Cour d'appel de Reims, 30 janvier 2015, n° 14/00345

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, 30 janv. 2015, n° 14/00345
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 14/00345
Décision précédente : Tribunal d'instance de Troyes, 15 décembre 2013, N° 11-12-000762

Sur les parties

Texte intégral

R.G. : 14/00345

ARRÊT N°

du : 30 janvier 2015

A. L.

SAS E-Motors

C/

Monsieur Z X

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

1re CHAMBRE CIVILE – SECTION INSTANCE

ARRÊT DU 30 JANVIER 2015

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 16 décembre 2013 par le tribunal d’instance de Troyes (RG 11-12-000762)

SAS E-Motors

agissant poursuites et diligences de son président domicilié de droit au siège social

XXX

XXX

Comparant, concluant par la SCP Genet, avocat postulant au barreau de Reims et par Maître Gérard Laraize, avocat au barreau de Paris

INTIMÉ :

Monsieur Z X

XXX

XXX

Comparant, concluant par Maître Florence Amsellem-Aknin, avocat postulant au barreau de Reims et par Maître Thibaud Vidal de la SELARLU Vidal, avocat au barreau de Paris

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Lafay, présidente de chambre

Madame Lefèvre, conseiller

Madame Magnard, conseiller

GREFFIER D’AUDIENCE :

Monsieur Jolly, greffier lors des débats et du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 9 décembre 2014, le rapport entendu, où l’affaire a été mise en délibéré au 30 janvier 2015,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Lafay, présidente de chambre, et par Monsieur Jolly, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par un bon signé le 10 mai 2012 et retourné par courriel à la SAS E-Motors, Monsieur Z X a commandé un véhicule de marque Renault modèle Grand Espace au prix de 29.468 euros, avec reprise de deux véhicules d’occasion.

La société E-Motors a invité Monsieur X à prendre rendez-vous pour qu’il soit procédé à la livraison du véhicule. Le 17 mai 2012, Monsieur X a adressé un courriel d’annulation de la vente. Il a demandé par lettre recommandée le remboursement de l’acompte de 1.500 euros prélevé sur son compte.

Le 9 août 2012, Monsieur X a fait assigner la Société E-Motors en restitution de l’acompte de 1.500 euros et en paiement des sommes de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts et de 3.000 euros pour frais irrépétibles.

Par jugement du 16 décembre 2013 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal d’instance :

— se déclare compétent pour statuer sur l’entier litige,

— constate que Monsieur X a valablement exercé son droit de rétractation et que la vente conclue le 9 mai 2012 est nulle,

— condamne la Société E-Motors à rembourser à Monsieur X la somme de 1.500 euros prélevée à titre d’acompte, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2012,

— déclare la Société E-Motors responsable du préjudice subi et la condamne à payer à Monsieur X la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

— déboute la Société E-Motors de ses demandes reconventionnelles en paiement, en résolution judiciaire du contrat et en dommages et intérêts,

— condamne la Société E-Motors aux dépens et au paiement d’une somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La Société E-Motors a fait appel de cette décision. Aux termes de conclusions du 3 septembre 2014, elle demande à la cour de :

— dire que Monsieur X a signé et transmis le contrat de vente portant la référence 'commande n° 18950" le 10 mai 2012 et que ce contrat était définitif entre les parties,

— dire que Monsieur X a renoncé de manière unilatérale à exécuter ses engagements contractuels avant même de recevoir le véhicule acheté,

— juger que Monsieur X n’est pas fondé à se prévaloir du droit de rétractation prévu par l’article L. 121-20 du code de la consommation,

— subsidiairement, de dire que Monsieur X a signé et remis pour accord dans les locaux de la Société E-Motors, le 17 mai 2012, un nouveau contrat de vente et déclaré caduc celui transmis par voie électronique le 10 mai 2012, et qu’il n’est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l’article L. 121-20 applicables uniquement aux ventes à distance,

