Cour d'appel de Paris, Pôle 4 chambre 5, 11 janvier 2023, n° 20/00389

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 ch. 5, 11 janv. 2023, n° 20/00389
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/00389
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 24 novembre 2019, N° 15/11692
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 16 janvier 2023
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Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 5

ARRET DU 11 JANVIER 2023

(n° /2023, 23 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00389 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBHBR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de Paris RG n° 15/11692

APPELANTE

Compagnie d’assurances SMABTP ès-qualités d’assureur PUC et prise en la personne de son président du conseil d’administration domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 7]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée de Me Emmanuelle BOCK, avocat au barreau de PARIS, substituée à l’audience par Me Stefania CARMINATI, de la SCP NABA, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

XL INSURANCE COMPANY venant aux droits d’ AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE recherchée en sa qualité d’assureur de la Société THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée de Me Jean-Pierre KARILA, de la SELAS KARILA, avocat au barreau de PARIS

SAS THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistée de Me Jean-Pierre KARILA, de la SELAS KARILA, avocat au barreau de PARIS

SA AXA FRANCE IARD assureur de la société THALES agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 11]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assistée de Carmen DEL RIO, avocat au barreau de PARIS

SARL CABINET [N] [O] prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

Assistée de Me Elise MIGNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

SAS SOCIETE DE CONCEPTION D’ARCHITECTURE ET D’URBANISME (SCAU) prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

Assistée de Me Elise MIGNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 Septembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre

Madame Elise THEVENIN-SCOTT, conseillère

Mme Alexandra PELIER-TETREAU, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame [T] [S] dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Mme Suzanne HAKOUN

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Marie-Ange Sentucq, présidente de chambre et par Céline Richard, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DU LITIGE

L’assistance publique des hôpitaux de [Localité 12] (AP-HP), dans le cadre de la procédure des marchés publics, a fait construire l’hôpital européen Georges Pompidou situé dans le [Localité 1].

Pour la réalisation de cette opération, un marché d’ingénierie et d’architecte a été conclu le 24 novembre 1989 avec Monsieur [U] [P] représentant la SAS société de conception d’architecture et d’urbanisme (la SCAU), architecte, d’une part, et Monsieur [N] [O], auquel a succédé la SARL Cabinet [N] [O], en qualité d’économiste-vérificateur, d’autre part.

Le lot électricité a été confié aux sociétés Santerne IDF et GTIE, devenu VINCI Energies, selon un marché de travaux conclu le 25 avril 1995.

Sont, par ailleurs, intervenus au titre d’une mission de contrôle technique du lot électricité, l’entreprise SOCOTEC, et aux fins de contrôle technique après entrée en possession, le bureau Véritas, puis DEKTRA.

Le 13 décembre 1995, une Police Unique de Chantier (PUC) entre l’AP-HP et la SMABTP a été signée, avec prise d’effet à la même date.

Les 20 décembre 1999 et 17 avril 2000, il a été procédé à des opérations de réception partielle avec réserves.

Le 14 août 2007, un incendie s’est déclaré dans le local électrique basse tension n°7 de l’hôpital.

Suite à cet incendie, l’AP-HP a saisi les juridictions administratives en référé sollicitant un constat en urgence, puis une expertise.

Une ordonnance de référé du 28 septembre 2007 a désigné un collège d’experts aux fins d’établir les causes de l’incendie, les dommages et préjudices subis.

Par ordonnances des 30 octobre 2007 et 5 février 2008, cette décision a été rendue commune à la SAS THALES, la SMABTP, la société AXA France IARD, et à la SA AXA CORPORATES solutions assurance.

Le rapport d’expertise a été déposé le 31 décembre 2011.

Le 31 août 2012, l’AP-HP a saisi le tribunal administratif de Paris d’une demande d’indemnisation contre la SCAU, le cabinet [O], la SAS THALES, Vinci Energies, Socotec, le bureau Veritas et la société Dektra.

Le 11 mars 2015, le tribunal administratif de Paris a notamment :

Condamné solidairement la société THALES, la SCAU, le cabinet [O], les sociétés VINCI Energies, SOCOTEC et DEKTRA à verser à l’AP-HP la somme de 4 949 999,65 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 31 août 2012 et capitalisation desdits intérêts ;

Condamné les mêmes parties aux frais d’expertise à concurrence de 85%

Procédé à un partage de responsabilité entre elles.

Par arrêt du 11 janvier 2016, la cour administrative d’appel de Paris a confirmé le jugement et condamné la SAS THALES à garantir la SCAU et le cabinet [O] à hauteur de 75 %.

En parallèle de la procédure devant les juridictions administratives, par acte du 2 avril 2013, la SCAU et le cabinet [O] ont assigné en garantie :

La SMABTP devant le tribunal de grande instance de Paris en exécution de la police unique de chantier n°397 884 N 1401.00

La société AXA France IARD, succédant à l’UAP, la SA AXA CORPORATES solutions assurance, succédant à AXA Courtages, et la société ALLIANZ ès qualités d’assureurs de la SAS THALES.

Suivant conclusions en date du 14 juin 2013, la SAS THALES est intervenue volontairement à l’instance devant le tribunal de grande instance de Paris.

Le 3 décembre 2013, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance a :

Déclaré parfait le désistement de la SCAU et du cabinet [O] à l’égard de la société ALLIANZ

Ordonné un sursis à statuer dans l’attente du jugement du tribunal administratif de Paris.

Par acte des 17 et 28 juillet 2015, la SCAU et le cabinet [O] ont assigné en garantie la SAS THALES et la SA AXA CORPORATES solutions assurance. Une jonction des deux instances a été ordonnée.

Par ordonnance du 11 janvier 2016, le juge de la mise en état a sursis à statuer dans l’attente de l’arrêt de la cour administrative d’appel.

Une nouvelle ordonnance rendue le 7 novembre 2017 a condamné la SMABTP à payer une provision de 280 453,80 euros à la SAS THALES, outre la somme de 325 713,40 euros à la SA AXA CORPORATES solutions assurance.

Le 25 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris, par jugement mixte a :

Déclaré recevable la SCAU et le cabinet [O] en toutes leurs demandes ;

Rejeté la demande de sursis à statuer formée par la SMABTP à l’égard des demandes de la SCAU et du cabinet [O] ;

Déclaré la SMABTP irrecevable en ses demandes formées contre la société AXA France IARD ;

Déclaré la SMABTP irrecevable en sa demande reconventionnelle formée contre la SAS THALES et la SA AXA CORPORATES solutions assurance

Déclaré non prescrite l’action en garantie exercée par la SA AXA CORPORATES solutions assurance à l’encontre de la SMABTP

Invité la SA AXA CORPORATES solutions assurance à produire une copie des conditions générales et particulières de la police d’assurance de responsabilité civile qui a fondé le paiement qu’elle a effectué à l’AP-HP, au profit de la SAS THALES

Ordonné la réouverture des débats et la révocation de l’ordonnance de clôture, et renvoyé les parties à la mise en état pour conclusions récapitulatives de la SA AXA CORPORATES solutions assurance et de la SMABTP sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la SA AXA CORPORATES solutions assurance

Réservé toutes les demandes formées contre la SA AXA CORPORATES solutions assurance par la SMABTP, ainsi que les demandes formées par la SA AXA CORPORATES solutions assurance.

