Cour d'appel d'Angers, 26 avril 2016, n° 14/00943

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, 26 avr. 2016, n° 14/00943
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 14/00943
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Angers, 25 février 2014, N° 1111111112

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

d’ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N°

aj/jc

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/00943.

Jugement Au fond, origine Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d’ANGERS, décision attaquée en date du 26 Février 2014, enregistrée sous le n° 1111111112

ARRÊT DU 26 Avril 2016

APPELANTE :

LA CAF DE MAINE ET LOIRE

XXX

XXX

représentée par Monsieur GARRAULT, muni d’un pouvoi

INTIMES :

Monsieur Z Y

XXX

XXX

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2014/5473 du 19/09/2014 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de ANGERS)

Madame D G épouse Y

XXX

XXX

représentés par Maître MAROT, avocat substituant Maître Bruno SCARDINA, avocat au barreau d’ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 Mars 2016 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Anne JOUANARD, président chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anne JOUANARD, président

Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, conseiller

Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller

Greffier : Madame BODIN, greffier.

ARRÊT :

prononcé le 26 Avril 2016, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Anne JOUANARD, président, et par Madame BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE,

M. Z et Mme D Y étaient bénéficiaires de prestations sociales servies par la caisse d’allocations familiales de Maine et Loire.

Le 1er août 2011 la caisse d’allocations familiales de Maine et Loire leur a notifié une notification d’indus à hauteur des sommes de :

-12 148,10 € au titre de l’aide personnalisée au logement APL pour la période de mars 2008 à mai 2011,

-7 148,07€ au titre d’aide à l’employeur versée dans le cadre du contrat d’insertion RMA,

-116,46 € au titre du RMI de mars 2008,

—  9 867,96 € au titre du RSA pour la période de juillet 2009 à mai 2011,

-2 657,34 € de primes relatives au RSA au titrer des mois d’avril 2008, avril 2009, janvier 2010 et décembre 2010.

Ce courrier leur indiquait la possibilité de contester l’indu d’APL devant la commission de recours amiable et les autres indus devant le tribunal administratif.

Le détail des trop perçus était joint à cette mise en demeure.

Le 26 août 2011, les époux Y ont saisi le tribunal administratif de Nantes d’un recours à l’encontre de cette mise en demeure ainsi que de deux décisions de la caisse d’allocations familiales du 29 juin 2011 leur réclamant le remboursement d’un indu de prime de retour à l’emploi pour 2 000 € et leur notifiant la fin de leur droit de percevoir le RSA et ce 'pour préserver leurs droits et dans la mesure où ils estimaient avoir rempli les conditions requises pour bénéficier des aides sus visées'.

Ce recours a été enregistré sous plusieurs procédures par le tribunal administratif.

S’agissant des décisions du 29 juin 2011 et de l’indu d’aide personnalisée au logement :

— la caisse d’allocations familiales a déposé un mémoire en défense en indiquant que la contestation de l’indu devait se faire en préalable devant la commission de recours amiable et que l’origine de l’indu se trouvait dans le fait que les loyers étaient réglés en réalité par la société Pressense créée par les époux Y et non par eux personnes physiques ;

— elle a alors soumis le dossier à sa commission de recours amiable qui, par décision du 21 février 2012 notifiée le 23 février 2012 (pièce 17) a, au visa de divers textes (L. 351-3 du code de la construction et de l’habitation), considéré que, l’APL étant une prestation soumise à condition de ressources, la situation des époux Y ne permettait pas la valorisation d’un droit APL ;

— les époux Y n’ont pas formalisé de recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à l’encontre cette décision de la commission de recours amiable ;

— par ordonnance du 13 octobre 2014, le tribunal administratif de Nantes a donné acte aux époux Y du désistement de leur requête faute pour eux d’avoir déposé un mémoire dans les délais impartis.

S’agissant du RSA,

— les époux Y n’ont pas saisi au préalable le président du Conseil Général comme indiqué dans la notification d’indu,

— par ordonnance en date du 22 janvier 2012 le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté leur recours.

