CAA de NANCY, 2ème chambre, 31 mai 2018, 17NC02124, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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www.actu-juridique.fr · 7 décembre 2020

De Gaulle Fleurance & Associés · 23 octobre 2020

Les résidents de pays européens (autre que la France) ont jusqu'au 31 décembre 2020 pour demander la restitution des prélèvements sociaux qu'ils ont acquittés à raison de la plus-value réalisée lors de la cession en 2018 d'un bien immobilier situé en France. Pour rappel, cette possibilité résulte de la jurisprudence française[1], qui a déclaré l'assujettissement aux prélèvements sociaux français de ces résidents européens non conforme au Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne. A ce jour, nos clients européens pour lesquels nous avons déposé des demandes de restitution …

 

www.actu-juridique.fr · 19 juin 2019
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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 2e ch., 31 mai 2018, n° 17NC02124
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 17NC02124
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Autres
Décision précédente : Tribunal administratif de Strasbourg, 10 juillet 2017, N° 1700440
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037039702

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B… A… ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des contributions sociales et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l’année 2015 à raison de revenus de capitaux mobiliers.

Par un jugement n° 1700440 du 11 juillet 2017, le tribunal administratif de Strasbourg les a déchargés desdites impositions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 août 2017, le ministre de l’action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d’annuler l’article 1er du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du

11 juillet 2017 ;

2°) de rétablir les impositions dont le tribunal a prononcé la décharge ;

3°) de réformer en ce sens le jugement entrepris ;

Il soutient que :

—  le tribunal n’a pas répondu à tous les arguments présentés par l’administration ;

 – le principe d’unicité de législation sociale ne saurait faire obstacle à ce que des impositions soient affectées au financement de prestations dont l’attribution n’est pas soumise à une condition d’affiliation à la sécurité sociale en France ;

 – s’agissant des prélèvements sociaux affectés au Fonds de solidarité vieillesse (FSV), le tribunal s’est à tort appuyé sur l’affaire C-169/98, jugée par la cour de justice de l’Union européenne (CJUE) le 15 février 2000, alors que la législation sociale applicable était différente de celle en cause dans la présente affaire ; depuis la loi de financement de la sécurité sociale

pour 2016, le produit de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital est affecté presque exclusivement à la première section du FSV, de manière à garantir que les ressources de cette section soient dédiées exclusivement au financement de prestations sociales non contributives relevant de la solidarité nationale ; ces prestations, énumérées au I de

l’article L. 135- 2 du code de la sécurité sociale, constituent des prestations mixtes, lesquelles, à supposer qu’elles entrent, pour certaines d’entre elles, dans le champ d’application matériel du règlement (CE) n° 883/2004, relèvent en toute hypothèse des dispositions dérogatoires fixées à son article 70 ;

 – s’agissant des prélèvements affectés à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), c’est également à tort que le tribunal a estimé, par analogie à d’autres prestations analysées par la CJUE dans ses arrêts, que les principales prestations gérées par cet organisme, à savoir l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH) sont des prestations de maladie, dès lors qu’elles sont destinées à couvrir des dépenses supplémentaires de la vie quotidienne ; la jurisprudence de la CJUE n’est pas transposable, dès lors que dans ces affaires, le montant des prestations versées était indépendant des ressources des bénéficiaires ; au cas particulier, le montant définitif de l’APA versé par les organismes sociaux dépend du niveau de ressources de l’intéressé ; il en va de même de la PCH dont le taux de prise en charge peut varier selon les ressources du bénéficiaire ; les prestations en cause, qui ont pour objet premier d’assurer à leurs bénéficiaires des moyens minimum de subsistance, tenant compte de leurs ressources propres, dans des situations de particulière vulnérabilité tenant au handicap ou à l’âge, ne peuvent être qualifiées de prestations de maladie, mais ont une caractéristique indéniable d’assistance sociale ;

 – s’agissant des prélèvements sociaux affectés à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), le tribunal s’est borné à se référer à l’arrêt de la CJCE du 15 février 2000

C-34/98 ayant jugé que les prélèvements affectés à la CADES entraient dans le champ d’application du règlement communautaire précité, sans prendre position sur l’argument de l’administration selon lequel les circonstances de fait avaient été modifiées par l’évolution de la structure des dettes prises en charge par la CADES ; depuis 2008, la CADES a procédé à des reprises de dette du FSV, en particulier liées aux prestations figurant dans la liste du I de l’article L. 135-2 du code de la sécurité sociale tel qu’issu de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale ; dès lors que les prélèvements affectés au financement de la première section du FSV n’entrent pas dans le champ d’application de la jurisprudence « de Ruyter » pour les motifs exposés ci-dessus, il serait contradictoire de conclure que les impositions affectées au remboursement de la dette contractée par les fonds qui financent ces prestations soient considérées comme relevant de ce champ d’application ;

Par un mémoire enregistré le 1er décembre 2017, M. et Mme A…, représentés par

Me C…, demandent à la cour :

1°) en tant que de besoin, avant dire droit, de surseoir à statuer jusqu’à ce que la Cour de justice de l’Union européenne se soit prononcée sur la question préjudicielle suivante :

« Des prélèvements fiscaux sur les revenus du patrimoine et produits de placement, tels que les contributions sociales généralisées des articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale, le prélèvement social, sa contribution additionnelle et le prélèvement solidarité, présentent-ils du seul fait qu’ils participent au financement pour le premier d’entre eux en partie de la Caisse d’amortissement de la dette sociale et pour l’essentiel du Fonds de solidarité vieillesse et pour les trois autres soit de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, soit le fonds de solidarité vieillesse, soit au financement de l’une ou de l’autre, un lien direct et pertinent avec certaines des branches de la sécurité sociale énumérées à l’article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 et entrent-ils ainsi dans le champ d’application de ce règlement ' » ;

2°) de rejeter les conclusions du ministre de l’action et des comptes publics ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre de l’action et des comptes publics ne sont pas fondés.

