Tribunal administratif de Poitiers, 6 février 2013, n° 1102362

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Sur la décision

Référence :
TA Poitiers, 6 févr. 2013, n° 1102362
Juridiction : Tribunal administratif de Poitiers
Numéro : 1102362

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE POITIERS

N° 1102362

___________

Mme Z Y

___________

M. X

Magistrat désigné

___________

M. Jaehnert

Rapporteur public

___________

Audience du 23 janvier 2013

Lecture du 6 février 2013

___________

KG

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Poitiers

Le magistrat désigné

Vu la requête, enregistrée le 3 novembre 2011 sous le n° 1102362, présentée par Mme Z Y, domiciliée XXX à XXX ;

Mme Y demande au tribunal :

1°) de condamner l’Etat, à titre principal, au remboursement de frais de repas et de déplacement d’un montant de 767,73 euros ou, à titre subsidiaire, au versement d’une somme équivalente en réparation du préjudice subi ;

2°) de condamner l’Etat à lui verser des intérêts de retard afférents et les intérêts capitalisés ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 500 euros conformément à l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La requérante soutient qu’elle a droit, par application de l’article 3 du décret du 3 juillet 2006 et du § 8 de la circulaire ministérielle n° 2010-134 du 3 août 2010, au remboursement des frais de repas et des frais de déplacement exposés en 2007-2008 et en 2008-2009 pour se rendre de l’école élémentaire de Vouneuil-sur-Vienne, où elle était affectée et où elle effectuait une partie de son service, dans les écoles élémentaires de Bonneuil-Matours et de Cenon-sur-Vienne, où elle effectuait le reste de son service ; que ce décret et cette circulaire précisent les notions de résidence administrative et de résidence familiale ; qu’il n’existe aucun service public de transport de voyageurs entre, d’une part, Vouneuil-sur-Vienne et, d’autre part, Bonneuil-Matours et Cenon-sur-Vienne de sorte que ces communes ne peuvent être regardées comme limitrophes au sens du 8° de l’article 2 du décret ; que le recteur de l’académie de Poitiers ne pouvait, dès lors, se fonder sur leur caractère de communes limitrophes pour refuser le remboursement des frais de déplacement ; que, dans un jugement n° 0701422, le tribunal administratif de Poitiers s’est déjà prononcé dans le sens de la prise en charge des frais de déplacement exposés du fait de l’absence de transport en commun ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 février 2012, présenté par le recteur de l’académie de Poitiers qui conclut au rejet de la requête ;

Le recteur fait valoir que les communes de Vouneuil-sur-Vienne, Bonneuil-Matours et Cenon-sur-Vienne sont géographiquement limitrophes ; que le refus de prise en charge des frais de déplacement ne résulte pas de ce que les communes devraient être regardées comme une même commune par application du 8° de l’article 2 du décret du 3 juillet 2006 ; que ce refus est fondé sur le second paragraphe de la circulaire n° 79-43 du 30 janvier 1979, toujours en vigueur ; que l’arrêté du 3 juin 2010 et la circulaire du 3 août 2010 sont postérieurs aux faits de l’espèce et ne leur sont donc pas applicables ; que la situation jugée par le tribunal administratif de Poitiers le 21 janvier 2009 n’est pas transposable au présent litige ; que le refus de prise en charge n’est pas fondé sur une circulaire du 2 octobre 2006, du reste non produite ;

Vu la décision du 8 décembre 2011 par laquelle le recteur de l’académie de Poitiers a refusé de prendre en charge les frais de déplacement de Mme Y au titre des années scolaires 2007-2008 et 2008-2009 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l’Etat ;

Vu l’arrêté du 3 juillet 2006 fixant les taux des indemnités de mission prévues à l’article 3 du décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l’Etat ;

Vu l’arrêté du 3 juillet 2006 fixant les taux des indemnités kilométriques prévues à l’article 10 du décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels de l’Etat ;

Vu l’arrêté du 26 août 2008 modifiant l’arrêté du 3 juillet 2006 fixant les taux des indemnités kilométriques prévues à l’article 10 du décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels de l’Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu, en application de l’article R. 222-13 du code de justice administrative, la décision en date du 21 septembre 2012 par laquelle le président du tribunal a désigné M. X, premier conseiller, pour statuer sur les litiges visés audit article ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 23 janvier 2013 :

— le rapport de M. X, premier conseiller ;

— les conclusions de M. Jaehnert, rapporteur public ;

— et les observations de Mme Y, requérante ;

Considérant que Mme Z Y, professeur des écoles, demande à titre principal la condamnation de l’Etat à lui rembourser des frais de repas et des frais de déplacement entre la commune de Vouneuil-sur-Vienne, qui constitue sa résidence administrative et où elle a effectué une partie de son service, et les communes de Bonneuil-Matours et de Cenon-sur-Vienne, où elle a exercé le reste de son service au cours des années scolaires 2007-2008 et 2008-2009 ;