Le comptable du Trésor a alors notifié aux époux Y le 17 février 2012 une opposition à tiers détenteur entre les mains de la caisse d’allocations familiales pour avoir paiement de la somme totale de 10 513,08 € correspondant aux indus de RMI et RSA de janvier à juillet 2007, mars 2008, d’octobre 2009 à juin 2011 et avril 2009.

Parallèlement, le 30 avril 2012 Mme Y s’est vue attribuée l’X à compter du 1er septembre 2011 jusqu’au 31 août 2016 ; elle ouvrait droit à un rappel d’X à hauteur de la somme de 5 965,32 € pour la période de 1er septembre 2011 au 30 avril 2012.

La caisse d’allocations familiales a opéré une compensation entre cette somme et celle de 4 747,32 € effectivement perçue pendant la même période au titre du RSA, et a affecté le solde au paiement des indus.

Le 22 juin 2012 les époux Y ont alors saisi le juge de l’exécution du tribunal d’instance d’Angers d’une contestation des retenues et saisies attribution opérées et d’une demande tendant à enjoindre à la caisse d’allocations familiales de les remplir de leurs droits et de leur verser en définitive l’arriéré de prestations indûment retenu selon eux à hauteur de la somme de 6 543,96 € ainsi que la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 28 septembre 2012 ce magistrat :

— a déclaré irrecevables les demandes des époux Y concernant les retenues sur prestations effectuées par la caisse d’allocations familiales de Maine et Loire dans le cadre d’une opposition à tiers détenteur qui lui a été délivrée par la Paierie départementale de Maine et Loire et notamment la demande aux fins de voir juger abusive la saisie attribution du RSA, de l’allocation logement et de l’X à revenir aux époux Y et leur reversement entre les mains du comptable du Trésor,

— s’est déclaré incompétent au profit du juge administratif pour statuer sur les demandes des époux Y concernant les retenues effectuées par la caisse d’allocations familiales sur les prestations relevant du RSA et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir,

— s’est déclaré incompétent au profit du tribunal des affaires de sécurité sociale d’Angers pour statuer sur les demandes des époux Y concernant les retenues effectuées par la caisse d’allocations familiales sur les prestations relevant de l’X et de la majoration pour la vie autonome ainsi que sur les prestations relevant de l’allocation de logement social et a ordonné la transmission du dossier à cette juridiction.

Il a considéré, en résumé, que des retenues opérées sans titre exécutoire et en dehors de toute mesure d’exécution forcée et de toute mesure conservatoire échappaient à sa compétence.

M et Mme Y ont relevé appel de ce jugement en ses dispositions relatives aux prestations retenues dans le cadre de l’avis d’opposition à tiers détenteur.

Il n’est pas précisé la suite donnée à ce recours.

Parallèlement ils ont saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale en référé d’un litige concernant le non-versement du RSA, de l’X, de l’allocation personnalisée au logement et du complément de ressources depuis le 1er juillet 2011.

Ils avaient présenté des requêtes similaires en référé le 27 juin 2012 et le 14 mars 2013.

Par jugement en date du 12 juin 2013 le tribunal des affaires de sécurité sociale a ordonné la jonction des dossiers ''en référé’ et de celui dont il était saisi sur renvoi du juge de l’exécution.

Par ordonnance de référé en date du 25 juillet 2013 le tribunal des affaires de sécurité sociale :

— a rejeté la demande de la caisse d’allocations familiales de sursis à statuer en attente de l’arrêt de la cour d’appel à intervenir,

— a ordonné la réouverture des débats et invité les parties à produire des pièces et en particulier le courrier de la caisse d’allocations familiales du 1er août 2011, le courrier de contestation des époux Y qui s’en est suivi, les courriers de la caisse d’allocations familiales adressés périodiquement aux époux Y démontrant que les retenues ont effectivement eu lieu ainsi que toutes les pièces justifiant de l’issue de la procédure pénale ayant conduit à la condamnation des époux Y.

