Tribunal de commerce de Paris, 27 avril 2020, n° 2018017694

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
T. com. Paris, 27 avr. 2020, n° 2018017694
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Numéro(s) : 2018017694

Texte intégral

Copie exécutoire : CHOLAY REPUBLIQUE FRANCAISE Martine

Copie aux demandeurs : 2

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Copie aux défendeurs : 2

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

13 EME CHAMBRE

JUGEMENT PRONONCE LE 27/04/2020 par sa mise à disposition au Greffe

RG 2018017694

27

ENTRE:

SARL Y Z, […], dont le siège social est […]

Partie demanderesse : assistée de Me Solange-Astrid MARLE avocat (RPJ097168) et comparant par la SEP ORTOLLAND avocats (R231)

ET:

SAS X, RCS de Paris B 511 492 472, dont le siège social est […]

Champs-Elysées 75008 Paris

Partie défenderesse : assistée de Me Lucienne BOTBOL avocat (E1574) et comparant par Me Martine CHOLAY avocat (B242)

APRES EN AVOIR DELIBERE

LES FAITS

La société Y Z commercialise des applications mobiles auprès des comités

d’entreprise. La société X est un éditeur de logiciels applicatifs pour mobiles.

Le 14 janvier 2014, la société Y Z a conclu avec la société X un contrat ayant pour objet la réalisation d’un cloud et d’applications mobiles. Le contrat est prévu pour une durée déterminée de 24 mois renouvelable.

Dès la fin de l’année 2014, des premières tensions entre les parties sont apparues liées à

l’existence de dysfonctionnements techniques.

A partir de 2016, Y Z a retenu le paiement de factures présentées par X prétendant que les montants réclamés n’étaient pas justifiés. Les 25 septembre et 25 octobre 2017, X a suspendu 2 jours l’accès au service de mise à jour du contenu des applications mobiles aux clients d’Y Z. Par lettre RAR du 30 novembre 2017, Y Z a mis un terme au contrat avec X,

à date d’effet au 20 décembre 2017.

Le litige porte sur de nombreux points de désaccord entre les parties, comprenant la facturation, l’interprétation du contrat sur les droits de propriété et l’exclusivité commerciale, les conditions de la rupture et ses conséquences. Ainsi est née la présente instance.

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TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2018017694 JUGEMENT DU LUNDI 27/04/2020

13 EME CHAMBRE MN – PAGE 2

LA PROCEDURE

Par acte en date du 21 mars 2018, la société Y Z assigne la société X.

Par cet acte et aux audiences des 9 novembre 2018, 12 avril et 11 octobre 2019, la société

Y Z demande, dans le dernier état de ses prétentions, au tribunal de :

Vu l’article L442-6 du code de commerce,

Recevoir la société Y Z en ses demandes et l’en dire bien fo ndée ; Dire que la société X a manqué à son obligation de loyauté en rompant

-

brutalement le contrat sans aucun préavis,

Constater la résiliation du contrat au 20 décembre 2017,

-

En conséquence,

Ordonner à la société X de retirer des plateformes de téléchargement les applications mobiles des clients d’Y Z qu’elle héberge, et ce sous astreinte de 150 € par jour et par application à compter de la signification de la présente assignation,

Condamner la société X à payer à la société Y Z les sommes suivantes :

La somme de 146.556 € au titre du préjudice commercial subi pour la non O fourniture du service prévu au contrat et la rupture abusive des relations commerciales ;

La somme de 10.000 € pour le préjudice subi en raison de la violation de l’article O

10 du contrat ;

O La somme de 10.000 € pour le préjudice subi en raison de la violation de l’article 13 du contrat ;

Débouter la société X de ses demandes ;

Condamner la société X aux entiers dépens ;

Condamner la société X à payer à la société Y Z la somme de 30.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Prononcer l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

-

Aux audiences en date des 12 octobre 2018, 15 mars, 13 septembre et 6 décembre 2019, la société X demande, dans le dernier état de ses prétentions, au tribunal de : Vu l’article L 442-6, 1, 5° du Code de Commerce,