Vu :

 – les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 ;

 – le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

 – la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale, notamment son article 24 ;

 – le code de la sécurité sociale ;

 – le code de l’action sociale et des familles ;

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Didiot,

 – les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

 – et les observations de Me C…, représentant M. et Mme A.chez eux

1. Considérant que M. et Mme A… sont domiciliés à Neuwiller (Haut-Rhin) et que M. A…, retraité, a effectué sa carrière professionnelle en Suisse ; que l’administration fiscale française a entendu assujettir les intéressés à la contribution sociale généralisée (CSG), à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), au prélèvement social et à sa contribution additionnelle et enfin au prélèvement de solidarité à raison d’une rente viagère à titre onéreux et de revenus de capitaux mobiliers perçus en 2015 ; que ces impositions ont été mises en recouvrement le 31 octobre 2016 ; que, par la voie d’une réclamation contentieuse datée du 26 octobre 2016 et rejetée par une décision de l’administration fiscale du 6 décembre suivant, les intéressés ont contesté ces impositions en se prévalant de leur affiliation au régime de sécurité sociale suisse et du principe d’unicité de législation sociale résultant du règlement du Conseil européen CE n° 883/2004 du 29 avril 2004 ; que par un jugement du 11 juillet 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a déchargé les intéressés des contributions sociales et des prélèvements sociaux en cause ; que par le présent recours, le ministre de l’action et des comptes publics relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Strasbourg qui n’était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a répondu à l’ensemble des moyens contenus dans les mémoires produits par l’administration ; que par suite, à supposer même que le ministre ait entendu contester la régularité du jugement attaqué, le moyen tiré de ce que ledit jugement serait entaché d’un défaut de réponse à une partie de l’argumentation présentée par l’administration ne peut qu’être écarté ;

Sur les conclusions à fin de rétablissement relatives aux impositions affectées au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) :

3. Considérant d’une part, qu’en ce qui concerne la contribution sociale généralisée, l’article 1600-0 C du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : « La contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine est établie, contrôlée et recouvrée conformément aux dispositions de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale. » ; que l’article 1600-0 E du même code prévoit que : « Le taux des contributions sociales sur les revenus du patrimoine et sur les produits de placements est fixé conformément aux dispositions du I de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale. » ; que l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale prévoit que : " I.-Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l’établissement de l’impôt sur le revenu, à l’exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3,

L. 136-4 et L. 136-7 : (…) b) Des rentes viagères constituées à titre onéreux ; c) Des revenus de capitaux mobiliers ;(…) » ; qu’aux termes de l’article L. 136-8 du même code : " I.-Le taux des contributions sociales est fixé : (…) 2° A 8,2 % pour les contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 ; (…) IV bis.-Le produit des contributions mentionnées au 2° du I est versé : 1° Au fonds mentionné à l’article L. 135-1, pour la part correspondant à un taux de 7,6 % ; 2° A la Caisse d’amortissement de la dette sociale, pour la part correspondant à un taux de 0,60 %. (…) » ;

4. Considérant qu’en ce qui concerne la contribution pour le remboursement de la dette sociale, qui est intégralement affectée au financement de la Caisse d’amortissement de la dette sociale ( CADES), l’article 1600-0 G du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : « La contribution pour le remboursement de la dette sociale assise sur les revenus du patrimoine est établie, contrôlée et recouvrée conformément à l’article 15 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale. » ; que l’article 1600-0 J du même code prévoit que : « Le taux des contributions pour le remboursement de la dette sociale mentionnées aux articles 1600-0 G à 1600-0 I est fixé par l’article 19 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale. » ; que l’article 15 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale dispose que : « I.-Il est institué une contribution perçue à compter de 1996 et assise sur les revenus du patrimoine définis au I de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale perçus par les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts. (…) » ; que l’article 19 de cette ordonnance prévoit que : « Le taux des contributions instituées par les articles 14 à 17 est fixé à 0,5 % » ;

5. Considérant qu’en ce qui concerne le prélèvement social, l’article 1600-0 F bis du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " I. – Le prélèvement social sur les revenus du patrimoine est établi conformément aux dispositions de l’article

L. 245-14 du code de la sécurité sociale. (…) » ; que l’article L. 245-14 du code de la sécurité sociale prévoit que : « Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts sont assujetties à un prélèvement sur les revenus et les sommes mentionnés aux I et II de l’article L. 136-6. (…) » ; que l’article L. 245-16 du même code dispose que : " I. – Le taux des prélèvements sociaux mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 est fixé à 4,5 %. II. – Le produit des prélèvements mentionnés au I est ainsi réparti :

-une part correspondant à un taux de 1,15 % à la Caisse nationale de solidarité pour

l’autonomie ; -une part correspondant à un taux de 3,35 % au fonds mentionné à

l’article L. 135-1." ;

6. Considérant qu’en ce qui concerne la contribution additionnelle audit prélèvement social, l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Les produits affectés à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie sont constitués par : (…) 2° Une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l’article L. 245-14 du code de la sécurité sociale et une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l’article L. 245-15 du même code. Ces contributions additionnelles sont assises, contrôlées, recouvrées et exigibles dans les mêmes conditions et sous les mêmes sanctions que celles applicables à ces prélèvements sociaux. Leur taux est fixé

à 0,3 % ; (…) » ;

7. Considérant enfin qu’en ce qui concerne le prélèvement de solidarité,

l’article 1600-0 S du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " I. – Il est institué : 1° Un prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine mentionnés à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ; (…) II. – Le prélèvement de solidarité mentionné au 1° du I est assis, contrôlé et recouvré selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que la contribution mentionnée à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale. (…) III. – Le taux des prélèvements de solidarité mentionnés au I est fixé à 2 %. IV. – Le produit des prélèvements de solidarité mentionnés au I est affecté au fonds mentionné à l’article L. 135-1 du code de la sécurité sociale. (…) » ;

8. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 3 du règlement (CE)

n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, applicable à la Suisse en vertu de l’accord conclu

le 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes : " 1. Le présent règlement s’applique à toutes les législations relatives aux branches de sécurité sociale qui concernent : a) les prestations de maladie ; b) les prestations de maternité et de paternité assimilées ; c) les prestations d’invalidité ; d) les prestations de vieillesse ; e) les prestations de survivant ; f) les prestations en cas d’accidents du travail et de maladies professionnelles ; g) les allocations de décès ; h) les prestations de chômage ; i) les prestations de préretraite ; j) les prestations familiales. (…) 5. Le présent règlement ne s’applique ni à l’assistance sociale et médicale, ni aux régimes de prestations en faveur des victimes de la guerre ou de ses conséquences. » ; que l’article 11 du même règlement dispose que : « 1. Les personnes auxquelles le présent règlement est applicable ne sont soumises qu’à la législation d’un seul État membre. Cette législation est déterminée conformément au présent titre (…) » ;

9. Considérant que M. et Mme A…, qui ont la qualité de résidents fiscaux français au sens de l’article 4 B du code général des impôts, justifient avoir été affiliés en 2015 au régime d’assurance obligatoire en Suisse, et avoir également versé des cotisations aux organismes privés d’assurance Sympany (KVG) et Helsana (VVG) qui prennent intégralement en charge l’ensemble de leurs dépenses de santé et couvrent les risques de maladie, maternité et paternité, vieillesse, accident du travail et maladies professionnelles, décès, chômage et préretraite ; qu’ils relèvent ainsi du champ d’application du règlement CE n° 883/2004 du

