Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 26 février 2019, n° 17/13117

  • Délai pour réaliser les opérations de saisie-contrefaçon·
  • Volonté de profiter des investissements d'autrui·
  • Divulgation par le créateur ou son ayant cause·
  • Reproduction des caractéristiques essentielles·
  • Au regard d'une clientèle spécifique·
  • Validité de la saisie-contrefaçon·
  • Impression visuelle d'ensemble·
  • Imitation du conditionnement·
  • Modèle d'appareil à coiffer·
  • Différences insignifiantes

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le modèle communautaire de fer à boucler invoqué ne présente pas de défaut de nouveauté. L’antériorité, constituée des dessins d’une demande de brevet portant sur un appareil à coiffer, est opposable au modèle. Le déposant de la demande de brevet, dont la publication opère divulgation, n’est pas l’ayant droit du créateur. Il n’a pas non plus agi sur la base d’informations fournies par celui-ci. Il est indifférent que le titulaire du modèle bénéficie d’une licence exclusive sur la demande de brevet. Cependant, si les dessins révèlent, à l’instar du modèle, un appareil de forme oblongue composé d’une poignée et d’une tête de mêmes proportions, ils présentent de nombreuses différences, tant sur les têtes que sur les poignées. Ces différences, qui portent sur des caractéristiques dominantes et non sur des détails, sont significatives et immédiatement perceptibles. S’agissant du caractère individuel du modèle de fer à boucler, l’appareil de massage facial invoqué est opposable à titre d’antériorité dès lors qu’il n’est pas établi que les secteurs concernés soient différents, ces derniers ayant des opérateurs communs, tel le distributeur du modèle. Ni cette antériorité, ni la demande de brevet précédemment invoquée ne remet en cause le caractère individuel du modèle, en raison de différences significatives qui produisent des impressions d’ensemble différentes sur l’utilisateur averti, défini en l’occurrence comme toute personne, particulier ou professionnel de la coiffure, utilisant des fers à coiffer. La CJUE a dit que pour apprécier si des caractéristiques de l’apparence d’un produit sont exclusivement imposées par la fonction technique, il y a lieu d’établir que cette fonction est le seul facteur ayant déterminé ces caractéristiques, l’existence de dessins ou modèles alternatifs n’étant pas déterminante. Il ne s’en déduit pas que le juge national ne peut pas tenir compte de la multiplicité des formes existantes dans l’art antérieur, qui peut constituer un indice, certes non suffisant, des variations formelles autorisées par la contrainte technique. Le juge peut aussi tenir compte de l’effort créatif qui a présidé au choix des formes qui peuvent traduire, hors de toute nécessité, une recherche de l’amélioration de "l’esthétique industrielle" (considérant 7 du règlement (CE) n° 6/2002) du produit. En l’espèce, les caractéristiques dominantes du modèle ne sont pas dictées exclusivement par leur fonction technique, à part la fente permettant l’insertion des mèches de cheveux dans la tête de l’appareil, quoique son positionnement sur la poignée réponde à des considérations esthétiques. La demande en contrefaçon est rejetée. Le produit incriminé se distingue du modèle invoqué dès lors qu’il ne reprend pas certaines de ses caractéristiques essentielles. L’utilisateur averti percevra immédiatement ces différences significatives qui induisent, pour certaines d’entre elles, un mode de fonctionnement différent. La différence essentielle réside dans le fait que le fer litigieux ne s’ouvre pas en deux, comme le modèle. Cette différence, qui se manifeste sur les représentations du modèle (lesquelles ne montrent l’appareil que fermé) par une fente nette au deux tiers de la hauteur de la poignée, exclut que le modèle et le produit incriminé puissent produire sur l’utilisateur averti une même impression visuelle d’ensemble.

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 1, 26 févr. 2019, n° 17/13117
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/13117
Publication : Propriétés intellectuelles, 71, avril 2019, p. 86-88, p. 95-96, notes de Patrice de Candé ; D, 28, 1er août 2019, p. 1582, note de Jean-Christophe Galloux ; PIBD 2019, 1114, IIID-201
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 17 mai 2017, N° 15/07814
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 18 mai 2017, 2015/07814
Domaine propriété intellectuelle : DESSIN ET MODELE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 002217927-0001
Classification internationale des marques : CL28-03
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Référence INPI : D20190007
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRÊT DU 26 février 2019 Pôle 5 – Chambre 1 (n°030/2019, 17 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/13117 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B3UT5 Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 mai 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 15/07814 APPELANTES SASU CALOR Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 956 512 495 Agissant poursuites et diligences en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège. 112 Chemin du Moulin Carron 69130 ECULLY Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018 Assistée de Me Anne-Charlotte LE BIHAN de l’AARPI BIRD & BIRD, avocat au barreau de PARIS, toque : R255

SAS GROUPE SEB FRANCE Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 440 410 637 Agissant poursuites et diligences en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège. 112 Chemin du Moulin Carron 69130 ECULLY Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018 Assistée de Me Anne-Charlotte LE BIHAN de l’AARPI BIRD & BIRD, avocat au barreau de PARIS, toque : R255 Société BABYLISS FACO SPRL Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège 25, avenue de l’Indépendance 4020 LIEGE (BELGIQUE) Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010 Assistées de Me Alexia DE MAULDE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0260 SARL BABYLISS Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 612 021 923 Prise en la personne de ses Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège 99, avenue Aristide Briand 92120 MONTROUGE Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010 Assistées de Me Alexia DE MAULDE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0260

INTIMÉES Société BABYLISS FACO SPRL Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège 25, avenue de l’Indépendance 4020 LIEGE (BELGIQUE) Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010 Assistées de Me Alexia DE MAULDE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0260 SARL BABYLISS Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 612 021 923 Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège 99, avenue Aristide Briand 92120 MONTROUGE Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010 Assistées de Me Alexia DE MAULDE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0260

SASU CALOR Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 956 512 495 Agissant poursuites et diligences en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège. 112 Chemin du Moulin Carron 69130 ECULLY Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018 Assistée de Me Anne-Charlotte LE BIHAN de l’AARPI BIRD & BIRD, avocat au barreau de PARIS, toque : R255