Sur la prise en charge par l’Etat des frais de déplacement et des frais supplémentaires de repas :

Considérant qu’aux termes de l’article 2 du décret du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l’Etat : « Pour l’application du présent décret, sont considérés comme : 1° Agent en mission : agent en service, muni d’un ordre de mission pour une durée totale qui ne peut excéder douze mois, qui se déplace, pour l’exécution du service, hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale ; (…) / 6° Résidence administrative : le territoire de la commune sur lequel se situe le service où l’agent est affecté ou l’école où il effectue sa scolarité. Lorsqu’il est fait mention de la résidence de l’agent, sans autre précision, cette résidence est sa résidence administrative ; / 7° Résidence familiale : le territoire de la commune sur lequel se situe le domicile de l’agent ; / 8° Constituant une seule et même commune : toute commune et les communes limitrophes, desservies par des moyens de transports publics de voyageurs (…) » ; qu’aux termes de l’article 3 du même décret : « Lorsque l’agent se déplace pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale à l’occasion d’une mission, d’une tournée ou d’un intérim, il peut prétendre : / – à la prise en charge de ses frais de transport sur production des justificatifs de paiement auprès du seul ordonnateur. / – et à des indemnités de mission qui ouvrent droit, cumulativement ou séparément, selon les cas, au : / 1° Remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de repas ; (…) » ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme Y a été affectée, à titre principal, à l’école primaire publique E F de Vouneuil-sur-Vienne et y a effectué une partie de son service ; qu’au cours de l’année scolaire 2007-2008, elle a reçu une affectation complémentaire à l’école primaire publique C D de Bonneuil-Matours ; qu’au cours de l’année scolaire 2008-2009, elle a reçu une affectation complémentaire à l’école primaire publique C D de Bonneuil-Matours et une affectation complémentaire à l’école primaire publique E H de Cenon-sur-Vienne ; qu’ayant fixé sa résidence familiale à Lavoux, elle doit être regardée comme s’étant déplacée hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale pour effectuer son service dans les communes de Bonneuil-Matours et de Cenon-sur-Vienne ;

Considérant que le recteur de l’académie de Poitiers fait valoir que ces communes, si elles ne peuvent être regardées comme constituant avec Vouneuil-sur-Vienne une même commune en l’absence de desserte par des moyens de transports publics de voyageurs, sont limitrophes et que cette circonstance fait obstacle à la prise en charge des frais de déplacement par l’Etat ; que, toutefois, il résulte des dispositions combinées des articles 2 et 3 du décret du 3 juillet 2006 que l’agent peut prétendre à la prise en charge de ses frais de transport et de ses frais supplémentaires de repas dès lors qu’il se déplace hors de sa résidence administrative ou familiale pour les besoins du service, sans que la circonstance que la commune du lieu de déplacement soit limitrophe de ses communes de résidence administrative ou familiale y fasse obstacle ; que, si le recteur invoque une circulaire n° 79-43 du 30 janvier 1979 qui serait toujours en vigueur, il résulte des termes mêmes de celle-ci qu’elle a été prise pour l’application du décret n° 66-619 du 10 août 1966 relatif aux frais de déplacements des personnels civils lorsqu’ils sont à la charge des budgets de l’Etat ; que ce décret a été remplacé par le décret n° 90-437 du 28 mai 1990 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les changements de résidence des personnels civils sur le territoire métropolitain de la France lorsqu’ils sont à la charge des budgets de l’Etat, lui-même remplacé par le décret du 3 juillet 2006 précité ; qu’il suit de là que le recteur de l’académie de Poitiers n’est pas fondé à prétendre que la circonstance que les communes sont limitrophes fait obstacle à la prise en charge par l’Etat des frais de déplacement et des frais supplémentaires de repas ;

Sur le montant des sommes dues :