Vu l’article 1220 du Code Civil,

Vu les articles 1231 et suivants du Code Civil,

Dire et juger que les manquements graves de la société Y Z justifiait la

-

suspension par la société X de ses prestations de service,

Dire et juger que la société Y Z reste devoir à la société X la somme de 38.567,92 € TTC (trente-huit mille cinq cent soixante-sept euros et quatre-vingt-douze centimes), en règlement du solde restant dû au titre des factures de la société X,

Dire et juger que la société Y Z ne justifie d’aucun manquement de la société

-

X

En conséquence,

Débouter la société Y Z de l’intégralité de ses demandes,

Condamner la société Y Z à payer à la société X, la somme de

38.567,92 € TTC (trente-huit mille cinq cent soixante-sept euros et quatre-vingt-douze centimes).

Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir et la capitalisation des intérêts, Condamner la société Y Z à payer à la société X, la somme de 685.513 €

(six cent quatre-vingt-cinq mille cinq cent treize euros) à titre de dommages et intérêts en réparation de l’intégralité des préjudices de la société X, résultant du plagiat de sa technologie et de ses conséquences,

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TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2018017694

JUGEMENT DU LUNDI 27/04/2020

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Condamner la société Y Z à payer à la société X, la somme de 250.000 € (deux cent cinquante mille euros) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial de la société X,

Condamner la société Y Z à payer à la société X, la somme de 30.000 € TTC (trente mille euros) à titre d’indemnité procédurale sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamner la société Y Z aux entiers dépens d’instance, lesquels comprendront les frais de signification du jugement à intervenir et ceux d’une exécution forcée éventuelle.

L’ensemble des demandes formées au cours de ces audiences fait l’objet du dépôt de conclusions, échangées en présence d’un greffier qui en prend acte sur la cote de procédure.

Le 14 février 2020, le tribunal a désigné un juge chargé d’instruire l’affaire conformément aux articles 871 et suivants du code de procédure civile. Les parties sont convoquées à

l’audience du juge chargé d’instruire l’affaire le 6 mars 2020 à laquelle les parties se présentent. Après avoir entendu les parties en leurs explications et observations, le juge clôt les débats, met l’affaire en délibéré et dit que le jugement sera prononcé le 27 avril 2020 par sa mise à disposition au greffe, conformément au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

LES MOYENS DES PARTIES

Après avoir pris connaissance de tous les moyens et arguments développés par les parties, tant dans leurs plaidoiries que dans leurs écritures, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal les résumera succinctement de la façon suivante :

Y Z soutient :

X a été informée par plusieurs mails, dès le début de la relation, de mécontentements techniques des clients utilisateurs des applications mobiles (comités

d’entreprise),

X a manqué de réactivité pour faire face aux dysfonctionnements et corriger les nombreux bugs, sans proposer de solution (pendant des semaines, voire des mois), les multiples dysfonctionnements l’ont conduit a contesté les factures émises par X qui facturait des services non fonctionnels, la relation commerciale avec X est établie depuis la signature du contrat du 14 janvier 2014, elle a perduré jusqu’à ce que X rompe brutalement ses obligations contractuelles en coupant l’accès à l’interface des applications, sans aucun préavis, X a violé les dispositions contractuelles prévues à l’article 10 (suppression d’informations mises en ligne par Y Z) et à l’article 13 (signature d’un contrat avec CE SOFIPRA),

l’instabilité du système et les pannes successives ont conduit plusieurs comités d’entreprise à remettre en cause la relation commerciale et rompre le contrat avec Y Z, son préjudice lié à la perte de clients doit être réparé,

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TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2018017694 JUGEMENT DU LUNDI 27/04/2020

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pouvoir librement contracter avec un développeur concurrent d’applications mobiles, sans être tenue à une quelconque exclusivité envers X,

X porte des accusations graves de plagiat de technologies à l’encontre d’Y Z sans aucune preuve, la société avec laquelle travaille Y Z aujourd’hui utilise un programme open source (depuis 2012) qui n’est pas une copie du logiciel appartenant à X.