SAS GROUPE SEB FRANCE Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 440 410 637 Agissant poursuites et diligences en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège. 112 Chemin du Moulin Carron Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

69130 ECULLY Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018 Assistée de Me Anne-Charlotte LE BIHAN de l’AARPI BIRD & BIRD, avocat au barreau de PARIS, toque : R255 COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 14 janvier 2019, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur David PEYRON, Président de chambre Mme Isabelle DOUILLET, Conseillère M. François THOMAS, Conseiller qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Karine A ARRÊT : •Contradictoire •par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. •signé par David PEYRON, Président de chambre et par Karine A, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE La société de droit belge BABYLISS FACO et la société française BABYLISS appartiennent au groupe CONAIR qu’elles présentent comme un acteur incontournable dans le secteur des appareils de soins du corps, de la beauté et du bien-être, qui a notamment développé un boucleur automatique dans le cadre d’une licence exclusive de brevets conclue pour le monde entier par la société CONAIR CORPORATION avec la société TF3 et portant notamment sur la demande de brevet international W02012/080751, ainsi que sur tous les droits attachés au dessin du prototype figurant dans ce brevet.

La société CONAIR CORPORATION a concédé ses droits à la société BABYLISS FACO, sa filiale, afin que celle-ci développe le boucleur automatique intégrant cette technologie en vue de sa commercialisation. Cette commercialisation a été confiée, pour la France, sous la marque 'CURL SECRET', à la société BABYLISS.

La société BABYLISS FACO est dans ce cadre titulaire de droits de propriété intellectuelle sur le modèle communautaire de boucleur n° 002217927-0001 enregistré le 10 avril 2013 (ci-après, le modèle 927) : Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

La société CALOR et la société GROUPE SEB FRANCE (ci-après, la société GSF) appartiennent au groupe SEB qu’elles présentent comme le leader mondial du petit électroménager. La première explique être en charge de la promotion de certains produits dans le domaine du soin de la personne, parmi lesquels des lisseurs à cheveux, sèche-cheveux, tondeuses ou fers à boucler commercialisés en France sous la marque 'CALOR', quand la seconde indique assurer la commercialisation et la distribution des produits du groupe pour la France.

Au mois de mars 2015, la société GSF a lancé en France, sous la marque 'SO CURLS', un fer à boucler automatisé référencé CF3610 :

Estimant que la commercialisation de ce produit, notamment sur le site internet calor.fr, sous un packaging reprenant les caractéristiques et les codes d’identification de son propre packaging, caractérisait des actes de contrefaçon du modèle communautaire n° 927, ainsi que des actes de concurrence déloyale et parasitaire, les sociétés BABYLISS ont, par courrier de leur conseil du 15 avril 2015, mis en demeure les sociétés CALOR et SEB SA de cesser leurs agissements. Par courrier du 30 avril 2015, ces dernières ont contesté l’ensemble des griefs opposés.

Autorisées par ordonnance rendue le 21 avril 2015 par le délégataire du président du tribunal de grande instance de Paris, les sociétés BABYLISS ont fait pratiquer une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société CALOR le 5 mai 2015.

Autorisées par ordonnance rendue le 26 mai 2015 par le délégataire du président du tribunal de grande instance de Paris, les sociétés BABYLISS ont fait pratiquer une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société GSF, le 28 mai 2015.

C’est dans ces circonstances que, par acte d’huissier du 4 juin 2015, les sociétés BABYLISS FACO et BABYLISS (ci-après, les sociétés BABYLISS) ont assigné les sociétés CALOR et GSF devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon et en concurrence déloyale et parasitaire.

Durant le second semestre 2016, la société GSF a mis sur le marché une nouvelle version du boucleur SO CURLS, commercialisée sous la référence CF3710, dans des conditions caractérisant, selon les demanderesses, des actes de concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre de la société BABYLISS.

Par jugement du 18 mai 2017, le tribunal de grande instance de Paris a notamment : Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

• rejeté les demandes reconventionnelles en nullité du modèle communautaire n° 927 présentées par les sociétés GSF et CALOR, • rejeté le moyen tiré de la nullité des procès-verbaux de saisie-contrefaçon opposé par les sociétés CALOR et GSF, •rejeté l’intégralité des demandes de la société BABYLISS FACO tant au titre de la contrefaçon que de la concurrence déloyale et parasitaire, •rejeté l’intégralité des demandes de la société BABYLISS, •condamné in solidum les sociétés BABYLISS aux dépens et au paiement à chacune des sociétés CALOR et GSF de la somme de 20 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 5 juillet 2017, les sociétés CALOR et GSF ont interjeté appel de ce jugement en ce qu’il a rejeté leurs demandes en nullité des opérations de saisie-contrefaçon et en nullité de modèle communautaire (procédure RG 17/13117) et le 7 juillet 2017, les sociétés BABYLISS ont formé appel total à l’encontre du même jugement (procédure RG 17/13775). Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 4 septembre 2018.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 3 transmises le 19 novembre 2018, les sociétés CALOR et GSF demandent à la cour :

•d’infirmer le jugement en ce qu’il les a déboutées de leurs demandes en nullité des saisies-contrefaçon des 5 et 28 mai 2015 et en nullité du modèle communautaire n° 927, •de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les sociétés BABYLISS de leur action et de leurs demandes en contrefaçon du modèle communautaire n° 927 et en concurrence déloyale et parasitaire,

statuant à nouveau: • à titre principal : • de prononcer la nullité des saisies-contrefaçon des 5 et 28 mai 2015 et de tous les actes subséquents, • de prononcer la nullité du modèle communautaire n°927 pour défaut de nouveauté et défaut de caractère individuel, •de prononcer la nullité du modèle communautaire n°927 en raison de son caractère exclusivement fonctionnel, •de dire que la mention de cette annulation sera inscrite au registre des dessins ou modèles communautaires tenu par l’Office de l’Union Européenne pour la Propriété Intellectuelle sur réquisition de la cour, •de dire que les sociétés CALOR et GSF n’ont commis aucun acte de contrefaçon du modèle communautaire n° 927 ni aucun acte de concurrence déloyale ou parasitaire,

en conséquence,

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• de débouter les sociétés BABYLISS de l’ensemble de leurs demandes, • à titre subsidiaire : • de ramener le montant des dommages et intérêts sollicités au titre des préjudices prétendument subis par les sociétés BABYLISS à de plus justes proportions, •dans tous les cas, de condamner les sociétés BABYLISS à leur verser à chacune la somme de 100 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 3 transmises le 18 octobre 2018, les sociétés BABYLISS demandent à la cour :

