Cour administrative d'appel de Bordeaux, 8 février 2019, n° 16BX00581

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 8 févr. 2019, n° 16BX00581
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 16BX00581
Décision précédente : Tribunal administratif de Pau, 28 décembre 2015

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE BORDEAUX

N° 16BX00581

___________

REPUBLIQUE FRANÇAISE SAS ROYAL CINÉMA et M. R===

__________


M. X E AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Président

__________


M. Y Z La cour administrative d’appel de Bordeaux Rapporteur

4ème chambre ___________


Mme A B

Rapporteur public ___________

Audience du 11 janvier 2019 Lecture du 8 février 2019 ___________ 01-01-06-02-01 135-02-03-04-01 14-08 39-01-01 C

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Royal cinéma et son président, M. R===, ont demandé au tribunal administratif de Pau d’annuler, d’une part, la délibération du 19 décembre 2014 par laquelle le conseil municipal de Mont-de-Marsan a approuvé le versement à la société Le club d’une subvention de 1,5 million d’euros afin de financer un projet de création d’un établissement de spectacle cinématographique de huit salles en centre ville et a autorisé le maire à signer la convention définissant les modalités d’attribution de cette subvention et, d’autre part, la convention elle- même, signée le 6 janvier 2015.

Mme P===, d’une part, et l’association de contribuables Un Marsan autrement, d’autre part, ont également demandé au tribunal l’annulation de la délibération du 19 décembre 2014.

La SAS Royal cinéma et son président, M. R===, ont encore demandé au tribunal d’annuler la décision du 23 décembre 2014 par laquelle le président du Centre national du



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cinéma et de l’image animée a accordé à la société Le club une subvention de 400 000 euros afin de financer le projet de création d’un établissement de spectacles cinématographiques précité.

Par un jugement n° 1500281, 1500363, 1500364, 1501380, 1501446 du 29 décembre 2015, le tribunal administratif de Pau a joint ces cinq requêtes, a annulé la décision du président du Centre national du cinéma et de l’image animée et a rejeté les autres demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2016, et des mémoires complémentaires, enregistrés respectivement le 31 août 2016 et le 7 décembre 2016, la SAS Royal cinéma et M. R===, représentés par la SAS Bouyssou & associés, demandent à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 29 décembre 2015 en tant qu’il rejette leurs demandes tendant à l’annulation, d’une part, de la délibération du conseil municipal de Mont-de-Marsan du 19 décembre 2014 attribuant à la SARL Le club une subvention de 1,5 million d’euros et, d’autre part, de la convention conclue le 6 janvier 2015 relative à l’attribution de cette subvention ;

2°) d’annuler la délibération du 19 décembre 2014 et la convention du 6 janvier 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mont-de-Marsan une somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils critiquent le jugement dans son ensemble, sans se borner à reproduire la demande de première instance ;

- ils justifient d’un intérêt à agir dès lors que l’attribution de la subvention en litige cause à la société Royal cinéma un véritable préjudice ;

- leur demande tendant à l’annulation de la délibération du 19 décembre 2014 était recevable au regard de la jurisprudence Tarn-et-Garonne ; en outre, l’attribution de la subvention a été décidée par la délibération, la convention n’étant que la mise en œuvre de celle-ci ;

- à titre subsidiaire, leur demande dirigée contre la convention du 6 janvier 2015 n’était pas tardive ;

- la subvention en litige est entachée de conflit d’intérêt ;

- la subvention en litige ne pouvait pas être attribuée à un établissement nouvellement créé, en application de l’article L. 2251-4 du code général des collectivités territoriales ;

- l’attribution de la subvention en litige porte atteinte au principe de liberté du commerce et de l’industrie ;

- l’attribution de la subvention en litige porte atteinte au principe de la libre concurrence.

Par un mémoire enregistré le 9 mai 2016, la SARL Le club, représentée par la SELARL Reflex droit public, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SAS Royal cinéma et de M. R=== une somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.



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Elle fait valoir que :

- le recours pour excès de pouvoir contre la délibération du 19 décembre 2014 est irrecevable ;

- les conclusions dirigées contre la convention du 6 janvier 2015 sont tardives ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par des mémoires, enregistrés respectivement le 23 septembre 2016 et le 12 janvier 2017, la commune de Mont-de-Marsan, représentée par la SELARL Symchowicz-Weissberg & associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SAS Royal cinéma et de M. R=== une somme de 10 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable, à défaut de formuler des critiques directes à l’encontre du jugement de première instance ;

- les conclusions de la demande tendant à l’annulation de la délibération du 19 décembre 2014 sont irrecevables ;

- les conclusions dirigées contre la convention du 6 janvier 2015 sont tardives ;

- à défaut d’être lésés dans leurs intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la convention en litige, les requérants ne justifient pas de leur intérêt à agir en l’espèce ;

- les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 13 mars 2018, la clôture de l’instruction a été fixée en dernier lieu au 13 avril 2018 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du cinéma et de l’image animée ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Vu notamment les décisions du Conseil d’Etat :

- CE, 5 juillet 2010, Chambre de commerce et d’industrie de l’Indre, n° 308615 ;

- CE, Assemblée, 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, n° 358994 ;

- CE, Section, 5 février 2016, Syndicat mixte des transports en commun, n° 383149.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Y Z, premier conseiller,

- les conclusions de Mme A B, rapporteur public,

- et les observations de Me Theret, représentant la commune de Mont-de-Marsan et de Me Brand, représentant la SARL Le club.