29 avril 2004, tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union européenne, dont l’article 90 prévoit que les règles énoncées au règlement (CEE) 1408/71 sont étendues à la Suisse par l’accord conclu le 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes ;

10. Considérant qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt du 26 février 2015, Ministre de l’économie et des finances contre Gérard de Ruyter (C-623/13), d’une part, que " la circonstance qu’un prélèvement soit qualifié d’impôt par une législation nationale n’exclut pas que, au regard du règlement

n° 1408/71, ce même prélèvement puisse être regardé comme relevant du champ d’application de ce règlement « , y compris lorsque, comme en l’espèce, ce prélèvement est » assis sur les revenus du patrimoine des personnes assujetties, indépendamment de l’exercice par ces dernières de toute activité professionnelle « et, d’autre part, que » l’élément déterminant aux fins de l’application du règlement n° 1408/71 réside dans le lien, direct et suffisamment pertinent, que doit présenter la disposition en cause avec les lois qui régissent les branches de sécurité sociale énumérées à l’article 4 du règlement n° 1408/71 « , » l’existence ou l’absence de contrepartie en termes de prestations est dépourvue de pertinence aux fins de l’application du règlement

n° 1408/71, le critère déterminant étant celui de l’affectation spécifique d’une contribution au financement d’un régime de sécurité sociale d’un Etat membre » ; que par un arrêt Hugues du

16 juillet 1992 (C-78/91), la Cour de justice de l’Union européenne avait déjà précisé que « la distinction entre prestations exclues du champ d’application du règlement n° 1408/71 et prestations qui en relèvent repose essentiellement sur les éléments constitutifs de chaque prestation, notamment ses finalités et ses conditions d’octroi, et non pas sur le fait qu’une prestation est qualifiée ou non par une législation nationale de prestation de sécurité sociale » ; que le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, applicable au présent litige, a remplacé le règlement précité n° 1408/71 et a repris ses

dispositions ;

11. Considérant que, selon les travaux préparatoires de la loi n° 2015-1702 du

21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale, afin de tenir compte pour l’avenir de la jurisprudence De Ruyter précitée et de garantir l’assujettissement des personnes concernées aux prélèvements sociaux sur leurs revenus du capital, l’article 24 de ladite loi a modifié l’affectation du produit budgétaire de ces prélèvements sociaux en vue d’assurer le financement de prestations non contributives ; que le produit global des prélèvements sociaux mis en recouvrement en 2016 est ainsi affecté, à l’issue de ces modifications législatives, sur un total de 15,5 points, à la première section du Fonds de solidarité vieillesse à hauteur de 12,95 points, à la Caisse d’amortissement de la dette sociale pour 1,1 point et à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie à hauteur de 1,45 point ; que le législateur s’est ainsi assigné comme objectif, comme cela ressort clairement des travaux préparatoires, non seulement de rendre le droit français compatible avec les exigences du droit de l’Union européenne mais aussi de maintenir dans la « sphère sociale » le produit des prélèvements sur les revenus du capital pour l’affecter, hors des régimes de sécurité sociale au sens du droit de l’Union, à des organismes servant des prestations non contributives, dont l’attribution n’est pas subordonnée à une condition tenant à l’affiliation à un régime de sécurité sociale français ;

12. Considérant, toutefois, qu’aux termes de l’article 4 du règlement (CEE)

n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté : « 2. Le présent règlement s’applique aux régimes de sécurité sociale généraux et spéciaux, contributifs et non contributifs (…) » ; que ces dispositions ont été reprises par l’article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 précité aux termes duquel : « 2. Sauf disposition contraire prévue à l’annexe XI, le présent règlement s’applique aux régimes de sécurité sociale généraux et spéciaux, soumis ou non à cotisations, ainsi qu’aux régimes relatifs aux obligations de l’employeur ou de l’armateur. 3. Le présent règlement s’applique également aux prestations spéciales en espèces à caractère non contributif visées à l’article 70. » ; que l’article 70 du même texte dispose que : « 1. Le présent article s’applique aux prestations spéciales en espèces à caractère non contributif relevant d’une législation qui, de par son champ d’application personnel, ses objectifs et/ou ses conditions d’éligibilité, possède les caractéristiques à la fois de la législation en matière de sécurité sociale visée à l’article 3, paragraphe 1, et d’une assistance sociale. 2. Aux fins du présent chapitre, on entend par »prestations spéciales en espèces à caractère non contributif" les prestations a) qui sont destinées : i) soit à couvrir à titre complémentaire, subsidiaire ou de remplacement, les risques correspondant aux branches de sécurité sociale visées à l’article 3, paragraphe 1, et à garantir aux intéressés un revenu minimum de subsistance eu égard à l’environnement économique et social dans l’État membre concerné; ii) soit uniquement à assurer la protection spécifique des personnes handicapées, étroitement liées à l’environnement social de ces personnes dans l’État membre concerné; b) et qui sont financées exclusivement par des contributions fiscales obligatoires destinées à couvrir des dépenses publiques générales et dont les conditions d’attribution et modalités de calcul ne sont pas fonction d’une quelconque contribution pour ce qui concerne leurs bénéficiaires. Les prestations versées à titre de complément d’une prestation contributive ne sont toutefois pas considérées, pour ce seul motif, comme des prestations contributives; et c) qui sont énumérées à l’annexe X » ; qu’il résulte de ces dispositions que la seule circonstance que le produit des prélèvements sociaux en litige soit désormais affecté au financement de prestations non contributives ne saurait suffire à les exclure par principe du champ d’application du règlement (CE) n° 883/2004 ; qu’il résulte d’ailleurs de l’alinéa 3 de l’article 3 précité que le législateur de l’Union européenne a notamment expressément entendu soumettre à l’application dudit règlement les prestations en espèces non contributives ayant un caractère mixte dont la liste est fixée à l’annexe X visée par les dispositions de l’article 70 précité ;

13. Considérant qu’il y a lieu de procéder à l’analyse approfondie de l’affectation du produit des prélèvements litigieux afin de déterminer si ces derniers financent des prestations de sécurité sociale entrant dans le champ du règlement (CE) n° 883/2004, et sont régis dès lors par le principe d’unicité de législation prévu par ce texte, ou s’ils financent des prestations d’assistance sociale, exclues de l’application dudit règlement ;

14. Considérant qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt du 28 mai 1974, Odette Callemeyn contre Etat belge

(C-187/73), qu’une prestation relève de l’assistance sociale pour l’application de ce règlement « notamment lorsqu’elle retient le besoin comme critère essentiel d’application et fait abstraction de toute exigence relative à des périodes d’activité professionnelle, d’affiliation ou de cotisation » ; que dans son arrêt du 18 octobre 2007 Commission contre Parlement et