•de dire irrecevables et à tout le moins de débouter les sociétés CALOR et GSF de toutes leurs demandes, •de confirmer le jugement ce qu’il a : • rejeté les demandes reconventionnelles en nullité du modèle communautaire n° 927 présentées par les sociétés CALOR et GSF, • rejeté le moyen tiré de la nullité des procès-verbaux de saisie-contrefaçon opposé par les sociétés CALOR et GSF, • d’infirmer le jugement en ses autres dispositions et statuant à nouveau : •de juger qu’en important, en assurant la promotion, en offrant à la vente et en vendant sur le territoire de l’Union Européenne le modèle litigieux SO CURLS référencé CF3610, les sociétés les sociétés CALOR et GSF se sont rendues coupables d’acte de contrefaçon du modèle communautaire n° 927 au préjudice de la société BABYLISS FACO et, subsidiairement, d’actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société BABYLISS FACO, •de juger que les sociétés les sociétés CALOR et GSF se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale et parasitaire au préjudice de la société BABYLISS SARL en commercialisant les modèles SO CURLSCF3610 et CF3710,

en conséquence :

•de condamner : •la société GSF à payer : • la somme provisionnelle de 100 000 euros à la société BABYLISS FACO en réparation des actes de contrefaçon et subsidiairement de concurrence déloyale et parasitaire commis à son encontre, à parfaire après la communication par la société GSF des documents dont la communication est sollicitée, • la somme provisionnelle de 1 100 000 euros à la société BABYLISS en réparation des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis à son encontre, à parfaire après la communication par la société GSF des documents dont la communication est sollicitée, • la société CALOR à payer : • la somme provisionnelle de 50 000 euros à la société BABYLISS FACO en réparation des actes de contrefaçon et subsidiairement de Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

concurrence déloyale et parasitaire commis à son encontre, à parfaire après la communication par la société CALOR des documents dont la communication est sollicitée, • la somme provisionnelle de 60 000 euros à la société BABYLISS en réparation des actes de concurrence déloyale et parasitaire commis à son encontre, à parfaire après la communication par la société CALOR des documents dont la communication est sollicitée, • d’ordonner : • à la société GSF de communiquer les éléments suivants : • l’ensemble des factures d’achat du produit SO CURLS litigieux référencé CF3610 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision sur le territoire de l’Union Européenne, certifiées conformes par son expert-comptable ou commissaire aux comptes, • l’ensemble des factures d’achat du produit SO CURLS litigieux référencé CF3710 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision, certifiées conformes par son expert-comptable ou commissaire aux comptes, l’ensemble des factures de vente du produit SO CURLS litigieux référencé CF3610 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision sur le territoire de l’Union Européenne, le tout certifié conforme par son expert-comptable ou commissaire aux comptes,

•l’ensemble des factures de vente du produit SO CURLS litigieux référencé CF3710 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision, en France, le tout certifié conforme par son expert- comptable ou commissaire aux comptes, •un état exhaustif des ventes du produit SO CURLS litigieux référencé CF3610 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision, sur le territoire de l’Union Européenne, certifié conforme par son expert-comptable ou commissaire aux comptes; •un état exhaustif des ventes du produit SO CURLS litigieux référencé CF3710 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision, en France, certifié conforme par son expert-comptable ou commissaire aux comptes, •un état exhaustif des stocks du produit SO CURLS litigieux référencé CF3610 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision, sur le territoire de l’Union Européenne, certifié conforme par son expert-comptable ou commissaires aux comptes, •un état exhaustif des stocks du produit SO CURLS litigieux référencé CF3710 depuis son lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision, en France, certifié conforme par son expert-comptable ou commissaires aux comptes, et ce, sous astreinte de 2 000 euros par jour de retard à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir,

•à la société CALOR, de communiquer une attestation de son expert- comptable ou commissaire aux comptes confirmant l’absence de toute vente des produits SO CURLS litigieux référencés CF3610 et CF3710 depuis leur lancement et jusqu’au jour du prononcé de la décision à intervenir sur l’ensemble du territoire de l’Union Européenne, sous Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

astreinte de 2 000 euros par jour de retard à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, •de surseoir à statuer, seulement en ce qui concerne la fixation définitive du préjudice subi par elles, jusqu’à ce que les sociétés CALOR et GSF aient communiqué les éléments sollicités, d’interdire aux sociétés CALOR et GSF l’importation, la détention, la distribution, l’offre à la vente et la vente, la promotion sur le territoire de l’Union Européenne, y compris sur les sites internet accessibles à partir dudit territoire, du modèle litigieux référencé CF3610 et ce, sous astreinte de 2000 euros par infraction constatée et de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et jusqu’au jour des constatations, •- d’ordonner le rappel des circuits commerciaux, sous contrôle d’huissier, de l’ensemble des exemplaires du modèle litigieux référencé CF3610 en cause et des packagings litigieux en cause du modèle référencé CF3610 importés et commercialisés sur l’ensemble du territoire de l’Union Européenne par les sociétés CALOR et GSF aux frais de ces dernières, •d’ordonner la destruction sous contrôle d’huissier de l’ensemble des modèles litigieux référencé CF3610 restant en stock aux frais des sociétés CALOR et GSF dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 2 000 euros par infraction constatée et de 1 000 euros par jour de retard à compter de ladite signification, •d’interdire aux sociétés CALOR et GSF l’importation, la détention, la distribution, l’offre à la vente et la vente, la promotion du modèle référencé CF3710 et ce, sous astreinte de 2 000 euros par infraction constatée et de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et jusqu’au jour des constatations, •d’interdire aux sociétés CALOR et GSF l’importation, la détention, la distribution, l’offre à la vente et la vente, la promotion de tout modèle de boucleur dans les packagings litigieux et/ou sous la dénomination SO CURLS et ce, sous astreinte de 2 000 euros par infraction constatée et de 1 000 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et jusqu’au jour des constatations, •d’ordonner le rappel des circuits commerciaux, sous contrôle d’huissier, de l’ensemble des exemplaires du modèle litigieux référencé CF3710, alors qu’en toute hypothèse les exemplaires du modèle litigieux référencé CF3710 porte la mention SO CURLS, et des packagings litigieux en cause du modèle référencé CF3710 aux frais des sociétés CALOR et GSF, • d’ordonner la destruction sous contrôle d’huissier de l’ensemble des packagings litigieux du modèle référencé CF3710 et de tous les modèles litigieux référencés CF3710 restant en stock aux frais des sociétés CALOR et GSF dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 2 000 euros par infraction constatée et de 1 000 euros par jour de retard à compter de ladite signification, Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

