Cour d'appel de Lyon, 14 janvier 2016, n° 14/00836

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Texte intégral

R.G : 14/00836

Décision du

Tribunal d’Instance de VILLEURBANNE

Au fond

du 20 janvier 2014

RG : 11-1300282

XXX

X

X

C/

SA LEROY MERLIN FRANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6e Chambre

ARRET DU 14 Janvier 2016

APPELANTS :

M. D X

né le XXX à BRON

XXX

XXX

Représenté par Me Patrick ANTON, avocat au barreau de LYON

Mme Z O K épouse X

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentée par Me Patrick ANTON, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

SA LEROY MERLIN FRANCE

XXX

XXX

Représentée par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON

Assistée de Me Philippe SIMONEAU, avocat au barreau de LILLE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 05 Novembre 2014

Date des plaidoiries tenues en audience publique :

17 Novembre 2015

Date de mise à disposition : 14 Janvier 2016

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— F G, président

— Olivier GOURSAUD, conseiller

— Catherine CLERC, conseiller

assistés pendant les débats de Martine SAUVAGE, greffier

A l’audience, F G a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par F G, président, et par Martine SAUVAGE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 22 juillet 2011 M. D X et Mme Z X née K ont passé commande auprès de la société Leroy Merlin France de la fabrication, de la livraison et de la pose de menuiseries et de volets pour un montant total de 15 516,41 euros. Ils ont versé un acompte de 3 100 euros et ont réglé le solde du coût des prestations le 15 novembre 2011.

Par acte d’huissier de justice du 6 novembre 2013, se plaignant d’une exécution défectueuse du contrat, ils ont fait assigner la société Leroy Merlin devant le tribunal d’instance de Villeurbanne afin d’obtenir sa condamnation à leur verser la somme de 6 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de l’impossibilité de disposer de leur appartement compte tenu des fautes commises par la défenderesse, outre 3 000 euros de dommages-intérêts pour la période postérieure au 5 juin 2012 et 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire du 20 janvier 2014 le tribunal d’instance de Villeurbanne les a déboutés de leurs demandes de dommages-intérêts et de leur demande en application de l’article 700 du code de procédure civile et a laissé les entiers dépens de l’instance à leur charge.

Il a relevé qu’ils se fondaient pour établir les manquements de la société Leroy Merlin uniquement sur des mises en demeure qu’ils avaient rédigées soit directement, soit par l’intermédiaire de leur conseil, à l’exclusion de tout autre élément de preuve comme un constat d’huissier ou même d’attestations pour démontrer à la fois l’existence et l’étendue des manquements allégués. Il a ajouté que le préjudice lié à l’impossibilité de disposer de leur appartement de novembre 2011 à mai 2013 n’était pas prouvé.

M. D X et Mme Z X née K ont interjeté appel par déclaration reçue au greffe le 31 janvier 2014.

Aux termes de leurs conclusions déposées par voie électronique le 26 septembre 2014 M. D X et Mme Z X née K demandent à la cour, au visa des articles 1134 et suivants du code civil, de :

— réformer le jugement entrepris

— constater l’exécution défectueuse du contrat

— constater le retard dans l’exécution

— condamner la société Leroy Merlin à leur verser la somme de 6 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’impossibilité de disposer de leur appartement compte tenu des fautes qu’elle a commises

— la condamner à leur verser la somme complémentaire de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts compte tenu du préjudice subi postérieurement au 5 juin 2012, conséquence des pertes de temps imposées à M. X

— la condamner à leur verser la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile

— la condamner en tous les dépens.

Ils font valoir :

— qu’ils ont adressé trois mises en demeure à la société Leroy Merlin par lettres recommandées avec accusé de réception des 28 décembre 2011 et 24 juillet 2013 mais qu’aucune réponse ne leur a été apportée

— que le contenu de ces trois lettres recommandées n’est pas contesté

— qu’ils établissent la preuve d’une exécution défectueuse et tardive de la convention et de son exécution de mauvaise foi par le moyen des trois attestations qu’ils versent aux débats, démontrant que ce n’est qu’en juin 2012 que l’installation des portes fenêtres a pu avoir lieu leur permettant de vivre enfin dans leur appartement

— que la société Leroy Merlin s’est totalement désintéressée du procès ; qu’elle s’empare d’une erreur de plume contenue dans leurs conclusions pour prétendre à l’incohérence de leur argumentation

— que les attestations de leurs parents qui témoignent les avoir hébergés ne sont pas de complaisance

— que la preuve de leur préjudice est bien rapportée sur la base d’une privation de jouissance pendant sept mois et d’une valeur locative de 850 euros

— que leur préjudice complémentaire est constitué par l’obligation dans laquelle M. D X s’est trouvé de s’absenter de son travail à de nombreuses reprises pour se rendre sur place à l’occasion des multiples interventions des poseurs.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 19 septembre 2014 la SA Leroy Merlin France sollicite la confirmation du jugement et la condamnation solidaire des époux X à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux entiers dépens, ceux d’appel distraits au profit de Me Rose, avocat sur son affirmation de droit.