Dans le dernier état de leurs prétentions les époux Y demandaient au tribunal au principal :

— de juger que la caisse d’allocations familiales ne justifiait pas du bien fondé des retenues opérées au titre de l’X et majoration de vie autonome et de la condamner au paiement de la somme de 9 065,32 € à ce titre,

— de juger que la caisse d’allocations familiales ne justifiait pas du bien fondé des retenues opérées au titre de l’allocation de logement sociale et de la condamner au paiement de la somme de 1 912,08 € à ce titre,

— de condamner la caisse d’allocations familiales à leur verser la somme de 5 000€ à titre de dommages et intérêts.

Par jugement en date du 26 février 2014, le tribunal des affaires de sécurité sociale :

— a dit que la caisse d’allocations familiales avait justement considéré que la somme de 4 747,32 € versée au titre du RSA se compensait avec celle de 5 965,32 € versée à Mme Y au titre de l’X et du complément de ressources,

— a dit que les indus perçus par M et Mme Y de la caisse d’allocations familiales au titre de l’aide au logement s’élevaient à 12 465,20 €,

— a condamné la caisse d’allocations familiales à verser à M et Mme Y la somme de 10 977,40 €,

— a débouté M et Mme Y de leur demande de dommages et intérêts et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, il a considéré en résumé :

— sur l’aide au logement : que par un jugement du tribunal correctionnel du 8 juin 2011 confirmé en appel par arrêt du 2 février 2012 et dont le pourvoi a été rejeté par arrêt de la Cour de cassation du 13 février 2013, M et Mme Y ont été condamné pour faux et usage de faux pour obtenir la location le 14 février 2008 d’un appartement auprès de la société le Toit Angevin et à compter de décembre 2010 auprès de la SCI Alentis de sorte que l’aide au logement qui leur a été versée de mars 2008 à mai 2011 a été obtenue par fraude ; qu’il leur avait été versée indûment la somme de 12 465,20 € ;

— sur l’X et la majoration pour vie autonome : que Mme Y ayant perçu sur la même période -1er septembre 2011 jusqu’au mois d’avril 2012- le RSA pour 4747,32 € et un rappel d’X de 5 965,32 €, il y avait lieu à compensation à laquelle la caisse d’allocations familiales avait justement procédé ;

— sur les créances de la caisse et les retenues opérées :

— que les indus des époux Y s’élevaient donc aux sommes de 12465,20 € au titre de l’aide au logement de mars 2008 à mai 2011 et de 1 218 € au titre du RSA de juillet 2009 à mai 2011 ;

— que la caisse d’allocations familiales ne demandait pas la condamnation des époux Y à lui payer une somme déterminée mais seulement de la déclarer fondée à retenir leurs prestations en déduction de leurs dettes, de sorte qu’il ne pouvait statuer sur l’existence d’une créance de la caisse ;

— que dès lors que les époux Y contestaient le caractère indu du versement des prestations, la caisse ne pouvait procéder à leur recouvrement sur les prestations à venir sur le fondement de l’article L. 553-2 du code de la sécurité sociale; que si l’article L. 553-4 du même code autorise les retenues sur prestations en cas de fraude, il ne dispense pas la caisse de justifier d’un titre exécutoire, seul un créancier muni d’un tel titre pouvant en poursuivre l’exécution forcée et une mise en demeure ne valant pas titre exécutoire ;

— qu’il s’ensuivait que la caisse d’allocations familiales devait être déboutée de sa demande et condamnée à verser aux époux Y la somme qu’ils réclamaient soit 9 065,32 € à Mme Y (X) et 1 918 € à M et Mme Y;

— que les époux Y ne justifiaient pas d’un préjudice moral.

Par lettre recommandée reçue au greffe le 10 avril 2014 la caisse d’allocations familiales de Maine et Loire a régulièrement relevé appel de ce jugement.