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 9 du décret du 3 juillet 2006 : « Le service qui autorise le déplacement choisit le moyen de transport au tarif le moins onéreux et, lorsque l’intérêt du service l’exige, le plus adapté à la nature du déplacement. (…) » ; qu’aux termes de l’article 10 du même décret : « Les agents peuvent utiliser leur véhicule terrestre à moteur, sur autorisation de leur chef de service, quand l’intérêt du service le justifie. / En métropole et outre-mer, l’agent autorisé à utiliser son véhicule terrestre à moteur pour les besoins du service est indemnisé de ses frais de transport soit sur la base du tarif de transport public de voyageurs le moins onéreux, soit sur la base d’indemnités kilométriques, dont les taux sont fixés par un arrêté conjoint du ministre chargé de la fonction publique, du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l’outre-mer (…) » ;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le chef de service doit, d’une part, autoriser le déplacement, ce qu’il fait nécessairement en affectant l’agent à un service distinct de sa résidence administrative, et, d’autre part, le cas échéant, l’utilisation du véhicule personnel ; que ces dispositions n’ont pas pour effet de limiter au tarif le moins onéreux le remboursement des frais de transport auquel les agents peuvent légalement prétendre lorsque, en raison de l’absence de desserte en transports en commun du lieu de leur déplacement ou de son caractère incompatible avec les obligations de service, ils sont dans l’obligation d’utiliser leur véhicule personnel ; qu’en revanche, dans le cas où la desserte en transport en commun est assurée et compatible avec les obligations du service, ces dispositions imposent la prise en charge des frais de déplacement non pas sur la base des indemnités kilométriques mais sur celle du tarif de transport public de voyageurs le moins onéreux ;

Considérant, en l’espèce, que si Mme Y n’établit ni même n’allègue avoir sollicité l’autorisation de son chef de service d’utiliser son véhicule personnel, il est constant que les communes de Vouneuil-sur-Vienne, Bonneuil-Matours et Cenon-sur-Vienne ne sont pas desservies par un réseau de transport public de voyageurs et que le recteur de l’académie de Poitiers n’a pas mis à la disposition de la requérante de véhicule de service ; que la requérante a, par suite, droit au remboursement des frais exposés du fait de l’usage de son véhicule personnel, sur la base des indemnités kilométriques ; que le recteur de l’académie de Poitiers ne conteste ni le nombre de déplacements réalisés en 2007-2008 et en 2008-2009, ni les distances parcourues, ni la puissance fiscale du véhicule utilisé ; qu’ainsi, la requérante est fondée à demander la condamnation de l’Etat à lui verser 116 euros au titre de l’année 2007-2008, soit 400 km multiplié par 0,29 euros, et 148,48 euros au titre de 2008-2009, soit 464 km multiplié par 0,32 euros ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’en application de l’article 7 du décret du 3 juillet 2006, les ministres chargés de la fonction publique et du budget ont, par un arrêté du même jour, fixé à 15,25 euros par repas le montant du remboursement forfaitaire des frais supplémentaires de repas ; que Mme Y prétend, sans être contredite par le recteur de l’académie de Poitiers, avoir réalisé 66 jours de mission ouvrant droit au versement de cette indemnité ; qu’elle limite toutefois le montant réclamé à ce titre à 503,25 euros ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme Y n’établit pas la date de réception par le recteur de l’académie de Poitiers de sa demande préalable de remboursement de ses frais de déplacement et de ses frais supplémentaires de repas ; que, par suite, elle n’a droit au paiement des intérêts moratoires au taux légal qu’à compter de l’enregistrement de sa requête au greffe du tribunal, soit le 3 novembre 2011 ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1154 du code civil : « Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière. » ; que, pour l’application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu’à cette date il s’agisse d’intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s’accomplit à nouveau à l’expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu’il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que la capitalisation des intérêts ayant été demandée lors de l’enregistrement de la requête, Mme Y a droit à cette capitalisation à la date du 3 novembre 2012 à laquelle il était due une année d’intérêts ainsi qu’à chaque échéance annuelle ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme Y est fondée à demander la condamnation de l’Etat à lui verser une somme de 767,73 euros au titre de la prise en charge de ses frais de déplacement et de ses frais supplémentaires de repas ; que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2011 ; que les intérêts échus seront eux-mêmes capitalisés au 3 novembre 2012 et à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que Mme Y, qui n’a pas constitué d’avocat, prétend avoir exposé dans la présente instance des frais non compris dans les dépens au titre de trajets pour constituer le dossier, de garde d’enfant pendant des consultations d’aide juridique, d’affranchissements postaux et de téléphone dont elle produit le détail ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement à la requérante d’une somme de 100 euros au titre de ces frais ;

D E C I D E :

Article 1er : L’Etat versera à Mme Y une somme de 767,73 euros (sept cents soixante sept euros et soixante treize centimes) au titre de la prise en charge de ses frais de déplacement et de ses frais supplémentaires de repas.

Article 2 : La somme visée à l’article 1er portera intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2011. Les intérêts échus seront eux-mêmes capitalisés au 3 novembre 2012 et à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme Z Y et au ministre de l’éducation nationale.

Copie en sera adressée, pour information, au recteur de l’académie de Poitiers.

Lu en audience publique le 6 février 2013.

Le magistrat désigné, Le greffier,

Signé Signé

D. X N. Collet

La République mande et ordonne au ministre de l’éducation nationale en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour le greffier en chef,

Le greffier,

N. Collet

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