Cour de cassation, Chambre civile 3, 11 octobre 2018, 17-18.553, Inédit

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Commentaires19

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Gouache Avocats · 10 avril 2024

Face à la hausse des tarifs de l'électricité, le bailleur peut-il vous imposer un fournisseur ? Doit-il mettre à disposition du locataire commercial un point de livraison en électricité ? Pourquoi ne pas réduire sa consommation ? Le coût de l'électricité a fortement augmenté ces derniers temps, de sorte que la question se pose pour les preneurs, de changer de fournisseur pouvant pratiquer des tarifs plus compétitifs. Mais le peuvent-ils lorsque le bailleur leur impose un fournisseur ? Le cas échéant, à qui incombent les travaux de raccordement permettant de bénéficier d'un point …

 

Gouache Avocats · 12 décembre 2023

L'obligation de délivrance du bailleur encore et toujours ! A défaut de stipulation expresse, le coût des travaux de ravalement de l'immeuble peut incomber au bailleur, même si le bail prévoit qu'ils doivent être supportés par le preneur. Les circonstances sur lesquelles la Cour de cassation a dû se prononcer sont singulières. C'est certainement l'une des raisons qui n'a pas permis la publication de cette décision au bulletin des arrêts, alors même que la solution, si particulière soit-elle, témoigne d'une fine analyse. La Haute juridiction a approuvé la cour d'appel qui, après avoir …

 

Charles-édouard Brault · Gazette du Palais · 14 novembre 2023
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Sur la décision

Référence :
Cass. 3e civ., 11 oct. 2018, n° 17-18.553
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-18.553
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 27 mars 2017, N° 16/00963
Textes appliqués :
Article 1719, 1° et 2°, du code civil.
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000037510747
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:C300883
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Sur les parties

Texte intégral

CIV.3

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 11 octobre 2018

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 883 F-D

Pourvoi n° T 17-18.553

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Igalio, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 28 mars 2017 par la cour d’appel de Versailles (12e chambre), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Elevation Real Estate, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

2°/ à la société La Tour immo, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

3°/ à la société King holding, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

4°/ à M. X… Y…, domicilié […] , exerçant sous l’enseigne bureau d’étude DC3D,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 11 septembre 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Z…, conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Z…, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Igalio, de la SCP Hémery, Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société La Tour immo, de Me C… , avocat de la société Elevation Real Estate et de la société King holding, l’avis de M. A…, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à la société Igalio du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre M. Y… exerçant sous l’enseigne Bureau d’étude DC3D ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 28 mars 2017), que, selon acte du 21 décembre 2010, la société Elevation Real Estate a donné à bail à la société Igalio des locaux commerciaux pour l’exploitation d’une activité de fromagerie, restauration, épicerie fine avec consommation sur place et à emporter et livraison ; que la locataire, se prévalant de manquements de la société Elevation Real Estate à son obligation de délivrance, l’a assignée, ainsi que son mandataire, en remboursement du coût des travaux de mise en conformité qu’elle a réalisés dans les locaux, en remboursement des loyers payés pendant la période où, faute de raccordement au réseau électrique, elle n’a pu exercer son activité et en réparation du préjudice d’exploitation subi ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur les deux premiers moyens, pris en leur première branche, réunis :

Vu l’article 1719, 1° et 2°, du code civil ;

Attendu que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ;

Attendu que, pour rejeter les demandes l’arrêt retient que le bail stipule que le preneur déclare bien connaître les locaux loués, qu’il les prend « dans l’état où ils se trouvent lors de son entrée en jouissance sans pouvoir exiger de travaux de quelque nature que ce soit ni remise en état de la part du bailleur et que, connaissant parfaitement les équipements des locaux, il déclare faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements desdits équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité, de sorte que, d’après les obligations réciproques des parties, il ne peut être déduit la preuve d’un manquement du bailleur à son obligation de délivrance ;