MOYENS ET PRÉTENTIONS,

Dans ses écritures régulièrement communiquées déposées le 11 décembre 2015 et à l’audience la caisse d’allocations familiales de Maine et Loire à la cour :

— de la déclarer recevable en son appel,

— d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déclaré infondée dans ses retenues effectuées sur les prestations des époux Y,

— si le caractère infondé des retenues était confirmé, d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamné au paiement de la somme de 10 977,40 € et de limiter cette somme aux seules retenues effectives dont le remboursement était demandé à savoir la somme de 5 839,62 €.

Elle rappelle l’historique des faits et procédures concernant les époux Y depuis 2011 duquel il ressort en résumé :

— que les indus objets de la mise en demeure du 1er août 2011 étaient justifiés,

— que les époux Y, qui ont saisi le tribunal administratif de quatre recours, n’en ont soutenu aucun ; que notamment, s’agissant de l’APL, elle a déposé un mémoire en défense en indiquant que la contestation de l’indu devait se faire en préalable devant la commission de recours amiable et que l’origine de l’indu se trouvait dans le fait que les loyers étaient réglés en réalité par la société Pressense créée par les époux Y et non par eux personnes physiques ;

— qu’elle a alors soumis le dossier à sa commission de recours amiable qui, par décision prise le 21 février 2012, qui leur a été notifiée le 23 février 2012 (pièce 17) a, au visa de divers textes, considéré que, l’APL étant une prestation soumise à condition de ressources, la situation des époux Y ne permettait pas la valorisation d’un droit APL ;

— que les époux Y n’ont pas formalisé de recours contre cette décision et que, par ordonnance du 13 octobre 2014, le tribunal administratif de Nantes leur a donné acte du désistement de leur requête, faute pour eux d’avoir déposé un mémoire dans les délais impartis ;

— qu’il en a été de même pour tous les autres recours.

Elle fait essentiellement valoir que :

— sur les retenues opérées :

— s’agissant de l’X : le 30 avril 2012 Mme Y s’est vue attribuée l’X à compter du 1er septembre 2011 jusqu’au 31 août 2016 ; elle a donc perçu un rappel d’X de 5 965,32 € pour la période de 1er septembre 2011 au 30 avril 2012 dont il a été déduit la somme de 4 747,32 € perçue pendant la même période au titre du RSA, déduction justifiée dès lors que le RSA répond à un principe de subsidiarité; Mme Y ne peut se prévaloir de l’insaisissabilité de l’X dans cette hypothèse ; la différence soit la somme de 1 218 € a été affectée aux dettes en cours;

— s’agissant de la majoration vie autonome : un rappel de MVA de 209,54€ pour la période de mars à avril 2012 a également été affecté aux dettes en cours , cette prestation n’étant plus versée à compter de juin 2012 dès lors que, par application de l’article L. 821-1-2 du code de la sécurité sociale, ce droit est conditionné au versement de l’aide au logement pour l’habitation occupée ;

— s’agissant du complément de ressources : le droit de Mme Y n’a pas pu s’ouvrir dès lors qu’elle a déclaré une activité dans l’année précédant sa demande ;

— à compter de mai 2012 les époux Y ont perçu une partie de l’X et de la MVA et une retenue a été affectée à leurs dettes et, à compter de juin 2013, ils ont perçu l’intégralité de leurs droits X et aide au logement ;

— s’agissant de l’aide au logement : à compter de juillet 2012 les droits des époux Y à l’allocation logement ont été suspendus compte tenu de leurs impayés de loyers dont ils sont seuls responsables ; qu’ils ont déménagé en mai 2013 sans faire de demande et sans aviser la caisse d’allocations familiales qui, n’en ayant eu connaissance que dans le cadre de la procédure d’appel de la décision du JEX, leur a adressé une demande qui a donné droit à l’ouverture d’un nouveau droit, l’allocation étant depuis lors versée directement au bailleur ; un récapitulatif des versements est produit;

— sur le bien fondé des retenues :

