Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 10 mai 2017, n° 16/00799

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 1 a, 10 mai 2017, n° 16/00799
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 16/00799
Décision précédente : Tribunal de grande instance, 27 janvier 2016
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

CD/SD

MINUTE N°

Copie exécutoire à

— Me Loïc RENAUD

— Me Mathilde SEILLE

— Me Marceline ACKERMANN

Le 10.05.2017

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D’APPEL DE COLMAR PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 10 Mai 2017 Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A 16/00799

Décision déférée à la Cour : 28 Janvier 2016 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE COLMAR

APPELANTE :

SARL MEOSIS

prise en la personne de son représentant légal

XXX

Représentée par Me Loïc RENAUD, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me Y, avocat à COLMAR

INTIMEES :

EURL S-MECAELEC

prise en la personne de son représentant légal

XXX

Représentée par Me Mathilde SEILLE, avocat à la Cour

SA LOCAM prise en la personne de son représentant légal

XXX

Représentée par Me Marceline ACKERMANN, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 13 Mars 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

Mme DORSCH, Conseillère, chargée du rapport

M. ROBIN, Conseiller

En présence de : M. A B et M. C D,

magistrats stagiaires

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme ARMSPACH-SENGLE

ARRET :

— Contradictoire

— rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Par acte des 10 et 12 février 2015 l’EURL S-MECAELEC a assigné la SARL MEOSIS et la SAS LOCAM devant le tribunal de Grande instance de Colmar aux fins d’obtenir la résolution du contrat tendant à l’installation d’un site Internet, et le remboursement des loyers payés.

Par requête du 19 août 2015, la SARL MEOSIS a saisi le juge de la mise en état d’un incident tendant à voir prononcer la nullité de l’assignation, et la condamnation de la société S-MECAELEC à lui verser 3.000 € au titre des de l’article 700 du CPC.

La société requérante soulevait la nullité de l’assignation au motif que la SARL

S-MECAELEC s’est fait cumulativement représenter par deux les avocats.

La société requise répliquait que le nom de deux avocats figure sur l’assignation en raison des règles de postulation, l’un des avocats la représentant, l’autre l’assistant.

Par ordonnance du 28 janvier 2016 le juge de la mise en état du tribunal de Grande instance de Colmar a condamné la société MEOSIS à verser à la société S-MECAELEC les sommes de 500 € pour procédure abusive, et 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du CPC, et a rejeté toutes autres conclusions plus amples contraires. Il est précisé que les dépens suivront le sort des dépens au fond.

Le juge de la mise en état a conclu que l’assignation porte le nom de l’avocat postulant, et le nom de l’avocat plaidant, ce que le conseil de la SARL MEOSIS a parfaitement retranscrit dans sa requête en incident. Il estime l’indication du nom de l’avocat extérieur n’est qu’informatif, le rôle de chacun des avocats étend clairement précisé, l’un intervenant au titre de la représentation, et l’autre au titre de la plaidoirie.

Il a par ailleurs alloué 500 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive en jugeant que l’incident a été formé par un esprit procédurier.

Par déclaration du 17 février 2016, la société MEOSIS a interjeté appel à l’encontre de cette décision.

À l’appui de son recours elle fait valoir que par combinaison des articles 414 et 752 du code de procédure civile, une partie ne peut se faire représenter en justice que par une seule personne physique ou morale, et que l’assignation contient à peine de nullité la constitution de l’avocat du demandeur.

Or elle soutient que l’assignation litigieuse indique que la demanderesse est représentée par deux avocats, Maître Z du barreau de NANCY, et Maître X du barreau de COLMAR. Elle conteste que le rôle de chacun des avocats soit clairement précisé puisque la mention 'AYANT POUR AVOCAT’ est suivie du nom des deux avocats. Or elle poursuit que cette mention vaut constitution, de sorte qu’il y a bien cumulativement deux constitutions d’avocat. Si elle reconnaît la prédominance procédurale de l’avocat nancéien elle maintient que l’assignation ne précise pas quel avocat et constitué pour la société MEOSIS.