X réplique :

Y Z est mal fondée en ses demandes à titre de rupture prétendument brutale alors qu’elle est pleinement responsable du litige, avoir rempli l’ensemble de ses obligations contractuelles, Y Z ne rapporte

-

nullement la preuve d’un quelconque manquement de sa part, en dépit de l’important arriéré dont la société Y ne s’est toujours pas acquittée, elle a w

continué sa prestation de services (développement et maintenance), Y Z a commis des graves fautes en ne payant pas les factures et en plagiant sa technologie innovante (160 logiciels applicatifs propriétaires), Y Z restait débitrice en 2017 d’un solde de factures impayées sur l’année 2016, avoir été contrainte de suspendre toute collaboration avec Y Z, notamment pour empêcher l’accès de Y Z (et ses prestataires) afin de limiter les pertes de données et la copie frauduleuse de ses solutions, les deux jours de suspension du service de mises à jour n’ont pas bloqué le fonctionnement des applications, toujours actives auprès des clients de la société Y

Z, seule la mise à jour ayant été interrompue, avoir subi un double préjudice dont elle demande réparation, à titre commercial et du plagiat de sa technologie.

SUR CE, LE TRIBUNAL

Sur la rupture brutale de la relation commerciale établie et la demande d’Y Z de 146.556 € de ce chef

Attendu que l’article L. 442-6, 1, 5° du code de commerce dispose que :

< Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers

(…)

De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. » ;

Attendu que le respect combiné de la liberté contractuelle et des prescriptions de l’article L.442-6, 1, 5° du code de commerce impose d’en limiter le domaine d’application aux cas où la relation commerciale revêt, avant la rupture, un caractère suivi, stable et habituel et où la partie qui s’en estime victime pouvait légitimement croire à la pérennité de la relation en anticipant raisonnablement pour l’avenir une certaine continuité de flux d’affaires avec son partenaire commercial, justifiant que l’intention de rompre soit précédée d’un délai de prévenance lui permettant d’organiser la recherche d’autres partenaires afin de maintenir l’activité de l’entreprise ;

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Attendu qu’il convient de rechercher, en premier lieu, si des relations commerciales établies existaient bien entre Y Z et X avant que celles-ci ne cessent ;

Attendu que la relation entre Y Z et X trouve sa traduction juridique et conventionnelle dans le contrat de souscription d’applications mobiles du 14 janvier 2014, établi pour une durée initiale de 24 mois, reconduit pour une nouvelle période non précisée ; Attendu qu’il ressort des pièces versées aux débats que, dès octobre 2014, Y Z a fait part à X de problèmes techniques relatifs aux développements des applications mobiles et de difficultés d’utilisation pour ses clients; que selon Y Z, les dysfonctionnements rencontrés n’ont pas été résolus pendant plusieurs semaines et ont conduit des clients en 2017 à mettre un terme à sa relation commerciale avec elle (CE

NOBILAS, CE SOGAL UES, CE UES MACSF, CE CIT); que cependant, dès 2016, Y Z a refusé de payer l’intégralité des factures émises par X au motif que les montants réclamés ne correspondaient aux prestations réalisées ; qu’après plusieurs mois de discussion, aucune solution amiable n’a pu aboutir; qu’en l’absence de réponse aux demandes de règlement des factures, X a suspendu l’accès au service de mises à jour des contenus des applications aux clients de Y Z, et ce à deux reprises, les 25 septembre et 25 octobre 2017, au risque de compromettre la poursuite de la relation commerciale avec Y Z ; qu’il ressort de ce qui précède que la rupture était prévisible compte tenu de la gravité des problèmes rencontrés et de l’absence d’émergence de solution amiable globale;

Attendu que, si Y Z prétend que la rupture s’est faite sans aucun préavis, le tribunal constate que d’une part, Y Z avait une parfaite connaissance de l’historique de la dégradation de la situation avec son cocontractant; que d’autre part, elle est à l’initiative du courrier de résiliation du 30 novembre 2017, envoyé à X, fixant elle-même le terme du contrat et le délai de préavis au regard des contraintes de réorganisation de ses activités ;