— infirmer le jugement afin de prononcer la résolution du contrat de vente aux torts exclusifs de Monsieur X et de le débouter de sa demande en dommages et intérêts,

— ordonner le remboursement des indemnités de 2.000 euros de dommages et intérêts et 1.000 euros au titre des frais irrépétibles,

— dire que la Société E-Motors a restitué la somme de 1.500 euros à titre d’acompte,

— de débouter Monsieur X de sa demande en dommages et intérêts,

— de le condamner aux dépens et au paiement d’une somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon écritures du 4 juillet 2014, Monsieur X conclut au visa des articles L. 121-20 et L. 121-74 du code de la consommation antérieurs à la loi du 17 mars 2014 à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions. Il sollicite la condamnation de la Société E-Motors à lui payer les sommes de 3.000 euros pour la résistance à restituer l’acompte prélevé et de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel, en sus des dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 novembre 2014.

Sur ce, la cour :

Sur la demande en remboursement de l’acompte :

Les dispositions des articles L.121-16 et suivants du code de la consommation s’appliquent à toute vente d’un bien conclue, sans la présence physique simultanée des parties, entre un consommateur et un professionnel qui, pour la conclusion de ce contrat, utilisent exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance.

L’article L.121-20 du code de la consommation prévoit :

'Le consommateur dispose d’un délai de sept jours francs pour exercer son droit de rétractation sans avoir à justifier de motifs ni à payer de pénalités, à l’exception, le cas échéant des frais de retour. (…)

Le délai mentionné à l’alinéa précédent court à compter de la réception pour les biens ou de l’acceptation de l’offre pour les prestations de service.'

L’article L.121-20-1 précise que 'Lorsque le droit de rétractation est exercé, le professionnel est tenu de rembourser le consommateur de la totalité des sommes versées, dans les meilleurs délais et au plus tard dans les trente jours suivant la date à laquelle ce droit a été exercé. Au-delà la somme due est, de plein droit, productive d’intérêts au taux légal en vigueur.'

Les parties s’accordent sur le fait que le bon de commande établi par la société E-Motors et daté du 9 mai 2012 a été signé et transmis par Monsieur X le 10 mai 2012, par voie électronique, au vendeur. Les parties ont donc, à cette date, échangé leur consentement et manifesté leur accord sur la chose et sur le prix, en utilisant une technique de communication à distance.

Par courriel du 17 mai 2012, dont copie est versée aux débats, et après s’être rendu à Troyes le jour-même pour voir le véhicule, Monsieur X a écrit à la société E-Motors : 'Je vous remercie de bien vouloir annuler le processus de vente dès maintenant et de ne pas tenir compte de l’ensemble des éléments remis ce matin à M. Y.', exprimant clairement sa volonté d’annuler la vente.

L’acquéreur a réitéré sa décision d’annulation par un courrier recommandé avec accusé de réception distribué le 22 mai 2012 à la société E-Motors.

Le tribunal a considéré que la réception du véhicule était intervenue le 17 mai 2012. La société E-Motors relève avec justesse que, si Monsieur X s’est déplacé dans les locaux du vendeur le 17 mai 2012, aucune réception du véhicule ne pouvait avoir lieu à cette date, puisque ce 17 mai était un jour férié (jeudi de l’Ascension) et que le service des livraisons était nécessairement fermé. En tout état de cause, Monsieur X a exercé son droit de rétractation avant l’expiration du délai fixé par l’article L. 121-20, qui court à compter de la réception du véhicule. En outre ce même texte le dispense de justifier des motifs de sa rétractation.

Il ne peut être sérieusement soutenu que Monsieur X a remis le 17 mai 2012 dans les locaux de la société E-Motors un nouveau contrat de vente, lequel rendrait caduc le contrat de vente du 10 mai 2012 transmis par technique de communication à distance. En effet, le solde restant dû sur le prix de vente après reprise de deux véhicules a été simplement modifié par un avenant n°1, parce que la reprise ne concernait plus qu’un seul véhicule, l’accord sur la chose et son prix n’étant pas affecté (pièce n° 8 de la société E-Motors). Cet avenant ne saurait donc faire échapper le contrat de vente en cause aux dispositions applicables aux contrats à distance.