Condamné la SMABTP à garantir la SCAU et le cabinet [O] des condamnations prononcées à leur encontre par le jugement du tribunal administratif de Paris du 11 mars 2015 et par arrêt de la cour administrative d’appel du 27 septembre 2016 ;

Condamné la SMABTP à payer à la SAS THALES la somme de 323 635,96 euros en garantie des sommes payées par cette dernière à l’AP-HP en exécution du jugement du tribunal administratif de Paris du 11 mars 2015 et de l’arrêt de la cour administrative d’appel du 27 septembre 2016 ;

Condamné la SMABTP à garantir la SAS THALES de toutes sommes correspondant à l’indemnisation de dommages garantis qu’elle pourrait encore devoir régler à l’AP-HP ou à la SCAU et au cabinet [O] en exécution des mêmes décisions administratives ;

Dit que la SMABTP est autorisée à opposer la franchise contractuelle et les limites de garantie à la SCAU, au cabinet [O] et à la SAS THALES, laquelle viendra se compenser avec les indemnités dues par la SMABTP en vertu du jugement ;

Condamné la SMABTP aux dépens ;

Condamné la SMABTP à verser la somme de 3 000 euros chacun à la SCAU, au cabinet [O] et à la société AXA France IARD, et la somme de 5 000 euros à la SAS THALES en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 20 décembre 2019, la SMABTP a interjeté appel de cette décision.

Suivant dernières conclusions signifiées au RPVA le 19 septembre 2022, la SMABTP demande à la cour de :

Vu les articles 31 et 32 du Code de procédure civile,

A titre préliminaire,

Juger qu’elle est saisie de la mobilisation des garanties PUC au titre du préjudice matériel et immatériel de l’AP HP et de l’application de la réduction proportionnelle de l’indemnité demandée par la SMABTP en première instance et en appel,

Infirmer le Jugement en ce qu’il a déclaré les sociétés SCAU et D [O] recevables en toutes leurs demandes,

Statuant à nouveau,

Juger en l’état irrecevables et en toute hypothèse mal fondées les demandes de la société SCAU et de la société cabinet [N][O] qui visent à demander la condamnation de la SMABTP à leur payer des sommes non chiffrées et en l’état indéterminées, leur préjudice n’étant à ce stade ni direct et ni certain, mais simplement hypothétique,

Subsidiairement,

Ordonner un sursis à statuer sur les demandes de la société SCAU et la société cabinet [N][O] et ce dans l’attente de la justification d’un règlement éventuel, que leurs demandes ne sauraient dans ce cas excéder,

A titre principal,

Vu la résiliation de la police PUC à effet le 14 décembre 2001,

Vu les conditions générales de la police PUC,

Vu l’article L113-1 et suivants du Code des assurances,

A titre principal, il est demandé au Tribunal (sic) de :

Infirmer le Jugement en ce qu’il a condamné la SMABTP à garantir les sociétés SCAU et [O] des condamnations principales et en garantie prononcées à leur encontre par les juridictions administratives, condamné la SMABTP à payer à la société THALES la somme de 323.635, 96 € avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2015, ordonné la capitalisation des intérêts, condamné la SMABTP à garantir THALES de toutes sommes qu’elle pourrait encore régler à l’AP HP ou aux sociétés SCAU et [O], condamné la SMABTP aux dépens exposés par SCAU, [O] et THALES, condamné la SMABTP à payer la somme de 3.000 € chacune à SCAU et [O] et la somme de 5.000 € à THALES au titre de l’article 700 CPC,

Statuant à nouveau,

Juger la SMABTP bien fondée à opposer la résiliation de son contrat à effet du 14 décembre 2001, opposable aux souscripteurs et aux assurés, ainsi qu’a toutes autres parties,

Juger que la résiliation de la PUC a mis fin aux garanties obligatoires et facultatives, parmi lesquelles figure la garantie des dommages immatériels,

Juger que la garantie des dommages immatériels ne peut trouver à s’appliquer s’agissant d’un sinistre survenu le 14 août 2007, postérieur à la résiliation du contrat,

Débouter en conséquence la compagnie XL INSURANCE de sa demande en ce qu’elle porte sur un préjudice immatériel qui ne peut mobiliser les garanties de la SMABTP,

Débouter plus généralement l’ensemble des demandes, fins et conclusions en tant que dirigées à l’encontre de la SMABTP, aussi au titre des dépens de première instance et au titre de l’article 700 CPC,

Condamner la société THALES à restituer à la SMABTP la somme de 285.817, 31 € qui lui a été réglée sous toutes réserves le 7 décembre 2017,

Condamner la compagnie XL INSURANCE à restituer à la SMABTP la somme de 336.942, 47 € qui lui a été réglée sous toutes réserves le 7 décembre 2017.

Subsidiairement,

Vu la police PUC et la police AXA FRANCE,

Vu l’article L121-4 du Code des assurances,

Il est demandé à la cour pour le cas où une condamnation devait intervenir à l’encontre de la SMABTP :

Infirmer le Jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable en ses demandes formées à l’encontre de la SA AXA FRANCE IARD,

Infirmer par conséquent les condamnations aux dépens exposés par AXA FRANCE et au titre de l’article 700 subies par la SMABTP en faveur d’AXA FRANCE,

Statuant à nouveau,

Juger que la compagnie AXA France doit garantir la responsabilité de la société THALES DEVELOPPEMENT COOPERATION,

Juger que la compagnie AXA France ne peut opposer l’article 4 de l’annexe n°520.103 « conventions spéciales »,

Condamner la Compagnie AXA FRANCE IARD à garantir la SMABTP de toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre, et ce en principal, intérêts, frais et tous autres accessoires,

Débouter la Compagnie AXA FRANCE IARD de sa fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale et de droit commun,

Débouter la société AXA FRANCE IARD de toute demande formée en première instance au titre des dépens et des frais irrépétibles,

A titre plus subsidiaire,

Fixer la part de contribution d’AXA FRANCE IARD au risque garanti par l’assurance PUC et l’assurance décennale consentie par AXA à THALES,

Vu la police PUC,

Vu les articles L113-3, L113-9 et L121-5 du Code des assurances,

Il est demandé à la cour de :

Infirmer le Jugement en ce qu’il a rejeté la demande de réduction proportionnelle de l’indemnité qui serait due à THALES, SCAU et D [O],