Attendu que, si la relation commerciale a duré environ quatre ans et présentait durant cette période un flux d’affaires régulier, ces éléments ne sont pas suffisants pour démontrer à eux seuls la stabilité de la relation commerciale dès lors qu’il existait de telles tensions entre les parties, non réglées au fil des mois, génératrices de précarité; que compte tenu de l’existence de conflits récurrents et croissants, la relation commerciale entretenue entre Y

Z et X ne revêtait donc pas le caractère de stabilité exigé par l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ; que le moyen est inopérant ;

En conséquence, le tribunal déboutera Y Z de sa demande de 146.556 € pour rupture brutale de la relation commerciale établie ;

Sur la demande en paiement de X de la somme 38.567,92 € au titre des montants impayés

Attendu que l’article 1315 ancien du code civil dispose :

< Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit

l’extinction de son obligation » ;

Attendu qu’en l’espèce il revient ainsi à X de prouver sa créance;

Attendu qu’Y Z a refusé de payer la totalité des factures au motif qu’une partie des montants réclamés concernait des prestations mal exécutées ou non réalisées ; Attendu que le contrat du 14 janvier 2014 régit les rapports entre Y Z et X ;

Attendu que le contrat porte sur des services de réalisation par X de « cloud mobile et

d’une ou plusieurs applications mobiles collaboratives dynamiques destinées à être publiés

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JUGEMENT DU LUNDI 27/04/2020

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sur Appstore, Playstore et autres interfaces de Distribution d’application pour le compte du Client » ; que l’article 5, maintenance évolutive, stipule que Y Z < bénéficiera des améliorations apportées aux applications par l’Editeur. Ces améliorations seront étudiées afin d’améliorer les performances des applications et d’enrichir leurs fonctionnalités » ;

Attendu que, si Y Z prétend que X n’a pas respecté ses engagements contractuels, le tribunal constate qu’aucun cahier des charges ou autre document fonctionnel

n’avait été convenu entre les parties pour structurer les développements informatiques correctifs ou évolutifs ;

Attendu que X produit aux débats de nombreux mails venant en réponse aux sollicitations de Y Z pour corriger des bugs informatiques ou apporter des évolutions techniques; qu’il ressort de ces éléments que X est intervenue, dans des délais raisonnables selon la nature de la tâche, afin de solutionner les demandes variées de Y

Z; que celle-ci échoue ainsi à démontrer les défauts de non-conformité des développements réalisés par X ni les manquements à l’obligation de délivrance de son prestataire ;

Attendu que, dès juin 2016, X constate le défaut de règlement de la somme de 1.360 € pour des prestations réalisées en 2015, toujours non payées ; Attendu qu’il ressort des pièces versées aux débats que Y Z n’est pas revenue vers

X pour solutionner les problèmes de facturation ; qu’au contraire, elle a contribué à dégrader significativement la situation litigieuse en poursuivant sur le même rythme les demandes de développement entre 2016 et 2017, sans régler intégralement les nouvelles prestations réalisées par son prestataire ;

Attendu que, par mail du 14 juillet 2017, X a résumé ainsi la situation à Y Z :

< Comme convenu, tu trouveras en pièces jointes : la totalité des factures 2017 (passées et à venir) réparties de façon mensuelle et intégrant les modifications de montants convenus hier,

l’avoir de régularisation sur 2017 conformément à notre accord d’hier, le récapitulatif excel avec les factures 2017 et le solde restant à payer 2016,

-

Le montant total prévisionnel à régler jusqu’à la fin de l’année (hors nouvelles applis éventuelles) est de 42.661 € ttc » ; que Y Z ne conteste pas la solution amiable envisagée ;

Attendu que, malgré les nombreuses relances et remises consenties par X, Y Z n’a pas honoré ses engagements en contrepartie de l’accord du 13 juillet 2017, retardant à nouveau le paiement des factures, sans apporter de justification ; qu’elle ne peut, dans ces conditions, venir reprocher à X les suspensions de service du 25 septembre 2017 et du 25 octobre 2017 alors qu’elle ne satisfait pas elle-même à son obligation de paiement; que ce défaut de paiement constitue une faute grave causant le préjudice allégué ;