• d’ordonner la publication de l’arrêt à intervenir dans cinq magazines et/ou journaux au choix des sociétés BABYLISS, et aux frais avancés des sociétés CALOR et GSF sans que le coût de chacune des publications ne puisse excéder la somme de 5 000 euros hors taxes, • d’ordonner la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir pour une durée d’un mois à compter du septième jour suivant sa signification dans un encart spécifique publié en première page d’accueil du site accessible à l’adresse www.calor.fr, et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, • de se réserver la liquidation des astreintes, •de condamner les sociétés CALOR et GSF aux entiers dépens, en ce compris les frais du constat d’huissier dressé les 23 mars et 29 mai 2015 et les frais des saisies-contrefaçon pratiquées les 5 et 28 mai 2015 et à leur payer à chacune la somme de 50 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est du 18 décembre 2018.

MOTIFS DE L’ARRÊT Considérant qu’en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu’elles ont transmises, telles que susvisées ;

Sur la contrefaçon du modèle communautaire de boucleur n° 927 de la société BABYLISS FACO Sur la validité du modèle Considérant que les sociétés CALOR et GSF, poursuivant la nullité du modèle de la société BABYLISS FACO, soutiennent que ce modèle est dépourvu de nouveauté et de caractère individuel et qu’il présente un caractère exclusivement fonctionnel ;

Que la société BABYLISS FACO répond que, comme en a décidé le tribunal, le modèle est parfaitement valable alors qu’il présente un caractère nouveau et individuel et que ses caractéristiques essentielles ne sont pas exclusivement fonctionnelles ;

Considérant que l’article 4 paragraphe 1 du règlement n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires dispose que la protection d’un dessin ou modèle par un dessin ou modèle communautaire n’est assurée que dans la mesure où il est nouveau et présente un caractère individuel ;

Sur la nouveauté du modèle Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

Considérant que les sociétés CALOR et GSF soutiennent que les figures de la demande de brevet international W02012/080751 déposée par la société de droit anglais TF3 le 16 décembre 2001 et publiée le 21 juin 2012 (ci-après, l’antériorité TF3), soit moins d’un an avant le dépôt du modèle revendiqué, portant sur un appareil à coiffer, sont destructrices de la nouveauté du modèle 927 et qu’il ne peut en être autrement puisque le modèle commercialisé par la société BABYLISS n’est que la réalisation industrielle de l’appareil divulgué par le brevet TF3 ; qu’elles font valoir que cette antériorité est opposable à la société BABYLISS FACO qui ne peut invoquer à son propos l’exception du délai de grâce prévue par l’article 7 paragraphe 2 du règlement, dès lors, d’une part, que la divulgation du brevet TF3 a été le fait de la société TF3 qui n’est ni le créateur du modèle, ni son ayant-droit et que cette divulgation n’est pas intervenue grâce à des informations fournies par le créateur ou son ayant-droit ou par un tiers sur la base d’informations fournies ou d’actes accomplis par le créateur ou son ayant-droit et, d’autre part, qu’il s’agit d’une divulgation exclusivement administrative ;

Que les sociétés BABYLISS opposent que l’antériorité TF3 ne leur est pas opposable puisque la société BABYLISS FACO est précisément le titulaire des droits sur ce brevet et sur la forme du prototype reproduit audit brevet aux termes d’une licence exclusive concédée par la société TF3, et qu’en toute hypothèse, cette antériorité n’est pas susceptible de détruire la nouveauté du modèle 927 comme l’a justement retenu le tribunal ;

Considérant que l’article 5 paragraphe 1 du règlement n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires dispose : 'Un dessin ou modèle est considéré comme nouveau si aucun dessin ou modèle identique n’a été divulgué au public : (…) b) dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité’ ; que le paragraphe 2 de l’article 5 prévoit : 'Des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants’ ;

Que l’article 7 paragraphe 1 du même règlement dispose : ' Aux fins de l’application des articles 5 et 6, un dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s’il a été publié à la suite de l’enregistrement ou autrement, ou exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute autre manière, avant la date visée à l’article 5, paragraphe 1 (…) point b) (…) sauf si ces faits, dans la pratique normale des affaires, ne pouvaient raisonnablement être connus des milieux spécialisés du secteur concerné, opérant dans la Communauté. Toutefois le dessin ou modèle n’est pas réputé avoir été divulgué au public s’il a seulement été divulgué par un tiers sous des conditions explicites ou implicites de secret’ ; Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