Statuant à nouveau,

Juger que la SMABTP est fondée à opposer une règle proportionnelle de capitaux à proportion de la différence entre la valeur de la chose assurée et la valeur de l’assiette de calcul de la prime réglée,

Juger que la SMABTP est en toute hypothèse fondée à opposer une réduction proportionnelle de l’indemnité pour aggravation du risque,

Juger que la demande de la société THALES COOPERATION ET DEVELOPPEMENT ne saurait excéder la somme de 264.957,20 € en principal après application d’une règle proportionnelle au taux de 0,818 %,

Juger que la demande de la compagnie XL INSURANCE ne saurait excéder la somme de 341.210 € après application d’une règle proportionnelle au taux de 0,818 %,

Juger que toute demande, y compris de SCAU et du cabinet [N] [O] sera réduite à proportion de la règle proportionnelle que la SMABTP est fondée à opposer, au taux de 0,818%,

Rejeter, en tout état de cause, la demande reconventionnelle des sociétés SCAU et [O] visant à être indemnisées par la SMABTP du préjudice prétendument subi en raison de l’absence de prise en charge pleine et entière des condamnations prononcées par les juridictions administratives,

Enfin et en toute hypothèse,

Vu l’article L112-6 du Code des assurances,

Juger que toute condamnation éventuelle sera prononcée en derniers ou quittances, au regard des règlements d’ores et déjà effectués, en particulier au titre de l’exécution effectuée, sous toutes réserves, de l’ordonnance rendue le 7 novembre 2017 par le Juge de la mise en état, Juger que la SMABTP ne saurait être tenue au-delà des conditions et limites de ses obligations contractuelles,

Juger la SMABTP fondée à opposer sa franchise, vis-à-vis de chacun de ses assurés, d’un montant de 3.048, 98 € s’agissant de chacun des membres de la maitrise d''uvre,

Condamner en toute hypothèse la société SCAU, la société cabinet [N][O] et à la société THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION à payer la franchise,

Juger la SMABTP bien fondée à opposer son plafond de garantie applicable en matière de garantie des dommages immatériels d’un montant de 1 million de francs soit 1.524.490,17 €,

Rejeter l’appel incident formé par THALES et XL INSURANCE à l’encontre du dispositif du Jugement ayant autorisé la SMABTP à opposer ses franchises contractuelles, et plus en général ses limites contractuelles, à ses assurés,

Débouter THALES et XL INSURANCE de leur fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale,

Par conséquent,

Confirmer le Jugement en ce qu’il dit que la SMABTP est fondée à opposer ses franchises contractuelles et limites de garantie aux sociétés SCAU, [O] et THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION,

Vu les articles 699 et 700 du Code de procédure civile,

Condamner les sociétés SCAU, [O], THALES, XL INSURANCE et AXA FRANCE IARD à régler à la SMABTP la somme de 5.000 €, chacune, au titre de l’article 700 CPC, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance d’appel, dont distraction faite au profit de la SELARL 2H AVOCATS prise en la personne de Maître Patricia HARDOUIN et ce, en application de l’article 699 CPC.

Suivant dernières conclusions signifiées au RPVA le 14 septembre 2022, la SCAU et le cabinet [O] demandent à la cour de :

Vu les articles 2224 du code civil, 1382 ancien du code civil et 1240 du code civil, 1147 ancien du code civil et 1231-1 du code civil, article 122 du code de procédure civile,

A titre principal,

CONFIRMER le jugement en ce qu’il a :

— Déclaré la société SCAU et de la société Cabinet [N] [O] recevables en toutes leurs demandes ;

— Rejeté la demande de sursis à statuer formée par la SMABTP à l’égard des demandes de la société SCAU et de la société Cabinet [N] [O].

— Condamné la SMABTP à garantir la société d’architecture SCAU et la société Cabinet [N] [O] des condamnations principales et en garantie prononcées à leur encontre par jugement du tribunal administratif de Paris du 11 mars 2015 et par arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 27 septembre 2016, s’agissant aussi bien des dommages matériels que des dommages immatériels,

— Condamné la SMABTP aux dépens exposés par la société d’architecture SCAU et la société Cabinet [N] [O],

— Condamné la SMABTP à payer la somme de 3 000 euros à la société d’architecture SCAU et 3 000 euros à la société Cabinet [N] [O], en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— Rejeté l’application de la règle proportionnelle de capitaux édictée par l’article L.121-5 du code des assurances ;

Et en outre, statuant de nouveau,

— REJETER l’application la règle proportionnelle de primes, édictée par l’article L.113-9 du code des assurances ;

— JUGER irrecevable, par suite de la prescription biennale de l’article L. 114-1 du Code des assurances, la prise en considération par le Premier Juge de la franchise stipulée au titre de l’assurance obligatoire de la responsabilité décennale, ainsi qu’au titre de l’assurance facultative des préjudices immatériels ;

— JUGER en conséquence que la SMABTP est infondée à opposer ses franchises contractuelles à la société d’architecture SCAU et la société Cabinet [N] [O] et à en demander le paiement ;

A titre subsidiaire,

— CONDAMNER la SMABTP, en raison de sa faute, à indemniser la société SCAU et la société Cabinet [N] [O] du préjudice subi, du fait de la résiliation et/ou des règles proportionnelles, tiré d’une absence de prise en charge pleine et entière des condamnations prononcées par la juridiction administrative ;

— JUGER que le montant du préjudice indemnisé à la société SCAU et la société Cabinet [O] sera égal au montant des condamnations qui seraient versées par ces dernières à l’AP-HP ou à tout autre coobligé.

A titre infiniment subsidiaire,

— CONDAMNER la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS, aux droits de laquelle vient la société XL INSURANCE, et la compagnie AXA France IARD, à relever et garantir la société SCAU et la société Cabinet [N] [O] à hauteur de 75 % de l’intégralité des sommes que ces dernières seraient amenées à verser à l’AP-HP dans le cadre de l’exécution du jugement rendu par le Tribunal administratif de Paris, le 11 mars 2015 et par la Cour administrative d’appel de Paris, le 27 septembre 2016.

En tout état de cause,

— CONDAMNER tout succombant à verser à la SCAU et la société Cabinet [N] [O] une somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

— CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens de l’instance.