Attendu que, c’est à tort, qu’Y Z considère que l’existence de la dette envers X ne présentait pas un degré de gravité suffisant pour permettre au co-contractant de suspendre le service;

Attendu que par lettre RAR du 6 novembre 2017, X a mis en demeure Y Z de lui régler les montants restants dus ;

Attendu que X verse aux débats toutes les factures concernées au titre des prestations réalisées et abonnements dus, un extrait du grand livre des comptes certifié au

31/12/2018 faisant apparaître un crédit en sa faveur de 38.567,92 € TTC ;

Attendu que la capitalisation des intérêts échus depuis au moins une année entière est de droit si elle est demandée par le créancier, ce qui est le cas en l’espèce ;

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TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2018017694

JUGEMENT DU LUNDI 27/04/2020

MN – PAGE 7 13 EME CHAMBRE

En conséquence, le tribunal condamnera Y Z au paiement de la somme de 38.567,92 € TTC, majorée des intérêts calculés au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 novembre 2017 et ordonnera la capitalisation des intérêts.

Sur les autres demandes en paiement d’Y Z de 20.000 € au titre des manquements contractuels

Attendu qu’Y Z prétend que X a violé les articles 10 et 13 du contrat et réclame le paiement de 20.000 € à ce titre;

Attendu que l’article 9 du CPC dispose que : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention » ;

Attendu que le contrat stipule qu’Y Z < conserve tous les droits, titres et intérêts sur

l’ensemble de ses contenus, logos, graphiques, dessins et modèles » (article 10) et bénéfice

< d’une exclusivité dans la construction d’une offre dédiée aux comités d’entreprise en

France » (article 13); Attendu que Y Z allègue avoir perdu des clients en raison des dysfonctionnements de l’application mobile et que X lui a détourné une partie de sa clientèle ;

Attendu cependant que Y Z ne prouve pas que la perte de clientèle, causant son préjudice allégué, découle de l’inexécution ou de la mauvaise exécution des obligations de X, le rôle de celle-ci vis-à-vis des clients étant d’ailleurs limité à la seule fonction

d’édition et d’hébergement des applications mobiles mises en ligne ; qu’elle ne démontre pas plus que X lui ait volontairement pris des clients ; que Y Z est ainsi défaillante dans l’administration de la preuve qui lui incombe conformément aux dispositions de l’article

9 du CPC;

En conséquence, le tribunal déboutera Y Z de sa demande de dommages et intérêts de 20.000 € pour violation des articles 10 et 13 du contrat ;

Sur la demande en paiement de X de la somme de 685.513 € à titre de dommages et intérêts

Attendu que X prétend qu’Y Z s’est livrée à son encontre à des manœuvres déloyales en copiant ses logiciels applicatifs, qu’au total 160 logiciels applicatifs auraient été reproduits en violation de ses droits (80 sous Iphone et 80 sous Androïd);

Attendu que Y Z ne conteste pas avoir fait développer des applications mobiles auprès d’un concurrent, rappelant d’une part qu’elle n’était pas tenue à une exclusivité envers X et d’autre part, que les développements s’appuyaient sur une technologie open source dont le code est ouvert à tous et qui n’est pas une copie du logiciel de

X;

Attendu qu’il ressort de ce qui précède que Y Z a pu légitimement s’inspirer de l’expérience de sa collaboration passée avec X et bénéficier ainsi de nombreux retours fonctionnels pour ses nouveaux développements, en particulier par rapport à l’interface de gestion, l’ergonomie du site, les fonctionnalités utiles etc… ; que par ailleurs

X ne démontre pas que Y Z lui ait copié son code source, sachant que Y Z ne bénéficiait que d’un accès partiel aux données, celles réservées aux seuls utilisateurs du service, et n’avait donc pas accès aux parties protégées du code ; Attendu de surcroît que X n’établit pas précisément les éléments qui auraient été reproduits, distinctifs et singuliers (marque, slogan, code source etc…), qui seraient

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TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS N° RG: 2018017694 JUGEMENT DU LUNDI 27/04/2020

13 EME CHAMBRE MN – PAGE 8

constitutifs de l’originalité de sa technologie et qui auraient permis de caractériser le plagiat allégué ; que dans ces conditions, le tribunal la déboutera de sa demande de dommages et intérêts formée de ce chef.