Conseil (C-299/05), repris dans un arrêt du 1er février 2017 Secretary of State for Work and Pensions contre Tolley (C-430/15), elle a par ailleurs indiqué « qu’une prestation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale dans la mesure où elle est octroyée, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels, aux bénéficiaires sur la base d’une situation légalement définie et où elle se rapporte à l’un des risques expressément énumérés à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71 » ;

En ce qui concerne l’affectation à la première section du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) :

15. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 24 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015 : « I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié : (…) D. – L’article L. 135-2 est ainsi rédigé : » Art. L. 135-2. – Les dépenses prises en charge par le Fonds de solidarité vieillesse sont retracées dans trois sections distinctes. (…) » ; E. – L’article L. 135-3 est ainsi rédigé : « Art. L. 135-3. – I. – Les recettes du fonds affectées au financement des dépenses mentionnées au I de l’article L. 135-2 sont constituées par : » 1° Une fraction, fixée au IV bis de l’article L. 136-8, du produit des contributions mentionnées aux articles L. 136-6 et

L. 136-7 ; " 2° Une fraction, fixée à l’article L. 245-16, du produit des prélèvements sociaux mentionnés aux articles L. 245- 14 et L. 245-15 ; (…) X. – A. – Les B, G, J et K du I ainsi que les II à IV s’appliquent aux produits des impositions assises sur les opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2016, à l’exception des dispositions relatives aux impositions sur les revenus du patrimoine, qui s’appliquent aux produits recouvrés par la voie des rôles émis à compter du 1er janvier 2016. B. – Le A du I s’applique à compter du

1er avril 2016. C. – Les autres dispositions du présent article s’appliquent à compter du 1er janvier 2016. » ;

16. Considérant que les intimés soutiennent qu’en vertu des dispositions du X de l’article 24 de la loi n° 2015-1702 du 21 décembre 2015, les dispositions du D et du E du I du même article, relatives au Fonds de solidarité vieillesse (FSV), n’entrent en vigueur qu’à compter du 1er janvier 2016 et que, par conséquent, c’est à tort que le tribunal a fait application aux impositions litigieuses, dont le fait générateur est situé au 31 décembre 2015, des

articles L. 135-2 et L. 135-3 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction issue de

l’article 24 précité ;

17. Considérant, toutefois, que le D et le E du I de l’article 24, qui modifient respectivement les articles L. 135-2 et L. 135-3 du code de la sécurité sociale, ont seulement pour objet d’une part, de préciser la ventilation des dépenses prises en charge par le Fonds de solidarité vieillesse entre trois sections distinctes et d’autre part, l’affectation budgétaire des recettes au financement de ces dépenses ; que s’agissant des recettes, le D mentionne expressément l’article L. 136-8 du code la sécurité sociale, relatif à la CSG sur les revenus du patrimoine, l’article L. 245-16 du même code, relatif au prélèvement social sur les revenus du patrimoine, et l’article 1600-0 S du code général des impôts, concernant le prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine ; que le D renvoie ainsi nécessairement aux dispositions du G , du J et du II de l’article 24 qui introduisent pour chacun des articles correspondant au prélèvement considéré les modifications liées à leur affectation au FSV ; que le A du X de l’article 24 dispose que les G, J et II précités s’appliquent aux produits des impositions assises sur les opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2016, à l’exception des dispositions relatives aux impositions sur les revenus du patrimoine, lesquelles s’appliquent aux produits recouvrés par la voie des rôles émis à compter du 1er janvier 2016 ; qu’il est constant que les impositions contestées par M. et Mme A… portent sur leurs revenus du patrimoine et ont été mises en recouvrement le 31 octobre 2016 ; qu’il s’ensuit, ainsi que l’a jugé le tribunal et contrairement à ce que soutiennent les intimés, que les dispositions du D et du E de l’article 24, qui sont notamment relatives aux nouvelles modalités d’affectation des recettes au FSV, sont applicables aux impositions en litige, sans qu’y fasse obstacle la circonstance que la date du fait générateur de ces impositions, correspondant à la fin de la période de réalisation des revenus, à savoir le 31 décembre 2015, soit antérieure à celle du 1er janvier 2016, date d’entrée en vigueur du nouveau dispositif légal d’affectation mentionnée par le C de l’article 24 ;

18. Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article L. 135-1 du code de sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l’article 24 précité de la loi n° 2015-1702 du

21 décembre 2015 : « Il est créé un fonds dont la mission est de prendre en charge les avantages d’assurance vieillesse à caractère non contributif relevant de la solidarité nationale, tels qu’ils sont définis par l’article L. 135-2. (…) » ; que son article L. 135-2 prévoit que : " Les dépenses prises en charge par le Fonds de solidarité vieillesse sont retracées dans trois sections distinctes. I.-La première section retrace : 1° Le financement des allocations mentionnées au dernier alinéa de l’article L. 643-1, au chapitre V du titre Ier du livre VIII et à l’article 2 de l’ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse ; 2° Les sommes représentatives de la prise en compte par le régime général, le régime des salariés agricoles et les régimes d’assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales, dans la durée d’assurance : a) Des périodes mentionnées aux 1°, 3° et 8° de l’article L. 351-3 ; b) Des périodes pendant lesquelles les assurés ont bénéficié des allocations mentionnées aux articles L. 1233-68, L. 5422-1, L. 5423-1, L. 5423-7 et L. 5423-8 du code du travail, des allocations spéciales mentionnées au 2° de l’article L. 5123-2 du même code et de la rémunération mentionnée au dernier alinéa de l’article L. 1233-72 dudit code ; c) Des périodes pendant lesquelles l’assuré a bénéficié, en cas d’absence complète d’activité, d’un revenu de remplacement de la part de son entreprise en application d’un accord professionnel national mentionné à l’article L. 5123-6 du code du travail ; 3° Les sommes correspondant à la prise en compte par le régime général, le régime des salariés agricoles et les régimes d’assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales des réductions de la durée d’assurance ou de périodes reconnues équivalentes, définies à l’article L. 351-7-1 du présent code ; 4° Les dépenses mentionnées au I de l’article 49 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ; 5° Les sommes représentatives de la prise en compte par les régimes d’assurance vieillesse de base des périodes de volontariat du service national de leurs assurés ; 6° Les dépenses attachées au service de l’allocation spéciale pour les personnes âgées prévue à l’article 28 de l’ordonnance n° 2002-411 du 27 mars 2002 relative à la protection sanitaire et sociale à Mayotte et, selon des modalités de calcul fixées par décret, les sommes représentatives de la prise en compte au titre de la durée d’assurance, par le régime de retraite de base obligatoire de sécurité sociale mentionné à l’article 5 de cette ordonnance, des périodes définies à l’article 8 de ladite ordonnance ; 7° Les sommes représentatives de la prise en compte par les régimes d’assurance vieillesse de base, dans le salaire de base mentionné à l’article L. 351-1, des indemnités journalières mentionnées au même article ; 8° Les sommes correspondant à la prise en charge mentionnée au dernier alinéa de l’article L. 6243-3 du code du travail ; 9° Le remboursement à la caisse de prévoyance sociale de Saint-Pierre-et-Miquelon des dépenses correspondant à l’application au régime d’assurance vieillesse de cette collectivité, dans les conditions prévues par la loi n° 87-563 du 17 juillet 1987 portant réforme du régime d’assurance vieillesse applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, des avantages non contributifs mentionnés aux 1° à 5°, 7° et 8° du présent I ; 10° Le financement d’avantages non contributifs instaurés au bénéfice des retraités de l’ensemble des régimes, lorsque les dispositions les instituant le prévoient (…) » ; qu’enfin, son article L. 135-3 dispose que : " I.-Les recettes du fonds affectées au financement des dépenses mentionnées au I de l’article L. 135-2 sont constituées par : 1° Une fraction, fixée au IV bis de l’article L. 136-8, du produit des contributions mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 ; 2° Une fraction, fixée à l’article L. 245-16, du produit des prélèvements sociaux mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 ; 3° Le produit du prélèvement mentionné à l’article 1600-0 S du code général des impôts (…)" ;

19. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que la première section du FSV a pour principal objet, même après les modifications apportées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, le financement des prestations relevant de la branche vieillesse de la sécurité sociale énumérées à l’article 3 alinéa 1 du règlement (CE) n° 883/2004, à savoir, outre le versement de l’allocation de solidarité des personnes âgées (ASPA), la prise en charge selon le cas par le régime général, le régime des salariés agricoles et les régimes d’assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales, de cotisations forfaitaires pour la validation de trimestres d’assurance vieillesse correspondant à des périodes durant lesquelles les bénéficiaires n’ont pas cotisé ou encore la prise en charge des majorations de pension servies par les régimes de base ; que la Cour de justice des Communautés européennes, dans un premier arrêt du 15 février 2000, Commission contre France, (aff. C-169/98), a déjà jugé, au point 35 de cet arrêt, s’agissant de la CSG, que cette dernière devait être regardée comme « affectée spécifiquement et directement au financement de la sécurité sociale en France », en tant que ses recettes étaient « allouées (…) au Fonds de solidarité vieillesse et aux régimes obligatoires de maladie. L’objet de la CSG est donc de financer plus particulièrement les branches qui concernent les prestations de vieillesse, de survivants, de maladie, et les prestations familiales, lesquelles sont visées à l’article 4 du règlement n° 1408/71. » ; qu’en l’espèce, alors que les prestations financées par le FSV doivent être regardées comme venant en complément d’une prestation de sécurité sociale et comme présentant ainsi un lien direct et pertinent avec une des branches de la sécurité sociale visée par le règlement (CE) n° 883/2004 et que le ministre ne saurait utilement soutenir que les impositions en litige sont assises, non sur les revenus d’activité et de remplacement mais sur les revenus du capital, il n’est fait état d’aucune circonstance de nature à justifier, au regard notamment des principes rappelés par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, que la solution qu’elle a énoncée dans son arrêt Commission contre France, ne serait pas transposable aux produits des contributions sociales et des prélèvements sociaux affectés au financement de la première section du Fonds de solidarité vieillesse ;

20. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les contributions sociales et les prélèvements sociaux affectés au FSV, en ce qu’ils financent même partiellement des prestations de sécurité sociale, entrent dans le champ du règlement n° 883/2004 et sont donc régis par le principe d’unicité de la législation applicable posé par l’article 11 dudit règlement ;

En ce qui concerne l’affectation à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) :

21. Considérant qu’aux termes de l’article 2 de l’ordonnance n° 96-50 du

24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale : « La Caisse d’amortissement de la dette sociale a pour mission, d’une part, d’apurer la dette mentionnée au I de l’article 4 et, d’autre part, d’effectuer les versements prévus aux II et III du même article » ; que l’article 4 du même texte dispose que : " I.-La dette d’un montant de 137 milliards de francs de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale à l’égard de la Caisse des dépôts et consignations constatée au 31 décembre 1995, correspondant au financement des déficits accumulés au

31 décembre 1995 par le régime général de sécurité sociale et à celui de son déficit prévisionnel de l’exercice 1996, est transférée à la Caisse d’amortissement de la dette sociale à compter du 1er janvier 1996. (…) II bis-La couverture des déficits cumulés de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale arrêtés au 31 décembre 2003 et celui du déficit prévisionnel au titre de l’exercice 2004 est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale à hauteur de 10 milliards d’euros le 1er septembre 2004 et dans la limite de 25 milliards d’euros au plus tard le 31 décembre 2004. (…) » ;

22. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que la CADES a pour principal objet, même après les modifications apportées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, outre la reprise des dettes du FSV, lequel, ainsi qu’il a été développé aux points 16 à 19, participe au financement de prestations de sécurité sociale, la reprise des dettes de l’ACOSS et la contribution par cet organisme au financement des régimes de sécurité sociale ; que la Cour de justice des Communautés européennes, dans un arrêt du 15 février 2000, Commission contre France, (aff. C-34/98), a également jugé aux points 37 et suivants de cet arrêt que : " (…) la circonstance que le produit de la CRDS soit versé à la CADES et non pas directement aux organismes de sécurité sociale n’est pas de nature à remettre en cause la constatation décisive selon laquelle la CRDS est affectée de manière spécifique et directe au financement du régime de sécurité sociale français et relève par conséquent du champ d’application du règlement

n° 1408/71. ( …) cette constatation ne saurait être infirmée ni par la circonstance que le paiement de la CRDS n’ouvre droit à aucune contrepartie directe et identifiable en termes de prestations ni par le fait qu’elle est en partie destinée à apurer une dette du régime de sécurité sociale occasionnée par le financement de prestations servies dans le passé." ; que par suite, une imposition dont le produit est affecté, même partiellement, à la Caisse d’amortissement de la dette sociale participe au financement du régime français de sécurité sociale ; que dès lors cette imposition, qui entre dans le champ du règlement CE n° 883/2004, est soumise au respect du principe d’unicité de la législation applicable posé par l’article 11 dudit règlement ;

23. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, qu’en raison de la persistance d’un lien direct et suffisamment pertinent entre les impositions litigieuses, lesquelles portent sur les revenus des contribuables, et certaines branches de sécurité sociale telles qu’elles sont énoncées aux articles 3 et 70 du règlement CE n° 883/2004 du 29 avril 2004, M. et Mme A…, qui ne sont pas affiliés au régime obligatoire de sécurité sociale en France, sont fondés à se prévaloir de la méconnaissance du principe d’unicité de la législation de sécurité sociale énoncé par le règlement CE n° 883/2004 précité et de son corollaire, le principe d’interdiction de double cotisation ; qu’ils sont par suite fondés à soutenir que c’est à tort qu’ils ont été assujettis à la contribution sociale généralisée (CSG), à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), au prélèvement social et enfin au prélèvement de solidarité à raison de leurs revenus du patrimoine perçus en 2015, s’agissant des impositions ou de la fraction de ces impositions affectées au financement de la première section du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) ;

24. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’action et des comptes publics n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a déchargé les époux A… des contributions sociales et des prélèvements sociaux susmentionnés auxquels ils ont été assujettis au titre de l’année 2015, s’agissant des impositions ou de la part de ces impositions affectées au financement de la première section du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à la caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) ;

Sur le renvoi à la Cour de justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle concernant les impositions affectées au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) :

En ce qui concerne le cadre juridique du litige :

25. Considérant que l’article 1600-0 F bis du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : « I. – Le prélèvement social sur les revenus du patrimoine est établi conformément aux dispositions de l’article L. 245-14 du code de la sécurité sociale. (…) » ; que l’article L. 245-16 du même code dispose que : " I. – Le taux des prélèvements sociaux mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 est fixé à 4,5 %. II. – Le produit des prélèvements mentionnés au I est ainsi réparti : – une part correspondant à un taux de 1,15 % à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie ; (…)" ; que l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : " Les produits affectés à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie sont constitués par : (…) 2° Une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l’article L. 245-14 du code de la sécurité sociale et une contribution additionnelle au prélèvement social mentionné à l’article L. 245-15 du même code. Ces contributions additionnelles sont assises, contrôlées, recouvrées et exigibles dans les mêmes conditions et sous les mêmes sanctions que celles applicables à ces prélèvements sociaux. Leur taux est fixé à 0,3 % ; (…) » ;

26. Considérant qu’aux termes de l’article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, applicable à la Suisse en vertu de l’accord conclu le 21 juin 1999 entre la Confédération suisse, d’une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d’autre part, sur la libre circulation des personnes : " 1. Le présent règlement s’applique à toutes les législations relatives aux branches de sécurité sociale qui concernent : a) les prestations de maladie ; b) les prestations de maternité et de paternité assimilées ; c) les prestations d’invalidité ; d) les prestations de vieillesse ; e) les prestations de survivant ; f) les prestations en cas d’accidents du travail et de maladies professionnelles ; g) les allocations de décès ; h) les prestations de chômage ; i) les prestations de préretraite ; j) les prestations familiales. (…) 5. Le présent règlement ne s’applique ni à l’assistance sociale et médicale, ni aux régimes de prestations en faveur des victimes de la guerre ou de ses conséquences. » ; que l’article 11 du même règlement dispose que : « 1. Les personnes auxquelles le présent règlement est applicable ne sont soumises qu’à la législation d’un seul État membre. Cette législation est déterminée conformément au présent titre (…) » ;

27. Considérant qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt du 26 février 2015, Ministre de l’économie et des finances contre Gérard de Ruyter (C-623/13), d’une part, que " la circonstance qu’un prélèvement soit qualifié d’impôt par une législation nationale n’exclut pas que, au regard du règlement

n° 1408/71, ce même prélèvement puisse être regardé comme relevant du champ d’application de ce règlement « , y compris lorsque, comme en l’espèce, ce prélèvement est » assis sur les revenus du patrimoine des personnes assujetties, indépendamment de l’exercice par ces dernières de toute activité professionnelle « et, d’autre part, que » l’élément déterminant aux fins de l’application du règlement n° 1408/71 réside dans le lien, direct et suffisamment pertinent, que doit présenter la disposition en cause avec les lois qui régissent les branches de sécurité sociale énumérées à l’article 4 du règlement n° 1408/71 « , » l’existence ou l’absence de contrepartie en termes de prestations est dépourvue de pertinence aux fins de l’application du règlement

n° 1408/71, le critère déterminant étant celui de l’affectation spécifique d’une contribution au financement d’un régime de sécurité sociale d’un Etat membre » ; que par un arrêt Hugues

du 16 juillet 1992 (C-78/91), la Cour de justice de l’Union européenne avait déjà précisé que « la distinction entre prestations exclues du champ d’application du règlement n° 1408/71 et prestations qui en relèvent repose essentiellement sur les éléments constitutifs de chaque prestation, notamment ses finalités et ses conditions d’octroi, et non pas sur le fait qu’une prestation est qualifiée ou non par une législation nationale de prestation de sécurité sociale » ; que le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, applicable au présent litige, a remplacé le règlement précité n°1408/71 et a repris ses

dispositions ;

28. Considérant que, selon les travaux préparatoires de la loi n° 2015-1702 du

21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale, afin de tenir compte pour l’avenir de la jurisprudence De Ruyter précitée et de garantir l’assujettissement des personnes concernées aux prélèvements sociaux sur leurs revenus du capital, l’article 24 de ladite loi a modifié l’affectation du produit budgétaire de ces prélèvements sociaux en vue d’assurer le financement de prestations non contributives ; que le produit global des prélèvements sociaux mis en recouvrement en 2016 est ainsi affecté, à l’issue de ces modifications législatives, sur un total de 15,5 points, à la première section du Fonds de solidarité vieillesse à hauteur de 12,95 points, à la Caisse d’amortissement de la dette sociale pour 1,1 point et à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie à hauteur de 1,45 point ; que le législateur s’est ainsi assigné comme objectif, comme cela ressort clairement des travaux préparatoires, non seulement de rendre le droit français compatible avec les exigences du droit de l’Union européenne mais aussi de maintenir dans la « sphère sociale » le produit des prélèvements sur les revenus du capital pour l’affecter, hors des régimes de sécurité sociale au sens du droit de l’Union, à des organismes servant des prestations non contributives, dont l’attribution n’est pas subordonnée à une condition tenant à l’affiliation à un régime de sécurité sociale français ;