Qu’en statuant ainsi, sans constater l’existence d’une stipulation expresse du bail mettant, à la charge du preneur, le coût des travaux de raccordement aux eaux usées et d’installation d’un raccordement au réseau électrique, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il rejette les demandes de la société Igalio en remboursement de 8 132,80 euros correspondant aux frais de renforcement du mur du rez-de-chaussée et de 7 246,46 euros correspondant au coût d’installation de la façade en bois, l’arrêt rendu le 28 mars 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société Elevation Real Estate aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze octobre deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Igalio.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’ AVOIR rejeté l’intégralité des demandes de la société Igalio et notamment celle tendant à la condamnation de la bailleresse en raison de son manquement à son obligation de lui délivrer un local raccordé au réseau d’évacuation des eaux usées ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « la cour relève, avec les premiers juges, le premier motif selon lequel au paragraphe sur la « désignation des locaux loués », il est précisé « une boutique d’angle sur rue au rez-de-chaussée et un sous-sol auquel on accède par un escalier depuis la boutique (cf plans en annexe). Ainsi que lesdits locaux existent, se poursuivent, le preneur déclarant les bien connaître pour les avoir vus et visités et les déclarant parfaitement conformes à la destination contractuellement autorisée. Le preneur renonce expressément à tout recours ou réclamation contre le bailleur et son mandataire pour toute erreur ou omission relative à la désignation » ; qu’il est aussi relevé la stipulation selon laquelle le « locataire prend les locaux dans l’état où ils se trouvent lors de son entrée en jouissance sans pouvoir exiger de travaux de quelque nature que ce soit ni remise en état de la part du bailleur » ; que la cour relève dans la discussion le motif selon lequel le bail a été convenu après que la société Igalio ait recouru à un architecte, M. B…, architecte DPLG, associé au bureau d’études de M. X…, et qui a établi les plans pour l’aménagement du local, lesquels ont été annexés au contrat de bail ; qu’enfin, la cour relève la franchise de loyer convenue entre les parties au bail pour le premier trimestre en contrepartie de l’exécution par le preneur de travaux de remise en état totale de la boutique ;

QUE en ce qui concerne [

] le raccordement aux eaux usées des compteurs d’eau, la société Igalio invoque l’obligation légale à laquelle le bailleur était tenu de permettre ce raccordement, son manquement qu’elle lui a dénoncé par lettre recommandée le 6 août 2011, les travaux qu’elle a dû en conséquence confier à la société Lonc.w, et conteste enfin la sincérité de l’attestation de la société MAG selon laquelle cette évacuation était disponible ; que toutefois, la cour relève avec les premiers juges les stipulations du contrat au paragraphe des « abonnements » qui prévoient que « le preneur connaissant parfaitement les équipements des locaux objets des présentes pour les avoir visités, déclare faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements desdits équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité (téléphone, télex, télécopie, électricité, gaz, eaux etc) » ; que d’après les obligations réciproques, pour le bailleur d’indiquer le lieu du percement de la canalisation des eaux usées, et celle du preneur de réaliser ce percement et d’adapter les canalisations de son établissement, il ne peut être déduit la preuve d’un manquement du bailleur de nature à entraîner les conséquences dont la société Igalio se prévaut » (arrêt p. 7, al. 2 et 3) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « aux termes de l’article 1719 1° du code civil, le bailleur est tenu de mettre à disposition du preneur un bien conforme à la destination contractuelle ; que le clause selon laquelle « le locataire prend les locaux dans l’état où ils se trouvent lors de son entrée en jouissance sans pouvoir exiger de travaux de quelque nature que ce soit ni remise en état de la part du bailleur » ne décharge pas ce dernier que son obligation de délivrance ; qu’en l’espèce, la société Igalio fait grief à la société Elevation Real Estate d’avoir manqué à son obligation de délivrance conforme pour plusieurs motifs ; que s’agissant de l’installation des compteurs d’eau et d’électricité, le paragraphe « Abonnements » page 9 prévoit que « le preneur connaissant parfaitement les équipements des locaux objets des présentes pour les avoir visités, déclare faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements desdits équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité (téléphone, télex, télécopie, électricité, gaz, eaux etc » ; qu’il a pareillement été prévu une franchise de loyer d’un trimestre en contre partie de l’exécution par le preneur de travaux de remise en état total de la boutique ; qu’aux termes d’une lettre recommandée adressée au preneur le 22 décembre 2011, le bailleur a fait état de l’impossibilité de terminer la colonne électrique faute d’accès au câble du preneur, les services ERDF ayant procédé à la pose de compteurs individuels dans l’immeuble la veille à l’exception du local du preneur faute d’accès ; que ces derniers attestent au demeurant le 6 janvier 2011 que le locataire du local n’a pas demandé de contrat électrique à partir de l’installation existante laissée par son prédécesseur ; que l’attestation de la société Mag non conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile mais constitutive d’un commencement de preuve, indique ensuite qu’en janvier 2011 elle a procédé à l’installation d’une seule évacuation, non de la seconde sollicitée par le preneur non autorisée par le bailleur ; qu’il apparait de ces éléments que le parties ont entendu, par des clauses claires et précisées, transférer au preneur la charge du raccordement du local et que ce dernier succombe à démontrer une défaillance du bailleur à ce titre ; que le grief du défaut de raccordement n’est pas démontré » ;

