Tribunal administratif de Melun, 8 février 2017, n° 1400323

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Melun, 8 févr. 2017, n° 1400323
Juridiction : Tribunal administratif de Melun
Numéro : 1400323
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Paris, 18 juillet 2013

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MELUN

N°1400323

MME Z… ET AUTRES

Mme X A

M. Y Rapporteur public

Audience du 18 janvier 2017 Lecture du 8 février 2017

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Melun

(9e chambre)

Vu la procédure suivante :

Par une requête, en tierce opposition, enregistrée le 14 janvier 2014 et des pièces complémentaires enregistrées le 12 février 2014, Mme Z… et autres, représentés par Me Bardon, avocat, demandent au tribunal : 1°) de déclarer non avenu ses jugements en date du 2 février 2012, par lesquels il a annulé la délibération du 26 mars 2008 et celle du 7 juillet 2008 fixant le régime indemnitaire des adjoints et des conseillers municipaux, en tant qu’elles fixent leur entrée en vigueur respective à une date antérieure à leur publication et à leur transmission au représentant de l’Etat ; 2°) de rejeter la requête de Mme F… A…

Les requérants soutiennent que :

— les délibérations en cause pouvaient être rétroactives ;

— le Tribunal administratif de Melun aurait dû différer les effets de son jugement.

Une mise en demeure a été adressée le 8 septembre 2014 à la commune de Fontainebleau, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative.

Une mise en demeure a été adressée le 8 septembre 2014 à Mme A…, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2014, Mme A… conclut : 1°) au rejet de la tierce opposition ; 2°) à la confirmation de l’annulation pour excès de pouvoir des délibérations des 26 mars 2008 et celle du 7 juillet 2008 ; 3°) au rejet des demandes des parties adverses au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; 4°) à la mise à la charge de la partie adverse de la somme de 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

— l’adoption des délibérations en litige sont entachées de vices de procédure tirés de la méconnaissance des articles L. 2121-13, L. 2121-22 et L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ;

— la délibération du 26 mars 2008 a été prise en méconnaissance des dispositions de l’article L. 2123-20-1 II du code général des collectivités territoriales ;

— les délibérations ne pouvaient pas être rétroactives ;

— les indemnités pouvaient faire l’objet d’un retrait.

Par un mémoire, enregistré le 13 octobre 2014, la commune de Fontainebleau, représentée par Me Fayat, avocate conclut : 1°) à ce que les jugements du 2 février 2012 soient déclarés nuls et non avenus ; 2°) au rejet de la requête de Mme F… A…

Elle fait valoir que :

— la tierce opposition est recevable ;

— elle soutient les arguments des requérants.

Par une ordonnance en date du 9 janvier 2015, la clôture d’instruction a été fixée au 6 mars 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu :

— la pièce enregistrée le 11 janvier 2017 et transmise par Mme A… n’a pas été communiquée ;

— les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus, au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme X ;

— les conclusions de M. Y, rapporteur public ;

— les observations de Me Z pour les requérants, et de Me Vermersch pour la commune.

Mme A… a présenté une note en délibéré le 22 janvier 2017.

1. Considérant que le conseil municipal de Fontainebleau a fixé par une première délibération du 26 mars 2008 le régime des indemnités des adjoints et des conseillers municipaux délégués ; que par une seconde délibération du 7 juillet 2008, il a rapporté la première délibération et fixé à nouveau le régime de ces mêmes indemnités ; qu’à la demande de Mme A…, conseillère municipale, le Tribunal administratif de Melun a, par deux jugements du 2 février 2012, annulé la délibération du 26 mars 2008 et celle du 7 juillet 2008 en tant qu’elle fixait son entrée en vigueur à une date antérieure à sa publication et à sa transmission au représentant de l’Etat ; que par un jugement du 19 juillet 2013, le tribunal de céans a annulé la décision implicite de refus du maire de Fontainebleau de faire droit à la demande de Mme A… de recouvrer les indemnités indument versées et d’émettre les titres exécutoires correspondants ; que la commune de Fontainebleau a formé un appel le 27 septembre 2013 contre le jugement rendu le 19 juillet 2013; que par un arrêt du 5 mai 2015, la Cour administrative d’appel de Paris, a rejeté la requête de la commune et lui a enjoint de procéder à l’émission de titres de recettes en vue de recouvrer les indemnités illégalement versées aux adjoints et conseillers municipaux pendant la période du 22 mars au 7 juillet 2008 dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; que par la présente requête, Mme Z… et autres ont introduit une tierce opposition contre les deux premiers jugements du Tribunal administratif de Melun rendus le 2 février 2012 ;

Sur la recevabilité de la tierce opposition :