29. Considérant toutefois qu’aux termes de l’article 4 du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté : « 2. Le présent règlement s’applique aux régimes de sécurité sociale généraux et spéciaux, contributifs et non contributifs (…) » ; que ces dispositions ont été reprises par l’article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 précité aux termes duquel : « 2. Sauf disposition contraire prévue à l’annexe XI, le présent règlement s’applique aux régimes de sécurité sociale généraux et spéciaux, soumis ou non à cotisations, ainsi qu’aux régimes relatifs aux obligations de l’employeur ou de l’armateur. 3. Le présent règlement s’applique également aux prestations spéciales en espèces à caractère non contributif visées à l’article 70. » ; que l’article 70 du même texte dispose que : « 1. Le présent article s’applique aux prestations spéciales en espèces à caractère non contributif relevant d’une législation qui, de par son champ d’application personnel, ses objectifs et/ou ses conditions d’éligibilité, possède les caractéristiques à la fois de la législation en matière de sécurité sociale visée à l’article 3, paragraphe 1, et d’une assistance sociale. 2. Aux fins du présent chapitre, on entend par »prestations spéciales en espèces à caractère non contributif" les prestations a) qui sont destinées : i) soit à couvrir à titre complémentaire, subsidiaire ou de remplacement, les risques correspondant aux branches de sécurité sociale visées à l’article 3, paragraphe 1, et à garantir aux intéressés un revenu minimum de subsistance eu égard à l’environnement économique et social dans l’État membre concerné; ii) soit uniquement à assurer la protection spécifique des personnes handicapées, étroitement liées à l’environnement social de ces personnes dans l’État membre concerné; b) et qui sont financées exclusivement par des contributions fiscales obligatoires destinées à couvrir des dépenses publiques générales et dont les conditions d’attribution et modalités de calcul ne sont pas fonction d’une quelconque contribution pour ce qui concerne leurs bénéficiaires. Les prestations versées à titre de complément d’une prestation contributive ne sont toutefois pas considérées, pour ce seul motif, comme des prestations contributives; et c) qui sont énumérées à l’annexe X » ;

30. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que la seule circonstance que le produit des prélèvements sociaux en litige soit désormais affecté au financement de prestations non contributives ne saurait suffire à les exclure par principe du champ d’application du règlement (CE) n° 883/2004 ; qu’il résulte d’ailleurs de l’alinéa 3 de l’article 3 précité que le législateur de l’Union européenne a notamment expressément entendu soumettre à l’application dudit règlement les prestations en espèces non contributives ayant un caractère mixte dont la liste est fixée à l’annexe X visée par les dispositions de l’article 70 précité ; qu’il y a, dès lors, lieu de procéder à l’analyse approfondie de l’affectation du produit des prélèvements litigieux afin de déterminer si ces derniers financent des prestations de sécurité sociale entrant dans le champ du règlement (CE) n° 883/2004, soumis dès lors au principe d’unicité de législation sociale prévu par ce texte, ou s’ils financent des prestations d’assistance sociale, exclues de l’application dudit règlement ;

31. Considérant qu’il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, notamment de son arrêt du 28 mai 1974, Odette Callemeyn contre Etat belge

(C-187/73), qu’une prestation relève de l’assistance sociale pour l’application de ce règlement « notamment lorsqu’elle retient le besoin comme critère essentiel d’application et fait abstraction de toute exigence relative à des périodes d’activité professionnelle, d’affiliation ou de cotisation » ; que dans son arrêt du 18 octobre 2007 Commission contre Parlement et Conseil

(C-299/05), repris dans un arrêt du 1er février 2017 Secretary of State for Work and Pensions contre Tolley (C-430/15), elle a par ailleurs indiqué « qu’une prestation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale dans la mesure où elle est octroyée, en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels, aux bénéficiaires sur la base d’une situation légalement définie et où elle se rapporte à l’un des risques expressément énumérés à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71 » ;

32. Considérant, en l’espèce, qu’aux termes de l’article L. 14-10-1 du code de l’action sociale et des familles : " I.-La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie a pour missions : 1° De contribuer au financement de la prévention et de l’accompagnement de la perte d’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, à domicile et en établissement, ainsi qu’au financement du soutien des proches aidants, dans le respect de l’égalité de traitement des personnes concernées sur l’ensemble du territoire ; (…) 10° De contribuer au financement de l’investissement destiné à la mise aux normes techniques et de sécurité, à la modernisation des locaux en fonctionnement ainsi qu’à la création de places nouvelles en établissements et services sociaux et médico-sociaux ; (…) » ;

33. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la CNSA, à travers notamment les dispositions du 1° du I de l’article précité, gère pour l’essentiel les prestations de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et la prestation compensatoire du handicap (PCH), dont les conditions d’attribution sont également définies par le code de l’action sociale et des familles ;

34. Considérant que s’agissant de l’allocation personnalisée d’autonomie,

l’article L. 232-1 du code de l’action sociale et des familles dispose que : « Toute personne âgée résidant en France qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liés à son état physique ou mental a droit à une allocation personnalisée d’autonomie permettant une prise en charge adaptée à ses besoins. Cette allocation, définie dans des conditions identiques sur l’ensemble du territoire national, est destinée aux personnes qui, nonobstant les soins qu’elles sont susceptibles de recevoir, ont besoin d’une aide pour l’accomplissement des actes essentiels de la vie ou dont l’état nécessite une surveillance régulière. » ; que l’article L. 232-2 du même code prévoit que : « L’allocation personnalisée d’autonomie, qui a le caractère d’une prestation en nature, est accordée, sur sa demande, dans les limites de tarifs fixés par voie réglementaire, à toute personne attestant d’une résidence stable et régulière et remplissant les conditions d’âge et de perte d’autonomie, évaluée à l’aide d’une grille nationale, également définies par voie réglementaire. » ;

35. Considérant que, s’agissant de la prestation compensatoire du handicap,

l’article L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles dispose que : « I. – Toute personne handicapée résidant de façon stable et régulière en France métropolitaine, dans les collectivités mentionnées à l’article L. 751-1 du code de la sécurité sociale ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, dont l’âge est inférieur à une limite fixée par décret et dont le handicap répond à des critères définis par décret prenant notamment en compte la nature et l’importance des besoins de compensation au regard de son projet de vie, a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d’une prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces. Lorsque la personne remplit les conditions d’âge permettant l’ouverture du droit à l’allocation prévue à l’article L. 541-1 du code de la sécurité sociale, l’accès à la prestation de compensation se fait dans les conditions prévues au III du présent article. Lorsque le bénéficiaire de la prestation de compensation dispose d’un droit ouvert de même nature au titre d’un régime de sécurité sociale, les sommes versées à ce titre viennent en déduction du montant de la prestation de compensation dans des conditions fixées par décret. (…) » ; que l’article L. 245-6 du code de l’action sociale et des familles : " La prestation de compensation est accordée sur la base de tarifs et de montants fixés par nature de dépense, dans la limite de taux de prise en charge qui peuvent varier selon les ressources du bénéficiaire. Les montants maximums, les tarifs et les taux de prise en charge sont fixés par arrêtés du ministre chargé des personnes handicapées. Les modalités et la durée d’attribution de cette prestation sont définies par décret. Sont exclus des ressources retenues pour la détermination du taux de prise en charge mentionné à l’alinéa précédent : – les revenus d’activité professionnelle de l’intéressé ; – les indemnités temporaires, prestations et rentes viagères servies aux victimes d’accidents du travail ou à leurs ayants droit mentionnées au 8° de l’article 81 du code général des impôts ; – les revenus de remplacement dont la liste est fixée par voie réglementaire ; – les revenus d’activité du conjoint, du concubin, de la personne avec qui l’intéressé a conclu un pacte civil de solidarité, de l’aidant familial qui, vivant au foyer de l’intéressé, en assure l’aide effective, de ses parents même lorsque l’intéressé est domicilié chez eux; – les rentes viagères mentionnées au 2° du I de l’article 199 septies du code général des impôts, lorsqu’elles ont été constituées par la personne handicapée pour elle-même ou, en sa faveur, par ses parents ou son représentant légal, ses grands-parents, ses frères et soeurs ou ses enfants ; – certaines prestations sociales à objet spécialisé dont la liste est fixée par voie réglementaire. » ;