Que le paragraphe 2 de l’article 7 du même règlement prévoit : 'Aux fins de l’application des articles 5 et 6, il n’est pas tenu compte d’une divulgation si un dessin ou modèle pour lequel la protection est revendiquée au titre de dessin ou modèle communautaire enregistré a été divulgué au public : a) par le créateur ou son ayant-droit ou par un tiers sur la base d’informations fournies ou d’actes accomplis par le créateur ou son ayant-droit, et ce, b) pendant la période de douze mois précédant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou la date de priorité, si une priorité est revendiquée’ ; Considérant que la société BABYLISS FACO invoque vainement l’exception prévue par l’article 7 paragraphe 2 précité dès lors que la demande de brevet, dont la publication opère divulgation, a été déposée par la société TF3 qui n’est pas l’ayant-droit du créateur du modèle communautaire (M. J) et qu’il n’est pas allégué que cette société ait agi sur la base d’informations données par le créateur ou son ayant-droit ; que, comme l’a retenu le tribunal, il est indifférent que la société BABYLISS FACO, titulaire des droits sur le modèle, soit licenciée exclusive de la société CONAIR CORPORATION qui détient elle-même ses droits de la société TF3 au titre de la demande de brevet opposée comme antériorité, aucune de ces sociétés n’étant l’ayant-droit du créateur du modèle ; que l’antériorité TF3 est donc opposable à la société BABYLISS FACO ;

Que les sociétés BABYLISS présentent ainsi les caractéristiques du boucleur représenté sur les figures du modèle 927 : une tête de forme ovoïde et une poignée légèrement bombée, les proportions étant respectivement de 1/3 – 2/3 ; une poignée aplatie avec les bords droits et un double arc de cercle situés au-dessus et en dessous dessinant le galbe de la poignée, celle-ci se terminant par un décroché comportant une bague d’une couleur argentée ; deux boutons positionnés sur le côté avec un témoin au sein d’un décroché partiellement elliptique que l’on retrouve des deux côtés du manche ; la poignée rejoint la tête du boucleur sur sa partie haute de manière excentrée ; la tête comporte des bords biseautés sur l’extérieur, la chambre ronde étant elle aussi excentrée ;

Que si les figures de la demande de brevet présentent, à l’instar du modèle, un appareil de forme oblongue composé d’une poignée et d’une tête de mêmes proportions, un dispositif situé au bout de la poignée servant d’axe de rotation pour l’actionnement des deux parties de la poignée qui se rejoignent sur la partie supérieure de la tête de l’appareil, un fil électrique en bout de la poignée, une ouverture circulaire implantée sur l’une des faces latérales de la tête de l’appareil et la proéminence de la partie inférieure de la tête de l’appareil par Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

rapport à sa partie supérieure, elles présentent, comme le tribunal l’a retenu, de nombreuses différences; qu’ainsi, la tête de l’antériorité TF3 est plus ronde qu’ovoïde et comporte sur l’un des côtés une petite ailette triangulaire ; aucune cassure n’est apparente entre cette tête et la poignée, les deux parties de l’appareil apparaissant dans une continuité qui confère à l’ensemble un aspect monobloc qui ne se retrouve pas dans le modèle ; les faces latérales de la tête ne sont pas planes ; l’ouverture sur la face latérale de la tête n’est pas excentrée vers l’avant comme sur le modèle BABYLISS mais vers le bas ; le mécanisme assurant la rotation entre les parties supérieure et inférieure de l’appareil est apparent en bout de poignée et matérialisé par une pièce circulaire occupant presque toute la largeur du manche ; la poignée est droite et ronde alors qu’elle est en forme d’ogive sur le modèle ; aucun bouton n’apparaît sur les côtés de la poignée alors que le modèle présente deux boutons et un témoin lumineux qui épousent la forme ogivale de la poignée ; que le bout de la poignée dans lequel s’insère le fil électrique vient, sans cassure, dans le prolongement de la poignée, alors que sur le modèle il constitue une partie autonome nettement plus étroite, dotée d’une bague, qui semble fichée dans la poignée ;

Que toutes ces différences portent sur des caractéristiques dominantes du modèle et non sur des détails ; qu’elles sont, comme l’ont retenu les premiers juges, significatives et immédiatement perceptibles ; que l’antériorité TF3 n’est donc pas destructrice de la nouveauté du modèle 927 de la société BABYLISS FACO ;

Que le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu’il a rejeté la demande des sociétés CALOR et GSF en nullité du modèle pour défaut de nouveauté ;

Sur le caractère individuel du modèle Considérant que les sociétés CALOR et GSF soutiennent que le modèle 927 est dépourvu de caractère individuel au regard de l’antériorité TF3 et également d’un modèle d’appareil de massage déposé le 9 février 2011 par la société PEI EICHEL devant l’Office américain et publié le 15 mai 2012 sous le n° US D/659,843 (ci-après, l’antériorité WANG), opposable à la société BABYLISS FACO dès lors qu’il concerne un appareil de massage relevant du même secteur que les appareils de coiffage ;

Que les sociétés BABYLISS demandent la confirmation du jugement en ce qu’il a écarté l’antériorité TF3 pour les motifs qu’il contient et objectent que l’antériorité WANG ne leur est pas opposable dès lors que, concernant un appareil de massage facial, soit une catégorie de produits n’ayant pas la même fonction que les appareils de coiffage, elle ne pouvait être raisonnablement connue par les milieux spécialisés du secteur des appareils de coiffage au sens de l’article 7 paragraphe 1 du règlement n° 6/2002, et qu’en tout état de cause, elle Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

ne produit pas une impression globale identique chez l’observateur averti ;

Considérant que l’article 6 paragraphe 1 b) du règlement n° 6/2002 prévoit qu’un dessin ou modèle communautaire enregistré est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, la date de priorité, le paragraphe 2 du même article précisant que pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle ;

Considérant en l’espèce que c’est par des motifs exacts et pertinents, tant en fait qu’en droit, adoptés par la cour, que le tribunal a estimé que ni l’antériorité TF3, ni l’antériorité WANG – celle-ci étant opposable à la société BABYLISS FACO dès lors qu’il n’est pas établi que les secteurs concernés soient différents, ayant des opérateurs communs, telle la société BABYLISS – ne détruisait le caractère individuel du modèle 927, et ce, en raison de différences significatives produisant des impressions d’ensemble différentes de celle générée par le modèle de la société BABYLISS FACO sur l’utilisateur averti, défini en l’occurrence comme toute personne, particulier ou professionnel de la coiffure, utilisant des fers à coiffer ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande des sociétés CALOR et GSF en nullité du modèle pour absence de caractère individuel ;