— les époux Y ne peuvent se prévaloir de l’insaisissabilité des prestations familiales édictée par l’article L.553-4 du code de la sécurité sociale ; en effet ce texte fait une exception en cas de fraude ou de fausse déclaration et en l’espèce tous les trop perçus des minima sociaux et des droits connexes ont été qualifiés de délictueux par des décisions de justice qui mettent en évidence le paiement des loyers par leur société ; l’indu de l’aide au logement est ainsi également justifié ; l’ensemble des dettes des époux Y est ainsi fondé de sorte qu’elle était en droit d’opérer les retenues, l’insaisissabilité n’ayant d’effet qu’à l’égard des tiers et non d’elle-même qui peut, en remboursement des prestations indues, retenir sur les prestations futures en application de l’article L.553-2 du code de la sécurité sociale ;

— c’est à tort que le premier juge l’a condamnée à verser aux époux Y la somme de 10 977,40 € ;

— en effet, en la condamnant au paiement de cette somme après avoir procédé à différents constats et analyses, le tribunal des affaires de sécurité sociale ne tire pas les conséquences de sa motivation ; en effet si l’on écarte la compensation RSA/X et le remboursement d’avances pour 600 €, elle n’a opéré de retenue sur l’X de Mme Y que pour la somme de 3 927,54 € (et non 9 065,32 €), les autres retenues opérées s’élevant en tout à 5 067,69 € ; le total de retenues effectives depuis décembre 2011 s’élève ainsi à 8 995,23 € ; toutefois le tribunal des affaires de sécurité sociale n’étant saisi que des retenues sur l’X et sur l’aide au logement à hauteur de 1 912,08 €, elle ne peut être condamnée au remboursement d’une somme supérieure à 5 839,62 € (3 927,54 € X + 1 912,08 € aide au logement) ;

— par ailleurs, elle était fondée à opérer ces retenues sans qu’il soit besoin d’un titre exécutoire dès lors que l’article L. 553-2 du code de la sécurité sociale l’y autorisait, étant constant que le caractère frauduleux des indus a été constaté par une décision de justice et que les époux Y, qui ont effectivement contesté en partie les indus pour lesquels elle a opéré des retenues, n’ont jamais soutenu leurs contestations (cf l’historique des procédures devant le tribunal administratif)

— ainsi, si elle devait être amenée à restituer des sommes aux époux Y, leurs contestations ayant toutes fait l’objet de désistement et/ou de rejet, de nouvelles retenues seraient effectuées sur leurs prestations à venir.

Dans leurs écritures régulièrement communiquées déposées le 10 mars 2016 et à l’audience, M et Mme Y demandent à la cour, au visa d’un jugement du tribunal correctionnel du 19 mars 2013,

— de réformer le jugement entrepris en ce que le tribunal des affaires de sécurité sociale ne pouvait retenir un indu d’allocation logement de 12 465,20 €,

— au visa des articles L.553-2 et L.553-3 du code de la sécurité sociale,

— confirmant le jugement, de condamner la caisse d’allocations familiales à leur verser les prestations indues sans retenues soit la somme de 9 065,32 € au titre de l’X à devoir à Mme Y outre celle de 1 912,08 € à leur devoir, soit une somme totale de 10 977,40 € avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation devant le juge de l’exécution,

— réformant le jugement, de condamner la caisse d’allocations familiales au paiement d’une somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de leurs préjudices et en application de l’article 1382 du code civil,

— de débouter la caisse d’allocations familiales de ses autres demandes et de la condamner aux dépens.

Ils soutiennent en résumé que :

— sur le prétendu indu au titre de l’aide au logement : dans le cadre de la poursuite pour faux, le tribunal correctionnel a considéré dans son jugement du 8 juin 2011 a jugé irrecevable la constitution de partie civile de la caisse d’allocations familiales ; la caisse a alors déposé une plainte à leur encontre le 29 novembre 2011 pour obtention d’aide au logement par fraude ou fausse déclaration à hauteur de la somme totale de 11827,74€ et, par un jugement définitif du 19 mars 2013, ils ont été relaxés ; il s’ensuit que ce jugement ayant autorité de chose jugée, le tribunal des affaires de sécurité sociale ne pouvait retenir, comme il l’a fait, un montant de l’indu au titre de l’aide au logement à hauteur de 12 465,20 € ;