Elle conclut que cette irrégularité de fond entraîne la nullité de l’assignation, sans que la preuve d’un grief n’ait à être rapportée.

Enfin elle fait valoir que soulever une irrecevabilité de l’assignation ne peut être considérée comme un abus de droit justifiant une condamnation pour procédure abusive. Elle estime la motivation du premier juge erronée sur ce point.

Par conclusions du 12 mai 2016 la SARL MEOSIS demande à la cour de déclarer son appel recevable et bien fondé, infirmer le jugement entrepris, de dire et juger l’assignation du 10 février 2015 à la demande de la société S-MECAELEC à son encontre, nulle et de nul effet, et de condamner la société S-MECAELEC aux entiers frais et dépens de l’instance ainsi qu’au paiement d’une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du CPC.

Par conclusions responsives du 30 juin 2016 la société S-MECAELEC réplique que son assignation n’est entachée d’aucune irrégularité, puisque Maître X est indiquée comme postulante, et que Maître Z est donc nécessairement le plaidant.

Elle reconnaît que le défaut de capacité de l’avocat de représenter son client devant la juridiction est une nullité de fond, mais qu’à l’inverse lorsque plusieurs avocats admis à postuler devant la juridiction sont constitués, il ne s’agit que d’une nullité de pure forme. Or elle affirme que les deux avocats mentionnés à l’acte auraient pu la représenter devant la chambre commerciale du TGI de Colmar.

Elle conteste l’existence du moindre grief, qui n’est au demeurant ni établi, ni même allégué, dès lors que Maître X est indiquée comme postulante, et qu’il n’existe aucun doute sur l’identité de l’avocat constitué. Elle ajoute que le grief a été régularisé dans les écritures ultérieures devant le juge de la mise en état.

Elle conteste la lecture faite par son adversaire de la jurisprudence citée, et souligne que dans l’arrêt de la cour d’appel de Colmar du 25 septembre 2013 les mentions de l’acte étaient critiquables puisqu’il était indiqué que le demandeur était représenté par Me LEVY avocat plaidant, et par Me FINCK, qui se constituent ; mais que surtout l’un des avocats n’était pas admis à postuler devant le TGI de Saverne, ce qui emportait de facto une nullité de fond, contrairement à la présente espèce.

Enfin la société S-MECAELEC conclut à la confirmation de la condamnation à dommages et intérêts pour procédure abusive, et réclame 500 € pour procédure abusive d’appel. Elle fait valoir qu’elle se trouve dans une situation délicate pour avoir payé un site Internet inexistant, et qu’elle doit subir les indélicatesses procédurales de l’appelante, qui pour des raisons dilatoires entend gagner du temps, et ne pas rembourser les sommes dues. Elle estime que l’incident procédural n’a aucun sens. Elle conclut qu’une amende civile doit être prononcée au motif que la conduite du procès nécessite de la part des parties et auxiliaires de justice un minimum de respect, comprenant notamment l’obligation de ne pas surcharger les magistrats et greffiers de demandes sans intérêt mobilisant des moyens matériels et humains importants.

L’intimée demande à la cour de déclarer l’appel mal fondé, de constater que l’assignation indique que Me X assure les fonctions de postulation, de constater que seul un avocat est constitué, qu’aucun grief n’est encouru, et qu’en toute hypothèse Me Y s’est constitué auprès de Me X, de dire qu’en toute hypothèse en cas de double constitution par deux avocats admis à représenter une partie en justice devant une juridiction, la sanction est une nullité pour vice de forme.

Elle demande par conséquent à la cour de débouter la société S-MECAELEC de ses entières des demandes, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et de condamner la société S-MECAELEC à lui verser à hauteur de cour 1.500 € au titre de l’article 700 du CPC, et 500 € pour procédure abusive, de condamner la société S-MECAELEC aux entiers dépens, et de dire que ces sommes seront dues indépendamment du fonds de la décision à intervenir et enfin de condamner la société S-MECAELEC à une amende civile.

La SAS LOCAM également citée dans la procédure au fond, déclare s’en remettre à justice sur le bien-fondé de l’appel. Par conclusions reçues le 6 mars 2017, elle demande à la cour de statuer ce que de droit sur l’appel de la société MEOSIS contre l’ordonnance du 28 janvier 2016, et de la condamner ou qui mieux le devra, aux entiers dépens d’appel.