1°) ALORS QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat de délivrer au preneur la chose louée en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ; qu’en l’espèce, la société Elevation Real Estate, aux droits de laquelle est venue la société King Holding, a donné à bail à la société Igalio une boutique en vue d’y exercer une « activité de fromagerie, restauration, épicerie fine avec consommation sur place, à emporter et livraison » (contrat de bail, p. 2) ; qu’en jugeant que le contrat de bail pouvait dispenser le bailleur de l’obligation de fournir au preneur un local raccordé au réseau d’évacuation des eaux usées, la cour d’appel a violé l’article 1719 du code civil ;

2°) ALORS QU’en toute hypothèse, les obligations du bailleur ne peuvent être mises à la charge du preneur que par une stipulation expresse et précise du contrat de bail ; qu’en retenant que le bailleur était contractuellement déchargé de son obligation de délivrance et de fournir au preneur un local raccordé au réseau des eaux usées par la stipulation figurant au paragraphe des « abonnements » aux termes de laquelle « le preneur connaissant parfaitement les équipements des locaux objets des présentes pour les avoir visités, déclare faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements desdits équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité (téléphone, télex, télécopie, électricité, gaz, eaux etc) », quand une telle stipulation ne visait que de la souscription d’abonnements et non de la réalisation de travaux nécessaires au raccordement du local au réseau des eaux usées, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ;

3°) ALORS QUE, en toute hypothèse, les clauses aux termes desquelles la société Igalio prenait les locaux dans l’état où il se trouvait et avait obtenu une franchise de loyers pour procéder à la remise en état total de la boutique ne sont, faute de précision suffisante, pas de nature à exonérer le bailleur de l’obligation de délivrer un local en état de servir à l’usage pour lequel il a été loué et notamment un local raccordé au réseau des eaux usées ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 1719 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR rejeté l’intégralité des demandes de la société Igalio et notamment celle tendant à la condamnation de la bailleresse pour manquement à son obligation de lui délivrer un local raccordé au réseau électrique ;

AUX MOTIFS QUE « la cour relève, avec les premiers juges, le premier motif selon lequel au paragraphe sur la « désignation des locaux loués », il est précisé « une boutique d’angle sur rue au rez-de-chaussée et un sous-sol auquel on accède par un escalier depuis la boutique (cf plans en annexe). Ainsi que lesdits locaux existent, se poursuivent, le preneur déclarant les bien connaître pour les avoir vus et visités et les déclarant parfaitement conformes à la destination contractuellement autorisée. Le preneur renonce expressément à tout recours ou réclamation contre le bailleur et son mandataire pour toute erreur ou omission relative à la désignation » ; qu’il est aussi relevé la stipulation selon laquelle « locataire prend les locaux dans l’état où ils se trouvent lors de son entrée en jouissance sans pouvoir exiger de travaux de quelque nature que ce soit ni remise en état de la part du bailleur » ; que la cour relève dans la discussion le motif selon lequel le bail a été convenu après que la société Igalio ait recouru à un architecte, Monsieur B…, architecte DPLG, associé au bureau d’études de Monsieur X…, et qui a établi les plans pour l’aménagement du local, lesquels ont été annexés au contrat de bail ; qu’enfin, la cour relève la franchise de loyer convenue entre les parties au bail pour le premier trimestre en contrepartie de l’exécution par le preneur de travaux de remise en état totale de la boutique ; qu’en ce qui concerne [