— sur la retenue au titre du RSA : la cour devra juger si la compensation entre les RSA et l’X était possible sans titre exécutoire ;

— sur le recouvrement abusif par la caisse d’allocations familiales de sa créance d’aide au logement : la réalité des retenues est établie par les documents produits par la caisse – relevés de situations et décomptes- et elles sont abusives dès lors qu’ils contestaient le caractère indu de l’aide au logement devant le tribunal administratif de Nantes puis devant le tribunal correctionnel, cette contestation permanente empêchant la caisse d’allocations familiales de le récupérer sur les prestations à venir ; le jugement doit être confirmé en ce que le premier juge a justement considéré qu’à défaut de titre exécutoire la caisse ne pouvait en poursuivre l’exécution forcée ; du fait du jugement de relaxe du 19 mars 2013 l’indu n’existe pas ; aucune retenue ne pouvait donc être opérée; ils contestent toutes les retenues sur leurs prestations sociales ; le jugement devra être confirmé en sa condamnation de la caisse d’allocations familiales à leur verser la somme totale de 10 977,40 €;

— ils justifient d’un préjudice matériel et moral consécutif à une faute de la caisse d’allocations familiales.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure et aux débats à l’audience du 21 mars 2016.

MOTIFS DE LA DÉCISION,

Le litige soumis à la cour porte exclusivement sur les trop perçus par les époux Y et les retenues opérées par la caisse d’allocations familiales en remboursement de ces indus au seul titre de l’X et de l’aide au logement.

Sur l’X,

Il ne fait pas débat que le 30 avril 2012 Mme Y s’est vue attribuée l’X à compter du 1er septembre 2011 jusqu’au 31 août 2016 ; elle a donc perçu un rappel d’X de 5 965,32 € pour la période de 1er septembre 2011 au 30 avril 2012 dont il a été déduit par la caisse d’allocations familiales la somme de 4 747,32 € perçue pendant la même période au titre du RSA.

Mme Y soutient en appel qu’il appartient à la cour de se prononcer sur ce point au regard du fait que la caisse d’allocations familiales ne disposait pas de titre exécutoire.

C’est à bon droit et sur des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a considéré qu’au regard du caractère subsidiaire du versement du RSA la compensation s’opérait de plein droit avec le rappel d’X perçue pour la même période en application des dispositions des articles L 262-10 du code de l’action sociale et des familles, le RSA étant considéré comme versé à titre d’avance.

Le jugement doit donc être confirmé de ce chef.

Sur l’aide au logement,

Pour contester le jugement entrepris en ce qu’il a fixé à la somme de 12 465,20€ l’indu d’aides au logement les époux Y font exclusivement valoir que :

— dans le cadre de l’instance pénale ayant donné lieu au jugement du 8 juin 2011 confirmé en appel, la caisse d’allocations familiales n’a pas été jugée créancière au titre de l’aide au logement versée qu’ils auraient indûment perçue,

— aux termes du jugement du 19 mars 2013 ils ont été relaxés du chef des poursuites de fraude et fausse déclaration en vue d’obtenir ces allocations logement,

— que dès lors, dans ces conditions et compte tenu du jugement de relaxe ayant autorité de chose jugée, le tribunal des affaires de sécurité sociale ne pouvait, comme il l’a fait, retenir un indu au titre de l’allocation logement à hauteur de 12 465,20 €.

Sur la créance de la caisse d’allocations familiales,

Il est établi, ainsi que constaté par le premier juge, que les époux Y ont perçu la somme de 10 249,02 € au titre de l’aide personnalisée au logement entre le mois de mars 2008 et le mois de novembre 2010 et celle de 2 216,18 € au titre de l’aide au logement entre le mois de décembre 2010 et le mois de juin 2011.