Suivant dernières conclusions signifiées au RPVA le 26 septembre 2022, la SAS THALES et la SA AXA CORPORATES solutions assurance demandent à la cour de :

CONFIRMER le jugement mixte du 25 novembre 2019 en ce qu’il a :

DÉCLARÉ la SMABTP irrecevable en sa demande reconventionnelle formée à l’encontre de la SAS Thales Développement et Coopération et de la société AXA Corporate Solutions,

DÉCLARÉ non prescrite l’action en garantie exercée par la société AXA Corporate Solutions à l’encontre de la SMABTP

RÉSERVÉ toutes les demandes formées à l’encontre de la société AXA Corporate Solutions par la SMABTP ainsi que les demandes formées par la société AXA Corporate Solutions,

CONDAMNÉ la SMABTP à payer à la SAS Thales Développement et Coopération, en deniers ou quittance, la somme de 323 635,96 euros en garantie des sommes payées par cette dernière à l’APHP en exécution du jugement du tribunal administratif de Paris du 11 mars 2015 et de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 27 septembre 2016, avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2015 ;

ORDONNÉ la capitalisation des intérêts et dit que les intérêts échus pour une année entière depuis le 19 novembre 2015 produiront eux-mêmes intérêts à compter du 19 novembre 2016,

CONDAMNÉ la SMABTP à garantir la SAS THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION de toutes sommes correspondant à l’indemnisation de dommages garantis qu’elle pourrait encore régler à l’APHP ou aux Sociétés SCAU et CABINET [N] [O] en exécution du jugement du Tribunal Administratif de Paris du 11 mars 2015 et de l’arrêt de la Cour Administrative de Paris du 27 septembre 2016,

CONDAMNÉ la SMABTP aux dépens exposés par la SAS Thales Développement et Coopération ;

CONDAMNÉ la SMABTP à payer à la SAS Thales Développement et Coopération en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile, la somme de 5.000 euros ;

Par ailleurs,

REJETER l’appel de la SMABTP d’une part et la demande subsidiaire de SCAU et [N] [O] à l’encontre d’AXA CORPORATE SOLUTIONS devenue XL INSURANCE COMPANY d’autre part ;

ACCUEILLIR et DIRE bien fondé l’appel incident de la Société THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION

Et statuant à nouveau :

JUGER que dans le cadre du présent procès, la SMABTP a fait preuve d’un surprenant défaut de loyauté notamment en affirmant l’existence de faits ou actes contraires à la vérité d’une part, et en soutenant des prétentions définitivement écartées par un jugement du 5 décembre 2017 auquel elle a acquiescé concernant la même Police Unique de Chantier (PUC) et la même opération de construction de l’Hôpital Européen Georges Pompidou, d’autre part ;

REJETER la demande de la SMABTP de réduction de l’indemnité d’assurance tant sur le fondement de l’article L. 121-5 du Code des assurances, comme l’a dit le Premier Juge, mais seulement dans les motifs de son jugement, qu’en application de l’article L. 113-9 du Code précité, comme jugé nécessairement mais implicitement par le Premier Juge, dès lors qu’il a condamné la SMABTP à payer à la SAS THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION la somme précitée de 323.635,96 euros ;

REJETER la demande de la SMABTP concernant le paiement d’une franchise de 3.048,98 euros et l’opposabilité d’un plafond de garantie pour les dommages immatériels ;

REJETER les demandes de la SMABTP formées tant à l’encontre de THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION qu’à l’encontre d’AXA CORPORATE SOLUTIONS devenue XL INSURANCE COMPANY sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile;

CONDAMNER en revanche la SMABTP à payer, en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile, à THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION, la somme de 20.000 euros ; et à XL INSURANCE COMPANY la somme de 20.000 euros ;

DIRE fondé l’appel incident de la SAS THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION ;

Et en conséquence :

JUGER irrecevable, par suite de la prescription biennale de l’article L. 114-1 du Code des assurances, la prise en considération par le Premier Juge de la franchise stipulée au titre de l’assurance obligatoire de la responsabilité décennale de THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION d’une part, et celle de la franchise contractuelle de l’assurance facultative des préjudices immatériels en raison notamment du fait que THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION n’a pas requis ni obtenu la condamnation de la SMABTP à la prise en charge ou à l’indemnisation de préjudices immatériels, mais seulement des dommages matériels, d’autre part ;

JUGER en conséquence que la SMABTP est infondée à opposer ses franchises contractuelles et limites de garantie à THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION ;

INFIRMER la décision de compensation autorisée par le jugement du 25 novembre 2019 entre les franchises avec les indemnités dues par la SMABTP en exécution du jugement ;

RETENIR le caractère définitif du jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris le 5 décembre 2017 ;

JUGER en conséquence que la SMABTP ne peut opposer aux locateurs d’ouvrage et à leurs assureurs la résiliation de la police PUC d’une part et ne peut prétendre pertinemment à l’application d’une réduction proportionnelle que ce soit sur le fondement de l’article L.121-5 du Code des assurances ou sur celui de l’article L.113-9 dudit code ;

RETENIR par ailleurs le caractère définitif du jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Paris le 17 mai 2022 et prendre en conséquence en considération le fait que la SMABTP a accepté définitivement ' pour le moins dans ses rapports avec XL INSURANCE COMPANY ' :

ne pas pouvoir opposer la résiliation de la PUC d’une part,

devoir garantie au titre de l’indemnisation des dommages immatériels d’autre part,

devoir payer à XL INSURANCE COMPANY la somme de 416.776,09 € avec intérêt au taux légal à compter du 24 janvier 2018 et la capitalisation des intérêts dus et échus pour une année entière dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du Code civil,

d’être condamnée à payer à XL INSURANCE COMPANY la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

REJETER en conséquence toutes les demandes formulées par la SMABTP tant à l’encontre de THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION qu’à l’encontre de XL INSURANCE COMPANY

CONDAMNER dans tous les cas la SMABTP à payer en vertu de l’article 700 du Code de procédure civile comme demandé ci-dessus à THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION la somme de 20.000 euros d’une part et à XL INSURANCE COMPANY la somme de 20.000 euros d’autre part

CONDAMNER la SMABTP enfin en tous les dépens de première instance et d’appel et dire en ce qui concerne ces derniers qu’ils pourront être recouvrés par Maître Edmond FROMANTIN dans les conditions prévues par l’article 699 du Code de procédure civile.

Suivant dernières conclusions signifiées au RPVA le 27 septembre 2022, la société AXA France IARD demande à la cour de :

Vu le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de PARIS du 25 novembre 2019,

Vu l’article 31 du Code de procédure civile,

Vu l’article 564 du Code Procédure Civile,

Vu l’article 1792 et suivants du Code Civil,

Vu l’article L 241-1 du Code des Assurances,

Vu la Police PUC,

Vu la police BATIDEC et BATIPLUS accordée par AXA FRANCE IARD

Vu le jugement rendu dans une affaire connexe le 5 décembre 2017, et aujourd’hui définitif, qui a déjà retenu l’application de la police PUC accordée par la SMABTP en raison de ce chantier

CONFIRMER le jugement rendu en ce qu’il a jugé irrecevable la SMABTP en sa demande de garantie dirigée à l’encontre d’AXA FRANCE IARD ès-qualités d’assureur de la société THALES comme étant irrecevable car dénuée de droit d’action et de qualité ;

JUGER irrecevable la SMABTP en ce qu’elle demande la garantie au bénéfice d’un tiers.