Par ordonnance du 30 septembre 2016, l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 13 mars 2017.

MOTIFS : • Sur la nullité de l’assignation :

Attendu que par application de l’article 414 du code de procédure civile une partie n’est admise à se faire représenter que par une seule personne physique ou morale habilitée par la loi ;

Que par ailleurs selon l’article 752 du code de procédure civile l’assignation contient à peine de nullité la constitution de l’avocat du demandeur ;

Attendu qu’en l’espèce l’assignation litigieuse a été délivrée le 10 février 2015 à la demande de l’EURL S-MECAELEC 'ayant pour avocat’ : • Maître Damien Z domicilié à Nancy • Maître Nadia X avocat au barreau de Colmar – avocate postulante ;

Attendu que l’assignation mentionne le nom de deux avocats sans expressément mentionner que Maître Z est celui qui est constitué pour la société demanderesse ;

Que la constitution de l’avocat doit résulter de l’assignation sans qu’il soit nécessaire de déduire de l’adjonction des termes 'avocate postulante’ à la suite du nom du 2d avocat, que c’est le premier qui est constitué ;

Qu’il s’ensuit que l’assignation litigieuse est entachée de nullité ;

Attendu cependant que contrairement aux affirmations de l’appelante il s’agit, non pas d’une nullité de fond, mais d’une nullité de pure forme au sens de l’article 114 du code de procédure civile ;

Qu’en application de ce texte la nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour celui qui l’invoque de prouver l’existence d’un grief que lui cause l’irrégularité et ce même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public ;

Qu’en l’espèce force est de constater que l’appelante n’établit l’existence d’aucun grief de sorte que la nullité ne saurait être prononcée ;

Attendu en dernier lieu que la nullité est selon l’article 115 du code de procédure civile susceptible d’être régularisée, ce qui est le cas en l’espèce dans les conclusions ultérieures déposées par la société S-MECAELEC devant le juge de la mise en état ;

Attendu qu’il résulte de ce qui précède que l’ordonnance entreprise est, par substitution de motifs, confirmée ; • Sur la demande de dommages et intérêts :

Attendu que le juge de la mise en état a condamné la société MEOSIS à payer à son adversaire 500 € à titre de dommages et intérêts au motif que l’incident a été formé par un esprit procédurier ;

Que ce faisant le juge n’a pas caractérisé la faute commise par la société MEOSIS de sorte que l’ordonnance entreprise doit être infirmée, et la société S-MECAELEC déboutée de ce chef de demande ;

Attendu qu’à défaut de démonstration de l’existence d’une faute, de la survenance d’un préjudice à son détriment, et d’un lien de causalité entre les deux, la demande de dommages et intérêts, formée à hauteur de cour par l’intimée pour procédure abusive ne peut être que rejetée ; • Sur le surplus :

Attendu que l’ordonnance déférée est confirmée s’agissant de la condamnation de la société MEOSIS au paiement d’une somme de 500 € à titre de frais irrépétibles, et du sort des dépens qui suivront celui des dépens au fond ;

Attendu que l’appelante qui succombe est condamnée aux entiers frais et dépens de la procédure d’appel ;

Que l’équité ne commande pas de faire application à son profit de l’article 700 du code de procédure civile ;

Qu’à l’inverse l’équité commande d’allouer une somme de 1.500 € sur ce même fondement à l’EURL S-MECAELEC ;

PARCESMOTIFS

La Cour,

Infirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle condamne la société MEOSIS à verser à la société S-MECAELEC la somme de 500 € pour procédure abusive,

Statuant à nouveau sur le chef infirmé,

Déboute l’EURL S-MECAELEC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses autres dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la SARL MEOSIS aux entiers frais et dépens de la procédure d’appel,

Condamne SARL MEOSIS à payer à l’EURL S-MECAELEC la somme de 1.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de toutes leurs autres prétentions.

Le Greffier : la Présidente :

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Textes cités dans la décision

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