Cette somme correspondant à celle qui leur a été versée au titre de la location de deux appartements à compter du 14 février 2008 auprès de la société le Toit Angevin puis, à compter du mois de décembre 2010, auprès de la SCI Alentis.

Il résulte par ailleurs des documents produits et ainsi que l’expose la caisse d’allocations familiales que :

— les époux Y ont formalisé un recours devant le tribunal administratif le 26 août 2011 à l’encontre de la mise en demeure du 11 août 2011 pour avoir paiement de l’indu d’allocation logement sus visé ;

— la caisse d’allocations familiales a déposé un mémoire en défense en indiquant que la contestation de l’indu d’APL devait se faire en préalable devant la commission de recours amiable et que l’origine de l’indu se trouvait dans le fait que les loyers étaient réglés en réalité par la société Pressense créée par les époux Y et non par eux personnes physiques ;

— la caisse d’allocations familiales a alors soumis le dossier à sa commission de recours amiable qui, par décision prise le 21 février 2012 qui leur a été notifiée le 23 février 2012 (pièce 17) aux termes de laquelle :

— a constaté que depuis le mois de mars 2008 le loyer du logement était prélevé sur le compte bancaire de la société,

— a constaté la contestation des époux Y et le fait qu’ils indiquaient qu’aucune procédure n’avait statué sur le montant des sommes qu’ils devaient rembourser,

— a, au visa de divers textes (L. 351-3 du code de la construction et de l’habitation), l’APL étant une prestation soumise à condition de ressources, considéré que la situation des époux Y ne permettait pas la valorisation d’un droit APL;

— les époux Y n’ont pas formalisé de recours contre cette décision de la commission de recours amiable ;

— par ordonnance du 13 octobre 2014 le TA de Nantes a donné acte aux époux Y du désistement de leur requête faute pour eux d’avoir déposé un mémoire dans les délais impartis.

Il suit de là que, les époux Y n’ayant pas contesté devant le tribunal des affaires de sécurité sociale la décision de la commission de recours amiable de la caisse d’allocations familiales portant rejet de leur contestation de l’indu, la créance de cette dernière au titre de l’indu d’allocation logement faute d’ouverture de droit, est définitivement établie.

Le fait que, par jugement en date du le 19 mars 2013, le tribunal correctionnel d’Angers a relaxé les époux Y du chef des poursuites de fraude et fausse déclaration en vue d’obtenir ces allocations logement est sans conséquence sur cet état de fait, cette décision ne faisant en effet que constater que la fraude en vue d’obtenir lesdites allocations n’est pas établie, ce qui ne signifie pas que la somme ne soit pas due.

Le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu’il a dit que les indus perçus par M et Mme Y de la caisse d’allocations familiales au titre de l’aide au logement s’élevaient à la somme totale de 12 465,20 €.

Sur les retenues opérées par la caisse d’allocations familiales,

La caisse d’allocations familiales ne discute pas avoir opéré, au titre de ces indus, des retenues sur les prestations versées aux époux Y.

Elle précise que la cour n’est saisie que des indus d’X et d’aide au logement et à hauteur des contestations des époux Y devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à savoir à hauteur de 1 912,08 € au titre de la retenue pour trop perçu d’aide au logement, étant constant que les retenues qu’elle a effectuées au titre d’un trop perçu d’X ne s’élèvent qu’à la somme de 3 927,54 €.

Elle soutient qu’elle était en droit de procéder aux retenues

— parce qu’il s’agissait de prestations obtenues par fraude,

— parce que les époux Y n’ont pas soutenu leurs contestations sur le bien fondé des indus.

Comme le tribunal des affaires de sécurité sociale, la cour n’a été saisie par renvoi du JEX que de prestations relevant de l’X et de la majoration pour la vie autonome ainsi que sur les prestations relevant de l’allocation de logement social.