JUGER irrecevable nouvelle la demande de garantie formée à son profit par la SMABTP en vertu de l’article 564 du CPC,

JUGER que la SMABTP au regard des dispositions de sa police n’a ni qualité ni intérêt pour agir à l’encontre de la Compagnie AXA FRANCE IARD assureur d’un bénéficiaire de la police PUC

JUGER que la SMABTP ne vise aucun fondement juridique à l’appui de sa demande en garantie à l’encontre de la Compagnie AXA FRANCE IARD,

LA JUGER en tout état de cause prescrite,

JUGER qu’aucune des garanties accordées par la Compagnie AXA FRANCE IARD, n’a en tout état de cause, vocation à s’appliquer.

Vu l’article L121-4 du Code des Assurances,

JUGER que la police PUC et le contrat souscrit auprès d’AXA FRANCE IARD ne sont pas des assurances cumulatives dès lors que le risque est couvert uniquement par la police PUC et le souscripteur distinct.

RENVOYER hors de cause la Compagnie AXA FRANCE IARD,

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a dit sans objet la demande de garantie formée subsidiairement par la société SCAU et le Cabinet [B]

JUGER que cette demande n’est fondée ni en fait ni en droit en ce qu’elle est dirigée à l’encontre de la SA AXA FRANCE IARD, l’article 1240 du Code Civil ne pouvant être invoqué.

Vu l’article L.124-3 du Code des Assurances,

Vu l’article 1792-4-1 du Code Civil,

Vu l’article 2224 du Code Civil,

JUGER la demande prescrite et relever que les garanties accordées par la société AXA FRANCE IARD n’ont pas vocation à être mobilisées;

RENVOYER de plus fort hors de cause la Compagnie AXA FRANCE IARD ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER in solidum tout succombant à verser à la Compagnie AXA FRANCE IARD la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile,

CONDAMNER in solidum tout succombant aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître GRAPPOTTE BENETREAU, Avocat aux offres de droit conformément à l’article 699 du Code de Procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2022, puis reportée au jour de l’audience s’étant tenue le 27 septembre 2022 à la demande de l’ensemble des parties.

MOTIVATION

Sur les fins de non-recevoir :

L’incidence du jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 5 décembre 2017 :

La SAS THALES et son assureur, XL INSURANCE, demandent à la cour de déclarer l’ensemble des demandes de la SMABTP à son encontre irrecevables au motif que les points soulevés auraient déjà été définitivement tranchés dans deux décisions du tribunal de grande instance de Paris ayant autorité de la chose jugée, en date des 5 décembre 2017 et 17 mai 2022.

La SCAU et le cabinet [O] soutiennent la même analyse et demande.

La SMABTP, quant à elle, affirme que l’autorité de la chose jugée ne trouve à s’appliquer qu’en cas d’identité de parties et de demandes dans les deux litiges, ce qui n’est pas, selon elle, le cas en l’espèce.

Réponse de la cour :

En application de l’article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l’autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’il tranche.

L’autorité de la chose jugée a pour effet d’empêcher qu’une partie réitère un litige exactement similaire à celui qui a déjà été tranché. Elle suppose une triple identité : il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

En l’espèce, le jugement du 5 décembre 2019 a, certes, opposé la SAS THALES et XL INSURANCE, ainsi que d’autres intervenants à l’opération, d’une part, à la SMABTP d’autre part ; il a trait à la même opération immobilière et évoque également la police unique de chantier (PUC), mais il porte sur un dommage totalement différent.

Quant à la décision du 17 mai 2022, elle est relative à la seule partie du litige ayant fait l’objet d’une réouverture des débats dans le jugement critiqué, et opposant XL INSURANCE à la SMABTP dans le cadre du recours subrogatoire de la première contre la seconde. Elle ne se prononce pas sur la garantie demandée par la SAS THALES à la SMABTP.

En conséquence, l’objet du litige étant différent dans les deux décisions visées, le moyen tiré de l’irrecevabilité à raison de la chose jugée n’est pas fondé.

La recevabilité des demandes de la SCAU et du cabinet [O] :

La SMABTP demande à la cour de déclarer irrecevables à agir la SCAU et le cabinet [O] au motif qu’ils ne pourraient justifier d’un intérêt né et actuel à l’appeler en garantie, ne pouvant prouver avoir versé la moindre indemnité à l’AP-HP. A titre subsidiaire, la SMABTP sollicite qu’il soit sursis à statuer dans l’attente du versement d’indemnités par la SCAU et le cabinet [O] à l’AP-HP.

La SCAU et le cabinet [O] s’oppose à ces demandes et souhaitent voir déclarer recevables leurs demandes, affirmant qu’une partie déjà condamnée, est fondée à appeler en garantie une autre partie, quand bien même aucun paiement préalable n’aurait été effectué. Elle souligne que le principe de sa condamnation est acquis et définitif suivant arrêt de la cour administrative d’appel du 27 septembre 2016.

Réponse de la cour :

En application de l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

En l’espèce, s’il est constant que ni la SCAU ni le cabinet [O] n’ont versé d’indemnisation à l’AP-HP, il est tout aussi constant que leur responsabilité dans les dommages subis a été définitivement retenue aux termes de l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Paris le 27 septembre 2016. Dans ces conditions, ils bénéficient d’un intérêt à agir, né et actuel, leur permettant de solliciter le principe d’une condamnation à garantie de leur assureur au titre de la PUC.

Dès lors, leurs demandes sont recevables et il n’est pas nécessaire de surseoir à statuer, la preuve d’un paiement n’ayant aucune incidence sur le principe de la garantie.

Le jugement du tribunal de première instance sera confirmé sur ce point.

La recevabilité des demandes de la SMABTP :

La recevabilité des demandes formées contre la société AXA France IARD, assureur « garantie décennale » de la SAS THALES :

La société AXA France IARD soulève l’irrecevabilité des demandes de la SMABTP à son encontre pour défaut de qualité à agir, son recours en garantie ne correspondant ni aux prescriptions contractuelle de la PUC, ni à l’article L.121-4 du code des assurances, relatif au cumul d’assurance. Elle ajoute qu’au surplus les demandes formulées à son égard sont nouvelles en cause d’appel.

La SMABTP réplique que sa demande tendant à obtenir la garantie de la société AXA France IARD avait été faite dès la première instance. Elle ajoute que l’article 19 de la PUC l’autorise à envisager un recours contre les tiers, et qu’en tout état de cause il y a lieu de faire application de l’article L.121-4 du code des assurances

Réponse de la cour :

Au regard de l’article 564 du code de procédure civile :

L’article 564 du code de procédure civile énonce qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Il doit être constaté que la demande en garantie de la société AXA France IARD formulée par la SMABTP l’était déjà devant le tribunal de grande instance de PARIS qui a, notamment, déclaré sa demande irrecevable. La demande n’est donc pas nouvelle, contrairement à ce qu’affirme la société AXA France IARD.