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 832-1 du code de justice administrative : « Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu’elle représente n’ont été présents ou régulièrement appelés dans l’instance ayant abouti à cette décision » ;

3. Considérant qu’il ressort des pièces des dossiers des deux affaires jugées par le tribunal administratif le 2 février 2012 sous les n os 0803932/6 et 0808769/6, que les requêtes de Mme A… n’ont pas été communiquées à Mme Z… et autres ; qu’ainsi et dès lors que la commune de Fontainebleau ne peut être regardée comme les ayant représentés, Mme Z… et autres n’ont été ni appelés ni représentés aux deux instances qui préjudicient à leurs droits ; que dès lors, leur tierce opposition contre ces deux jugements est recevable ;

Sur le bien-fondé de la tierce opposition :

4. Considérant, en premier lieu, Mme Z… et autres font valoir que la délibération du 7 juillet 2008 en cause pouvait être rétroactive et qu’elle constituait une mesure de régularisation visant à combler un vide juridique ; que la délibération du 7 juillet 2008 a eu pour objet d’allouer des indemnités de fonctions aux adjoints et conseillers municipaux au titre d’une période antérieure à son intervention ; qu’elle est ainsi entachée de rétroactivité illégale ; que si des mesures de régularisation peuvent éventuellement être prises, elle doivent l’être dans le but de faire respecter des droits et principes d’égale valeur que le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ; que les requérants n’en invoquent aucun si ce n’est d’avoir été privés de sommes d’argent alors que le code général des collectivités territoriales consacre dans son article L. 2123- 17, le principe de la gratuité des fonctions de maire, d’adjoint et de conseiller municipal ; qu’en outre, le principe de l’obligation transmission au contrôle de légalité de toute délibération fixant les indemnités des adjoints et des conseillers municipaux délégués fait obstacle à l’entrée en vigueur d’une telle délibération avant sa transmission ; que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que le Tribunal administratif de Melun a annulé la délibération du 7 juillet 2008 en tant qu’elle a fixé son entrée en vigueur à une date antérieure à sa publication et à sa transmission au représentant de l’Etat ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l’annulation d’un acte administratif implique en principe que cet acte est réputé n’être jamais intervenu ; que, toutefois, s’il apparaît que cet effet rétroactif de l’annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur que de l’intérêt général pouvant s’attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif de prendre en considération, d’une part, les conséquences de la rétroactivité de l’annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d’autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l’annulation ; qu’il lui revient d’apprécier, en rapprochant ces éléments, s’ils peuvent justifier qu’il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l’effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l’affirmative, de prévoir dans sa décision d’annulation que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de celle-ci contre les actes pris sur le fondement de l’acte en cause, tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à son annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l’annulation ne prendra effet qu’à une date ultérieure qu’il détermine ;

6. Considérant que Mme Z… et autres font grief à la formation du Tribunal administratif de Melun qui a statué le 2 février 2012, de ne pas avoir usé de la possibilité qui lui était offerte de différer les effets de l’annulation de la délibération du 7 juillet 2008 ; que toutefois, d’une part, il ressort des termes même du dispositif de ses jugements en date du 2 février 2012, que les juges ont annulé la délibération en cause seulement en tant qu’elle était rétroactive ; qu’ils ont ainsi circonscrit l’annulation prononcée pour la période antérieure à son entrée en vigueur à une date antérieure à sa publication et à sa transmission au représentant de l’Etat ; qu’ils ne pouvaient neutraliser la rétroactivité et différer les effets dans le futur de cette annulation fondée justement sur la méconnaissance du principe de non-rétroactivité de la délibération fixant le régime indemnitaire pour l’exercice des fonctions des adjoints et des conseillers municipaux délégués ; que de surcroit, le fait de devoir reverser des sommes relativement limitées et perçues sur une courte période de mars à juillet 2008 ne saurait être regardé comme emportant des conséquences manifestement excessives et telles que de l’intérêt général pouvait conduire à un maintien temporaire de ses effets au sens de la jurisprudence susvisée ; que le moyen tiré de ce que le tribunal de Melun aurait dû différer les effets de l’annulation de la délibération du 7 juillet 2008 ne peut qu’être écarté ;

7. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les conclusions de Mme Z… et autres tendant à ce que les jugements du tribunal administratif du 2 février 2012 soient déclarés non avenus ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative:

8. Considérant qu’aux termes de l’article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ; qu’il résulte des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut, même d’office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation ;

9. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge des requérants, partie perdante, dans la présente instance, la somme que réclame Mme A…, faute de justifier des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1 : La tierce opposition de Mme Z… et autres est rejetée. Article 2 : Les conclusions de Mme A… tendant à la mise à la charge de Mme Z… et autres d’une somme au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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