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Sur la décision
| Référence : | TJ Paris, 21 avr. 2023, n° 21/52582 |
|---|---|
| Numéro(s) : | 21/52582 |
Sur les parties
| Avocat(s) : | |
|---|---|
| Cabinet(s) : | |
| Parties : |
Texte intégral
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
JUGEMENT rendu selon la PROCEDURE
ACCELEREE AU FOND le 21 avril 2023 N° RG 21/52582 – N°
Portalis
352J-W-B7F-CTZM
N par Caroline FAYAT, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, N° : 4
Assistée de Pascale GARAVEL, Greffier. Assignation du : 15 Mars 2021 et 23
Juin 2022
DEMANDERESSE
LA VILLE DE PARIS prise en la personne de Madame la Maire de PARIS, Madame X Y
Place de l’Hôtel de Ville
75004 PARIS
représentée par Maître Bruno MATHIEU de la SELAS MATHIEU ET ASSOCIE, avocats au barreau de PARIS – #R0079
DEFENDEUR
Monsieur Z AA
Demeurant 29 boulevard Lord Duveen
13008 MARSEILLE
représenté par Me Lorène DERHY, avocat au barreau de PARIS
- #E1320
DÉBATS
A l’audience du 20 Mars 2023, tenue publiquement, présidée par Caroline FAYAT, Juge, assistée de Pascale GARAVEL, Greffier,
délivrées le: 1/2727/04/2013 2 Copies exécutoires
Page 1
Nous, Président,
Après avoir entendu les conseils des parties,
EXPOSE DU LITIGE
Par assignation en date du 23 juin 2022, enregistrée sous le numéro de RG 21/52582, la Ville de Paris prise en la personne de Madame la Maire de Paris a fait assigner Monsieur Z AA, né le […] à […] devant le président du tribunal judiciaire de Paris saisi selon la procédure accélérée au fond, sur le fondement notamment des dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, concernant l’appartement situé […], […].
La Ville de Paris demande de :
-condamner Monsieur Z AA à payer à la Ville de Paris une amende civile de 50 000 euros conformément aux dispositions de l’article L 631-7 du code de la construction et de l’habitation;
-ordonner le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation, sis […], […], sous astreinte de 256 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai qu’il plaira au tribunal de fixer;
-se réserver la liquidation de l’astreinte ;
-condamner Monsieur Z AA à payer à la Ville de Paris la somme de 1 500 euros au titre de l’article
700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens;
Au soutien de ses prétentions, la Ville de Paris fait valoir que Monsieur Z AA a donné en location meublée de courte durée à une clientèle de passage l’appartement situé sis […], […]. La Ville de Paris expose que cet appartement n’est pas la résidence principale de la partie défenderesse, qu’il est à usage exclusif d’habitation et que la location meublée de courte durée à une clientèle de passage, sans autorisation préalable, est un changement d’usage qui doit être sanctionné.
Par conclusions déposées et soutenues à l’audience, Monsieur
Z AA demande de :
A titre principal:
-débouter la Ville de Paris de l’intégralité de ses demandes; A titre subsidiaire :
-ramener le montant de l’amende civile à une somme qui ne pourrait excéder 1.000 euros ; En tout état de cause :
-condamner la Ville de Paris à payer la somme de 2.400 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
-ordonner que les parties conservent la charge de leurs frais de procédure et leurs dépens.
Page 2
La partie défenderesse fait valoir que ce bien constituait sa résidence principale au moment des locations. A titre subsidiaire et s’agissant du quantum de l’amende civile, elle invoque sa bonne foi, sa collaboration avec les services de la Ville de Paris, la cessation des locations de courte durée et le retour du bien à
l’usage d’habitation.
Il est renvoyé aux dernières écritures des parties et à leurs observations à l’audience pour plus ample exposé des faits, moyens et prétentions qui y sont contenus.