Au regard du droit à agir :

En application des articles 31 et 32 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention. Par ailleurs, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

En vertu de l’article L.121-4 du code des assurances, celui qui est assuré auprès de plusieurs assureurs par plusieurs polices, pour un même intérêt, contre un même risque, doit donner immédiatement à chaque assureur connaissance des autres assureurs.

L’assuré doit, lors de cette communication, faire connaître le nom de l’assureur avec lequel une autre assurance a été contractée et indiquer la somme assurée.

Quand plusieurs assurances contre un même risque sont contractées de manière dolosive ou frauduleuse, les sanctions prévues à l’article L. 121-3, premier alinéa, sont applicables.

Quand elles sont contractées sans fraude, chacune d’elles produit ses effets dans les limites des garanties du contrat et dans le respect des dispositions de l’article L. 121-1, quelle que soit la date à laquelle l’assurance aura été souscrite. Dans ces limites, le bénéficiaire du contrat peut obtenir l’indemnisation de ses dommages en s’adressant à l’assureur de son choix.

Dans les rapports entre assureurs, la contribution de chacun d’eux est déterminée en appliquant au montant du dommage le rapport existant entre l’indemnité qu’il aurait versée s’il avait été seul et le montant cumulé des indemnités qui auraient été à la charge de chaque assureur s’il avait été seul.

Sur le droit d’action de la SMABTP à l’égard d’AXA France IARD, il convient de préciser que l’AP-HP, dans le cadre de l’opération de construction litigieuse, a souscrit, le 13 décembre 1995, auprès de la SMABTP une PUC prévoyant les garanties suivantes:

— Garantie obligatoire de dommage au sens de l’article L242-1 du Code des assurances,

— Garantie obligatoire de responsabilité décennale au sens de l’article L241-1 et L 241-2 du Code des assurances,

— Garantie de Bon Fonctionnement et Dommages Immatériels

Cette police prévoit donc notamment une garantie responsabilité décennale des intervenants au premier rang desquels la Société THALES.

Par ailleurs, il n’est pas contesté que la SAS THALES est assurée comme suit :

Auprès de la compagnie XL Insurance venant aux droits de AXA Corporate Solutions Assurance au titre de la responsabilité civile,

Auprès de la compagnie AXA France IARD venant aux droits de l’UAP au titre de la responsabilité dite décennale suivant polices BATI-DEC et BATI-PLUS correspondant au contrat N°375036751755, initialement souscrit auprès de l’UAP, avec effet au 1er janvier 1992, puis après avenant au 1er janvier 1995.

L’article 29 des conditions générales de la PUC, prévoit que la SMABTP est « subrogée, à concurrence de l’indemnité versée, dans les droits et actions de l’assuré contre tout responsable du sinistre ». La subrogation envisagée par cet article est celle aux termes de laquelle la SMABTP agit, après paiement d’une indemnité pour le compte de son assuré, à l’encontre de tiers responsables ou co-responsables du sinistre.

Sauf à vider totalement la PUC de toute substance, l’action récursoire de la SMABTP ne peut s’entendre que comme celle exercée contre un intervenant non-couvert par la PUC, ou un tiers au chantier.

La SAS THALES bénéficie de la PUC. En conséquence, la SMABTP ne dispose pas du droit d’exercer une action récursoire à son égard (au-delà d’une action relative au paiement de la franchise) ou à l’égard de son assureur, et toute demande en garantie est donc irrecevable. Les demandes de la SMABTP étant déclarées irrecevables, il n’y a pas lieu de se prononcer sur les autres moyens soulevés par celle-ci.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

4. La prescription biennale de l’article L.114-1 du code des assurances, opposée à la SMABTP :

La SCAU, le cabinet [O], la SAS THALES, ainsi que son assureur, XL Insurance, soulèvent la prescription biennale de l’article L.114-1 du code des assurances pour voir écarter les demandes en paiement de la franchise formées par la SMABTP à leur encontre.

La SMABTP entend s’y opposer en affirmant que, dès lors que le délai de prescription est inopposable aux assurés en raison de l’absence de précisions dans les conditions générales et conditions particulières de la PUC des causes interruptives, la prescription ne peut pas plus lui être opposée.

Réponse de la cour :

L’article 9 du code de procédure civile dispose qu'«il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. ».

En application de l’article L.114-1 du code des assurances, « toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance. (')

Toutefois, ce délai ne court :

1° En cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, que du jour où l’assureur en a eu connaissance ;

2° En cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s’ils prouvent qu’ils l’ont ignoré jusque-là.

Quand l’action de l’assuré contre l’assureur a pour cause le recours d’un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré ou a été indemnisé par ce dernier. »

Toutefois, cette prescription ne trouve à s’appliquer qu’à l’action dérivant du contrat d’assurance et non au moyen de défense opposé à une telle action.

En entendant, pour limiter sa garantie, voir faire application des clauses contractuelles de franchise et de plafond de garantie pour les dommages immatériels, la SMABTP exerce un moyen de défense auquel ne peut être opposé la prescription du texte précité.

En conséquence, ses demandes ne sont pas prescrites.

II. Sur la résiliation de la police unique de chantier et ses conséquences

La SMABTP affirme qu’elle ne saurait être tenue à garantie vis-à-vis de ses assurés, la SAS THALES, la SCAU et le cabinet [O], a minima concernant les dommages immatériels, dès lors que la PUC aurait été résiliée avant la survenance du fait générateur du dommage, soit avant l’incendie du 14 août 2007. Elle précise que la résiliation est intervenue par lettre recommandée du 19 novembre 2001, à effet au 14 décembre 2001.

L’ensemble des intimés s’oppose à cette analyse, considérant que le fait à l’origine de l’incendie et donc des dommages se situe dans la phase de conception, et donc très en amont de la résiliation de la PUC.

Réponse de la cour :

Il ressort de la lecture de l’article L.113-3 du code des assurances que :

« A défaut de paiement d’une prime, ou d’une fraction de prime, dans les dix jours de son échéance, et indépendamment du droit pour l’assureur de poursuivre l’exécution du contrat en justice, la garantie ne peut être suspendue que trente jours après la mise en demeure de l’assuré. Au cas où la prime annuelle a été fractionnée, la suspension de la garantie, intervenue en cas de non-paiement d’une des fractions de prime, produit ses effets jusqu’à l’expiration de la période annuelle considérée. La prime ou fraction de prime est portable dans tous les cas, après la mise en demeure de l’assuré.

L’assureur a le droit de résilier le contrat dix jours après l’expiration du délai de trente jours mentionné au deuxième alinéa du présent article.

Le contrat non résilié reprend pour l’avenir ses effets, à midi le lendemain du jour où ont été payés à l’assureur ou au mandataire désigné par lui à cet effet, la prime arriérée ou, en cas de fractionnement de la prime annuelle, les fractions de prime ayant fait l’objet de la mise en demeure et celles venues à échéance pendant la période de suspension ainsi que, éventuellement, les frais de poursuites et de recouvrement.»