En conséquence, c’est à bon droit que le tribunal d’instance a condamné la société E-Motors à rembourser à Monsieur X la somme de 1 500 euros prélevée à titre d’acompte, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2012. La décision est confirmée de ce chef.

Sur les demandes en dommages et intérêts de Monsieur X :

Les conditions générales de vente prévoient :

— en leur article II relatif à la formation du contrat, qu’en cas de vente sans recours à un crédit, la vente est réputée parfaite et définitive à la date de signature du bon de commande par le client et après versement d’un acompte fixé d’un commun accord entre les parties à la signature du bon de commande.

— en leur article VIII relatif au paiement du prix que 'Sauf disposition contraire stipulée sur le bon de commande, le paiement du prix du véhicule commandé par le client s’effectuera par le versement d’un acompte dont le montant sera déterminé d’un commun accord entre les parties, à la date de signature de celui-ci, le solde devant être réglé en intégralité à la date de livraison du véhicule dans les locaux de E-Motors.'

Le bon de commande daté du 9 mai 2012 et accepté le 10 mai 2012 par Monsieur X indique pour montant de l’acompte '0,00 euros'. Par courriel du 10 mai 2012, le conseiller commercial, Monsieur Y a confirmé à l’acquéreur 'recevoir ce jour votre contrat de vente, complété de l’acompte correspondant.' Le même 10 mai 2012, le compte bancaire de Monsieur X a été débité de 1 500 euros au profit de la société E-Motors (pièces n° 4 de l’appelant et n° 7 de l’intimé). Il apparaît ainsi que le vendeur a prélevé un acompte qui n’avait pas été prévu dans le contrat.

Par ailleurs, la société E-Motors, par courrier recommandé daté du 18 mai 2012, donc postérieur à la rétractation, a indiqué à Monsieur X que le véhicule était à sa disposition et que, passé le délai de huit jours, il serait remis à la vente, l’acompte serait perdu à titre de pénalités de retard et la société se réservait le droit d’entamer une procédure judiciaire. Ce courrier était à l’évidence destiné à impressionner Monsieur X, en le menaçant de sanctions que le droit de la consommation ne permet pas.

Ce comportement fautif du professionnel a causé à Monsieur X un préjudice, que le premier juge a évalué à 2 000 euros, pour privation injustifiée d’une somme indûment prélevée et pour perte de temps dans la recherche d’un autre véhicule. Le préjudice souffert de ce chef sera plus justement apprécié à la somme de 1 000 euros, le jugement étant infirmé en ce sens.

Monsieur X veut y voir ajouter une indemnisation de 3 000 euros sur le fondement de l’article 1382 du code civil pour abus de procédure, reprochant à la société E-Motors d’avoir adopté successivement des positions contradictoires dans son argumentation, notamment quant à la date de livraison et au caractère contractuel de l’acompte prélevé. Toutefois, il n’est pas justifié de ce que les moyens soulevés par la société E-Motors ont dégénéré en abus du droit d’agir en justice, de sorte que ce chef de demande est rejeté par la cour.

Sur les autres demandes :

La société E-Motors succombe et supporte les dépens d’appel. L’équité commande de la condamner à payer à Monsieur X une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Par ces motifs :

Confirme le jugement du tribunal d’instance de Troyes du 16 décembre 2013, à l’exception du montant des dommages et intérêts alloués à Monsieur X,

Statuant à nouveau de ce chef,

Fixe à la somme de 1 000 euros le montant des dommages et intérêts que la société E-Motors doit payer à Monsieur X,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société E-Motors à payer à Monsieur X une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société E-Motors aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Reims, 30 janvier 2015, n° 14/00345