Sur l’absence de caractère exclusivement fonctionnel du modèle Considérant que les sociétés CALOR et GSF soutiennent que le modèle 927 doit être annulé en raison de son caractère exclusivement fonctionnel ; qu’elles arguent que contrairement à l’analyse du tribunal, il faut s’en tenir pour apprécier le caractère fonctionnel à l’examen du seul modèle opposé, à l’exclusion d’éventuelles formes alternatives dont l’existence est indifférente depuis l’arrêt DOCERAM rendu par la CJUE le 8 mars 2018 ; qu’elles font valoir que le caractère purement fonctionnel des caractéristiques du fer à boucler objet du modèle communautaire 927 est d’autant plus évident que cet appareil n’est qu’une application industrielle de la technologie couverte par le brevet de TF3 ; que selon elles, les caractéristiques essentielles du modèle – soit l’aspect général de l’appareil comportant un manche et une tête, la forme ovoïde et fermée de la tête, la forme et l’emplacement des deux interrupteurs et du témoin de chauffe, la configuration de faces latérales de la tête de l’appareil et l’orifice rond légèrement excentré vers l’avant de la tête – n’ont rien d’esthétique et répondent à des impératifs purement techniques ;

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Que les sociétés BABYLISS répondent que pour être exclue de la protection en application de l’article 8 paragraphe 1 du règlement, la forme du modèle doit être asservie à la fonction qu’elle exerce, qui la commande et la détermine, aucune considération autre que technique n’ayant dû intervenir lors de l’élaboration de cette forme, l’existence d’un brevet par ailleurs n’impliquant pas en soi, comme le tribunal l’a retenu, que seules des contraintes techniques aient dicté exclusivement le choix de la forme ; qu’elles font valoir que les juridictions tant nationales qu’européennes font application du critère de la multiplicité des formes pour apprécier le caractère fonctionnel d’un dessin ou modèle, sans que l’arrêt DOCERAM n’ait mis un terme à cette approche ; qu’elles soutiennent que les caractéristiques du modèle 927 sont esthétiques et aucunement dictées par des considérations techniques dès lors que des choix arbitraires ont été réalisés et que d’autres choix esthétiques ont été faits pour des produits concurrents ;

Considérant que l’article 8 paragraphe 1 du règlement n° 6/2002 dispose qu’un dessin ou modèle communautaire ne confère pas de droits sur les caractéristiques de l’apparence d’un produit qui sont exclusivement imposées par sa fonction technique ;

Que dans l’arrêt DOCERAM (8 mars 2018, C395/16), la Cour de l’Union européenne a dit pour droit que L’article 8(1) du Règlement 6/2002 (') doit être interprété en ce sens que, pour apprécier si des caractéristiques de l’apparence d’un produit sont exclusivement imposées par la fonction technique, il y a lieu d’établir que cette fonction est le seul facteur ayant déterminé ces caractéristiques, l’existence de dessins ou modèles alternatifs n 'étant pas déterminante à cet égard. ' et que 'L'article 8(1) du Règlement 6/2002 doit être interprété en ce sens que, afin de déterminer si les caractéristiques concernées de l’apparence d’un produit sont exclusivement imposées par la fonction technique de celui-ci, au sens de cette disposition, il incombe au juge national de tenir compte de toutes les circonstances objectives pertinentes de chaque cas d’espèce. Il n’y a pas lieu, à cet égard, de se fonder sur la perception d’un 'observateur objectif. ' ; qu’il ne s’en déduit pas, contrairement à ce qui est soutenu par les sociétés CALOR et GSF, que le juge national ne peut pas tenir compte, dans son examen, de la multiplicité des formes existantes dans l’art antérieur qui peut constituer un indice, certes non suffisant, des variations formelles autorisées par la contrainte technique ; que le juge peut tenir compte aussi de l’effort créatif qui a présidé au choix des formes qui peuvent traduire, hors de toute nécessité, une recherche de l’amélioration de 'l’esthétique industrielle’ (considérant 7 du règlement) du produit ;

Considérant que c’est par des motifs exacts et pertinents, tant en fait qu’en droit, adoptés par la cour, que le tribunal a estimé que les caractéristiques dominantes du modèle ne sont pas exclusivement dictées par leur fonction technique – sauf une : la fente permettant Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

l’insertion des mèches de cheveux dans la tête de l’appareil, quoique son positionnement sur la partie supérieure de la poignée plutôt que sur l’axe longitudinal de cette poignée réponde à des considérations esthétiques – et que la combinaison des caractéristiques dominantes du modèle n’est pas imposée par une fonction technique ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande des sociétés CALOR et GSF en nullité du modèle en raison d’un caractère exclusivement fonctionnel ;

Sur la validité des opérations de saisies-contrefaçon Considérant que les sociétés CALOR et GSF soutiennent, comme en première instance, que les opérations de saisie-contrefaçon n’ont jamais été formellement clôturées dans le délai imparti par les ordonnances d’autorisation (prévoyant que les opérations devaient être pleinement exécutées dans un délai maximum de 2 mois) puisque, sur place, les 5 mai (dans les locaux de la société CALOR) et 28 mai 2015 (dans les locaux de la société GSF), l’huissier a suspendu ses opérations dans l’attente de la remise de documents par les saisis, puis, le lendemain, a établi des procès-verbaux de constat à la suite de la remise de ces documents ; que, selon elles, la clôture des procès-verbaux de constat dressés par l’huissier, les 6 et 29 mai 2015, pour constater la réception des documents remis par elles deux ne peut en aucun cas valoir clôture des opérations de saisie-contrefaçon, l’huissier ayant expressément indiqué à la fin de chacun de ces constats : 'Clos et signé pour le présent procès-verbal de constat ;