Elle observe :

— que les écritures des appelants contiennent des incohérences et des contradictions s’agissant de la date à laquelle leur préjudice a prétendument pris fin

— que les époux X ne justifient pas de l’envoi effectif des mises en demeure, la dernière datant du 24 juillet 2013 alors que les travaux étaient déjà terminés depuis longtemps

— qu’ainsi que l’observe le tribunal cette lettre ne justifie en rien d’un manquement qu’elle aurait commis, dès lors qu’elle est unilatérale

— que la force probante des attestations produites est limitée dans la mesure où elles émanent des deux parents de l’un des demandeurs, qu’elles sont rédigées dans les mêmes termes et que leur sincérité est douteuse

— à titre très subsidiaire, qu’il n’est pas justifié du préjudice de jouissance invoqué, s’agissant tant de la valeur locative que de la superficie de l’appartement

— que la perte de temps n’est pas en soi un préjudice indemnisable et que le quantum de 3 000 euros est complètement fantaisiste.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 novembre 2014 et l’affaire a été fixée à l’audience du 17 novembre 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les époux X se plaignent de l’exécution défectueuse du contrat passé le 22 juillet 2011 avec la société Leroy Merlin.

Afin d’établir les faits qu’ils allèguent ils versent aux débats les trois lettres recommandées avec avis de réception qu’ils ont adressées à cette société.

Dans la lettre recommandée du 28 décembre 2011 ils font état de ce qu’après la livraison et la pose des menuiseries et volets qu’ils ont commandés, le 16 novembre 2011, ils ont découvert de multiples erreurs :

— tous les volets sont trop courts

— les deux volets des portes fenêtres sont trop courts et trop larges

— les volets sont électriques et à interrupteur alors que la commande portait sur des volets électriques et à télécommande

— les deux portes fenêtres sont trop petites et ne peuvent être installées; elles n’ont pas de seuil, ce qui impose un obstacle de 71 millimètres de haut pour aller sur le balcon

— le poteau reliant les deux portes fenêtres est trop fin et ne respecte pas les critères de façade de l’immeuble; il ne permet pas la fixation des coulisses.

Ils ajoutent qu’ayant préparé le chantier pour le 15 novembre 2012 en déposant et évacuant les anciennes menuiseries et volets pour la livraison du lendemain, ils n’ont pu rester habiter chez eux en raison d’une ouverture de 4,2 m de large correspondant aux portes fenêtres qui n’ont pu être installées du fait des erreurs commises dans les mesures.

Dans la lettre expédiée le 24 juillet 2013 à la société Leroy Merlin les époux X indiquent que des livraisons se sont succédées jusqu’au 11 juillet 2013 et qu’à cette date de nouveaux problèmes sont apparus. Le même jour leur avocat a adressé une mise en demeure à la société Leroy Merlin, signalant que les difficultés n’étaient toujours pas réglées et que ses clients n’avaient pas pu occuper leur appartement du 18 novembre 2011 jusqu’à la fin du mois de mai 2013.

Dans leurs écritures devant la cour les époux X prétendent que ce courrier contient une erreur de plume et qu’il convient de lire jusqu’à la fin du mois de mai 2012, mais dans le jugement déféré le tribunal a bien mentionné qu’ils invoquaient un préjudice lié à l’impossibilité de disposer de leur appartement de novembre 2011 à mai 2013.

Si la société Leroy Merlin ne peut arguer n’avoir pas reçu les trois lettres de réclamation émanant des époux X ou de leur conseil puisque les accusés de réception signés de ces envois sont produits aux débats, en revanche les appelants ne sauraient déduire de son silence qu’elle acquiesce à leurs doléances et reconnaît ses manquements.

Ainsi que l’a relevé le tribunal, ces mises en demeure, qui émanent d’eux-mêmes ou de leur conseil, ne peuvent permettre à elles seules de prouver les faits allégués.

Il est en outre étonnant que les requérants n’aient pas songé à faire effectuer un constat permettant d’établir la preuve des différents défauts allégués, les mettant selon eux dans l’impossibilité d’occuper leur appartement, et aient attendu un an et demi après leur première lettre de réclamation pour adresser une mise en demeure à la société Leroy Merlin, alors que les désordres dénoncés n’avaient selon eux pas encore été réglés.

Les appelants versent devant la cour trois attestations rédigées en mars et juin 2014 :

— celle de M. B X, qui déclare avoir constaté de novembre 2011 à mai 2012 les nombreux problèmes rencontrés par son fils pour la pose des deux portes fenêtres du séjour, remplacées par une bâche, et ajoute avoir dû héberger ses enfants pendant cette période

— celle de Mme L X qui confirme les propos de son mari

— celle de M. J K qui déclare avoir été présent le 15 novembre 2011 lors de la réception de la commande effectuée chez Leroy Merlin, ajoute que la pose des éléments commandés n’a pu être effectuée en totalité car les dimensions ne correspondaient pas et affirme avoir hébergé ses enfants jusqu’au 5 juin 2012 en alternance avec les parents de son gendre.

Ces témoignages, qui émanent tous de la proche famille des appelants, ont été rédigés longtemps après les faits et sont peu circonstanciés, ne permettent pas d’établir la réalité, l’ampleur et l’origine des défauts invoqués, ni d’expliquer que la situation a perduré pendant de nombreux mois sans autre intervention de leur part.

Le décision déférée, qui rappelle à juste titre les dispositions de l’article 9 du code de procédure civile selon lesquelles il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, doit donc être confirmée en ce qu’elle a débouté les époux X de leurs demandes de dommages et intérêts au motif qu’ils ne rapportaient la preuve ni des manquements allégués ni du préjudice subi.

Les circonstances du litige justifient qu’il ne soit pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la SA Leroy Merlin.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Confirme le jugement rendu le 20 janvier 2014 par le tribunal d’instance de Villeurbanne.

Ajoutant,

Déboute la SA Leroy Merlin de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette toutes autres demandes.

Condamne M. D X et Mme Z X née K aux dépens de la procédure d’appel et dit que Me Rose, avocat, pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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