] le raccordement aux eaux usées des compteurs d’eau, la société Igalio invoque l’obligation légale à laquelle le bailleur était tenu de permettre ce raccordement, son manquement qu’elle lui a dénoncé par lettre recommandée le 6 août 2011, les travaux qu’elle a dû en conséquence confier à la société Lonc.w, et conteste enfin la sincérité de l’attestation de la société MAG selon laquelle cette évacuation était disponible ; que toutefois la cour relève avec les premiers juges les stipulations du contrat au paragraphe des « abonnements » qui prévoient que « le preneur connaissant parfaitement les équipements des locaux objets des présentes pour les avoir visités, déclare faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements desdits équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité (téléphone, télex, télécopie, électricité, gaz, eaux, etc) ». D’après les obligations réciproques, pour le bailleur d’indiquer le lieu du percement de la canalisation des eaux usées, et celle du preneur de réaliser ce percement et d’adapter les canalisations de son établissement, il ne peut être déduit la preuve d’un manquement du bailleur de nature à entraîner les conséquences dont la société Igalio se prévaut » (arrêt p.7, al. 2 et 3) ;

ET QUE « en ce qui concerne [

] le raccordement au réseau électrique, la société Igalio se prévaut des constats d’huissier des 15 avril et 16 septembre 2011 établissant que la colonne électrique de l’immeuble n’était pas installée. Alors que celle-ci a été tardivement posée le 30 janvier 2012, ce manquement lui a interdit d’ouvrir son local pendant plus de quinze mois. Enfin, en réplique à l’attestation de ERDF que le bailleur verse aux débats, et selon laquelle la preneuse n’avait entrepris aucune démarche auprès d’un fournisseur d’électricité, la société Igalio oppose l’information qu’elle a recueillie de ERDF le 1er décembre 2012 et selon laquelle le propriétaire de l’immeuble n’avait pas installé cette colonne d’électricité, alors qu’il en supportait l’obligation, et qu’en conséquence, l’établissement de la société Igalio ne pouvait être raccordé dans les normes applicables ; qu’ au demeurant, il résulte des termes du bail précité que la société Igalio supportait les démarches en vue d’obtenir les branchements, et tandis qu’aux termes de sa lettre du 1er décembre 2012, ERDF indiquait à la preneuse la possibilité qui lui était offerte de raccorder son installation au réseau souterrain de ERDF, il ne se déduit pas, d’après les obligations réciproques du bailleur et de la locataire, la preuve d’un manquement caractérisé du bailleur de nature à entraîner des conséquences dont la société Igalio se prévaut » (arrêt p. 7, dernier al. et p. 8, al. 1er) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « aux termes de l’article 1719 1° du code civil, le bailleur est tenu de mettre à disposition du preneur un bien conforme à la destination contractuelle ; que le clause selon laquelle « le locataire prend les locaux dans l’état où ils se trouvent lors de son entrée en jouissance sans pouvoir exiger de travaux de quelque nature que ce soit ni remise en état de la part du bailleur » ne décharge pas ce dernier que son obligation de délivrance ; qu’en l’espèce, la société Igalio fait grief à la société Elevation Real Estate d’avoir manqué à son obligation de délivrance conforme pour plusieurs motifs ; que s’agissant de l’installation des compteurs d’eau et d’électricité, le paragraphe « abonnements » page 9 prévoit que « le preneur connaissant parfaitement les équipements des locaux objets des présentes pour les avoir visités, déclare faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements desdits équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité (téléphone, télex, télécopie, électricité, gaz, eaux etc » ; qu’il a pareillement été prévu une franchise de loyer d’un trimestre en contre partie de l’exécution par le preneur de travaux de remise en état total de la boutique ; qu’aux termes d’une lettre recommandée adressée au preneur le 22 décembre 2011, le bailleur a fait état de l’impossibilité de terminer la colonne électrique faute d’accès au câble du preneur, les services ERDF ayant procédé à la pose de compteurs individuels dans l’immeuble la veille à l’exception du local du preneur faute d’accès ; que ces derniers attestent au demeurant le 6 janvier 2011 que le locataire du local n’a pas demandé de contrat électrique à partir de l’installation existante laissée par son prédécesseur ; que l’attestation de la société Mag non conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile mais constitutive d’un commencement de preuve, indique ensuite qu’en janvier 2011 elle a procédé à l’installation d’une seule évacuation, non de la seconde sollicitée par le preneur non autorisée par le bailleur ; qu’il apparait de ces éléments que le parties ont entendu, par des clauses claires et précises, transférer au preneur la charge du raccordement du local et que ce dernier succombe à démontrer une défaillance du bailleur à ce titre ; que le grief du défaut de raccordement n’est pas démontré » ;

