Cour de Cassation, Chambre criminelle, du 18 mai 2004, 03-84.840, Publié au bulletin

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le changement d’affectation d’un immeuble à usage de foyer pour étudiants en résidence-hôtel ne constitue une infraction au sens des articles L. 421-1, alinéa 2, et L. 480-4 du Code de l’urbanisme que si l’existence des travaux ayant eu pour effet ce changement de destination est caractérisée.

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-huit mai deux mille quatre, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GAILLY, les observations de Me de NERVO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

— X… Christian,

contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, 13ème chambre, en date du 23 juin 2003, qui, pour infraction au Code de l’urbanisme, l’a condamné à 100 000 euros d’amende, et a ordonné, sous astreinte, la mise en conformité des lieux ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 111-2, 111-3 et 111-4 du nouveau Code pénal, L. 160, L. 421-1, L. 480-4 et suivants du Code de l’urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

« en ce que l’arrêt confirmatif de la cour d’appel de Paris a déclaré Christian X… coupable d’avoir »exécuté sur une construction existante des travaux ayant pour effet d’en changer la destination en remplaçant un foyer pour étudiants par une résidence service" sans être en conformité avec le permis de construire, l’a condamné à une amende délictuelle de 100 000 euros et a ordonné à son encontre la mise en conformité des lieux ou ouvrages dans un délai d’un an à compter du jugement définitif sous astreinte de 30 euros par jour de retard ;

« aux motifs que le prévenu admet, dans ses écritures, que le permis de construire litigieux a été délivré pour la construction de deux bâtiments à usage de foyer pour étudiants ;

que le 25 novembre 1997, le prévenu, en qualité de gérant de la SARL Cedibat, a réalisé, avec la société Groupe France Epargne, ci-après GFE, une convention aux fins de commercialisation des lieux en construction auprès de clients susceptibles d’investir dans des produits immobiliers ; que, le 15 décembre 1998, en qualité de gérant de la SCI Jaurès-Poincaré dénommée la Société de Construction-Vente, il a souscrit, avec la société Dometud, un engagement de prise de bail commercial de logements d’une résidence para-hôtelière, Le Colisée, offrant aux résidents des services en plus de l’hébergement ; qu’ainsi Christian X… a détourné la destination des lieux mentionnée dans le permis de construire litigieux ; que la prévention est fondée ;

« et aux motifs adoptés qu’il est constant que la SCI Jaurès-Poincaré avait obtenu un permis de construire pour un foyer d’étudiants, alors qu’il a été constaté lors de la visite de récolement que cette résidence était en réalité une résidence service ; qu’il appartenait à la SCI Jaurès-Poincaré de veiller au respect des dispositions du permis de construire qui lui avait été accordé ; que le changement de destination constaté caractérise en tous ses éléments le délit d’exécution de travaux non conformes au permis de construire ;

« alors, d’une part, que le principe de la légalité des délits et des peines, qui impose une interprétation stricte de la loi pénale, s’oppose à ce que l’incrimination prévue à l’article L. 480-4 du Code de l’urbanisme réprimant l’exécution de travaux en méconnaissance des obligations imposées par les autorisations de construire délivrées en conformité avec les règlements d’urbanisme, soit étendue au cas du »détournement de la destination des lieux", en sorte que les agissements imputés à faute à Christian X… (arrêt, page 5), ne peuvent donner lieu à un renvoi de ce dernier de ce chef devant la juridiction correctionnelle et justifier une déclaration de culpabilité ; qu’en décidant du contraire, les juges d’appel ont violé les textes susvisés ;

« alors, d’autre part, que la loi pénale est d’interprétation stricte et que les jugements doivent être motivés ; qu’en l’espèce l’incrimination de l’article L. 480-4 du Code de l’urbanisme réprimant l’exécution de travaux en méconnaissance des obligations imposées par les autorisations de construire délivrées en conformité avec les règlements d’urbanisme, la cour d’appel avait l’obligation de caractériser l’infraction visée par la citation en tous ses éléments et notamment d’indiquer quels avaient été les travaux entrepris par le prévenu ou la personne morale dont il est pénalement responsable, élément matériel du délit, ou exécutés sur une construction existante ayant eu pour effet d’en changer la destination ; qu’en s’abstenant de procéder à cette recherche la cour d’appel a insuffisamment motivé sa décision et l’a entachée d’un manque de base légale au regard des articles visés au moyen ;

« alors, de troisième part, qu’il résulte des constatations de la décision de première instance que les juges du fond n’étaient pas saisis d’une poursuite du chef d’infraction au plan d’occupation des sols au demeurant non établie mais d’une poursuite pour avoir »exécuté sur une construction existante des travaux ayant pour effet d’en changer la destination en remplaçant un foyer pour étudiants par une résidence service" ; la cour d’appel s’est prononcée sur un chef de poursuite dont elle n’était pas saisie, violant ainsi les textes susvisés ;

« qu’au demeurant un changement d’affectation des lieux n’équivaut pas à une modification de la destination des lieux prévue par le permis de construire sauf si cette affectation est contraire aux dispositions du plan d’occupation des sols ; qu’en s’abstenant d’indiquer les raisons qui l’ont conduit à considérer que le fait d’offrir des services en plus de l’hébergement constituait une infraction au plan d’occupation des sols de la ville de Paris, la cour d’appel de Paris a entaché sa décision d’une insuffisance de motivation et d’un défaut de base légale au regard des textes visés au moyen ;

« qu’enfin la démolition des ouvrages ou la réaffectation du sol en vue du rétablissement des lieux dans leur état antérieur incombe, en vertu des articles L. 480-4 et L. 480-5 du Code de l’urbanisme, au bénéficiaire des travaux ou de l’utilisation irrégulière du sol à l’époque où l’infraction a été commise et qu’il n’importe que le prévenu ait perdu ultérieurement cette qualité ; qu’en l’espèce en s’abstenant de rechercher ainsi que le prévenu l’avait fait valoir dans ses conclusions demeurées sans réponse qu’il n’était plus le bénéficiaire de l’utilisation de l’immeuble à la date de l’infraction mais qu’il s’agissait de la société Dom’Ville’Services titulaire d’un bail sur ce dernier, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de réponse à conclusions et a méconnu le principe et les textes susvisés" ;

Vu l’article 593 du Code de procédure pénale, ensemble les articles L. 421-1 et L. 480-4 du Code de l’urbanisme ;

Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l’infraction qu’il réprime ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que Christian X… a été poursuivi, sur le fondement des articles L. 421-1 et L. 480-4 et suivants du Code de l’urbanisme, pour « avoir exécuté sur une construction existante des travaux ayant pour effet d’en changer la destination en remplaçant un foyer pour étudiants par une résidence para-hôtelière sans être en conformité avec le permis délivré » ; que, pour déclarer le prévenu coupable de ce délit, l’arrêt attaqué retient que les contrats qu’il a conclus relatifs à la commercialisation puis à la prise à bail de l’immeuble établissent qu’il a détourné la destination des lieux mentionnée au permis de construire ;

Mais attendu qu’en l’état de ces seules énonciations, qui ne caractérisent pas l’élément matériel du délit visé à la prévention, dont l’existence était contestée par les conclusions du prévenu, ni ne restitue aux faits leur exacte qualification, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Paris, en date du 23 juin 2003, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Gailly conseiller rapporteur, MM. Farge, Blondet, Palisse, Le Corroller, Castagnède conseillers de la chambre, Mme Beaudonnet, M. Chaumont conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Chemithe ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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