Le fait dommageable s’entend comme étant celui qui constitue la cause génératrice du dommage.

Il est constant que la PUC souscrite par l’AP-HP pour le chantier en cause couvre les dommages relevant de la garantie obligatoire décennale. La garantie est due (articles 5 et 9 des conditions générales de la PUC) au plus tôt à compter de la réception et prend fin à l’expiration d’une période de 10 ans à compter de cette date.

S’agissant des dommages immatériels, leur couverture facultative est prévue par les articles 48 et suivants de la PUC. Cette garantie est délivrée à l’ensemble des assurés et couvre « tout préjudice pécuniaire résultant de la privation d’un droit, de l’interruption d’un service ou de la perte d’un bénéfice, à l’exclusion de tout préjudice corporel », et directement consécutif à un dommage matériel couvert. La période de cette garantie commence à la réception et cesse aux mêmes dates que la garantie au titre des dommages matériels. Elle s’exerce à concurrence des montant retenus dans les conditions particulières, en l’espèce 10 000 000 francs en 1995, équivalent à 1 524 490,17 euros.

En application de l’article 19 des conditions générales de la PUC, le contrat peut être résilié avant sa date d’expiration, notamment, par l’assureur :

En cas de non-paiement d’une cotisation, d’une fraction ou de tout ajustement (article L.113-3 du code des assurances)

Avant réception en cas d’omission ou d’inexactitude dans la déclaration du risque

Avant réception en cas d’aggravation du risque dans les conditions fixées à l’article 14-3 lorsque le souscripteur n’accepte pas le nouveau taux de cotisations fixé par la SMABTP

Enfin, le montant des franchises par assuré est établi par l’article 4 des conditions particulières.

La SMABTP entend se prévaloir d’une résiliation pour défaut de paiement des primes par l’AP-HP, souscripteur. L’AP-HP a été mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception du 24 août 2001 de payer le solde des primes à hauteur de 4 865 923,66 francs. Cette mise en demeure n’a pas été suivie d’effet, ce qui n’est pas contesté. La SMABTP a informé, par lettre recommandée avec avis de réception du 13 décembre 2001, l’AP-HP de la résiliation de la PUC, avec effet au 14 décembre 2001. Il est donc constant que la PUC était résiliée lors de l’incendie du 14 août 2007.

Cependant, le rapport d’expertise judiciaire relaté dans le jugement du tribunal administratif de PARIS et l’arrêt de la cour administrative d’appel de PARIS des 11 mars 2015 et 11 janvier 2016 établit que l’origine de l’incendie est « un défaut de contact de la pièce de raccordement du disjoncteur de protection du circuit « condensateurs » de la cellule n°11 du LTE7 (') défaut lié à un sous-dimensionnement des matériels non conçus pour résister aux échauffements dus aux courants harmoniques circulant dans les installations ». L’expert conclut que le dommage, l’incendie en l’espèce, a pour seule origine un défaut de conception. Les juridictions administratives retiennent la nature décennale de ce désordre, et la responsabilité, notamment, de la SAS THALES, la SCAU et le cabinet [O] condamnés tant au titre des dommages matériels que des dommages immatériels subis par l’AP-HP (préjudice financier lié à la perte d’activité, et découlant directement du dommage matériel constitué par l’incendie).

La phase de conception, à l’origine exclusive du dommage, est nécessairement antérieure au 20 décembre 1999 et 17 avril 2000, dates des opérations de réception du bâtiment et point de départ des garanties. Or, à ces dates la PUC n’était pas résiliée.

En conséquence, les dommages ont leur origine dans une activité s’étant perpétuée entre la prise d’effet de la police et son expiration du fait de la résiliation. La SMABTP doit sa garantie aux assurés que sont la SAS THALES, la SCAU et le cabinet [O], au titre des dommages matériels mais aussi immatériels directement consécutifs aux premiers, ainsi qu’en a décidé le jugement qui sera donc confirmé.

III. Sur l’étendue de la garantie due par la SMABTP et les éventuelles limites

Sur la réduction proportionnelle :

La SMABTP sollicite qu’il soit fait application du principe de réduction proportionnelle en raison d’une aggravation du risque sur le double fondement des articles L.121-5 et L.113-9 du code des assurances. Elle affirme qu’en raison d’une augmentation du coût final de la construction ne correspondant pas au coût prévisionnel, le risque couvert s’en est trouvé aggravé, l’autorisant, alors, à obtenir une résiliation du contrat ou à conclure un avenant avec le souscripteur impliquant une surprime.

La SCAU et le cabinet [O] s’opposent à cette demande en affirmant, d’une part, que l’article L.121-5 du code des assurances s’applique aux assurances de bien, ce que n’est pas la PUC, assurance de responsabilité décennale et civile. Sur l’application de l’article L.113-9 du code des assurances, d’autre part, ils font valoir :

Il ne saurait être fait application de l’article L. 113-9 du Code des assurances en l’espèce dès lors que la difficulté soulevée par la SMABTP est exclusivement liée à un défaut de paiement de prime et non à une omission ou déclaration inexacte de risque.

L’omission ou la déclaration inexacte faite par l’assuré doivent changer l’objet du risque ou en modifier l’opinion pour l’assureur, ce qui n’est ni démontré ni allégué par la SMABTP.

L’article L. 113-9 du code des assurances est en tout état de cause insusceptible d’application, dès lors que l’article 17.2 de la PUC stipule une sanction en cas d’absence de déclaration dans l’esprit de l’article L. 113-10 du code des assurances. Ces stipulations étant exclusives de l’application de l’article L 113-9.

Les modalités de calcul de la réduction proportionnelle revendiquée par la SMABTP, sont contraires aux dispositions de l’article L. 113-9 du code des assurances.

La SAS THALES, quant à elle, expose le même moyen concernant l’application de l’article L.121-5 du code des assurances, ajoutant que la PUC ne reprend pas les dispositions de l’article L. 121-1 alinéa 2 du code des assurances et ne précise pas que l’assuré « reste obligatoirement son propre assureur pour une somme, ou une quantité déterminée, ou qu’il supporte une déduction fixée d’avance sur l’indemnité du sinistre ».

S’agissant de l’application de l’article L.113-9 du code des assurances, la SAS THALES affirme qu’elle ne saurait prospérer dès lors que la SMABTP n’invoque pas une omission ou une déclaration inexacte de l’APHP quant au risque assuré ou à assurer pour fonder la résiliation intervenue, mais un simple défaut de paiement des primes. Elle ajoute, à son tour, que les modalités de calcul de la réduction proportionnelle revendiquée par la SMABTP seraient, en tout état de cause, contraires aux dispositions de l’article L. 113-9 du code des assurances.