Que les sociétés BABYLISS demandent la confirmation du jugement, faisant valoir que la clôture des opérations de saisie-contrefaçon n’est aucunement imposée par un texte et ne constitue pas une formalité substantielle, les effets de l’ordonnance d’autorisation étant épuisés dès lors que les opérations de saisie sont exécutées et, en toute hypothèse, lors de l’expiration du délai prévu dans l’ordonnance, qu’en l’espèce, l’huissier était dans l’impossibilité de clôturer sur place ses opérations puisque les saisis s’étaient engagés à communiquer des informations ultérieurement, et qu’en tout état de cause, comme le tribunal l’a retenu, les opérations de saisie-contrefaçon ont bien été clôturées après la réception des documents adressés par les saisis ;

Considérant que c’est par des motifs exacts et pertinents, tant en fait qu’en droit, adoptés par la cour, que le tribunal a estimé que les opérations de saisie-contrefaçon ont été valablement clôturées par les procès-verbaux de constat dressés par l’huissier de justice les 6 et 29 mai 2015, après réception des documents remis par les sociétés CALOR et GSF ;

Qu’il sera ajouté que ces deux procès-verbaux de constat ont été établis dans le délai de deux mois imparti par les ordonnances Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

d’autorisation prises les 21 avril et 26 mai 2015 et que, comme le soulignent les sociétés BABYLISS, les opérations de saisie- contrefaçon ont été, en tout état de cause, nécessairement clôturées à l’expiration de ce délai de deux mois, plus aucune mesure ne pouvant être diligentée passé ce délai, de sorte que les sociétés CALOR et GSF ne peuvent affirmer que les opérations de saisie se sont prolongées au-delà de la période de deux mois accordée par le président du tribunal et qu’elles sont encore ouvertes ;

Que le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande des sociétés CALOR et GSF en nullité des procès-verbaux de saisie- contrefaçon ;

Sur la réalité de la contrefaçon Considérant que la société BABYLISS FACO soutient qu’en assurant la promotion et en commercialisant un boucleur reprenant l’impression visuelle d’ensemble du modèle communautaire 927 sur l’utilisateur averti n’ayant pas les modèles sous les yeux, les sociétés CALOR et GSF se sont rendues coupables d’actes de contrefaçon ; qu’elle fait valoir que le modèle SO CURLS litigieux reprend les caractéristiques protégeables de son modèle, à savoir : i) une tête de forme ovoïde et d’une poignée légèrement bombée, de proportions 1/3 – 2/3, ii) un aplatissement des surfaces supérieure et inférieure de la tête qui accentue la forme particulièrement ovoïde, iii) une poignée aplatie avec les bords droits et un double arc de cercle situés au-dessus et en dessous dessinant le galbe de la poignée en une forme d’ogive, iv) des boutons positionnés sur le côté avec un témoin au sein d’un décroché elliptique qui renforce la forme d’ogive de la poignée, v) une poignée rejoignant la tête du fer à friser sur sa partie haute et s’en détachant significativement, vi) une tête comportant des bords biseautés sur l’extérieur, la chambre ronde étant elle aussi excentrée et ces bords biseautés s’élargissant de la poignée vers l’extrémité de la tête donnant ainsi un effet elliptique de chaque côté, vii) des faces latérales planes, et qu’il produit ainsi la même impression globale visuelle ;

Que les sociétés CALOR et GSF répondent que le fer à boucler SO CURLS présente d’importantes différences, toutes aisément perceptibles pour l’utilisateur averti, par rapport au modèle de la société BABYLISS FACO, tant en ce qui concerne sa configuration générale qui traduit une différence de conception fondamentale, que sa tête, son manche, ses boutons de commande, les rares éléments de ressemblance portant sur des caractéristiques purement fonctionnelles en tant que telles non protégées (l’existence d’un manche avec, à une extrémité, un dispositif permettant le raccordement électrique et à l’autre extrémité, dans le prolongement du manche, une coque de forme générale arrondie disposée dans l’axe du manche présentant au moins une fente pour permettre l’insertion de la mèche de cheveux à boucler et un orifice sur le côté Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

pour en permettre l’extraction, des boutons de réglage fixés sur le côté du manche) ;

Considérant que l’article 10 du règlement n° 6/2002 dispose que '1. La protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s’étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l’utilisateur averti une impression visuelle globale différente. 2. Pour apprécier l’étendue de la protection, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle’ ;

Considérant que le produit litigieux SO CURLS référencé CF3610, que le jugement auquel il est renvoyé sur ce point décrit parfaitement (pages 23 et 24), présente, comme le modèle : une forme allongée, une tête ovoïde et une poignée légèrement bombée de mêmes proportions, respectivement 1/3 – 2/3, des boutons et un témoin lumineux positionnés sur un côté de la poignée, des bords biseautés sur la tête de l’appareil, une ouverture circulaire positionnée de façon excentrée sur cette tête, des faces latérales planes ;

Que cependant, il se distingue du modèle en ne reprenant pas certaines de ses caractéristiques essentielles, à savoir la fente longitudinale sur la poignée et la partie supérieure de la tête destinée à l’insertion des mèches à boucler, la cassure entre la tête et la poignée, la poignée rejoignant la tête du boucleur sur la partie haute de cette tête, l’ouverture circulaire excentrée vers le bas de la tête, le nombre, la taille et la forme des boutons ; que l’utilisateur averti percevra immédiatement ces différences significatives qui induisent, pour certaines, à l’évidence, un mode de fonctionnement différent comme l’a pertinemment relevé le tribunal, de sorte que le modèle et le produit litigieux produisent des impressions globales différentes ;

Qu’il est souligné que la différence essentielle réside dans le fait que le fer à boucler SO CURLS ne s’ouvre pas en deux, comme le modèle, à la manière d’une pince, dans le sens de la longueur pour permettre l’insertion des mèche à boucler, mais possède une poignée d’un seul tenant, les mèches devant s’insérer sur le devant de la tête de l’appareil qui présente à cette fin, à cet endroit, une sorte de bouche avec deux lèvres entrouvertes, absente du modèle BABYLISS, ce qui, ainsi que l’a relevé le tribunal, suppose des modes de fonctionnement différents ; que cette différence, qui se manifeste sur les représentations du modèle (lesquelles ne montrent l’appareil que fermé) par une fente nette au deux tiers de la hauteur de la poignée, sera immédiatement perçue par l’utilisateur averti et exclut, par elle seule, que le modèle et le produit litigieux puissent produire sur cet utilisateur une même impression visuelle d’ensemble, la cour faisant sienne par ailleurs l’analyse du tribunal sur l’absence de valeur probante des avis de blogueurs pour caractériser la contrefaçon ;