Sur la demande en paiement de X de la somme de 250.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice commercial

Attendu que X réclame le paiement de dommages et intérêts alléguant que le contrat avait vocation à se prolonger pour une durée d’au moins cinq années supplémentaires ; que cependant elle n’apporte pas la preuve de cette allégation ni du préjudice invoqué, elle est donc mal fondée en sa demande de dommages et intérêts et en sera déboutée.

Sur la demande de retrait sous astreinte des plateformes de téléchargement des applications mobiles des clients d’Y Z

Attendu que le tribunal constate que le contrat a été résilié en date du 20 décembre 2017; que les parties ont retrouvé leur liberté d’action à compter de cette date; que Y Z a choisi de travailler avec un autre prestataire pour le développement de ses applications mobiles; que par ailleurs, elle n’apporte aucun élément venant justifier la demande de retrait sous astreinte en rapport à un préjudice subi ni à un risque certain ; que la demande formée par Y Z sera donc rejetée.

Sur l’article 700 du CPC

Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de X les frais non compris dans les dépens qu’elle a engagés pour faire valoir ses droits, le tribunal condamnera Y Z

à payer à X la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du CPC, déboutant pour le surplus de la demande.

Sur la demande d’exécution provisoire

Attendu que l’exécution provisoire est compatible avec la nature de l’affaire et le tribunal

l’estimant nécessaire, il y sera fait droit, sans constitution de garantie.

Sur les dépens

Attendu qu’Y Z succombe, le tribunal la condamnera à supporter les dépens.

Sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres moyens ou prétentions, inopérants ou mal fondés, le tribunal statuera comme suit :

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N° RG: 2018017694 TRIBUNAL DE COMMERCE DE PARIS

JUGEMENT DU LUNDI 27/04/2020

MN – PAGE 9 13 EME CHAMBRE

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort par jugement contradictoire :

Dit que la relation entre les parties ne présente pas le caractère d’une relation

commerciale établie,

Déboute la SARL Y Z de sa demande de 146.556 € pour rupture brutale de

relations commerciales établies,

Déboute la SARL Y Z de sa demande en paiement de la somme de 10.000 €

pour préjudice subi en raison de la violation de l’article 10 du contrat,

Déboute la SARL Y Z de sa demande en paiement de la somme de 10.000 €

pour préjudice subi en raison de la violation de l’article 13 du contrat,

Condamne la SARL Y Z à payer à la SAS X la somme de 38.567,92 €

TTC, majorée des intérêts calculés au taux légal à compter de la mise en demeure du 6 novembre 2017,

Ordonne la capitalisation des intérêts,

Déboute la SAS X de sa demande en paiement de la somme de 685.513 € à

titre de dommages et intérêts,

Déboute la SAS X de sa demande en paiement de la somme de 250.000 € à

titre de dommages et intérêts pour préjudice commercial,

Déboute la SARL Y Z de sa demande de retrait sous astreinte des

plateformes de téléchargement des applications mobiles de ses clients,

Condamne la SARL Y Z à payer à la SAS X la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du CPC,

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

Ordonne l’exécution provisoire, Condamne la SARL Y Z aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe,

liquidés à la somme de 77,84 € dont 12,76 € de TVA.

En application des dispositions de l’article 871 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 6 mars 2020, en audience publique, devant M. A B, juge chargé

d’instruire l’affaire, les représentants des parties ne s’y étant pas opposés. Ce juge a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré du tribunal, composé de : MM. A B, C D et E F.

Délibéré le 17 avril 2020 par les mêmes juges. Dit que le présent jugement est prononcé par sa mise à disposition au greffe de ce tribunal, les parties en ayant été préalablement avisées lors des débats dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La minute du jugement est signée par M. A B, président du délibéré et par Mme Marina Nassivera, greffier.

Le présidentput Le greffier

En remplacement du greffier empêché

G H

Greffier Associé

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Tribunal de commerce de Paris, 27 avril 2020, n° 2018017694