Réponse de la cour :

En application de l’article L.121-1 du code des assurances, « l’assurance relative aux biens est un contrat d’indemnité ; l’indemnité due par l’assureur à l’assuré ne peut pas dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre.

Il peut être stipulé que l’assuré reste obligatoirement son propre assureur pour une somme, ou une quotité déterminée, ou qu’il supporte une déduction fixée d’avance sur l’indemnité du sinistre. »

L’article L.121-5 du même code prévoit que « s’il résulte des estimations que la valeur de la chose assurée excède au jour du sinistre la somme garantie, l’assuré est considéré comme restant son propre assureur pour l’excédent, et supporte, en conséquence, une part proportionnelle du dommage, sauf convention contraire. »

Enfin, aux termes de l’article L.113-9 du code des assurances : « L’omission ou la déclaration inexacte de la part de l’assuré dont la mauvaise foi n’est pas établie n’entraîne pas la nullité de l’assurance.

Si elle est constatée avant tout sinistre, l’assureur a le droit soit de maintenir le contrat, moyennant une augmentation de prime acceptée par l’assuré, soit de résilier le contrat dix jours après notification adressée à l’assuré par lettre recommandée, en restituant la portion de la prime payée pour le temps où l’assurance ne court plus.

Dans le cas où la constatation n’a lieu qu’après un sinistre, l’indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés. »

En l’espèce, en premier lieu, il est constant que la PUC constitue une assurance de responsabilité et non de bien. En conséquence, les articles L.121-1 et L.121-5 du code des assurances ne peuvent trouver à s’appliquer.

S’agissant du principe de proportionnalité tiré de l’article L.113-9 du code des assurances, il a vocation à être retenu en cas d’omission ou de déclaration inexacte de l’assuré de nature à aggraver le risque couvert. Or, en l’espèce, il ne peut être soutenu qu’il y aurait eu omission ou inexactitude dans la déclaration du coût de la construction par l’AP-HP dès lors qu’il ressort des pièces produites, au contraire, que le coût augmenté de la construction était connu de l’assureur qui, en conséquence, a sollicité une revalorisation de la prime. (En ce sens, courriers adressés au souscripteur les 29 mai et 27 août 2001 et prenant en compte des revalorisations).

En tout état de cause, si une omission ou une inexactitude était retenue, elle ne pourrait être sanctionnée au-delà de ce que prévoit la PUC en son article 17-2 des conditions générales, sanction contractuelle exclusive de l’application de l’article L.113-9 du code des assurances.

Enfin, comme l’ont justement retenu les premiers juges, la demande formulée par la SMABTP sur le fondement de l’article L.113-9 du code des assurances ne peut prospérer dès lors qu’elle n’est pas conforme aux prescriptions du texte précité qui pose le principe d’une réduction en proportion du taux des primes payées par rapport au taux de prime qui était dû.

En conséquence de ce qui précède, il n’y a pas lieu de faire application du principe de réduction proportionnelle et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les limites contractuelles

La SMABTP demande à la cour de retenir les limites contractuelles à sa garantie que sont la franchise à hauteur de 20 000 F soit 3 048, 98 euros pour chacun des assurés, d’une part, et le plafond de garantie propre aux dommages immatériels à hauteur de 10 millions de francs soit 1 524 490,17 euros, lequel plafond est épuisable pour la durée de la garantie, d’autre part.

La SAS THALES s’y oppose, s’agissant de la franchise, au motif que le montant de la franchise ne serait pas justifié.

Il a déjà été rappelé que la PUC contient dans les conditions particulières, en son article 2-3 un plafond de garantie s’agissant des dommages immatériels, et en son article 4 une franchise applicable à chaque assuré, dans les limites dont entend se prévaloir la SMABTP.

Concernant la limite de garantie propre aux dommages immatériels, elle précise qu’aucun plafond de garantie ne lui serait opposable dès lors qu’elle ne sollicite pas de condamnation à garantie de la SMABTP à ce titre.

La SCAU et le cabinet [O], font valoir les mêmes moyens relativement à la franchise.

Réponse de la cour :

L’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, qu’elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel et, enfin, qu’elles doivent être exécutées de bonne foi.

En application de l’article L.114-1 du code des assurances, « toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance. (')

Toutefois, ce délai ne court :

1° En cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, que du jour où l’assureur en a eu connaissance ;

2° En cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s’ils prouvent qu’ils l’ont ignoré jusque-là.

Quand l’action de l’assuré contre l’assureur a pour cause le recours d’un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré ou a été indemnisé par ce dernier. »

Toutefois, cette prescription ne trouve à s’appliquer qu’à l’action dérivant du contrat d’assurance et non au moyen de défense opposé à une telle action.

En entendant, pour limiter sa garantie, voir faire application des clauses contractuelles de franchise et de plafond de garantie pour les dommages immatériels, la SMABTP exerce un moyen de défense auquel ne peut être opposé la prescription du texte précité.

S’agissant de la franchise, l’article 10 des conditions générales fixe le principe d’une franchise dont les détails sont précisés aux conditions particulières. L’article 4 desdites conditions particulières prévoit une franchise par intervenant à l’opération d’un montant de 20 000 francs, soit 3 048,98 euros. Dès lors, la SMABTP est en droit d’opposer le montant de cette franchise à la SAS THALES, la SCAU et le cabinet [O], ainsi que l’a justement retenu le jugement de première instance qui sera confirmé.

S’agissant du plafond de garantie relativement aux dommages immatériels, il est prévu par l’article 52 des conditions générales dans son principe, et l’article 2-3 des conditions particulières dans ses modalités de mise en 'uvre. Celui-ci prévoit que « les garanties définies au chapitre 5 du titre IV (dommages immatériels) sont apportées à concurrence de 10 000 000 de francs épuisables pour la durée de la garantie. ». Dans ces conditions, la SMABTP était en droit d’opposer cette limite contractuelle aux assurés, et le jugement sera confirmé sur ce point en ce qu’il a limité la garantie due par elle à la SCAU et le cabinet [O] à 1 524 490,17 euros.

IV. Sur les autres demandes

Le sens de l’arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

La SMABTP succombant sera condamnée aux entiers dépens de l’instance d’appel. En outre, l’équité commande de la condamner à verser à chacun des intimés une somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

DECLARE recevables et non prescrites les demandes de la SMABTP ;

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 25 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de PARIS ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la SMABTP à verser la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à chacun des intimés, soit la SAS THALES DEVELOPPEMENT ET COOPERATION, XL INSURANCE COMPANY venant aux droits d’AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, la société AXA France IARD, la SAS société de conception d’architecture et d’urbanisme (SCAU), et la SARL Cabinet [N] [O] ;

CONDAMNE aux entiers dépens de l’instance d’appel la SMABTP ;

ADMET les avocats qui en ont fait la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente,

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Cour d'appel de Paris, Pôle 4 chambre 5, 11 janvier 2023, n° 20/00389