La date de délibéré a été fixée au 21 avril 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de condamnation sur le fondement des dispositions des articles L 631-7 et L.651-2 du code de la construction et de l’habitation
L’article L.631-7 du code de la construction et de l’habitation dans sa rédaction temporellement applicable prévoit :
< La présente section est applicable aux communes de plus de 200 000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. Dans.ces communes, le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est, dans les conditions fixées par l’article L.631-7-1, soumis à autorisation préalable.
Constituent des locaux destinés à l’habitation toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de.l’article L. 632-1 ou dans le cadre d’un bail mobilité conclu dans les conditions prévues au titre Ier ter de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.
Pour l’application de la présente section, un local est réputé à usage d’habitation s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. Cette affectation peut être établie par tout mode de preuve. Les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au ler janvier 1970 sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés.
Toutefois, lorsqu’une autorisation administrative subordonnée à une compensation a été accordée après le 1er janvier 1970 pour changer l’usage d’un local mentionné à l’alinéa précédent, le local autorisé à changer d’usage et le local ayant servi de compensation sont réputés avoir l’usage résultant de l’autorisation.
Sont nuls de plein droit tous accords ou conventions conclus en violation du présent article.
Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage au sens du présent article ».
Page 3
L’alinéa premier de l’article L.651-2 du code de la construction et de l’habitation dans sa rédaction temporellement applicable prévoit que :
< Toute personne qui enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 euros par local irrégulièrement transformé. »
Conformément à l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à la Ville de Paris, d’établir:
-l’existence d’un local à usage d’habitation, un local étant réputé à usage d’habitation si la preuve est apportée par tout moyen qu’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés ;
-un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile.
Il est en outre constant que, s’agissant des conditions de délivrance des autorisations, la Ville de Paris a adopté, par règlement municipal et en application de l’article L.631-7-1 du code de la construction et de l’habitation, le principe d’une obligation de compensation par transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage, obligation de compensation dont il n’est pas allégué qu’elle a été mise en œuvre.
En l’espèce, il est constant comme résultant des écritures et observations orales des parties, concordantes sur ce point, que le bien immobilier situé […], […] qui était affecté à un usage d’habitation au sens de l’article L 631-7 du code de la construction et de l’habitation, a fait l’objet de locations meublées de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile alors qu’il ne constituait pas la résidence principale de la partie défenderesse.
Sur la qualification de résidence principale ou secondaire :
Selon l’article L.631-7-1 A du code de la construction et de l’habitation: «[…] Lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986,
l’autorisation de changement d’usage prévue à l’article L. 631-7 du présent code ou celle prévue au présent article n’est pas nécessaire pour le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile ».
Il appartient à la partie défenderesse qui invoque les dispositions susvisées d’établir la preuve que le local litigieux constitue sa résidence principale.
Page 4
Aux termes des dispositions de l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version applicable à l’espèce, la résidence principale est entendue comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation.
En l’espèce, Monsieur Z AA est propriétaire de l’appartement litigieux […], […], ainsi qu’il résulte du relevé de propriété qu’il a acquis le 9 juin 2017.
La Ville de Paris qui estime que le local ne constitue pas la résidence principale de Monsieur Z AA fait valoir que les services fiscaux lui ont indiqué que la résidence principale de Monsieur Z AA était située 11 rue Maison Dieu, 75014 Paris, que la porte de la porte d’entrée comporte une boîte à clé, que la gardienne de l’immeuble a confirmé que le défendeur loue le bien à des clients de passage toute l’année, et que le relevé transmis par Airbnb démontre de la location du bien 178 nuitées en 2018 et 148 nuitées en 2019 ce qui exclut une occupation de plus de 8 mois par an.
Toutefois, il ressort des fiches de paie versées à la procédure portant l’adresse du local et de l’attestation de Monsieur AB, président de la société qui l’employait, que de 2018 à 2019, Monsieur Z AA a travaillé en qualité de de directeur général au sein de la société SPORTBAK dont le siège social est à […] et qu’il a été amené à effectuer de nombreux déplacements professionnels dans le Sud de la France et aux Etats- Unis. Ces déplacements sont justifiés par le production du planning 2019 et par les mails justifiant des dates des déplacements durant 190 jours.
