les mêmes motifs, de sa propre demande de publication judiciaire du présent arrêt dans trois journaux ou revues à son choix et aux frais de la société SHAF S.p.A. ;

Considérant qu’il est équitable d’allouer à la société SHAF S.p.A. la somme complémentaire de 20.000 € au titre des frais par elle exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu’il a statué sur les frais irrépétibles de première instance ;

Considérant que la société Keter Holdings Ltd sera pour sa part, déboutée de sa demande en paiement au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que la société Keter Holdings Ltd, partie perdante en son appel, sera condamnée au paiement des dépens d’appel, le jugement entrepris étant par ailleurs confirmé en ce qu’il a statué sur la charge des dépens de la procédure de première instance ;

PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement et contradictoirement ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Déboute la société SHAF S.p.A. de sa demande de publication judiciaire du présent arrêt ;

Déboute la société Keter Holdings Ltd de sa demande de publication judiciaire du présent arrêt ; Condamne la société Keter Holdings Ltd à payer à la société SHAF S.p.A. la somme complémentaire de VINGT MILLE EUROS (20.000 €) au titre des frais exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens ;

Déboute la société Keter Holdings Ltd de sa demande en paiement au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; Condamne la société Keter Holdings Ltd aux dépens de la procédure d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 27 janvier 2015, n° 2013/15460