1°) ALORS QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat de délivrer au preneur la chose louée en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ; qu’en l’espèce, la société Elevation Real Estate, aux droits de laquelle est venue la société King Holding, a donné à bail à la société Igalio une boutique en vue d’y exercer une « activité de fromagerie, restauration, épicerie fine avec consommation sur place, à emporter et livraison » (contrat de bail, p. 2) ; qu’en jugeant que le contrat de bail pouvait dispenser le bailleur de l’obligation de fournir au preneur un local raccordé au réseau électrique, la cour d’appel a violé l’article 1719 du code civil ;

2°) ALORS QU’en toute hypothèse, les obligations du bailleur ne peuvent être mises à la charge du preneur que par une stipulation expresse et précise du contrat de bail ; qu’en retenant que « la société Igalio supportait les démarches en vue d’obtenir les branchements » (arrêt p. 8, al. 1er) et que le bailleur était contractuellement déchargé de son obligation de fournir au preneur un local raccordé au réseau électrique car la stipulation figurant au paragraphe des « abonnements » prévoit que « le preneur connaissant parfaitement les équipements des locaux objets des présentes pour les avoir visités, déclare faire son affaire personnelle de toutes démarches en vue d’obtenir les branchements desdits équipements et installations de toute nature nécessaires à l’exercice de son activité (téléphone, télex, télécopie, électricité, gaz, eaux etc) », quand une telle stipulation ne visait que de la souscription d’abonnements et non de la réalisation de travaux nécessaires au raccordement du local au réseau électrique, telle que l’installation d’une colonne électrique, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ;

3°) ALORS QUE le contrat stipulait expressément que même si le preneur déclarait prendre les lieux dans l’état où ils se trouvaient au moment de l’entrée en jouissance et qu’il ne pourrait exiger du bailleur aucun travaux, il était fait exception « à cette clause de délivrance des lieux les éléments porteurs de la structure architecturale du local, d’un compteur d’eau et d’électricité séparés » (contrat de bail, p. 6, al. 3) ; qu’en jugeant qu'« il résult[ait] des termes du bail [

] que la société Igalio supportait les démarches en vue d’obtenir les branchements » et notamment le raccordement des locaux au réseau électrique (arrêt p. 8, al. 1er ) la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ;

4°) ALORS QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat, de délivrer au preneur la chose louée en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ; que tout manquement du bailleur à cette obligation est de nature à engager sa responsabilité ; qu’en jugeant que le preneur aurait dû démontrer « un manquement caractérisé du bailleur » (arrêt p. 8, al. 1er) à ses obligations pour que sa responsabilité puisse être engagée au profit du preneur, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2012-131 du 10 février 2016, devenu l’article 1231-1 du même code ;