Dès lors, Monsieur Z AA justifie pouvoir bénéficier de l’exception prévue à l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 au titre de l’obligation professionnelle.
Par ailleurs, Monsieur Z AA verse de nombreuses factures DELIVEROO, UBER, TXFY, BOLT datées de 2018 et 2019 démontrant une occupation effective de son appartement tout au long de ces deux années.
Enfin, Monsieur Z AA démontre que l’appartement situé 11 rue Maison Dieu, 75014 Paris qu’il occupait en qualité de locataire avant l’acquisition du local litigieux a été occupé entre juin 2017 et avril 2020 par ses parents qui effectuaient de nombreux voyages entre […], lieu de leur résidence principale et Paris, ainsi qu’en atteste les billets de train versés à la procédure et l’attestation établie par Madame AC AA.
Il résulte de tout ce qui précède que Monsieur Z AA établit de manière suffisante, bénéficier de l’exception prévue à l’article l’article 2 de la loi du 6 juillet 1989 au titre de l’obligation professionnel pour se prévaloir des dispositions de l’article l’article L. 631-7-1 A du code du tourisme.
Page 5
Dans ces conditions, il convient de rejeter la demande de la Ville de Paris tendant à voir condamner Monsieur Z AA au paiement d’une amende civile de 50.000,00 euros, sans qu’il ait lieu à examiner les autres moyens des parties.
Sur la demande de retour à l’usage d’habitation du local litigieux :
Il résulte des dispositions de l’article 651-2 du code de la construction et de l’habitation que le président du tribunal ordonne le retour à l’usage d’habitation du local transformé sans autorisation, dans un délai qu’il fixe. A l’expiration de celui-ci, il prononce une astreinte d’un montant maximal de 1 000 euros par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé. Le produit en est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé.
Au cas d’espèce, Monsieur Z AA verse au contrat de bail du 1er février 2022 à titre de résidence principale aux termes duquel il donne l’appartement situé […], […] en location à Madame AD AE pour une durée d’un an, renouvelable.
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’ordonner le retour à l’habitation du local litigieux.
Sur les mesures accessoires :
L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge
d’une autre partie.
La Ville de Paris, partie perdante, supportera la charge des dépens.
L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
La Ville de Paris devra verser une indemnité que l’équité commande de fixer à 1 500 euros au titre des frais irrépétibles.
En application des articles 481-1 6° et 514 alinéa 2 du code de procédure civile, la présente décision est de droit assortie de l’exécution provisoire
PAR CES MOTIFS,
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique,
Rejette la demande de condamnation à une amende civile sur le fondement des dispositions des articles L 631-7 et L.651-2 du code de la construction et de l’habitation ;
Page
Rejette la demande portant sur le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation situés […], […];
Condamne la Ville de Paris à payer à Monsieur Z AA la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la Ville de Paris aux dépens ;
Rappelle que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit.
Fait à Paris le 21 avril 2023
Le Greffier, Le Président,
Pascale GARAVEL Caroline FAYAT
て
Page 7
N° RG 21/52582 – N° Portalis 352J-W-B7F-CTZMN
EXPÉDITION exécutoire dans l’affaire :
Demanderesse: Commune Ville de Paris
contre
Défendeur M. Z AA
EN CONSÉQUENCE, LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE mande et ordonne :
A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite décision à exécution,
Aux Procureurs Généraux et aux Procureurs de la
République près des Tribunaux Judiciaires d’y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En foi de quoi la présente a été signée et délivrée par nous Directeur des services de greffe judiciaires soussigné au Greffe du Tribunal judiciaire de Paris
B I R
p/Le Directeur des services de greffe judiciaires 20150818
8 ème page et dernière
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