En ce qui concerne la difficulté sérieuse d’interprétation du droit de l’Union soulevée par le recours du ministre de l’action et des comptes publics :

36. Considérant, d’une part, que le ministre soutient que le montant de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) dépend du niveau de ressources de l’intéressé et que la prise en charge de la prestation compensatoire du handicap (PCH) varie également selon les ressources des bénéficiaires, et qu’ainsi ces prestations, qui ont pour objet d’assurer à leurs bénéficiaires des moyens minimum de subsistance tenant compte de leurs ressources propres relèvent de la législation d’assistance sociale et non de la législation de sécurité sociale ; qu’il s’ensuit, selon le ministre, que ces prestations dépourvues de caractère contributif et dont l’attribution nécessite l’appréciation individualisée des besoins personnels des bénéficiaires, sont exclues du champ d’application du règlement n° 883/2004 précité ;

37. Considérant, d’autre part, qu’il résulte des dispositions précitées du code de l’action sociale et des familles que l’allocation personnalisée d’autonomie et la prestation compensatoire de handicap sont attribuées, de façon objective en fonction de critères légaux, en dehors d’une appréciation discrétionnaire des besoins personnels ; qu’en outre, elles sont destinées à couvrir des dépenses supplémentaires de la vie quotidienne engendrées par la dépendance et le handicap et se rapportent aux risques invalidité et vieillesse prévus à l’article 3 du règlement n° 883/2004 précité ; que par un arrêt de grande chambre du 21 février 2006, Hosse, (aff. C-286/03), la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit, aux points 37, 38 et 46, qu'« une prestation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale dans la mesure où elle est octroyée aux bénéficiaires en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels, sur la base d’une situation légalement définie, et où elle se rapporte à l’un des risques expressément énumérés à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1408/71 (…) Il en résulte que des prestations, octroyées de façon objective, sur la base d’une situation légalement définie, et qui visent à améliorer l’état de santé et la vie des personnes dépendantes, ont essentiellement pour objet de compléter les prestations de l’assurance maladie, et doivent être regardées comme des »prestations de maladie« au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1408/71 (…) Par conséquent, une allocation de soins (…) ne constitue pas une prestation spéciale à caractère non contributif au sens de l’article 4, paragraphe 2 ter, du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 (…) mais une prestation de maladie au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de ce règlement. » ; que la Cour de justice a notamment confirmé sa position dans un arrêt du 18 octobre 2007, commission c/Parlement et Conseil (aff. C-299/05, Rec.p. I-8695, point 61) puis dans un arrêt du 5 mai 2011, Commission européenne c/République fédérale d’Allemagne (aff. C-206/10,

point 28) ; que dans cette dernière espèce, où étaient en cause des prestations versées par des Länder aux aveugles, aux sourds et aux handicapés, la Cour de justice a jugé que ces prestations visaient à couvrir, sous forme d’une contribution forfaitaire, les dépenses supplémentaires de la vie quotidienne engendrées par leur handicap ;

38. Considérant que la réponse au moyen soulevé par le ministre dépend ainsi de la question de savoir, si les prélèvements affectés à la CNSA, qui contribuent au financement des prestations litigieuses susmentionnées, présentent un lien direct et suffisamment pertinent avec certaines branches de la sécurité sociale énumérées à l’article 3 du règlement (CE) n°883/2004 et entrent par suite dans le champ d’application de ce règlement du seul fait que ces prestations se rapportent à l’un des risques énumérés à cet article 3 et sont octroyées en dehors de toute appréciation discrétionnaire sur la base d’une situation légalement définie ;

39. Considérant que cette question est déterminante pour la solution du litige que doit trancher la cour administrative d’appel ; qu’elle présente une difficulté sérieuse ; qu’il y a lieu, par suite, d’en saisir la Cour de justice de l’Union européenne en application de l’article 267 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et, jusqu’à ce que celle-ci se soit prononcée, de surseoir à statuer sur le recours du ministre de l’action et des comptes publics tendant à l’annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 juillet 2007 en tant qu’il a déchargé M. et Mme A… des prélèvements sociaux affectés au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie auxquels ils ont été assujettis au titre de l’année 2015 ;

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du ministre de l’action et des comptes publics est rejeté en tant qu’il demande le rétablissement de la contribution sociale généralisée (CSG), de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), du prélèvement social et enfin du prélèvement de solidarité, auxquels M. et Mme A… ont été assujettis au titre de l’année 2015, et dont le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 juillet 2007 a prononcé la décharge s’agissant des impositions ou de la part de ces impositions affectées au financement de la première section du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES).

Article 2 : Il est sursis à statuer sur les conclusions du recours présenté par le ministre de l’action et des comptes publics tendant à l’annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 juillet 2007 en tant qu’il a déchargé M. et Mme A… du prélèvement social et de la contribution additionnelle audit prélèvement affectés au financement de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) auxquels ils ont été assujettis au titre de l’année 2015, jusqu’à ce que la Cour de justice de l’Union européenne se soit prononcée sur la question suivante :

« Les prélèvements affectés à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui contribuent au financement des prestations litigieuses susmentionnées, présentent-ils un lien direct et suffisamment pertinent avec certaines branches de la sécurité sociale énumérées à l’article 3 du règlement (CE) n° 883/2004 et entrent-ils par suite dans le champ d’application de ce règlement du seul fait que ces prestations se rapportent à l’un des risques énumérés audit article 3 et sont octroyées en dehors de toute appréciation discrétionnaire sur la base d’une situation légalement définie ' ».

Article 3 : Les conclusions de M. et Mme A… relatives à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont réservées en fin d’instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’action et des comptes publics et à M. et Mme B… A.chez eux


Copie en sera adressée :

- au Premier Ministre

- au président de la Cour de justice de l’Union européenne

- au greffe de la Cour de justice de l’Union européenne

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N° 17NC02124

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CAA de NANCY, 2ème chambre, 31 mai 2018, 17NC02124, Inédit au recueil Lebon