5°) ALORS QUE dans la lettre du 1er décembre 2011, ERDF rappelé au preneur que la demande de raccordement devait être faite par le propriétaire du local et que l’alimentation du local loué ne pouvait être faite faute de colonne électrique, puis précisait qu’elle pouvait « exceptionnellement [lui] proposer un raccordement à partir [du] réseau souterrain sur le domaine public [en précisant que] le délai du raccordement est de l’ordre de 2 mois (3 mois en période hivernale) à partir de l’obtention des autorisations administratives (délais indépendant de notre volonté) et de l’accord du propriétaire » (courrier ERDF du 1er décembre 2011, adressé à la société Igalio), ce dont il s’évinçait que le raccordement dépendait de l’accord du propriétaire ; qu’en jugeant au contraire qu’il s’évinçait de cette lettre que le preneur aurait pu de sa seule initiative procédé au raccordement, la cour d’appel a méconnu le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;

6°) ALORS QUE si dans son courrier du 1er décembre 2011 ERDF proposait à la société Igalio de la raccorder au réseau électrique même en l’absence de colonne électrique, elle précisait qu’un tel raccordement supposait l’accord du propriétaire du local et que « le délai du raccordement est de l’ordre de 2 mois (3 mois en période hivernale) à partir de l’obtention des autorisations administratives (délais indépendant de notre volonté) et de l’accord du propriétaire », de sorte qu’en toute hypothèse l’exposante n’aurait pu procéder au raccordement qu’à compter du mois de février 2012, soit après le « 30 janvier 2012 » la date à laquelle une colonne électrique avait finalement été installée (arrêt p. 7, dernier al.) ; qu’en estimant que ce courrier justifiait le rejet des prétentions de l’exposante, la cour d’appel a méconnu le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR rejeté l’intégralité des demandes de la société Igalio et notamment celle tendant à la condamnation de la bailleresse pour manquement à son obligation de sécurité dans le renforcement d’un mur porteur de la chambre froide ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « en ce qui concerne le manquement du bailleur à l’obligation de sécurité dans le renforcement d’un mur porteur de la chambre froide que la société Igalio a abattu pour disposer d’une pièce plus grande, l’appelante se prévaut du courriel par lequel l’agent immobilier lui a indiqué le 6 décembre 2010 que ce mur n’était pas porteur, et soutenir contre le motif retenu par les premiers juges, qu’elle n’était pas tenue d’en faire une condition pour la souscription du bail ; que toutefois, ce grief ne peut être dirigé à l’encontre du bailleur, de sorte qu’il sera purement et simplement écarté » (arrêt, p. 8, al. 2 et 3) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « s’agissant du grief tiré du mur porteur séparant l’ancienne surface de vente de l’ancienne chambre froide, il est stipulé au paragraphe « travaux » premier aliéna page 7 que les travaux de démolition, construction ou touchant au gros-oeuvre sont soumis à autorisation écrite du bailleur, les plans mentionnant une épaisseur de 20 cm dudit mur. Aucune demande d’autorisation n’est versée aux débats ; que les échanges intervenus entre le preneur et la société La Tour Immo relativement à la nature de ce mur ne sont quant à eux pas opposables au bailleur et ne sauraient engager sa responsabilité, le contrat ne comportant aucune mention particulière sur ce point, hormis les plans annexés » (jugement, p. 5, al. 13 et 14) ;

ALORS QUE la faute commise par le mandataire du bailleur est opposable au mandant et engage sa responsabilité, à moins que le mandataire ait agi en dehors des limites de son mandat ; que tant la société La Tour Immo que la société Elevation Real Estate reconnaissaient que la première avait agi comme mandataire de la bailleresse (conclusions de la société Elevation Real Estate, p. 17, antépénultième al. ; conclusions de la société La Tour Immo, p. 3, al. 8) ; qu’en jugeant néanmoins que « les échanges intervenus entre le preneur et la société La Tour Immo relativement à la nature de ce mur ne sont quant à eux pas opposables au bailleur et ne sauraient engager sa responsabilité » (jugement p. 5, al. 14) de sorte que la bailleresse n’aurait pu se voir opposer les fausses informations relatives à la nature du mur transmises au preneur par la société La Tour Immo, sans constater que le mandataire aurait agi en dehors des limites de son mandat, la cour d’appel a violé l’article 1998 du code civil.

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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Cour de cassation, Chambre civile 3, 11 octobre 2018, 17-18.553, Inédit