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Que le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la société BABYLISS FACO de ses demandes en contrefaçon de son modèle communautaire ;

Sur la concurrence déloyale et parasitaire Sur les demandes à titre subsidiaire de la société BABYLISS FACO Considérant que la société BABYLISS FACO soutient qu’en commercialisant le boucleur SO CURLS qui reprend les formes du boucleur CURL SECRET, les sociétés CALOR et GSF ont généré un risque de confusion ou à tout le moins d’association ou d’évocation et détourné à leur bénéfice les investissements qu’elle a réalisés ; qu’elle argue que le consommateur de référence est un consommateur moyen et non pas averti et qu’elle fait la démonstration du risque de confusion par la production d’un sondage GFK et des extraits de blogs ;

Que les sociétés CALOR et GSF demandent la confirmation du jugement pour les motifs qu’il contient ;

Considérant que c’est à juste raison que le tribunal a estimé que les différences significatives présentées par le boucleur SO CURL CF3610 par rapport au boucleur CURL SECRET – notamment, l’absence de fente qui induit à l’évidence un mode de fonctionnement distinct, ce qui peut, en soi, déterminer un acte d’achat – seront perceptibles par le consommateur concerné (en l’occurrence, plutôt une consommatrice) qui, s’il n’est pas nécessairement 'averti’ sera néanmoins très attentif aux détails, notamment de fonctionnement, du produit qu’il acquiert, et ce, en raison, comme l’ont très pertinemment retenu les premiers juges, du prix du produit et de son usage relevant de l’esthétique et des soins d’une partie du corps très visible ; que le risque de confusion allégué n’est ainsi pas établi ; qu’il l’est encore moins avec la nouvelle version CF3710 du boucleur SO CURL qui présentant une apparence encore plus éloignée du modèle BABYLISS (appareil plus massif que le modèle CF3610, monobloc sans rupture nette entre le manche et la tête qui, vue de dessus, est très nettement asymétrique et s’apparente à un maillet plus bas que haut et qui, vue de profil, comporte les mêmes ouvertures d’un côté et une face combinant un cône et demi-cercle de l’autre, appareil comprenant deux boutons et un voyant sur son manche en forme d’ogive, appareil associant le noir et le doré) ; que le tribunal a pertinemment retenu que les emballages des produits litigieux ne sont pas susceptibles de générer un risque de confusion dès lors que la reproduction d’une tête de femme aux cheveux longs ondulés et d’une photographie de l’appareil est banale pour vendre un fer à boucler, que l’utilisation du terme 'curl’ (boucle en anglais), purement descriptif, ne saurait être fautive et que la marque de chaque opérateur est apposée en gros caractères sur la boîte ; que la qualification de parasitisme avancée Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

par la société BABYLISS FACO ne peut pas davantage être retenue dès lors qu’aucun acte fautif n’est caractérisé de la part des sociétés CALOR et GSF et qu’en outre, comme le tribunal l’a relevé, les investissements invoqués ont été engagés par la seule société BABYLISS ;

Que la cour fait sienne l’analyse du tribunal quant à la faible valeur probante du sondage GFK produit par les sociétés BABYLISS, dont la présentation est de nature à fausser les résultats, alors qu’en défense, les sociétés CALOR et GSF produisent un autre sondage (IFOP) réalisé sur un panel plus important, qui n’apparaît pas contestable dans sa méthode et qui confirme l’importance accordée aux fonctionnalités de ce type de produit (pour 48 % des sondés) par rapport à son apparence (1 % des sondés) ; que comme l’a dit le tribunal, les avis donnés sur les blogs sont de faible valeur probante en raison du mode habituel de rémunération ou de gratification des blogueurs ;

Que pour ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes subsidiaires en concurrence déloyale et parasitaire de la société BABYLISS FACO ;

Sur les demandes à titre principal de la société BABYLISS Considérant que c’est par des motifs exacts et pertinents, tant en fait qu’en droit, adoptés par la cour, que le tribunal a débouté la société BABYLISS, distributrice du fer à boucler CURL SECRET objet du modèle communautaire 927, de ses demandes en concurrence déloyale et parasitaire, relevant notamment l’absence de risque de confusion entre les fers à boucler en litige et le fait que si la société BABYLISS justifie de ses investissements et du succès du fer CURL SECRET, la société GSF justifie de son côté de ses propres investissements pour le lancement du fer SO CURLS, de sorte que si cette dernière a pu profiter des investissements initialement engagés par BABYLISS, ce n’est pas le résultat d’un comportement fautif mais celui du fonctionnement du marché qui veut que chaque concurrent bénéficie des investissements réalisés par ses prédécesseurs ;

Que le jugement sera donc confirmé également en ce qu’il a rejeté les demandes en concurrence déloyale et parasitaire de la société BABYLISS ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles Considérant que les sociétés BABYLISS qui succombent seront condamnées aux dépens d’appel et garderont à leur charge les frais non compris dans les dépens qu’elles ont exposés à l’occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées ;

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Que la somme qui doit être mise à la charge des sociétés BABYLISS au titre des frais non compris dans les dépens exposés par les sociétés CALOR et GSF peut être équitablement fixée à 15 000 € pour chacune, ces sommes complétant celles allouées en première instance ; PAR CES MOTIFS. LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant, Condamne les sociétés BABYLISS aux dépens d’appel ainsi qu’au paiement à chacune des sociétés CALOR et GROUPE SEB FRANCE (GSF) de la somme de 15 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile. Document issu des collections du centre de documentation de l’INPI

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 26 février 2019, n° 17/13117