Le caractère incessible et insaisissable des prestations sociales édicté par l’article L. 553-4 du code de la sécurité sociale est sans application en l’espèce, ces dispositions s’opposant seulement, sauf dans l’hypothèse d’une fraude ou d’une fausse déclaration de l’allocataire, à toute 'saisie’ de ces prestations par un tiers, ce que n’est pas la caisse d’allocations familiales qui n’a procédé à aucune 'saisie’ mais a opéré des retenues sur les prestations qu’elle versait.

Aux termes de l’article L. 553-2 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi du 17 décembre 2008 portant financement de la sécurité sociale 2009 'tout paiement indu de prestations familiales est récupéré, sous réserve que l’allocataire n’en conteste pas le caractère indu, par retenues sur les prestations à venir ou par remboursement intégral de la dette en un seul versement si l’allocataire opte pour cette solution.

A défaut, l’organisme payeur peut, dans des conditions fixées par décret, procéder à la récupération de l’indu sur les échéances à venir dues soit au titre de l’allocation de logement mentionnée à l’article L.831-1, soit au titre de l’aide personnalisée au logement mentionnée à l’article L.351-1 du code de la construction et de l’habitation, soit au titre des prestations mentionnées au titre II du livre VIII du présent code, soit au titre du revenu de solidarité active mentionné à l’article L.262-1 du code de l’action sociale et des familles tel qu’il résulte de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le RSA et réformant les politiques d’insertion.

Par dérogations aux dispositions précédentes, lorsqu’un indu a été constitué sur une prestation versée en tiers payant, l’organisme peut, si d’autres prestations sont versées directement à l’allocataire, recouvrer l’indu sur ces prestations selon les modalités et conditions précisées par décret.[ ]'.

Ce texte, qui a eu notamment pour objet d’étendre les possibilités de contraintes délivrées par administration, prévoit deux hypothèses :

— soit une absence de contestation d’indu qui autorise sa récupération sur les prestations futures,

— soit, en cas de contestation de l’indu, la nécessité pour le créancier d’obtenir un titre exécutoire, cette loi de finances ouvrant à la caisse d’allocations familiales la possibilité d’émettre des contraintes notamment pour récupération d’indus au titre de l’allocation de logement mentionnée à l’article L.831-1 comme au titre de l’aide personnalisée au logement mentionnée à l’article L.351-1 du code de la construction et de l’habitation.

Or ainsi que plus avant rappelé, dans la mesure où les époux Y n’ont pas formé de recours à l’encontre de la décision de la commission de recours amiable de la caisse d’allocations familiales rejetant leur contestation d’indu d’allocation logement et où ils n’ont soutenu aucun de leur recours afférent aux indus objets de la mise en demeure devant le tribunal administratif, ce qui a eu pour effet de rendre la créance de la caisse d’allocations familiales certaine, les époux Y ne peuvent sérieusement contester le droit de la caisse d’allocations familiales de les récupérer sur les prestations qui leur ont été versées par la suite.

S’ils ont toujours contesté la fraude et ont été relaxés de ce chef de poursuite, les époux Y ne peuvent prétendre aujourd’hui que leur contestation, d’ailleurs limitée dans son montant, qui a été définitivement rejetée par une décision de la commission de recours amiable faute de recours dans les formes et délais prévus, soit de nature à remettre en cause la récupération d’indu sur leurs prestations versées postérieurement.

Il suit de là que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu’il a condamné la caisse d’allocations familiales à reverser aux époux Y la somme de 10 977,40€.

Le jugement doit être confirmé en toutes ses autres dispositions et notamment en ce qu’il a débouté M et Mme Y de leur demande en paiement de dommages et intérêts, faute pour eux de justifier d’une faute et d’un préjudice.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement en matière sociale par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la caisse d’allocations familiales à verser à M et Mme Y la somme de 10 977,40 €.

Statuant à nouveau de ce chef Déboute M et Mme Y de leur demande en restitution de cette somme.

Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions.

Dispense les parties du paiement du droit prévu par l’article R.144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale liquidé à la somme de 321,80 euros.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. BODIN Anne JOUANARD

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Cour d'appel d'Angers, 26 avril 2016, n° 14/00943