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Une note en délibéré, enregistrée le 21 janvier 2019, a été produite pour la commune de Mont-de-Marsan.

Considérant ce qui suit :

1. La société Le club a sollicité, le 9 octobre 2014, l’attribution d’une subvention de 1,5 million d’euros pour la création d’un établissement de spectacle cinématographique de huit salles en centre ville de Mont-de-Marsan. Par délibération du 19 décembre 2014, le conseil municipal de Mont-de-Marsan a approuvé le versement de cette subvention et a autorisé le maire à signer la convention dont le texte annexé à la délibération définissait les modalités d’attribution. Cette convention a été signée le 6 janvier 2015. La SAS Royal cinéma, qui exploite notamment un cinéma dans le centre ville de Mont-de-Marsan, et son président, M. R===, relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 29 décembre 2015 en tant qu’il a rejeté leurs demandes tendant à l’annulation de cette délibération et de cette convention.

2. Aux termes de l’article L. 113-1 du code de justice administrative : « Avant de statuer sur une requête soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, le tribunal administratif ou la cour administrative d’appel peut, par une décision qui n’est susceptible d’aucun recours, transmettre le dossier de l’affaire au Conseil d’Etat, qui examine dans un délai de trois mois la question soulevée. Il est sursis à toute décision au fond jusqu’à un avis du Conseil d’Etat ou, à défaut, jusqu’à l’expiration de ce délai ».

3. Aux termes de l’article L. 2251-4 du code général des collectivités territoriales : « La commune peut attribuer des subventions à des entreprises existantes ayant pour objet l’exploitation de salles de spectacle cinématographique dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Ces subventions ne peuvent être attribuées qu’aux établissements qui, quel que soit le nombre de leurs salles, réalisent en moyenne hebdomadaire moins de 7 500 entrées ou qui font l’objet d’un classement art et essai dans des conditions fixées par décret. / Ces aides ne peuvent bénéficier aux entreprises spécialisées dans la projection de films visés à l’article 279 bis du code général des impôts. / Ces aides sont attribuées conformément aux stipulations d’une convention conclue entre l’exploitant et la commune ».

4. Le tribunal administratif, en se référant à la décision n° 358994 du 4 avril 2014 du Conseil d’État, a rejeté, comme irrecevable, la demande des requérants, enregistrée au greffe du tribunal sous le numéro 1500281, tendant à l’annulation de la délibération du 19 décembre 2014 au motif que cette délibération constituait un acte détachable de la convention du 6 janvier 2015 dont la légalité ne pouvait plus être contestée qu’à l’occasion du recours contre la convention qu’il a rejeté au fond.

5. La requête de la société Royal cinéma et de M. R=== présente à juger la question suivante :

Ainsi que l’a dit pour droit le Conseil d’Etat dans la décision susvisée du 4 avril 2014 n° 358994, indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action



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devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu’au représentant de l’Etat dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité. Les requérants peuvent éventuellement assortir leur recours d’une demande tendant, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, à la suspension de l’exécution du contrat. Ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de deux mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d’un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu’à l’occasion du recours ainsi défini. Toutefois, dans le cadre du contrôle de légalité, le représentant de l’Etat dans le département est recevable à contester la légalité de ces actes devant le juge de l’excès de pouvoir jusqu’à la conclusion du contrat, date à laquelle les recours déjà engagés et non encore jugés perdent leur objet.

Ce régime de recours contentieux est-il applicable lorsque le litige porte sur une convention ayant pour objet l’octroi d’une subvention à la demande du bénéficiaire et dont les conditions d’attribution et les modalités de versement sont unilatéralement déterminées par la décision ou la délibération préalable d’une collectivité publique ?

6. Il y a lieu, par suite, en application des dispositions précitées de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, de surseoir à statuer sur la requête de la société Royal cinéma et de M. R=== et de transmettre le dossier de cette requête, pour avis, au Conseil d’Etat.

DECIDE :

Article 1er : Le dossier de la requête n° 16BX00581 de la société Royal cinéma et de M. R=== est transmis au Conseil d’Etat pour examen de la question de droit définie dans les motifs du présent arrêt.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur la requête de la société Royal cinéma et de M. R=== jusqu’à ce que le Conseil d’Etat ait fait connaître son avis.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n’est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu’en fin d’instance.



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Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au président de la section du contentieux du Conseil d’Etat, à la SAS Royal cinéma, à M. R===, à la SARL Le club, à la commune de Mont-de- Marsan, à Mme P=== et au Centre national du cinéma et de l’image animée.

Délibéré après l’audience du 11 janvier 2019 à laquelle siégeaient :

M. X E, président, Mme Sylvande Perdu, premier conseiller, M. Y Z, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 février 2019.

Le rapporteur, Le président,

Y Z X E

Le greffier,

C D

La République mande et ordonne au préfet des Landes en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

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Cour administrative d'appel de Bordeaux, 8 février 2019, n° 16BX00581